GLDF

Loge : Les Templiers de Saint Jean - Orient de Paris

09/02/2005

Conscience et Fraternité

Nous avons le plaisir ce soir de partager nos travaux pour les raisons que vous savez. Le sujet qui m’a semblé s’imposer était de vous parler de

"Conscience et Fraternité". Là aussi, vous savez pourquoi !

Se référant très souvent à un vécu, nos pairs qui un jour ont décidé de donner un titre distinctif à nos ateliers, ne l’ont jamais fait de façon anodine.

Je reste persuadé que ce fameux titre distinctif détermine pour une longue période l’esprit et l’égrégore de l’atelier.

Pour vous il s’agit donc de : Conscience et Fraternité.

Je ne saurais vous dévoiler pourquoi ils ont fait ce choix, mais simplement vous donner ma vision de la conscience et de la fraternité en tant qu’éléments séparés puis associés.


Conscience :

On peut dire que la conscience au sens générale est d’abord, le manifeste qui oscille entre moi et la chose à laquelle je pense et me jette à la fois hors de moi  et hors de la chose, comme si la conscience ne manifestait que l’existence de la chose ou du moi.

Toute conscience est acte spontané ou volontaire, mémoire et anticipation.

La  conscience est pratiquement indéfinissable et par elle-même  insuffisante à se définir, un qualificatif lui est quasi obligatoire pour éclairer quelque peu son sens.

La conscience réfléchie n’est pas la conscience morale.

La conscience philosophique n’est pas la conscience psychologique.

La prise de conscience n’est pas la conscience.

Etc.….

On comprendra par là que la conscience est toujours conscience « de » quelque chose. Nous ne la percevons pas mais nous percevons ses effets.

N’étant ni philosophe, ni psychologue, mais un simple M\, je vais vous développer les résultats de mes diverses lectures et réflexions pour ce qui me paraît être  notre sujet à savoir « la conscience morale ».

Pour commencer : « Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’il te fasse ». 

Cette évidence simple ne doit pas masquer la très grande complexité à définir la conscience morale.

Bien des théories ont été développées sur le sujet.

L’analyse de Kant, version relativement minimaliste, la réduit au principe de la « bonne volonté » démontrant par là qu’il est impossible de partir

de la conscience morale compte tenu de sa complexité. Il s’appuiera sur la conception du désir qui précède toute analyse, considérant

que nous ne désirons que ce qui nous semble bon pour nous. Raisonnement qui  nécessite  l’introduction d’une exception : la loi morale

qui elle n’est pas subordonnée au plaisir.

Autres théories : le  culturalisme et le cognitivisme qui ont en commun de considérer la moralité comme survenue accidentellement à l’homme.

Pour le culturalisme par adaptation à la société, pour le cognitivisme par le raisonnement rationnel qui précède la moralité (parce que je connais, je deviens moral.) Partant de ces théories, mis à part l’homme transcendé, l’homme ne serait pas foncièrement moral mais le deviendrait. Il lutterait entre son animalité et la moralité. Idée que l’on retrouve dans l’expression « agir comme un animal.

Une autre théorie dite « instinctiviste » s’appuie, entre autre, sur la théorie darwinienne de l’évolution, basée sur la sélection naturelle favorisant le comportement altruiste dès l’instant où il y aurait quelque chose de commun génétiquement avec un individu et par extension à un groupe.

Ce respect de tout homme par instinct moral serait fondateur du lien social, renforcé par ailleurs par la culture et la raison.

Cette approche m’apparaît comme celle s’appliquant le plus à notre engagement car fondée sur les relations prioritaires et réciproques.

A l’exemple de l’amitié, mais aussi le patriotisme ou le racisme, ces  relations ont pour origine un sentiment d’appartenance à un groupe que les experts dénomment « sentiment  de tribu ».

Dans la tribu, la relation prime sur les services.

C’est parce que tu es mon ami ou c’est parce que nous sommes de même nationalité que je t’aide.

Au sein de ma tribu je suis prioritaire et  je privilégie mes relations avec ses membres. Ce qui ne m’empêche nullement de faire partie de plusieurs tribus (je peux être Polytechnicien, jouer au rugby et faire partie du  bagad de Lorient). Plus ma tribu est restreinte plus je me sens en sécurité.

Plus elle est vaste et plus je m’y sens anonyme.

Ces caractéristiques relationnelles constituent la base de la conscience morale de la tribu.

La tribu  existe par le fait que ses membres se reconnaissent dans une entité qui leur est commune. Cette entité les mêmes experts l’appellent « totem ».

La plus représentative des tribus  c’est l’amitié car le totem n’y est pas préétabli. Une amitié durable est celle où les protagonistes sont en quête de nouveaux  totems  à partager qui les rapprochent et les unissent.

Il est à noter que si le besoin de tribu et des sentiments qu’elle  développe est d’origine instinctive, le totem relève de la raison par le fait de rechercher et de discerner ce qu’il y de commun entre le ou les autres et moi. Loin de s’opposer, instinct et raison sont complémentaires dans le processus de conscience morale.

L’élément essentiel du totem, c’est le langage : adresser la parole à quelqu’un c’est déjà le reconnaître  comme un membre potentiel de la tribu. 

La puissance unificatrice du langage a différents degrés : bavarder c’est déjà  une mise en commun, discuter c’est permettre de dégager des consensus et favoriser la normalisation des points de vue sur le monde.

La tribu,  pour le peu que l’on s’accorde sur le totem, établit des relations indifférenciées : n’importe qui peut devenir mon ami. Cela  implique la condition de respect de tous les hommes et rend satisfaisant la tentative d’explication de la conscience morale.

Membre d’un groupe, j’ai un sentiment d’attachement envers tous les membres de cette tribu. Celle-ci m’apparaît comme étant à protéger et pour la sauvegarder je dois m’engager. C’est par ce sentiment d’attachement  que je peux appliquer ses lois. Par exemple dans le principe fondamental « ne fais pas à autrui  ce que tu ne voudrais pas qu’il te fasse » j’exige d’autrui qu’il soit moral et en même temps qu’il l’exige de moi.

Il  arrive que la conscience morale se retourne contre elle-même et contredise les principes instinctifs universels, mais ces déviances restent le plus souvent passagères. En revanche celles qui s’appuient sur un dogme restent irréductibles.

Toute proportion gardée la théorie « instinctiviste » paraîtrait  s’appliquer aux sociétés et cultures non dogmatiques.

Cette théorie reste profondément humaniste. Comme dit plus haut, tout homme reste potentiellement  un partenaire avec qui je suis susceptible de partager un totem par ce fait je dois  tous les  respecter.

Fraternité

Tout comme la conscience la fraternité semble devoir s’étayée d’un qualificatif pour lui donner tout son sens.

Fraternité de sang n’est pas celle d’arme ou communautaire.

Le sentiment fraternel n’est pas la Fraternité.

Persistant sur le développement  de la théorie « instintiviste » la Fraternité peut-elle être définie comme le totem qui nous rassemble ?

 

Déjà, nous pouvons dire que la Fraternité n’est pas l’amitié qui,  comme nous l’avons vu, se régénère par la multiplicité des totems.

Notre vécu M:. nous le prouve suffisamment pour le savoir aussi. J’ai des amis en M:., mais je peux également y avoir des ennemis et ces derniers n’en restent pas moins mes Frères.

Les mythes fondateurs ainsi que la Bible sont parsemés de fratricides d’Abel et Caïn en passant par Isaac  et Ismaël.

Nous comprenons par-là  que notre  Fraternité est  indissoluble. Il faudra attendre Jésus pour entendre parler de Frères en évoquant ses disciples.

Elle s’impose à nous dès le jour de notre Initiation. Ce qui n’empêchera personne de la renier. Ceci étant un autre sujet.

Par le fait, le totem qui nous lie est l’Initiation et la Fraternité sa conséquence.

L’initiation nous fait naître avec des Frères.

Si l’on reprend le sens étymologique de totem qui  vient de l’algonquin (indien du Nord de l’Amérique) « Il est de ma première parenté » qu’y a-t-il de plus proche (à part ma sœur) que mon frère.

Ce sont nos serments qui lors de notre Initiation ont scellé notre Fraternité.

Pourquoi avoir réuni  « Conscience et Fraternité » ?

« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un  esprit de fraternité ».

Vous avez bien sur reconnu l’article 1er de la Déclaration des Droits de l’Homme.

La seconde  phrase répond à notre question. Doué de conscience l’humain doit agir dans un esprit de fraternité. C’est bien ce qui a été développé précédemment.

L’esprit de  fraternité  ne coule pas de source chacun étant ce qu’il est. Notre rituel et les outils qui nous sont proposés sont là pour y parvenir.

Pour que la Loge (la tribu) vive sereinement et pour que je la ressente pleinement, nous l’avons vu précédemment, il faudra qu’elle soit relativement restreinte.

Et à l’évidence avoir avec une majorité de ses membres des relations   amicales ou  pour le moins quelque totem à partager. D’ailleurs   si la majorité d’entre nous, a été cooptée, c’est bien pour cette raison.

Aidée des outils rationnels mis à notre disposition dans l’atelier et de l’éveil au symbolisme, la conscience morale développera les sentiments moraux que l’on est droit d’espérer du sentiment fraternel.

Le respect qui nous fait vouloir le bien  et nous empêche de faire le mal.   

L’amour qui nous fait préférer le bien de nos proches.

La reconnaisse qui sous-entend la réciprocité de la bienveillance.

La tolérance qui nous fera accepter l’autre dans sa différence.

L’équité- La liberté- l'égalité….. tiens, tiens ….. la fraternité.

Etc...

Le travail (sans relâche) sur notre pierre devant faire le reste.

La Loge ne serait-elle pas cette mère qui fait tout pour rassembler ce qui est épars ?

 

Mais si nous sommes de la même tribu F\M\ de R\E\A\A\ que nous avons des Totems communs, n’oublions pas qu’après avoir travaillé  sur nous-mêmes au sein du microcosme qu’est la Loge, c’est, comme nous le rappelle le rituel, pour continuer nos travaux au dehors, au sein de la Cité.

Pierre Mor\  -  V\M\ des Templiers de Saint Jean


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