L’Approche
de
la Mort dans le Judaïsme
De
même qu'il y a une manière juive de vivre,
ainsi y a t'il une manière juive de mourir.
L’attitude
juive envers la Mort telle quelle est développée
dans la littérature
rabbinique,est un mélange de défi et
d’acceptation.
Comme
le Judaïsme ne nie pas la réalité de
l’ici et maintenant, la mort doit être
combattue,la vie doit être chérie et
préservée jusqu’à autoriser
de
violer le Shabbat pour sauver une vie, car la Sainteté de la
vie est une valeur
suprême du judaïsme puisque la vie est
considérée comme
un
Don de Dieu.
Après
avoir crée les phénomènes naturels,
les végétaux et les animaux, Dieu insuffla
dans les narines de l’homme l’haleine de la vie.
C’est
pourquoi la vie humaine diffère des autres formes de
vie : elle incarne
l’image de Dieu.
D’autre
part, Dieu place l’être humain devant
l’alternative de la vie et du bien, d’un
côté, et, de la mort et du mal de
l’autre côté.
La
Bible assimile les commandements de Dieu à un Arbre de Vie.
C'est en aimant Dieu et en accomplissant ses commandements que le juif "vivra
et prolongera ses jours"
et les
autorités religieuse ont interprété la
formule : "Afin
qu'il vive par eux",
sous entendu
les commandements, comme une allusion au fait que les commandements
sont
destinés à assurer la vie des hommes bien loin de
provoquer leur perte. C'est
pourquoi tous les commandements de la Loi peuvent être
outrepassés si il y
danger de mort, à l'exception de 3 interdictions:
l'idolâtrie,
le
meurtre
et
les transgressions
sexuelles. (tels l'inceste ou l'adultère.).
Tant
qu'on est en vie, on doit tout faire pour s'y maintenir, d'un point de
vue
physique aussi bien que spirituel.
Supprimer
ne serait-ce qu'une seule vie équivaut à
supprimer l'Univers tout entier,
et
inversement,
Sauver
une seule vie équivaut à sauver l'Univers tout
entier.
La
mort est un mal, la mort précoce est
considérée comme un malheur et la
longévité comme une
bénédiction. Dieu promit à Abraham
qu'il
vivrait jusqu'à une heureuse vieillesse et il
vécut jusqu'à 120 ans, et il est,
encore aujourd'hui de coutume, de souhaiter à ses
connaissances une durée de
vie aussi longue.
Le
temps passe, s'enfuit, il " n'est " jamais.
L'existence
présente est donc un passage perpétuel du
passé au futur et si le passé n'a pas
de véritable contenu, le présent n'est rien
d'autre qu'un abîme qui happe
l'avenir.
La
vie terrestre, passage intermédiaire entre la vie
intra-utérine et les
entrailles de la terre-mère, dont l'homme est issu et
où il est appelé à
revenir, n'est qu'un pont reliant deux types d'existences
situés au deux
versants de notre vie.
Le
temps révolu de notre vie fœtale et
l'au-delà. Ces deux existences sont très
différentes l'une de l'autre;
La
première est totalement passive alors que la vie du monde
future est déterminée
par les acquis spirituels accumulés par l'homme pendant son
séjour sur Terre.
Ce
pont nous
l'appelons "vie", la sortie du ventre maternel
"naissance" et le retour à la poussière "mort",
parce que tant que l'homme se trouve sur le pont, il est
aveuglé par son
existence matérielle présente, il n'a plus de
souvenirs de sa vie prénatale et
n'a pas de vision claire sur l'au-delà.
Toute
l'existence terrestre n'est en
fait qu'une longue gestation ……de
nous-mêmes.
De
même que la vie embryonnaire n'est qu'un passage transitoire
s'ouvrant sur un
univers plus étendu et plus exaltant, de
même,notre existence temporelle sur la
Terre n'est qu'un tremplin vers un monde encore plus grandiose, que
l'être
humain, enfermé dans ses limites corporelles,
ne
peut conceptualiser. Et si grande est la différence entre le
monde utérin et le
monde ici-bas, infiniment plus grande est encore la
différence entre ce monde
ci et le monde futur promis a l'âme
libérée de son enveloppe charnelle.
L'abandon
de la
matrice c'est la naissance de l'être corporel, l'abandon du
corps, la naissance
de l'âme.
"Les
nouveau-nés sont destinés à mourir et
les morts à vivre"
Quand
on vient à la vie, la mort se dessine à
l'horizon, mais quand on meurt c'est
pour vivre. Les sept ou neuf mois de grossesse sont le temps
de
gestation de l'être matériel, les soixante dix ou
quatre vingt dix années de
vie sur terre, la gestation de notre vie immatérielle.
C'est
donc une chaîne à trois maillons où
l'âme passe par trois mondes:
Le
1er monde, la création, la conception dans le ventre
maternel,
Le
2ème monde, la naissance du corps par abandon de la matrice,
laboratoire d'une
existence constructive,
Et
le 3ème monde, la naissance de l'âme par abandon
du corps, porte d'entrée d'un
monde idéal, qui est notre destination ultime.
En
d'autres termes:
Le
1er monde est ténèbres,
Le
2ème mélange de lumière et
d'obscurité
Le
3ème la Lumière.
La
naissance est donc la porte d'entée dans le monde temporel,
la mort, la porte
de la vie éternelle, la séparation de
l'âme et du corps, que
nous appelons mort est un retour à la source, un changement
d'habit, où les
deux composantes de l'être humain retrouvent leur lieu
d'extraction.
Et
si la Torah a
donné un certain nombre de prescriptions concernant le
deuil, ce n'est pas en
regard de la disparition corporelle de la personne, c'est parce que la
vie que Dieu nous a accordée recèle un potentiel
d'ascension spirituel. C'est sur la
destruction de ce potentiel que nous devons nous lamenter, comme
l'explique le
Talmud à propos du fait de déchirer son
vêtement lorsqu'on assiste à un
décès :
"Un
Homme qui meurt, c'est comme un
rouleau de la Torah qui a brûlé."
Une
interprétation rabbinique de la Bible voit dans le
comportement même du
nouveau-né et du mourant, l'expression d'un "état
d'âme" complètement
différent, aux deux pôles de l'existence humaine;
Lorsqu'un
homme vient au monde, ses mains sont fermées et
repliées, comme pour dire:
"Le
monde entier est à moi, et j'en
prendrai possession!"
Lorsqu'il
quitte ce monde, ses mains sont tendues et grandes ouvertes comme pour
dire:
"Je
n'ai rien possédé en ce
monde!"
"Tout
est vanité", d'après le Zohar. Tout ou
rien, l'Eternité ou le Néant,
un pont vers la vie ou un pont vers la mort.
Pour
celui qui ne connaît pas la valeur de la vie, l'existence est
effectivement
insignifiante, pour celui qui en connaît le prix, elle est
inestimable.
Pour
l'un, la vie est une longue agonie, pour l'autre le parvis magnifique
d'un
grand palais.
Si
la mort est la fin de tout, alors la vie n'a pas de sens, mais si la
vie a un
sens alors la mort n'est pas une fin.
C'est
le sens de l'enseignement de nombreux sages juifs:
"Les
impurs de leur vivants sont appelés morts
et
les justes après leur mort sont appelés vivants."
La
valeur que l'homme attribue à sa propre vie
dépend de sa vision du monde. Si
l'Univers tout entier n'est qu'un ensemble d'atomes, l'individu n'est
lui aussi
qu'une petite molécule.
Il
vit en cherchant les moyens d'améliorer ses conditions de
vie sans essayer de
comprendre la vie elle-même, ses origines, ses objectifs.
Par
contre, s'il sait que le monde n'a pas été
crée pour devenir un abîme sans
fond, il sait également que sa présence ici-bas
n'est pas fortuite, ni vaine.
Dans
les textes traditionnels, la mort est désignée
par différents termes qui font
allusion à la survie de l'être après la
mort.
La
mort se dit en Hébreux de deux façons: mot ou
mawete;
Le
mot mort est composé de deux lettres
hébraïques: mem et taw qui ont chacune une
valeur de 4, deux arrêts qui ne sont qu'une seule porte.
Le
chiffre 4 est symbole d'arrêt, d'épreuve, de
prison et le mot hébreux qui
l'exprime est "arbat", et il semble nous dire
qu'il est une
porte, donc une ouverture.
Ce
quatre se révèle être une matrice car
dans la profondeur, ce qui est
apparemment sans issue est une porte pour qui sait voir.
La
mort est inséparable de la naissance pour aller vers la
Vérité, un autre mot
composé des mêmes lettres, Mem et Taw :
« Tam ».
Le
mot « Mawete » est
composé de trois lettres hébraïques,
Mem, Vaw et
Taw, qui sont les initiales des mots: "Mavete Ve-ahara
Té'hya",
dont la traduction est: "mort et ensuite
résurrection".
Le
sens de la mort est déjà inscrit dans les lettres
du mot, à savoir que la mort
est indissociable de la résurrection.
Dans
la Bible, la
mort prends différents noms : "marche",
comme un voyage d'un
endroit à un autre,… "sommeil",
"coucher","rassemblement", "sortie",
"repos"… La mort est un processus de dissolution
de
l'organisme
humain, par la séparation de ses deux composantes qui
retrouvent leur "état"
originel. L'on trouve trois termes dans la Bible, équivalant
aux trois stades
de cette désintégration de l'être
humain:
La
Guevia : l'expiation, qui désigne la séparation
de
l'âme et du corps,
Mita
:
la transformation énergétique des constituants
matériels du corps humain, et
Assifa
:
le retour de l'âme dans les mondes célestes dont
elle est issue.
Quand
les textes traditionnels parlent de "la destruction de
l'être",
ils veulent dire que cet être par son enracinement dans la
matérialité a perdu
son énergie spirituelle; il n'est plus qu'énergie
physique. De même, lorsque
l'on parle de "retranchement","Karet", c'est
l'idée que l'âme trop
imprégnée par le monde matériel ne
peut rejoindre sa
source céleste ; elle est condamnée à
un
exil perpétuel, épuisant son énergie
matérielle accumulée pendant son existence
terrestre.
Par
contre, l'être humain, qui a su pendant sa vie spiritualiser
son corps, l'a
transformé en étui de rouleau de la Tora.
Les
lettres de la Tora se sont inscrites sur sa peau purifiée,
devenu parchemin de
la Tora, et lorsqu'elles sont libérées, elles
s'envolent reprendre leur place
auprès du Créateur.
Pour
le judaïsme, le mystère de la mort appartient
à l'énigme de l'âme et de la vie
elle-même.
Ainsi
comprendre la mort c'est comprendre la vie. Durant la vie le corps
tient sa
vitalité de l'âme. A la mort se produit une
dissociation
du corps et de l'âme,
comme je vous l'ai déjà dit, mais l'âme
n'en
continue pas moins à vivre comme
elle le fit toujours, affranchie cette fois ci des contingences
physiques du
corps, et du fait que les réelles
caractéristiques
morales d'un individu- sa
bonté, sa vertu, sa
générosité, sont
inhérentes à l'âme, il est
appelé ainsi
à
s'élever à un plus haut degré
après avoir
rempli sa mission sur Terre.
La
force spirituelle qui anime l'être humain, l'âme,
ne disparaît jamais.
A
la mort elle abandonne une forme pour en revêtir une autre,
plus sublime.
Quelque
soit le mal qui emporte une personne, il demeure physique. Rien de ce
qui
survit à la chair et au sang ne peut altérer le
pouvoir purement spirituel de
l'âme.
Aussi
l'expression "après la vie" est-elle inappropriée
dans le judaïsme
pour définir ce qui survient après la mort, car
"après la vie",
implique l'entrée dans un domaine nouveau,
alors
que pour nous, la mort est en réalité le
prolongement de la vie, mais sous une
forme plus sublime.
Ainsi,
le verset de la Genèse évoquant la mort de Sarah
est appelé "la vie de
Sarah".
Quant
à celui relatant la mort de Jacob, il a pour nom: "Et
Jacob vécut."
Pour
les talmudistes, toutes les âmes émanent du Fleuve
Céleste dont les eaux
sourdent au pied de l'Arbre de Vie.
Mais
avant de descendre dans le monde, le fleuve conduit les âmes
dans le Gan Eden,
le Jardin d'Eden, et seulement après elles sont
envoyées dans le monde où on
l'exhorte à maintenir le corps qu'elle animera dans la bonne
voie et à observer
les Commandements. L'âme qui doit s'incarner sur la Terre,
passe donc d'une
région supérieure à une
région intermédiaire, le Paradis (rappelez-vous
ma
planche sur le Parvis du Temple…), avant de gagner la
région inférieure, pour
son existence terrestre.
A
l'origine, c'est Neschama, l'âme supérieure,
lorsqu'elle parvient au Paradis
elle s'enveloppe d'une âme inférieure, Rouah,
l'esprit intellectuel, et
lorsqu'elle quitte le Paradis,
elle
prend un vêtement extérieur, c'est Nephesch,
l'esprit vital.
Lorsque
l'âme réside dans le gan Eden, Neschama devenu
mâle est donc uni à Rouah
d'essence femelle et ensemble ils projettent la Lumière.
Après
l'existence, ces trois éléments constitutifs de
l'âme retournent d'où ils sont
venus.
Nefesch,
l'esprit
vital; après avoir formé le corps et
présidé à la procréation
accompagne
celui-ci dans le tombeau et assiste à sa
décomposition, Rouah, l'esprit
intellectuel; après avoir déterminé le
corps dans ces actions, doit regagner le
Paradis et prendre le visage d'un ange avec l'image du corps qu'il
avait
ici-bas pour jouir de tous les délices, Neschama,
l'âme supérieure; l'élément
spirituel de l'être humain, que la doctrine juive proclame
éternelle et
indestructible, Dieu ayant crée l'homme à son
image c'est à dire qu'Il l'a
doté d'une âme qui participe à la
nature divine, étant pure et sans tâche; et
telle, elle revient à son Créateur quand le corps
périt.
Il
n'existe donc pas de doctrine du "péché originel"
dans le judaïsme.
L'enveloppe
matérielle de l'homme sert de
réceptacle à l'âme, qui est tenue
responsabledes fautes commises par son
porteur, ici-bas; dans l'au-delà, les âmes des
morts se retrouveront.
Un
rabbin au 13ème siècle disait:
"L'âme
remplit et illumine le corps tout entier, car même si elle
transparaît plus
particulièrement dans certains membres tels que la cervelle,
le cœur ou la
langue, elle se trouve partout. Ainsi voyons-nous que les mains sont
capables
de faire une œuvre durable, et cette faculté de créer
ne peut venir
que de l'âme."
Les
gestes de
compassion envers nos prochains, notre présence chaleureuse
aux moments de
leurs joies et de leurs peines, porteront nos âmes vers la
vie éternelle de
l'au-delà et l'auréoleront comme une couronne sur
la tête, ainsi que le dit le
psalmiste:
"La
grâce
du Seigneur dure d'éternité en
éternité en faveur de ceux qui Le craignent et
sa bienveillance s'étend de génération
en génération."
La
croyance en une vie après la mort selon laquelle les morts
ressusciteront, a
toujours existée dans le judaïsme, bien qu'elle ne
soit jamais exprimée sous
une forme dogmatique.
Liée
aux approches du monde à venir et à la
rédemption à venir, apporté par le
Messie, on ne peut relever à son égard de
système théologique unique.
La
Bible s'intéresse peu au sort des humains après
leur mort, ils se rendent au
Chéol où ils séjournent dans une semi
existence obscure et éthérée. Ce
séjour
biblique des morts
peut
désigner la tombe seule ou signaler une sorte
d'Hadès.
La
littérature talmudique et rabbinique contient une
variété étendue d'opinions
concernant le devenir de l'âme après la mort, le
monde à venir, la Rédemption
messianique et la Ressurection. En dépit des divergences, on
peut néanmoins
dresser un tableau eschatologique de ces positions.
L'âme
quitte le corps lors de la mort, mais elle reste en relation avec
celui-ci
pendant les douze premiers mois allant et venant jusqu'à la
décomposition
corporelle. Cette année est considérée
comme une année de purgatoire pour l'âme
où seulement pour celledes pêcheurs,
après laquelle les justes vont au jardin
d'Eden et les impies à la Géhenne.
Mais
la condition de ces âmes demeure incertaine.
On
trouve également l'idée d'une damnation
éternelle mais qui est contre dite par
l'affirmation qu'il "y aura pas de géhenne dans le
monde à venir".
L'enfer
tire son nom de l'abominable vallée de Ben Hinnom, au Sud de
Jérusalem, où, à
l'époque de la monarchie biblique, un culte païen,
consistant en sacrifices
d'enfants, était observé.
Dans
le Zohar, l'âme ne s'incarnant sur la terre que pour
accomplir une mission
précise, celle des impies qui n'y étaient pas
parvenus était punie et purifiée
en enfer ou se trouvait
à
nouveau réincarnée, selon le principe du Gilgoul,
ou transmigration des âmes,
pour compléter sa tâche inachevée dans
un autre corps. En certains cas,
toutefois, l'âme pécheresse
se
voyait refuser même la réincarnation et l'enfer et
se voyait exiler sans
espoirde repos.
Originellement
conçu comme un châtiment exemplaire, le gilgoul en
vînt à être
considéré comme
un acte de miséricorde divine, offrant aux âmes la
possibilité de racheter
leurs péchés et de redevenir des êtres
spirituels.
La
notion de transmigration des âmes s'exprima aussi, dans la
croyance au Dibbouq,
âme errante dont les péchés
étaient si graves qu'elle ne pouvait trouver refuge
qu'en des corps vivants, affaiblis, qu'elle possédait et
tyrannisait jusqu'à ce
qu'on l'extirpe en l'exorcisant.
Aujourd'hui,
le judaïsme, maintient les deux croyances rabbiniques en la
Résurrection comme
partie intégrante du processus de Rédemption
messianique et en une forme
d'immortalité de l'âme après la mort.
L'affirmation
de la croyance en la Résurrection s'exprime dans la
liturgie, notamment au
cours de l'office du matin, où une prière
proclame l'assurance de voir réuni le
corps et l'âme dans le monde à venir.
Après
la mort, les impies, toujours assoiffés de désirs
matériels, voguent d'un bout
à l'autre du monde, cherchant
désespérément à satisfaire
ces
désirs. C'est la recherche éperdue de
désirs qui, là-haut, ne peuvent être
satisfaits et qui ne laisse pas l'âme en repos.
Par
contre, les
justes, imprégnés de spiritualité, se
réjouissent de ce qu'il sont et n'ont pas
besoin de chercher ailleurs d'autres sources de jouissance. Les racines
du
monde futur se trouvent en eux-mêmes.
Le
juste n'est pas dans le monde futur;
C'est
le monde futur qui est dans le
juste."
"Celui
qui ne croit pas à la Résurrection des morts, n'a
pas part au monde
futur".
Celui
qui voit la mort comme une fin irrémédiable et
irréversible ne se relèvera pas:
la mort correspondra à l'image qu'il s'en est faite.
Mais
celui qui sait que la mort est la semence de l'Eternité,
revivra dans un monde
harmonieux où matérialité et
spiritualité seront confondues.
Tous
les hommes
s'écrieront alors:
"Car
près de Toi est la Source de la vie;
A
ta lumière, nous verrons le jour."
Je
voudrais, avant de terminer mon Travail,
vous parler de la prière juive des morts:
"Le
Qaddich"
Cette
prière a, pour la plupart de mes coreligionnaires et
moi-même, une sinistre
résonance car il est associé à l'image
de la mort.
C'est
la prière récité par les
endeuillés d'une voix étranglée par
l'émotion et
entrecoupée par les sanglots. Elle est toujours
récitée debout, dans la
direction de Jérusalem.
Si
cette prière n'est pas véritablement
destinée à l'âme du disparu, le
judaïsme
affirme que sa récitation permet de soulager le
défunt des tourments de la
géhenne.
C'est
avant tout une prière de louange en l'honneur de Dieu, et
un appel présent à
l'instauration du royaume de Dieu sur la terre.
La
grande popularité de cette récitation est
associée à la personne du fils et le
Yiddish la traduit en appelant le fils aîné un "Qaddich",
disant d'une personne morte sans enfant masculin qu'elle n'a pas
laissé de
Qaddich.
Pour
comprendre la prééminence du Qaddich dans le
rituel juif en général, et dans le
rite mortuaire en particulier, il me faut vous analyser certaines
parties de ce
texte.
La
première chose qui frappe lorsqu'on lit le qaddich, c'est
qu'il est en araméen.
L'araméen était la langue populaire des juifs
déportés en Babylonie, après la
destruction du Temple
de
Salomon. On peut donc logiquement penser que ce texte a
été rédigé dans cette
langue, pour être à la portée du plus
grand public;
Les
sages de l'époque tenaient à ce que chaque juif
connaisse le sens de cette
prière, et ceci est donc encore une preuve de l'importance
primordiale de ce
texte pour le Juif croyant.
Dés
la première phrase, nous sommes transportés dans
un autre univers.
Les
premiers mots:
"Grandira
et sera sanctifié son grand Nom"
font
en effet référence à la vision
prophétique d'Ezéchiel.
D'entrée
de jeu, le Qaddich nous renvoie donc au temps idyllique de
l'ère messianique,
et le halo de sainteté qui entoure le Qaddich
s'explique déjà mieux. En
effet, l'aspiration messianique est l'une des forces motrices de
l'histoire
juive, le levier de l'évolution dynamique du peuple juif,
qui a conditionné sa
fidélité à son alliance tri
millénaire avec Dieu et
son
attachement à la Tora. Par la récitation
répétée du Qaddich, le juif proclame
sans cesse son appartenance au peuple juif, sa participation
à son histoire. Il
se voit comme un maillon solide de la chaîne
éternelle, continuateur du passé
et préparateur de l'avenir pour l'édification
d'une société nouvelle.
Dans
la suite du
texte, il est dit:
"Grandira
et sera sanctifié son Nom dans le monde qu'il a
crée, car c'est Sa
volonté".
Cette
phrase vient confirmer l'objectif de la création: la
reconnaissance universelle
du Dieu unique et, à travers elle, l'unité
réalisée entre les hommes.
Le
Qaddich est une proclamation de foi personnelle, la mémoire
fidèle d'un passé
et une confiance sereine en l'avenir.
Mais
le juif, n'est pas un "croyant solitaire", vivant dans sa tour
d'ivoire, muré dans sa foi et se
désintéressant des autres.
La
seconde phrase
s'adresse en effet à toute la Communauté:
"Grandira
et sera sanctifié Son Grand Nom
de votre vivant et du vivant de toute la maison d'Israël,
très bientôt et
dites:
Amen".
La
proclamation de foi initiale avait donc essentiellement pour but de
stimuler
toute l'assemblée à proclamer à
l'unisson sa foi dans l'unicité de Dieu et la
pérennité de l'Alliance.
Et
là, nous arrivons vraiment au "cœur"
du Qaddich. Le terme
Qaddich est une forme araméenne
dérivée de la racine Kaddoch, "Saint".
Le
Qaddich est une sanctification publique du nom de Dieu, qui est, l'un
des
sommets du service divin.
Des martyres ont sanctifiés publiquement le nom de Dieu en
refusant à toutes
les générations de renier leur foi; pour la
vérité, ils ont accepté
de
mourir.
Le
Qaddich est une
sanctification publique de Dieu, mais une sanctification par la vie,
par la
participation active de l'ensemble de la communauté. Les
sages expliquent que
le mérite essentiel de celui qui récite cette
prière ne vient pas de son rôle
de récitant, mais d'avoir suscité la
réponse de la communauté :
"Que
son Nom soit béni dans ce monde-ci et dans le monde futur".
Cette
phrase est tout simplement la traduction en araméen de la
réponse faite par l'assemblée
réunie dans le Temple, lorsqu'elle entendait les
bénédictions du ministre
officiant.
Définir
le Qaddich comme une sanctification publique du Nom de Dieu, qui
s'accomplit
par la réponse de l'assemblée à
l'exhortation du récitant,
a
deux conséquences pratiques.
D'abord,
on ne pourra pas réciter le Qaddich sans minyan, c'est
à dire en l'absence
d'une communauté minimale composée de dix hommes
majeurs. Jusqu'à dix, les
assistants sont considérés comme des
unités; une fois la dizaine atteinte, une nouvelle
entité est constituée.
Le
chiffre qui se dit "un" en hébreux "erad",
est aussi l'un des noms de Dieu.
Deuxièmement,
tous les assistants se doivent de participer à cette
sanctification collective.
Si la communauté ne répond pas, parce qu'elle
bavarde, soit par distraction, la
valeur du Qaddich est nulle et non avenue puisqu'il n'a pas
débouché sur la
proclamation escomptée.
A
cette réponse de la
communauté succède une série de huit
louanges:
"que
soit
béni, loué glorifié,
élevé, ennobli, embelli, grandi, et
chanté son Nom
saint".
Si
l'on y adjoint les deux louanges du début: "Grandira
et sera sanctifié",
on arrive à un totale de Dix éloges pour
l'ensemble de la prière.
Ce
chiffre "dix" n'a pas été
choisit au hasard. On a vu qu'il
constituait l'entité communautaire, mais on le retrouve
aussi dans d'autres
circonstances. Il y a eu dix paroles divines lors de la
création du monde, dix
commandements au moment de la Révélation sur le
Mont Sinaï,
dix
miracles dans le Temple et la Kabbale introduit le concept de dix
séphirot,
sphères d'émanation du divin.
La
Chekhina, La Présence de Dieu, se manifeste donc
à l'homme sous le signe de la
dizaine, et le chiffre dix est devenu le symbole du sacré,
du
monde supra matériel, de tout ce qui se rattache au divin.
Et
ce second
paragraphe se termine par l'affirmation:
"Plus
haut que toutes les bénédictions,
les cantiques, les louanges
et
les paroles de consolation qui sont dites dans le monde".
Voilà
donc cette prière promue comme le plus grand
éloge, adressé à Dieu dans ce
monde plus encore que la Qeddoucha (Trois formules de louanges,
tirées des
visions d'Isaïe et d'Ezéchiel, qui symbolisent
l'écho renvoyé au chœur
céleste
par l'assemblée d'Israël glorifiant le Nom.)
La
Qeddoucha avec sa triple louange Kadoch, kadoch, kadoch, n'atteint pas
le
troisième monde dans la doctrine de la Kabbale , qui dit que
la Créations s'est
faite par les paliers successifs de quatre mondes, de degré
spirituel de plus
en plus bas. Le Qaddich, qui est entièrement
conçu par l'homme, s'élève
jusqu'au monde supérieur, depuis le monde de la
matérialité par excellence,
jusqu'au monde de l'Emanation.
Ceci
expliquerait également pourquoi cette prière ait
été écrite en araméen. En
effet, la Tradition nous dit que les anges ne connaissaient pas la
langue
hébraïque; si les hommes avaient prié
dans la langue des anges, cette
prière du Qaddich supérieur à la leur,
cela aurait été considéré
comme une
attitude de défi envers ces exécuteurs de la
volonté divine.
On
a donc préféré l'araméen,
langue plus discrète.
Le
Qaddich se termine par le vœu:
"que
Dieu, agrée nos prières, qu'il nous
prête vie
et
qu'Il instaure la Paix sur le Monde."
A
la lecture des différents paragraphes dont je vus ai fait la
traduction, je
voulais vous faire comprendre le sens profond de l'institution de cette
prière,
du devoir qui incombe aux orphelins de réciter le Qaddich
pour les juifs.
Le
seul moyen d'apporter le repos ou une élévation
à l'âme du défunt, c'est de
montrer…Qu'il n'est pas mort, Que son œuvre
spirituelle se poursuit sur la
terre, même après sa disparition physique.
Lorsque
le fils sanctifie publiquement le nom de Dieu par le Qaddich, il
confère un
mérite supplémentaire au défunt, car
c'est grâce à l'éducation juive qu'il a
donnée et à l'influence
bénéfique qu'il a eu sur ses proches
que cette
sanctification a pu avoir lieu.
La
sanctification du Qaddich qui se répercute dans les quatre
mondes, compense les
profanations éventuelles des quatre monde par le
défunt, en conséquence de ses
transgressions.
Cette
sanctification par l'orphelin a d'autant plus de poids qu'elle
constitue en
même temps, une justification du Jugement Céleste,
qui l'a privé d'un être
cher.
C'est
l'impératif le
plus difficile à accomplir: Bénir Dieu
même dans le malheur.
Le
Qaddich, c'est l'incarnation de l'espérance
juive, qui résiste à l'épreuve de la
mort, attente patiente de ce jour où:
"Dieu
effacera les larmes de tous les
visages"
et
Fera
régner la paix."
"Apprends
nous donc à compter nos jours, pour que nous
acquérions un cœur ouvert à la
sagesse" dit le psalmiste, car l'endeuillé doit
continuer à vivre.
La
mort est au-delà
du contrôle de l'homme, mais la poursuite de la vie, ne l'est
pas.
Au
départ, le sujet de mon travail était :
"L’Approche
de
la Mort dans le Judaïsme. ",
Au
final je crois que
j'aurais pu l'intituler /3028-3.html
:
"L'Amour
de la Vie dans le Judaïsme."
Jean Paul Gos\
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