Le Miroir
Planche
du Frère Orateur
V\
M\,
dignitaires qui décorés l’O\,
et vous tous mes TT\
CC\
FF\,
en
vos grades et qualités.
C’est à vous que je
m’adresse, plus particulièrement, FF\
nouveaux CC\.
Ce
soir, vous avez franchi une nouvelle porte. Oh certes depuis votre
initiation,
dans votre vie profane, vous avez dû et su franchir une
multitude de portes
sans lesquelles vous ne seriez pas là ce soir. Mais ce soir,
dans notre temple,
l’ouverture de cette nouvelle porte vous a amené
à faire de nouveaux voyages
qui vous invitent à découvrir de nouveaux
matériaux, de nouveaux symboles.
Parmi ces nouveaux symboles, il y en a un qui doit
retenir plus
particulièrement votre attention, un qui va vous permettre
de vous mesurer avec
vous-même, un, qui va vous permettre de REFLECHIR sur ce que
vous étiez, sur ce
que vous êtes et sur ce que vous devriez être, un
qui va vous permette de mieux
vous connaître : le Miroir!
Mais avant de vous faire lecture de cette planche
« Miroir » laissez-moi,
mes TT\
FF\
CC\
, vous faire part des quelques réflexions, ou
tracés, qui
ont contribué à l’architecture de cette
planche..
1 - Il est des miroirs naturels dont la fonction est
irremplaçable et qui
contribuent à l’accomplissement de
l’Univers. Tel est le cas de la lune qui
peut être considérée comme
étant le miroir du soleil. Peut-être que sa
fonction
serait tout autre si elle ne recevait pas la lumière
solaire. Elle est en
quelque sorte la garante de la permanence de la lumière, au
moins dans notre
galaxie.
2 - On sait que le tain du miroir est ce qui permet la
réflexion. Or ce tain
est obtenu par le broyage de métaux. Dès lors,
peut-être qu’un sens alchimique
peut être lié au miroir:
- transformer
les métaux,
- diriger et
se diriger vers la lumière
- transformer
le regard par le voir de l’angle codé qui
n’est jamais fixe,
- voir
au-delà du miroir, passer au-delà des
métaux afin de retrouver la transparence.
3 - Le miroir (dont le nom dérive de
spéculum) peut devenir outil de
spéculation, avec toutes les ambivalences qui s’y
rattachent et toutes les
déviations qu’elles peuvent engendrer. A
l’origine, spéculer c’était
observer
le ciel et les mouvements relatifs des étoiles, à
l’aide d’un miroir. Sidus
(étoile) a également donné
considération, qui signifie étymologiquement
regarder l’ensemble des étoiles.
4 - Que reflète le miroir? La
vérité, la sincérité, le
contenu du coeur et
de la conscience, comme le Soleil, comme la Lune, comme
l’eau, comme l’or,
lit-on sur un miroir chinois du musée d’Hanoi,
« Sois clair et brillant et
reflète ce qu’il y a dans ton cœur
».
5 - La vérité
révélée par
le miroir peut également être d’un ordre
supérieur
: évoquant le miroir magique des Ts’in, Nichirien
lui
compare le miroir du
Dharma bouddhique, qui montre la cause des actes passés. Le
miroir sera
l’instrument de l’Illumination. Le miroir est en
effet le
symbole de la sagesse
et de la connaissance, le miroir couvert de poussière
étant celui de l’esprit
obscurci par l’ignorance.
La Sagesse du grand Miroir du Bouddhisme
tibétain enseigne le secret
suprême, à savoir que le monde des formes qui
s’y reflète n’est qu’un aspect
de
la shûnyâtâ, de la vacuité.
Ces reflets de l’intelligence ou de la Parole
célestes font apparaître le
miroir comme le symbole de la manifestation reflétant
l’intelligence créatrice.
Il est aussi celui de l’intellect divin
réfléchissant la manifestation, la
créant comme telle à son image. Cette
révélation de l’identité et
de la
Différence dans le miroir est l’origine de la
chute luciférienne. Plus
généralement pour les chrétiens, elle
est l’aboutissement de l’expérience
spirituelle b plus haute. Le miroir du cœur
reflète chez les Bouddhistes, la
nature de Bouddha : chez les Taoïstes, le Ciel et la Terre.
Miroir, oh, mon miroir.., dis-moi, mais qu’est
ce qu’elle a ma gueule?
En fait, La symbolique du miroir est d’une
extrême richesse et largement
antérieur à l’arrivée sur le
marché des beaux miroirs de bronze, que l’on
retrouve dans les fouilles de sépultures. Une flaque
d’eau, un fragment de
cristal de roche servent à refléter un rayon de
soleil ou la lune dans sa
plénitude. Que de spéculations s’y
rattachent. Plus que pour tout autre
symbole, peut-être faut-il prendre garde au
caractère ambivalent de la ou des
fonctions du miroir.
La première de ses fonctions venant
à l’esprit est celle du reflet. Mais, ce
reflet est-il une réalité ou une illusion ?
C’est, pour le moins, une inversion
de la réalité qu’il est aisé
de vérifier. Il suffit en effet de lire dans un
miroir le reflet d’un mot écrit sur un papier pour
constater que l’ordre des
lettres se trouve totalement inversé. Le mot miroir vu dans
un miroir devient
riorim. Par l’effet de ce miroir, le mot a perdu sa
réalité. On pourrait dès
lors estimé que, d’une certaine
manière, le miroir est menteur.
Mais, d’une autre manière, on peut
aussi penser qu’il nous livre l’autre
face du monde. li pourrait alors apparaître comme
étant le révélateur de
l’antimatière qui serait ici, quantitativement
égale à la matière.
L’image du miroir est immatérielle.
Mais elle peut néanmoins présenter une
certaine forme d’énergie, en ce sens
qu’elle établit une sorte d’axe entre
deux
dimensions de la réalité. La
réalité abstraite et la
réalité concrète. Etant
toutefois entendu que l’une et l’autre ne sont pas
porteuses de l’essence de la
véritable réalité qui, selon la vision
la plus haute, ne peut être que d’Ordre
Principiel.
À l’encontre de l’homme,
le miroir est dépourvu de mémoire, il ne livre
que
l’image d’un instant, image qui s’efface
avec le retrait de l’objet reflété.
L’image peut cependant demeuré dans la
mémoire de celui qui a vu le reflet
donné par le miroir. Celui-là risque fort
d’être pris en un piège narcissique.
Car le danger du miroir est qu’il peut flatter la
vanité, la prétention, en
enfermant l’être dans une contemplation
complaisante. Contemplation d’une image
inversée, ne l’oublions pas, par rapport
à l’objet reflété.
Il peut également nous renvoyer une image que
nous jugeons indésirable, sans
que l’approche qu’offre celle-ci soit pour autant
totalement fausse.
Simplement, on voudrait être autre que cette image qui nous
est renvoyée. Autre
que ce qui nous fait face. Se pose alors le problème :
comment, face au miroir,
voir celui qui est et non celui que nous voudrions voir?
Le miroir peut être déformant, mais
au fond qui déforme ?, le miroir ou
celui qui se contemple devant lui ? Vérité -
mensonge ne sont en fait qu’un
problème de lecture. Un problème de justesse du
regard. Un problème de
lucidité, c’est-à-dire un
problème de réception de la véritable
lumière et non
pas de sa réception plus ou moins illusoire.
On peut se chercher dans l’image, dans le
reflet que nous livre un miroir et
ne jamais se trouver. Le miroir n’a fonction
d’éveil que pour qui sait voir,
que pour qui a une certaine capacité
d’éveil, que pour qui a une certaine
conscience de son état d’être. Faute de
cela, le miroir risque d’être
extrêmement dangereux. Toujours le problème de
Narcisse.
Voir au-delà du miroir, c’est le
traverser en pensée. C’est tenté
d’aller
dans l’autre monde, non pas vers la mort, mais vers le monde
cosmique que nos
sens ne parviennent pas à appréhender. Ce qui est
fort dommageable, car ce qui
est derrière le miroir est peut-être plus
créateur que le reflet qu’il nous
offre.
Il est diverses manières d’aborder
le miroir qui se dresse devant nous comme
une épreuve, comme un défi. Il est une sorte de
porte invisible, invisible
parce que masquée par l’attrait du reflet. En
fait, le problème posé est de
savoir oublier ce matériau opaque interposé entre
nous et la réalité.
On peut être parfois tenté de
briser le miroir, afin d’effacer l’image
déroutante qu’il renvoie. Briser le miroir peut
sembler une action vaine, mais
ce peut être aussi une action de l’imaginaire pour
tenter de voir la réalité
qu’il nous masque. Aller au-delà où
traverser le miroir, c’est la démarche de
l’imaginaire qui habite certains hommes. Le miroir joue alors
le rôle de la
page blanche devant l’écrivain. Cette page qui
attend... qui attend..... qui
attend...et en même temps provoque, la projection de la
réalité recréée par le
regard, par la pensée, par l’imagination de
l’auteur. Tout cela est peut-être
voisin du mirage (mirage - miroir, même famille).
Et s’il était des mirages plus
constructeurs, plus révélateurs à
l’esprit du
quêteur que la vision de la simple
réalité? N’oublions pas que
révéler c’est au
fond re-voiler, autrement dit présenter le
mystère de façon différente.
D’où
l’obligation d’apprendre à voir
différemment.
Tenter de voir par le miroir, c’est tenter de
fixer, en se substitut, une
révélation cachée qui ne peut
apparaître qu’à son habile utilisateur.
Le miroir
est aussi une sonde de notre cœur (centre, âme), il
est alors impitoyable.
Si surprenant que cela puisse paraître, un
livre peut également faire
fonction de miroir. il peut offrir un reflet
révélateur de la sensibilité du
lecteur. Les images-rencontres qu’il suggère sont
effectivement des reflets de
lieux où nous aimerions être ou
d’états de conscience que nous aimerions
revêtir.
Le peintre (l’artiste véritable)
peut, par les images qu’il soumet à notre
vision, être créateur d’une sorte de
miroir. Encore que l’on puisse se demander
si ce n’est pas, en certain cas, le miroir qui
crée le peintre. Mais, il se
peut aussi qu’un miroir imaginaire se présente
devant lui pour qu’il y voie..,
le Monde.
En fait, le miroir n’est peut-être
pas un instrument pour regarder, encore
moins pour se regarder. L’étymologie du mot
insiste sur “regarder avec
attention” et, plus encore, sur son sens d’origine
qui est mirer, de
“s’étonner”.
Il faut également retenir le sens de
visée (venant du mot mire). Le miroir
doit être l’instrument qui permet la
visée... l’alignement.
C’est pourquoi le miroir n’est pas,
en fait, un objet d’auto contemplation,
mais l’instrument de la ligne de mire qui doit
révéler l’angle secret de ce qui
n’apparaît pas encore, mais qui est en gestation.
La personnalisation de notre perception est en fait
fonction de l’angle que
nous donnons au miroir. De la recherche du bon angle, du pur principe
de vie et
de la quête pure. Nous devons apprendre à
contempler (con-templer), “être avec
le temple”, à trouver l’angle harmonique
qui révèle et diffuse la lumière en
justesse.
Partant de cette idée, on peut oser cet
exemple du secret initiatique :
celui qui sait « tenir » le miroir peut trouver le
fameux point qui révèle la
genèse de l’Univers.
Jean-Claude
von L\ |