Obédience : NC Loge : NP Date : NC


Le Silence

Lorsque j’étais apprentie, j’ai vraiment beaucoup aimé cette période de silence, je l’ai extrêmement bien vécue et l’ai trouvée exceptionnelle pour l’observation.

Le silence est une discipline, il permet d’être à l’écoute, il favorise l’éveil spirituel, le respect, le recueillement, la discrétion.
Le silence peut constituer une richesse si on parvient à en explorer les voies, et permettre des moments très privilégiés.
D’une certaine manière, il nous permet de nous libérer afin de nous rendre plus réceptif à la connaissance.
Le silence est un outil essentiel pour développer la connaissance interne, car tout ce qui concerne la sagesse interne ne peut s’exprimer par des mots, seul le silence peut la contenir, les mots sont limités, les mots quelques soit la perfection de leur choix et leur force significative, ne sont que des fragments du sens. Ce sont des morceaux, des pièces avec lesquelles on tente d’établir une communication.
Toute personne sensible sait que plus une expérience est profonde, plus le sujet dont il s’agit nous tient à cœur, plus il est difficile de le formuler en mots.
Les choses les plus importantes que l’on veut partager dans la vie ne demandent pas de mots, elles exigent le silence.
Les mots sont alors importuns, ils réduisent ce qui se passe à une parodie de ce dont il s’agit réellement. Il est particulièrement douloureux que ce soit justement les plus merveilleux moments, les plus belles expériences, que nous désirons le plus partager, que nous soyons incapable de transcrire en mots.
Panser cette blessure, c’est partager avec quelqu’un qui possède une sensibilité interne semblable aux mêmes choses, car alors, les mots sont totalement inutiles.
On sait que les mots sont menteurs, ils ne peuvent jamais traduite parfaitement un sentiment.

On dit que Moïse souffrait d’un défaut d’élocution, d’une imperfection, en fait il ne pouvait bien parler, à cause de sa trop grande perfection, il résidait dans le monde de la vérité où les choses sont prises pour ce quelles sont réellement.
Ce qui est appréhendé ainsi, prophétiquement dans son essence ne peut guère être réduit à la dimension des mots, le faire serait rétrécir la connaissance divine à un niveau circonscrit.

C’est le secret qui réside derrière l’ésotérisme des enseignements mystiques.
Celui qui n’est pas initié comprend que le mot secret est utilisé parce que cette sagesse est gardée secrète, personne ne vous la dévoilera, mais il n’est pas ainsi, le mot secret est utilisé parce que cette sagesse ne peut pas être appréhendée, elle ne peut être traduite en mots, même quand quelqu’un connaît le secret, cela reste un secret.

Le silence est l’expression de tous nos états psychologiques :
Le silence peut être éloquent, obstiné, significatif, morne, mécontent, approbateur, boudeur, consterné, glacial, religieux, pudique.

Le silence est le lieu de la conscience profonde, il fonde notre regard, notre écoute et nos perceptions, il est ainsi l’interface de nos communications profondes et intimes.  

La première leçon de Bouddha :

Fais silence en toi et écoute, écoute et affronte ton monde intérieur afin d’atteindre la voie de l’essentiel.

La F.M. ne nous demande pas un aussi grand sacrifice mais nous indique la voie d’un idéal à construire.
C’est dans le silence de la concentration que l’apprentie munie du ciseau et du maillet devra apprendre à dégrossir sa pierre brute afin de construire son temple intérieur.
Sur la colonne du nord, l’apprentie a pour devoir de méditer afin de s’imprégner du rituel, écouter mieux en apprenant à gérer toute agitation morale et intérieure, imposer le silence à ses passions, à son mental.
L’apprentie découvre la valeur du silence, du respect de l’autre.

Le silence en Loge se pratique, se vit et on en parle.

Nous sommes reçues dans le Temple en silence après avoir donner les mots de semestre à la sœur experte, nos pas se font en silence.
A la fermeture des travaux les surveillantes annoncent après voir vérifié que le silence règne sur l’une et l’autre colonne, nos moyens de connaissance se font en silence et comme le veut le rituel nous nous retirons en paix sous la loi du silence.

Rituels, outils, gestes, mots et silence sacralisent un temple maçonnique qui ouvrent aux initiés une dimension spirituelle libre de tout dogme et de toute croyance.

Si on l’écoute, le silence nous parle, nous renseigne, nous oriente sur la voix de la connaissance, il est notre compagnon intime.
Il nous accompagne dans la maîtrise de nos pensées, dans la formulation de nos jugements, dans la prise de conscience de nos préjugés, de nos contradictions et de nos propres limites.
Dans le secret de nos pensées, le silence nous permet la rencontre avec notre être intime, notre essence ,cet inconscient qui émerge des profondeurs et nous ouvre les portes à la fraternité, à l’amour et au respect de l’autre.
Le silence imposé à l’apprentie est assimilable à la solitude
Alfred de Vigny a écrit :
Le silence permet de suivre les conditions de son être dégagé de l’influence des associations mêmes les plus belles, parce que la solitude seule est la source de l’inspiration
Ce qui voudrait dire que la solitude seule est la source de la pensée, à son niveau le plus haut la pensée induit à la perfection de l’âme, elle est donc couplée à la pratique de la méditation qui agit en profondeur sur notre être, et nous savons que le moyen pour méditer est le silence.

Lors de notre première démarche initiatique vers la F.M., puis à chaque degré, la règle primordiale de notre ordre, le silence, nous est inculqué avec force et nous prêtons serment sur notre vie.

Les connaissances révélées ouvrent à la pensée des perspectives capable de donner le vertige aux esprits mal préparés, exemple la transmission des diverses religions, la moyenne des hommes n’étaient pas préparés à recevoir les choses de l’esprit, et les religions ont vite perdu de leur force, de leur simplicité et de leur pureté primitive.

Nous devons donc être prête à chaque degré à recevoir la connaissance, car plus nous avançons, plus nous prenons conscience de notre ignorance et nous ne devons pas recevoir un enseignement que nous ne comprendrions pas, qui nous serait mal transmis.
Nous devons trouver en nous-mêmes la force pour saisir différentes nuances, savoir intuitivement quoi faire, quoi dire, quoi taire.

On peut aussi parler de ce que je nommerais le silence courage, le silence de ceux qui se sont tus par la parole donnée qui a permis à certains de dépasser les limites humaines même sous la torture, le silence de la résistance etc.…

Le silence est d’or : pour moi cette phrase n’appelle aucun commentaire, je la trouve juste.

"Malheur à ceux qui n’ont pas connu le silence ! le silence est un peu de ciel qui descend vers l’homme"
Ernest Psichari dans le voyage du centurion.

Immobile, le silence peut-il être immobile ?

Dans une chanson le chanteur Christophe dit :  "J’aime le silence immobile d’une rencontre"

J’ai longuement réfléchi à cette phrase et effectivement j’ai trouvé l’immobilité du silence.
 
J’ai dit
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