Le
Labyrinthe
Le
Labyrinthe de ma Vie
Quand
mon parrain m’a proposé de travailler sur ce
sujet,
je fus à la fois séduit par la profondeur de ce
mythe et un peu effrayé par les
innombrables ramifications labyrinthiques de ce travail.
C’est comme si j’avais
peur d’y pénétrer,
d’affronter les méandres, les impasses, les
écueils et de ne
pas y trouver la sortie.
Je
pris vite le parti de me laisser porter par une autre
évocation qui s’imposa à moi. Ce
labyrinthe avait vraiment des parfums
d’enfances. Je me revoyais le crayon en main, cherchant la
bonne voie, buttant
dans des impasses, pour finalement arriver vainqueur à la
porte du trésor. Ces
jeux de labyrinthe allaient être ma première
approche, sans vraiment prendre
conscience que ce labyrinthe était à
l’image de la vie. Je pensais aussi à tous
ces contes de fées, où je tremblais de peur en
accompagnant le héros dans sa
quête sur des chemins parsemés
d’épreuves, et à ce jeu de
l’oie, où, croyant
être si près du but, j’étais
ramené, par un mauvais coup du sort, à la case
DEPART.
L’image
de ce labyrinthe exerce une
forte impression sur l’âme d’enfant qui
demeure en chacun de nous. Pour
l’enfant, il est synonyme d’aventures et offre ce
qu’il faut d’angoisse et
d’insécurité pour éprouver
l’individu vers de nouveaux défis.
Mais
il m’arrivait aussi, dès mon plus jeune
âge de
m’aventurer dans le labyrinthe de la connaissance. Je
cherchais des réponses à
des questions fondamentales sur le sens de la vie.
Je
m’étourdissais dans ce labyrinthe méta
physique ne
trouvant pas de réponse à la question sur
l’origine du premier œuf – où
de la
première poule. Dans ma quête de sens, je me
heurtais à des impasses, me disant
qu’il n’était pas possible que du
néant ait pu naître quelque chose ou
qu’un
créateur ait pu toujours exister. Je pensais alors, que peut
être, quand je
serais grand, je trouverais la réponse ---
Après
cette première évocation, une deuxième
se présenta à
mon esprit. Toute vie est un cheminement plus ou moins aisé.
Si très vite j’ai
trouvé ma voie dans la vie professionnelle, ou je suis
rentré avec enthousiasme
dans la carrière enseignante, j’ai par contre
longtemps erré sur des chemins
pleins d’impasses et d’écueils en
risquant même de perdre la maîtrise de ma
vie. En survolant aujourd’hui rapidement mon
passé, je vois que trois portes
importantes qui allaient changer le cours de ma vie se sont ouvertes.
La première fut celle de la
sobriété
La deuxième fut celle de la
paternité
La troisième fut celle de la
franc-maçonnerie
Je
crois que nous recourons
souvent à notre passé pour évoquer le
labyrinthe (difficultés surmontées,
situations complexes résolues, itinéraires
empruntés, nature de nos choix.) la
vie exige parfois beaucoup de courage, mais je crois qu’il
faut éviter de voir
le labyrinthe comme une forme emblématique d’un
chemin tortueux d’où l’on ne
ressort que rarement vainqueur mais plutôt le
considérer comme une aide qui
nous permet d’appréhender les épreuves
du quotidien avec un certain recul. Ce
qui est important c’est que la voie empruntée ait
été choisie au plus près de
sa conscience même si notre décision devait
aboutir à une impasse.
Étymologie
Les
labyrinthes, que ce soient ceux de l’Antiquité
où ceux
des cathédrales restent auréolés de
mystères. Pour un grand nombre, l’image du
labyrinthe est un parcours constitué de chemins
embrouillés ou les multiples culs-de-sac,
les voies repliées et les entrelas complexes
découragent et égarent l’audacieux
qui aurait eu la témérité de
s’y aventurer.
Le
grand dictionnaire Larousse nous dit que LABYRINTHE
vient du latin « Labyrinthus » et
le définit comme un vaste édifice
comprenant d’innombrables salles agencées de telle
manière que l’on n’en trouve
que difficilement la sortie. Hérodote décrit
celui du lac Moeris construit par
Amenemhat III sous la 12e dynastie. Il
comprenait 3000 chambres,
Anubis, le chacal, l’un des multiple dieu
égyptien, prenait en charge les âmes
des défunts pour les conduire jusqu’à
Osiris, afin que ce dernier prenne sa
décision sur le devenir des morts.
Une
des racines de labyrinthe est
« Laborintrus »
mot latin qui comporte la racine
« Labor », travail, dans le sens
d’effort. De ce terme découlent plusieurs mots
dont « Labrum »,
sillon ouvert par le « Labrus »,
non donné pour une hache à double
tranchant, qui sépare le haut du bas, le bien du mal, le
profane du spirituel.
Une autre origine du nom serait
« Labra » qui désigne
les cavernes,
les galeries de mines et
« Inthos » suffixe de racine
pré-indo
germanique qui se rapporte aux jeux d’enfants.
Ces
labyrinthes à trois dimensions, avec leurs voies sans
issues, ont peu à peu laissé
place au
labyrinthe à deux dimensions et à une seule voie
venant du centre après des
croisements et des retours en arrière.
Les
Labyrinthes des Églises
Il
en existe des circulaires (Saint Vital de Ravenne,
Bayeux. Saint Michel de Pavie) des carrés (Basilique San
Repartus d’Orleansville,
San Bertas à St Orner) et octogonaux (St Quentin, Arras,
Reims. Amiens).
C’est
à l’époque où furent mises
en chantier les
cathédrales gothiques que se
développèrent les labyrinthes.
L’idée du
labyrinthe est probablement venue de la caverne et de la grotte. Ces
lieux
avaient été choisis par l’homme pour
célébrer des cérémonies
religieuses. Les
labyrinthes d’églises sont en deux dimensions,
reproduits sur le sol de la nef.
Ils préfigurent le long cheminement, une sorte de
pèlerinage initiatique avant
de rejoindre le royaume de Dieu. Le plus souvent ils sont
désignés sous le nom
de chemin de Jérusalem. Ils nous montrent qu’il
n’y a qu’une seule voie, celle
du salut et ils sont parfaitement balisés et ne mettent pas
en danger celui qui
avance.
Le
plus ancien labyrinthe que nous rencontrons dans une
église est celui de Chartres. Du temps des croisades,
nombreux étaient ceux qui
ne pouvaient aller en Terre Sainte. Ils parcouraient ainsi le
labyrinthe par
substitut faute de pouvoir partir. Tout homme qui part en
pèlerinage, avec un
but géographique sur la planète, cherche
à retrouver son créateur et il arrive
au terme de ses pérégrinations en état
de symbiose avec l’environnement créé
par Dieu. Il fait alors partie du TOUT, a rejoint le UN.
L’homme
qui parcourt le labyrinthe part dans un voyage
initiatique virtuel. La dernière station se faisant
à genoux, le dernier pas au
centre du labyrinthe. Ce pas qui oblige le pèlerin
à se relever était appelé
« Saut de la Joie ».
Le
Labyrinthe Crétois
Les
labyrinthes des églises, qui ne sont pas destinés
à
égarer mais à conduire, sont à l'image
de la quête spirituelle ; mais
qu’en est-il de l’incontournable labyrinthe
mythique de Cnossos ? On sait
que la hache à double tranchant était
utilisée comme représentation de la
dynastie minoenne symbolisant la double lune, croissante et
décroissante,
déesse tutélaire de l’île de
Crête où se trouve le labyrinthe de Cnossos. Dans
ce labyrinthe le Minotaure, un monstre mi-homme, mi-taureau
était prisonnier.
Tous ceux qui s’aventuraient à
l’intérieur périssaient.
Pour
apaiser le Minotaure, Minos exigea de la
ville d’Athènes vaincue un tribut de sept filles
et
sept garçons, tous adolescents.
Thésée, fils de Egée roi
d’Athènes, décida de
mettre fin à la terrible malédiction qui frappait
sa cité. Se dissimulant parmi
les jeunes sacrifiants convoqués par Minos, il rejoint la
Crète avec l’ambition
d’anéantir le Minotaure Si son entreprise doit
réussir, il était convenu que,
sur la route du retour, son navire hisserait des voiles blanches.
Autrement il
conserverait en signe du deuil pour les jeunes victimes
immolées les voiles
noires arborées au départ.
Ariane,
la
propre fille de Minos, s’éprend de
Thésée et lui propose son aide en lui offrant une
pelote
de laine que lui a
procuré Dédale. Thésée en
attache une
extrémité à l'entrée et la
déroule
au fur
et à mesure de son avancement. Arrivé au
cœur du
labyrinthe, il lutte en combat
singulier avec le Minotaure et le tue. C’est grâce
à
la pelote qu’il revient
sur ses pas et retrouve la sortie. Sur
les ondes du retour, enivrés de leurs amours et du
succès de leur entreprise
ils oublièrent d’affaler les voiles du deuil.
Égée, impatient de la
réapparition de son fils, déshonoré de
la faillite supposée de sa mission,
désespéré, se jeta des hauts murs de
la citée athénienne, et dans une fin
funeste se noya dans les flots de la mer, qui prit alors le nom de Mer
Egée.
On pourrait dire
que Thésée a provoqué le suicide de
son père qui s’est laissé dominer par
ses
émotions. Il est clair que ceci nous interpelle en tant que
francs-maçons. Tout
n’est pas acquis avec l’initiation ou un passage de
grade. La vie continue, et
l’initié à le devoir de travailler a
son perfectionnement jusqu’à la fin de sa
vie. S’il ne la fait pas il retourne
inévitablement dans le profane.
Le
Labyrinthe et la Franc-Maçonnerie
Il m’importe
maintenant après cet exposé succinct sur les deux
grandes catégories de
labyrinthes, ceux qui guident et ceux qui égarent, de vous
faire part de mes
réflexions personnelles sur les liens du labyrinthe avec la
franc-maçonnerie.
Il est clair que le labyrinthe n’est jamais
représenté dans le Temple comme un
symbole maçonnique, mais je trouve qu'il y a beaucoup de
correspondances avec
ma vie maçonnique.
Quand j’ai frappé à
la porte de la Loge, tout en ayant quelques informations sur l'ordre
maçonnique, je me suis présenté un peu
comme devant un dédale dont on connaît
si peu de chose. Une fois franchi le porche, j’ai eu les yeux
bandés afin
d’accéder au cabinet de réflexion. Je
crois qu’il y a deux sortes de
labyrinthes, ceux dans lesquels nous sommes engagés et ceux
que nous avons
choisis d’emprunter. J’ai librement choisi de
rentrer dans le « labyrinthe
maçonnique et depuis mon initiation, j’ai
commencé mon cheminement. J'avance à
petits pas sachant que le chemin est long et que je dois toujours
avancer vers
un perfectionnement constant.
Le labyrinthe
représente aussi les différentes
étapes de la carrière maçonnique. Je
sais
qu’il y aura des portes à franchir dans les
passages de grade et je peux prévoir
qu’il y aura certainement de nouveaux obstacles. Mais ces
difficultés de
parcours me conduiront à chaque fois à une
meilleure connaissance de soi.
Le labyrinthe est
aussi un lieu initiatique, exercice du V.I.T.R.I.O.L., une
régression ad
uterum, retour à la matrice, à
l’origine, car l’âme y est encore en
contact
avec l’UN. Ce sens initiatique, il l’aura toutefois
en partant de l’idée que
l’homme possède en lui le VRAI, le BIEN et le BEAU
et qu’il les a oubliés et
qu’il peut les retrouver. Le symbolisme du labyrinthe est
intimement lié à la
notion de voyage initiatique, montrant à travers ses
méandres auxquelles nous
sommes soumis lors de l’initiation.L'EDIFICE
- contact@ledifice.net
Quant au fil
d’Ariane, ce fil conducteur, il est plus un fil qui permet
d’avancer. Il
représente pour moi les outils maçonniques dont
je dispose, les conseils
éclairés de mes FF\, les enseignements de mes MM\ et de mes lectures qui me permettent de
progresser vers une meilleure connaissance de soi et de la
Lumière.
Le
Centre
De toutes les
images liées au labyrinthe, c’est celle du centre
qui suscite en moi le plus
d’interrogations. L’arrivée au centre du
labyrinthe, comme au terme d’un long
voyage initiatique, vous introduit dans une loge que les artistes
concepteurs
du labyrinthe ont souvent laissé dans le mystère.
C’est comme si chacun dans sa
quête devait le remplir selon ses intuitions et son propre
développement, bien
sur, en fonction d’un but qu’il s’est
librement choisi d’atteindre. À l’image
du labyrinthe crétois, on peut y voire le Minotaure, notre
propre Minotaure que
nous devons dominer et, à l’image du labyrinthe
médiéval, la rencontre avec le
divin. L’Apprenti que je suis, aspire à atteindre
la connaissance mais dans
l’état actuel de mon cheminement et de mon
développement, j’y vois
l’aboutissement d’une longue et lente
quête spirituelle qui pourrait me
rapprocher du divin.
Dans un labyrinthe,
les premiers pas se dirigent vers le centre, ce qui permet de
visualiser le but
à atteindre. Mais très tôt, il faut se
rendre compte, de toute évidence, que le
chemin ne sera pas direct. Ce chemin est trompeur, il paraît
court alors qu’il
nécessite en fait un long parcours.
Quant au retour, si
la tradition antique met l’accent sur la capacité
à renaître vivant, la
tradition chrétienne dans le labyrinthe
médiévale, insiste que c’est au centre
que l’homme effectue son retournement à la fois
psychique et spirituel.
Les
Enseignements
Ce sujet dont je
n’ai pas la prétention d’avoir
traité toutes les facettes et d’avoir
exploré
tous les chemins a eu le mérite de me faire
réfléchir sur les difficultés du
parcours que je rencontrerais dans ma quête personnelle. Je
n’attends pas que
vous me donniez les clés qui me donneraient
l’accès à la chambre aux
trésors.
Je suis convaincu qu’avec l’aide des outils
maçonniques, les enseignements
reçus, ceux que je continuerais à recevoir, et,
votre amour fraternel, je
serais mieux armé pour progresser sereinement vers le centre.
Le labyrinthe me
donne aussi le droit à l’erreur, à
faire fausse route, à revenir sur mes pas et
aussi à faire des pauses. Je n’attends pas, aussi,
que vous me montriez le
chemin. Chacun à son propre chemin. Le labyrinthe, loin de
l’enseignement
dogmatique laisse à chacun la possibilité
d’exercer sa liberté et nul ne peut
dire aujourd’hui quel chemin il aura à emprunter
dans les années à venir.
Ne
disposant à ce
jour que de peu d’outils, je reste confiant cependant et
heureux
d'avoir
entrepris avec vous ce voyage. Parcourir le labyrinthe reste pour moi
un voyage
pour découvrir un centre. J’y ai
déjà
pénétré, j’ai
accepté de me perdre
pour
me découvrir sans fard. C’est une
découverte de ma
propre nature, un voyage
symbolique en soi et pour soi. Mais cette expérience unique
et
si riche est
d’autant plus merveilleuse qu’elle est
partagée dans
l’amour fraternel. Je suis
heureux de continuer le chemin et je sais que c’est par la
présence assidue en
loge, l’écoute, la méditation et le
travail sur ma
pierre brute, que je
progresserais vers cette lumière vers laquelle nous tendons
tous. Je me
garderais surtout, avec l’humilité de
l’Apprenti de
faire comme ICARE qui s’est
brûlé les ailes en voulant s’approcher
trop
près du soleil.
Pascal
B. Frère de la loge Fidélité et
Prudence à
l’Orient de Genève
Commentaires
sur le labyrinthe
DEDALE ET ICARE
Dédale
était cet architecte qui construisit, en Crète,
le Labyrinthe pour le Minotaure
et qui montra à Ariane comment Thésée
pourrait en sortir. En apprenant que les
Athéniens avaient trouvé le moyen de s'en
échapper, le roi Minos fut aussitôt
convaincu qu'ils n'auraient pu y réussir sans l'aide de
Dédale. En conséquence,
il emprisonna l'architecte et son fils dans ce même
labyrinthe, ce qui tendrait
à prouver l'excellence du plan de cet enclos, puisque sans
indication, même son
auteur ne pouvait en découvrir l'issue. Mais le grand
inventeur n'était pas en
peine pour si peu. Il dit à son fils :
« La fuite peut être
entravée par la terre et par l'eau
mais l'air
et le ciel sont libres, c'est par là que nous irons:
que
Minos posséde tout,
il ne posséde pas le ciel."
et il fabriqua deux paires d'ailes, qu'il
fixa avec de la cire à ses épaules et
à celles de son fils Icare. Avant de
prendre leur envol, Dédale recommanda à Icare de
ne pas s'élever trop haut sur
la mer, car, dit-il, en approchant de trop près le soleil,
la cire pourrait
fondre et les ailes se détacheraient. Mais comme tant
d'histoires nous le
montrent, la jeunesse ne tient guère compte de ce que disent
les aînés. Tous
deux s'élevèrent donc,
légèrement et sans effort, et
quittèrent la Crète ; le
ravissement de ce nouveau et merveilleux pouvoir grisa l'adolescent. Il
monta
de plus en plus haut, refusant d'entendre les appels
angoissés de son père. Et
ses ailes se détachèrent. Il tomba dans la mer et
les
eaux se
refermèrent sur lui.
Le père
affligé
poursuivit sa route sans accident et atterrit en Sicile où
il fut fort bien
accueilli par le roi Cocalos.
Rendu furieux par cette fuite, Minos
décida de
retrouver Dédale. Pour y parvenir, il employa la ruse. Il
fit proclamer partout
qu'il accorderait une grande récompense à
quiconque réussirait à passer un fil
dans les volutes d'une coquille aux spirales
particulièrement enchevêtrées.
Dédale déclara au Roi de Sicile qu'il se faisait
fort d'y parvenir. Il perça
d'un petit trou l'extrémité de la coquille, fixa
un fil à la patte d'une
fourmi, introduisit la fourmi dans l'orifice, qu'il boucha. Quand la
fourmi
sortit enfin par l'autre extrémité dela coquille,
le fil, bien entendu, l'avait
suivie dans tous ses tours et détours.
«Seul
Dédale pouvait imaginer pareil
stratagème»,
dit Minos, qui se mit en route
pour la Sicile afin de se saisir
de l'architecte. Mais le roi Cocalos refusa de le livrer et dans la
lutte qui
suivit, Minos trouva la mort.
DEDALE
Le débat manifeste
qui oppose les Architectes, faisant s’affronter les tenants
de la fonction à
ceux trop rapidement catalogués de formalistes, perdure
depuis l’antiquité.
Dédale, (dont le nom est quasiment
synonyme de chaos, un concept cher à Rem Koolhaas et aux
Déconstructivistes)
dans la mythologie hellénistique déjà,
essuya les déboires des paradoxes de sa
discipline . Un mythe fondateur, une damnation superbe, aux racines de
l’Architecture ...
Pour séduire la jeune et belle Europa qui
jouait sur la plage de Sidon,
Zeus se transforma en un Taureau magnifique. Il enleva sa
conquête facile vers
Crète. De leurs étreintes naquirent trois fils,
l’aînée Minos devint roi de
l’Ile .
Respectueux
des dieux de l’Olympe Minos promis de
vénérer ses ancêtres. Afin de glorifier
Poséidon il jura de lui offrir en sacrifice le Taureau que
le Dieu marin avait
nouvellement fait surgir des vagues . Mais l’animal
soudainement apparu sur le
rivage était si beau que Minos, esthète, se
parjurera. Poséidon furieux conféra
à l’animal une puissance maléfique et
lui ordonna de dévaster tout le pays. Dès
lors les humains le craignirent et jusque à la fin des temps
décidèrent de le
combattre à mort. Ainsi naquit la tauromachie.
Depuis cette époque, aujourd’hui encore dans les Arénes antiques ont peut
toujours assister à des combats taurins.
Pasiphaée,
l’épouse de Minos, farouchement jalouse,
subodorant
l’hérédité douteuses de son
mari nourrit une violente passion coupable pour le
Taureau majestueux. Elle demanda à Dédale
un Architecte habile de concevoir une effigie parfaite de
Zeus afin de
secrètement tromper son époux avec son illustre
beau père. De cette relation
illégitime naquit un humain gigantesque surmonté
d’une tête de taureau :
Minotaure, qui terrorisa la Crète entière.
Minos convoqua alors
Dédale et lui enjoignit
de construire pour son fils adultérin un palais
forteresse : le
Labyrinthe, inextricable geôle pour le perdre à
jamais. Telle en serait la
fonction, sa forme serait libre , elle serait la signature de
l'Architecte.
Pour
nourrir le monstre, Minos exigeât de la ville d’
Athènes vaincue un tribut de
sept filles et sept garçons, tous adolescents .
Thésée, fils de Egée roi d’
Athènes, décida de mettre fin à la
terrible malédiction qui frappait sa cité .
Se dissimulant parmi les jeunes sacrifiables convoqués par
Minos, il rejoint la
Crète avec l’ambition
d’anéantir le Minotaure Si son
’entreprise devait
réussir, il était convenu que sur la route du
retour son navire hisserait des
voiles blanches. Autrement il conserverait en signe du deuil pour les
jeunes
victimes immolées les voiles noires arborées au
départ.
Une
fois la Crète rejointe , Thésée
obtient l’aide amoureuse de la belle
Ariane , fille de Minos et Pasiphaé, la propre soeur de
Minotaure. Elle
introduisit le jeune athénien dans le labyrinthe et pour
qu’il retrouva son
chemin lui remit une pelote de laine qu’il
dévidât sans la perdre. Ce lien la
ramènerait vers elle. Le secret de
l’Architecte ne tenait qu’a un fil. La forme de son
édifice avait trahit sa
fonction. Ainsi guidé après un combat
acharné Thésée exécuta Le
Minotaure.
Ensemble il rentrèrent à Athènes .
Sur les
ondes du retour, enivrés de leurs amours et du
succès de leur entreprise ils
oublièrent d’affaler les voiles du deuil.
Egée, impatient de la réapparition de
son fils, déshonoré de la faillite
supposée de sa mission,
désespéré, se jeta
des hauts murs de la citée athénienne, et dans
une fin funeste se noyât dans
les flots de la mer, qui pris alors le nom de Mer Egée .
Plus tard, bien plus tard afin qu’il soit
punit pour les défaillances de son projet Minos fit enfermer
Dédale dans son
oeuvre. La légende dit qu’il parvint à
s’en évader par l’entremise de son fils
Icare, dont on connaît la fin tragique . On peut encore voir
sur le pavement de
la cathédrale de Chartres un tracé
supposé de son labyrinthe avec en son centre
un portrait apocryphe de l’Architecte légendaire .
Introduction
au labyrinthe médiéval
Le
motif graphique du labyrinthe classique
À première
vue, le dessin du labyrinthe est un système de lignes plus
ou moins décoratif,
un motif géométrique plus ou moins
symétrique, plus ou moins complexe. Et
pourtant, l'essence du labyrinthe est dans son chemin, non pas dans son
dessin.
Un labyrinthe est fait pour être parcouru.
Un modèle
réduit suffit au parcours : soit simple parcours
visuel, soit à l'aide du
doigt ou d'un instrument fin. Déjà le parcours
visuel du chemin éveille des
sensations kinesthésiques et permet de sentir le rythme du
labyrinthe.
L'utilisation du doigt est encore plus facile et plus efficace.
Le
labyrinthe classique est à chemin unique, sans boucles ni
impasses. Le plus
connu est celui du sol de la cathédrale de Chartres en France ; il a
été incorporé au
dallage de sol de la cathédrale autour de l'an 1200.
La
renaissance du labyrinthe classique
Depuis
quelque dix ou vingt ans, il y a un regain
d'intérêt pour le labyrinthe
classique, principalement celui de Chartres : on
découvre en lui à la fois
un objet culturel fascinant et un outil spirituel puissant. Une
activité
répandue consiste à parcourir, en marche
méditée, ce labyrinthe reproduit sur
le sol. Cette renaissance s'intéresse aussi à
d'autres modèles du labyrinthe
classique, en particulier au labyrinthe crétois.
Historique :
les trois dessins classiques
Dans
l'histoire du labyrinthe classique européen, on distingue
trois époques, dont
proviennent trois types de dessins différents : le
labyrinthe crétois, le
labyrinthe romain
et le
labyrinthe médiéval.
Le
labyrinthe crétois
Les
premiers exemples connus du motif graphique du labyrinthe
étaient gravés sur la
roche naturelle, selon un dessin plus simple que celui du labyrinthe
médiéval
mais déjà bien défini. Ce
modèle de labyrinthe a reçu le nom de crétois parce qu'on l'a d'abord trouvé sur des
pièces de monnaie crétoises. Il
est cependant très antérieur à cette
époque crétoise. Il est construit sur une
trame spirale de 8 enroulements délimitant sept couloirs. La
spirale de 8
enroulements résulte du prolongement replié de
chacun des 4 bras de la croix
intiale. Ce motif très répandu est encore
utilisé aujourd'hui. Il en existe une
version rectangulaire, aussi très répandue, mais
elle n'a pas de rapport direct
avec le labyrinthe médiéval.
Le
labyrinthe romain
La
civilisation romaine a mis au point un modèle particulier de
labyrinthe,
utilisé principalement sous forme de mosaïques de
sol. Ce modèle se retrouve
entre autres sur le sol d'une église algérienne
datant de 324. Le labyrinthe romain
est habituellement à quatre quadrants correspondant
à quatre labyrinthes
identiques parcourus successivement. Le nombre de couloirs est
variable. Il
existe en versions circulaires et carrées. Contrairement
à la plupart des
autres auteurs, je crois que c'est le labyrinthe romain, et non le
labyrinthe
crétois, qui est à l'origine de l'invention du labyrinthe médiéval.
Le
labyrinthe médiéval
Le dessin médiéval du labyrinthe a été
principalement utlisé
comme illustration de manuscrits. Il est construit sur une trame
circulaire
concentrique de douze cercles formant onze couloirs. Ces nombres
résultent de
la structure
rythmique
du trajet du labyrinthe, qui exige de plus
une division radiale en 4 quadrants. Les quatre plus anciens manuscrits
à
labyrinthes connus datent du 9e siècle. L'un d'eux contient
le labyrinthe
crétois ; un autre, daté de 860,
constitue le premier témoin du modèle qui
se retrouvera, plus de trois siècles plus tard, sur le sol
de la cathédrale de Chartres. Dès le moment de son apparition, ce
modèle a été le plus
utilisé : on le considérait donc comme
le plus parfait. On l'appelle
maintenant du nom de celui de Chartres, qui en est la
réalisation la plus
célèbre.
Avant cette
date de 860, il avait certainement fallu une période
relativement longue pour
développer le modèle
médiéval à partir du modèle
romain. Les documents connus
permettent d'imaginer cette évolution, mais non de la
reconstituer précisément
ni de la dater. Par la suite, le nouveau dessin du labyrinthe continue
à
illustrer les manuscrits, mais la période
d'évolution créatrice semble
terminée.
Le
labyrinthe comme motif graphique à un seul trajet n'est
mentionné dans aucun
texte ancien ou médiéval. On ne peut donc pas
savoir directement ce qu'il
représentait ou signifiait à l'époque.
Mais il a certainement eu beaucoup
d'importance pour les dessinateurs qui le pratiquaient : en
fait, il est
devenu un objet technique très sophistiqué,
auquel seuls ses dessinateurs (et,
éventuellemenr, les architectes qui l'ont agrandi sur le sol
de leurs
cathédrales) semblent s'être
intéressés.
À partir de
la Renaissance (c.1450), on s'intéressera surtout aux
représentations
tridimensionnelles en perspective du labyrinthe classique, et, pour la
première
fois, au dessin de labyrinthes à chemins multiples. La
tradition du motif
graphique du labyrinthe classique est alors terminée.
Du
manuscrit au sol
Autour de
l'an 1200, on a commencé à incorporer au sol de
quelques cathédrales de France
des labyrinthes de grande dimension. Jusqu'alors, depuis plusieurs
siècles, les
labyrinthes étaient dessinés sur le parchemin des
manuscrits et mesuraient
environ 15 cm (6 po). Il semble que ces grands
labyrinthes de sol
occupaient toute la largeur de la nef : ils mesuraient donc
entre 10 et 13
mètres (33-43 pi). Aucun document contemporain ne
permet de savoir dans
quel but ce transfert du manuscrit au sol a été
fait.
Avant cette
époque, il y a eu des labyrinthes de sol plus petits. Les
labyrinthes romains
étaient normalement des décorations de plancher
en mosaïque et quelques
labyrinthes médiévaux avaient
été mis sur les sols (Pavia) et les murs
(Pontremoli, Lucca), mais les nouveaux labyrinthes de sol
étaient vraiment
beaucoup plus grands et doivent être
considérés dans une catégorie
à part.
Le
labyrinthe de Chartres
Le
labyrinthe classique le plus connu est celui du sol de la
cathédrale de Chartres (France, 96 km au sud-ouest de Paris).
C'est le seul survivant
des grands labyrinthes médiévaux (celui de
St-Quentin date de 1495 : il
est donc postérieur aux autres de près de trois
siècles). Le labyrinthe de
Chartres mesure environ 13 mètres (43 pi). Il
comporte des éléments décoratifs
uniques qui permettent de le reconnaître facilement, et qui
ont sans doute
contribué à sa popularité.
Son dessin
général correspond à celui d'un des
manuscrits du 9e siècle ; c'est
d'ailleurs ce dessin qui est le plus fréquent dans
l'ensemble des manuscrits
médiévaux et même sur le sol des
cathédrales.
Le
labyrinthe de Reims
Le dessin
du labyrinthe de Reims semble n'avoir existé pendant
l'époque
médiévale que sur le sol de la
cathédrale de Reims. Le labyrinthe de sol a
été
détruit en 1778 mais un architecte du nom de Jacques Cellier
en avait fait un
relevé sommaire autour de 1585. Ce relevé permet
d'en connaître la forme
générale (qui est octogonale avec bastions), et
le trajet (qui est différent de
celui de Chartres). La forme octogonale avec bastions était
originale au moment
de la construction ; par la suite elle a
été utilisée ailleurs, mais avec
le trajet de Chartres. Le trajet de Reims n'a été
retrouvé nulle part ailleurs,
sauf dans un manuscrit français des premières
années du 15e siècle (d'ailleurs
sous forme octogonale avec bastions), dessin probablement
copié sur celui du
sol de la cathédrale.
L'étude du
trajet du labyrinthe de Reims et sa comparaison avec celui de Chartres sont grandement
facilitées par sa transcription en version
« script »,
c'est-à-dire
en version circulaire sans bastions, à la manière
des dessins de manuscrits.
Le trajet
du labyrinthe de Reims est peut-être unique dans la tradition
médiévale connue,
mais il partage avec celui de Chartres certaines qualités
rythmiques. L'étude
comparative de ces deux labyrinthes m'a amené à
deux notions essentielles pour
l'étude du labyrinthe
médiéval : la notion de sa structure
rythmique
spécifique et celle du labyrinthe parfait ou canonique.
Le
rythme du labyrinthe médiéval
L'intérêt
du labyrinthe médiéval, c'est son rythme. Ce que recherchaient les dessinateurs du
labyrinthe médiéval, c'est un trajet bien
rythmé. En voici une description
sommaire.
Après une
courte introduction principalement radiale, le mouvement rythmique
général du
labyrinthe de Chartres est d'amplitude croissante pour le trajet
d'entrée
(décroissante pour le trajet de sortie). Le trajet commence
sur les petits
cercles intérieurs et se poursuit vers les cercles plus
grands de l'extérieur.
L'arrivée au centre a lieu, après une courte
transition radiale, au moment de
la plus grande intensité énergétique,
résultant du parcours des grands cercles.
Quant au
labyrinthe de Reims, son mouvement rythmique est d'amplitude
décroissante : son trajet commence sur les grands
cercles et l'arrivée au
centre se fait dans le recueillement des cercles intérieurs.
La
notion de labyrinthe parfait ou canonique
Le mot
canonique signifie selon les règles,
c'est-à-dire, dans le présent contexte,
parfait. Voici maintenant deux des propriétés
rythmiques du trajet des
labyrinthes de Chartres et de Reims qui permettent de les
reconnaître comme
parfaits ou canoniques.
D'abord, ce
trajet est constitué entièrement de segments d'un
quart de cercle et d'un
demi-cercle : il ne s'y trouve aucun segment plus long.
Ensuite, la
séquence des éléments du trajet est
réversible, c'est-à-dire que des
éléments
identiques occupent la même position dans la
séquence selon qu'on parcourt le
trajet de l'extérieur vers l'intérieur ou de
l'intérieur vers l'extérieur du
labyrinthe.
Ces deux
propriétés suffisent pour identifier les
labyrinthes canoniques. Elles sont
aussi mentionnées par Robert Ferré et
Craig
Wright
Certaines
autres propriétés sont plus
profondément
reliées à la qualité strictement
rythmique du labyrinthe et m'ont permis de
découvrir son vrai sens pour les dessinateurs
médiévaux qui l'ont inventé. |