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R151 : La
Tolérance |
La
Tolérance et le Respect D'abord
l'intolérance Si la
tolérance, ou plutôt la nébuleuse
désignée par ce
terme, a tant d'importance pour nous, c'est avant tout autre chose en
raison
de l'intolérance
généralisée que nous constatons chaque
jour tout autour de
nous. Agressions verbales, violences physiques, guérillas,
terrorismes,
guerres, autant de faits qui traduisent
l'intolérance, c'est-à-dire
l'incapacité de vivre avec l'autre (et non simplement
à côté de lui) lorsque sa
différence est reconnue comme telle, voire lorsqu'elle est
affichée ou
revendiquée. Si nous voulons parler de tolérance,
c'est parce que nous savons,
que ce soit consciemment ou non, que l'intolérance est
première. Et tel est
bien le cas. Sans entrer dans de savantes études
ethnologiques, il est
possible de montrer que l'intolérance est l'attitude la plus
répandue chez
l'homme, dans la mesure où elle est une attitude
spontanée. A ce titre, tous
les peuples, toutes les cultures, tous les hommes, sont
intolérants. C'est
ainsi que les Grecs méprisaient les Barbares, c'est
ainsi que les Romains
méprisaient les Sauvages, et il n'est pas de religion qui ne
connaissent ses
Païens et ses Hérétiques. Nous pourrions
grossir cette liste indéfiniment. Pour le dire
autrement, si la tolérance fait pour nous
problème,
et si nous nous attachons à ce problème, c'est
parce que nous sommes
naturellement intolérants. Devant l'autre, nous
éprouvons d'abord la crainte de
l'inconnu, puis cette crainte devient peur, la peur de voir
notre intégrité
menacée. L'intolérance est ici. Elle ne dit pas
tant la haine de l'autre que la
peur de l'autre. Elle n'est pas en ce sens, et contrairement aux
apparences,
un sentiment agressif, mais un sentiment défensif. En
témoignent le repli sur
soi, le refus de toute discussion, le recours à la violence,
manifestations
classiques de l'intolérance, mais qui sont, à
bien y regarder, des
manifestations de peur et de défense de celui qui se croit
attaqué ou menacé.
C'est bien la raison pour laquelle, d'ailleurs,
l'intolérance est tellement
difficile à éradiquer. C'est parce
qu'elle est liée à quelque chose
d'extrêmement profond en nous, quelque chose de
viscéral, et qui, renvoie, par
l'intermédiaire du groupe et de ses valeurs culturelles,
à l'instinct de
survie. Il n'y a
pas, à mon sens, de discussion sérieuse sur la
tolérance, si l'on n'a pas au préalable
compris cette antériorité naturelle
de l'intolérance ainsi que son lien avec l'instinct de
conservation ou de
survie. Comme Spinoza le souligne dans l'Ethique : L'effort par lequel chaque chose s'efforce de persévérer dans son être n'est rien en dehors de l'essence actuelle de cette chose. » Il est
clair, à ce titre, que les appels sentimentaux et
miévreux à la tolérance dont certaines
vedettes télévisuelles se sont faites
les héros et les héroïnes travaillent en
pure perte. J'irai même jusqu'à dire,
mais peut-être pourrons-nous y revenir plus tard, qu'elles
font en réalité le
contraire de ce qu'elles prétendent faire. Exacerbant le
sentiment, elles
donnent prises à tout ce qu'il y a en nous de sentimental,
d'instinctif, de
pulsionnel, bref d'affectif. Or l'affectivité, si elle est
capable de pitié,
peut tout aussi vite se transformer en haine. Nul n'ignore la
versatilité des
foules qui est un excellent exemple de ce type de retournement. Mais
c'est
peut-être d'ores et déjà comprendre que
l'intolérance possède une telle force,
une telle puissance, que ce que l'on nomme d'ordinaire la
tolérance est une
arme bien faible pour lui résister. Mais je ne veux pas
anticiper. De toutes
les formes d'intolérance, le racisme est sans
doute la forme la plus odieuse, la plus dangereuse, mais aussi la plus
puissante, la plus virulente et la plus
développée. Mais il constitue par ses
excès même l'exemple qui peut nous en apprendre le
plus sur la tolérance. Je
voudrais donc en dire quelques mots. Si
l'ethnocentrisme renvoie au simple refus de l'autre, le
racisme excède considérablement ce
refus. En effet, au cœur du racisme, nous
trouvons la peur des qualités réelles ou
supposées de l'autre. Ainsi,
l'intelligence et l'habileté financière du Juif,
ou encore la puissance
sexuelle du Noir. A ce titre, le racisme exprime la peur
d'être dominé, et
c'est la raison pour laquelle il cherche à
détruire, voire à exterminer, celui
par lequel il se croit menacé. Nous retrouvons ici le
réflexe défensif dont je
parlais plus haut, mais un réflexe
élevé à la hauteur de comportement,
voire de
doctrine systématique. Inutile de
développer. C'est également la raison
pour
laquelle le racisme se développe surtout dans les couches
sociales qui vivent
dans la proximité la plus grande avec les victimes du
racisme (ainsi les «
petits blancs » aux Etats-Unis, mais aussi la masse populaire
de l'électorat du
FN), c'est-à-dire dans les couches sociales qui ont
objectivement (peu importe
que ce soit ou non fondé) les meilleures raisons de se
croire menacées. On comprend
ainsi pourquoi les mouvements politiques racistes
sont des mouvements violents, mais aussi populaires, voire populistes. Pour revenir
à ce que je disais plus haut, il semble clair
qu'opposer, comme on a tendance à le faire aujourd'hui, pour
des raisons
essentiellement économiques d'audimat, une
démagogie tolérante à une
démagogie
intolérante ne peut revenir qu'à
substituer une démagogie à une autre.
Or,
pour refuser l'intolérance, on peut aussi vouloir refuser la
démagogie. N'est-ce
à dire qu'il faille refuser, pour des raisons que je
développerai par la suite,
la tolérance, comme l'intolérance ? La
tolérance comme effort sur soi ou la tolérance
authentique. Si
l'intolérance est naturelle et spontanée, la
tolérance
ne peut être conçue, du moins au
préalable, que comme une attitude de principe,
une attitude, par là-même, construite et
artificielle, au sens positif de ce
terme. Il faut que je me force, il faut que je me raisonne, ou
bien encore il faut qu'on m'attendrisse,
pour tolérer ce qui a d'abord pu me
paraître si étrange ou si repoussant chez
autrui. Ici, c'est l'intolérance qui est la
réaction normale, logique si j'ose
dire. La tolérance, pour sa part, est le résultat
de la comparaison (qu'ai-je
de mieux que l'autre), de la réflexion (pourquoi serai-je
mieux que lui), bref
elle est le résultat d'un effort sur soi. La
tolérance est, ainsi, davantage
l'attitude de l'adulte que celle de l'enfant dans la mesure
où elle ne peut
résulter que de la raison qui compare, analyse,
juge et conclut. En ce sens,
la tolérance est de nature foncièrement
relativiste. Elle consiste à
relativiser mes qualités, mes habitudes, mes valeurs, afin
de faire une place
(plus ou moins grande) à celle d'autrui. Face à
l'intolérance, il faut être relativiste,
c'est-à-dire montrer et démontrer sans
relâche que les valeurs et les
comportements dépendent de l'appartenance
à un groupe, que les groupes sont
nécessairement
pluriels et divers, différents, qu'ils ne sauraient y avoir
par conséquent de
sens à croire que des valeurs relatives, fussent-elles
miennes, puissent être
supérieures à d'autres valeurs relatives, ou pire
encore puissent être
considérées comme des valeurs absolues. Mais,
à terme, une telle attitude n'est pas tenable. En
effet, la relativité des valeurs ne peut nous conduire qu'au
règne de la permissivité,
du laisser-aller, et, pour tout dire, du n'importe quoi. Si toutes les
valeurs
se valent, à quoi bon des valeurs ? Si toutes les valeurs
s'équivalent, à quoi
bon lutter contre la violence et vouloir la paix ? Il y a,
ainsi, avec la
tolérance, et dans sa pratique même, un
véritable problème, qui renvoie à
l'agir humain, c'està-dire à la morale.
En peu de mots, si la tolérance, qui
est par essence, relativité des valeurs,
s'étend à tout ce qui peut être
revendiqué
comme valeur, elle n'a plus de sens et devient contradictoire. Quelles sont
donc les limites de la tolérance ? Le
véritable problème réside dans le fait
que la tolérance, tout en se fondant sur
la reconnaissance et l'acceptation de la diversité des
hommes et des cultures,
donc sur une certaine relativité des valeurs, des croyances
et des
comportements, doit cependant pouvoir déterminer un
seuil critique, un seuil
au-delà duquel on parvient à ce que l'on ne peut
accepter et que l'on doit
combattre, un seuil qui à pour nom l'intolérable. Le paradoxe
est réel et difficile. La tolérance nous
conduit à l'intolérable. La tolérance
semble exiger l'intolérable. Comment résoudre
un pareil paradoxe ? II faut, tout d'abord,
remarquer que l'intolérable n'est pas
l'intolérance. L'intolérance est une
attitude irréfléchie et spontanée,
naturelle 'et violente, quand l'intolérable
désigne le résultat d'une réflexion
qui pèse, examine, analyse et se prononce
enfin par le rejet. C'est un premier point. Je le crois important. Il
faut,
d'autre part, comprendre que la tolérance n'est pas
contradictoire par hasard,
et qu'il ne servirait à rien de vouloir
à tout prix la sauver de cette
contradiction. Pour le dire crûment, j'avancerai que
la tolérance est une
attitude, certes utile, et même nécessaire, mais
pourtant radicalement
insuffisante. En tout cas, radicalement insuffisante pour
résoudre le problème
que nous pose l'intolérance. En effet, tolérer
c'est toujours accepter l'autre.
Il y a là sinon du mépris, du moins de
l'indifférence, indifférence provenant
d'une position de force qui fait que, de toute la hauteur de sa
puissance, on
accepte de tolérer l'autre, c'est-à-dire de
regarder comme négligeables, ne
comptant pour rien ou pour pas grand chose, ses différences,
ses valeurs, ses
coutumes, ses comportements. Pour le dire encore plus
crûment, je me demande
si la tolérance ne signifie pas, en
réalité, le fait de supporter l'autre.
Et
si tel est bien le cas, alors il en va de la tolérance comme
des odeurs,
certaines paraissent supportables quand d'autres le sont moins. Je
crois que
les rapports à autrui méritent mieux que cela.
Mais si l'on refuse ainsi la
tolérance, que mettre à sa place ? A cette
question, je répondrai, chaque fois
que c'est possible, le respect. Ce que je voudrais examiner pour finir. La
tolérance est toujours à la croisée
des chemins. Dans cette
perspective, il convient de revenir sur la
tolérance. La
tolérance apparaît toujours à la
croisée de deux
chemins. Le premier chemin est celui de la valeur,
c'est-à-dire du sens spirituel
qui engage l'action et la vie dans le monde, bref qui engage
l'humanité de
l'homme. Le deuxième chemin est celui des valeurs,
c'est-à-dire des relations
conflictuelles ou amicales qui peuvent et qui doivent naître
entre des valeurs
différentes. La tolérance, comme son
contraire l'intolérance, provient
toujours d'un conflit des valeurs. Elle est un moyen pour
résoudre ce conflit.
Du moins pour atténuer ses effets les plus destructeurs. Je voudrais
analyser ce dernier point, afin de montrer la
tolérance à l'oeuvre, à
partir de deux exemples précis, qui pourront
paraître
polémiques, mais qui ne le sont pas. Premier
exemple : les religions monothéistes La Lettre sur
la Tolérance de
Voltaire en témoigne, s'il est un domaine où le
problème de la tolérance se
pose c'est bien celui des religions, en particulier celui des religions
monothéistes. Ce qui n'est pas très difficile
à comprendre. La caractéristique
essentielle des religions monothéistes est
d'affirmer l'existence d'un Dieu
unique, absolu, tout puissant et qui contient en lui toute
vérité, un Dieu qui
est la Vérité. Tout le
problème vient ici du fait qu'il y a plusieurs
Dieux, plusieurs vérités, ou si l'on veut, mais
concernant notre problème cela
revient strictement au même, plusieurs manières de
croire en ce Dieu unique.
Une telle pluralité, une telle multiplicité, pour
le croyant est inacceptable.
Elle ne peut donc déboucher que sur l'opposition, le conflit
ou la guerre.
L'histoire l'illustre abondamment. Elle l'illustre,
malheureusement,
aujourd'hui encore. Pour qui refuse cette guerre, la tolérance est le moyen idéal. Tolérer les autres religions va signifier ici supporter leur présence inopportune, mais tout en les considérant pour ce qu'elles sont, à savoir des erreurs plus ou moins néfastes. Dès lors, la question qui se pose est celle de savoir jusqu'à quel point ces erreurs néfastes pourront être supportées. II est clair que les conditions historiques détermineront ce qu'il faut bien appeler le seuil de tolérance. Des conditions faciles amèneront la tolérance, des conditions difficiles l' exclueront. Cet exemple
montre assez, à mon sens, la véritable valeur
de la tolérance. Contrairement aux apparences, elle n'est
pas une attitude
positive et fondée sur la volonté de
reconnaître à l'autre ce que je m'accorde
à moi-même, par exemple le droit de vivre ainsi
plutôt qu'autrement, de croire
ainsi plutôt qu'autrement, d'aimer l'autre ainsi
plutôt qu'autrement. Si la
tolérance est positive c'est seulement par rapport
à l'intolérance, qui est,
elle, foncièrement négative, passive et
instinctive. Mais cela posé, et eu
égard à la nature de l'homme, en particulier
à sa dimension d'être raisonnable,
la tolérance n'est qu'un pis aller. Ce n'est pas elle qui
peut être au
fondement d'une reconnaissance de valeurs différentes,
précisément dans la
mesure où ces valeurs elle ne les reconnaît
jamais, mais se contente de les
accepter ou de les supporter. D'où son inconstance et sa
fragilité. Deuxième
exemple : la revendication des droits aujourd'hui De
cette inconstance et de cette fragilité, notre
époque est le formidable (au
sens étymologique' du terme qui dit la « terreur
» et le « sacré »)
témoin. Nous
assistons, en effet, à l'apparition, ou plutôt
à la résurgence et au
développement, de valeurs abstraites, qui sont toutes
imprégnées de tolérance,
et dont la principale caractéristique est qu'elles peuvent
être revendiquées
sans craindre d'être accusées de «
moralisme ». Ces
derniers temps, un être nouveau est né, qui, du
seul fait qu'il est, possède et sans aucune
contrepartie un certain
nombre de droits aussi sacrés qu'inaliénables. Je
crois que sur le plan des valeurs spirituelles, c'est-à-dire
des valeurs
spécifiquement humaines, l'affirmation des droits de l'homme
et conjointement
la nécessité de la tolérance n'ont pas
toujours eu les effets favorables que
l'on pouvait en attendre. Il n'est pas question de remettre en question
le
contenu concret de ces droits, mais seulement de s'interroger sur la
façon dont
ils sont compris et vécus au quotidien. Psychologie
des droits de l'homme, tel pourrait être
l'énoncé des analyses qui vont
suivre. A
force de parler de droit, à force de poser l'homme comme un
être de droits, on
a donné naissance à une
génération marquée au fer rouge de
l'exigence et de la
revendication. « J'exige » est le
maître-mot de cette génération, pour
ainsi
dire le seul qu'elle connaisse, en tout cas le seul qu'elle pratique et
avec
une rare détermination. L'éducation, qui
consiste précisément à obliger et
à
apprendre l'obligation, est devenue un non-sens impraticable. Comment
les
parents, comment les éducateurs (et nous le sommes tous
d'une manière ou d'une
autre) peuvent-ils se battre contre les monstres qui ont pour nom
« télévision
», « console de jeu vidéo »,
« mode vestimentaire, sportive, linguistique »,
etc. ? Comment peuvent-ils se battre lorsque ces monstres, qui
n'oublient
jamais leurs intérêts, qu'il s'agisse de vente ou
d' audimat ce qui revient
strictement au même, font appel à la
sensibilité des plus jeunes pour collecter
des fonds au nom de causes nobles, et d'autant plus nobles que, par la
vertu de
l'image et du « clip vidéo », elles sont
devenues totalement abstraites, les
enfants affamés et faméliques ayant
laissé la place à des idoles chantant les
droits de tous les hommes et le refus de la misère ? N'ayons
pas peur des mots
: les émissions
de Dorothée laissent loin derrière elles la vraie
et profonde morale de l'abbé
Pierre. Plus encore, ne la détruisent-elles pas ? Pour
être « verte », la
lessive n'en est pas moins de la lessive. On
assiste, ainsi, à une confusion et à une
collusion incroyablement dangereuses
et pernicieuses où le droit, le profit et la loi du plus
grand nombre sont
associés sans claire distinction. D'antant plus
dangereuses que le devoir,
l'effort, le travail ne font plus guère que sourire - hormis
pour une petite
élite de privilégiés qui a fort bien
compris la nature et les enjeux d'une
telle manipulation. Droit
et démocratie, c'est-à-dire loi du plus grand
nombre, mis au service de la
consommation et du profit, laminent littéralement
toutes les valeurs morales.
Il n'est que de voir ce que diffusent chaque soir les
chaînes de télévision
qui fondent leur programmation sur un tel amalgame. Le peu de
morale qui reste
ici et là, à l'occasion de telle ou telle cause
humanitaire, ne fait plus appel
au devoir et au respect, mais seulement à la sensiblerie des
bons sentiments, à
la tolérance reine et bien entendu au seigneur «
audimat ». La règle a laissé
place au pathos, le devoir à l'émotion. Comment,
dans cette perspective, parler, seulement parler, de valeurs
spirituelles ?
Comment comprendre que ces valeurs puissent se
reconnaître ? Il
est très significatif, dans ces conditions, que la
différence de l'autre n'est
plus comprise que sur le mode de la tolérance. Ici et
là, partout, c'est à la
tolérance que l'on nous engage comme si le fait de supporter
l'autre
constituait une panacée. La valeur
infiniment infinie du respect. On
peut certes accorder que la tolérance constitue un moindre
mal. Mais cela ne
permet pas de l'ériger en valeur morale et
positive. En effet, il y a quelque
chose d'inachevé et d'insatisfaisant dans la
tolérance, précisément dans la
mesure où elle ne va pas jusqu'à
reconnaître l'autre comme tel. Le
respect est la seule attitude positive qui peut permettre à
des valeurs
différentes de vivre ensemble, et au même titre,
sans s' entredéchirer. Et
ce n'est pas, j'espère l'avoir montré, seulement
une question de mot. A la
tolérance, avec les limites qui sont les siennes, il faut
substituer le respect
qui est le seul vrai sentiment moral ayant la capacité de
rendre viables des
valeurs, par ailleurs, différentes. En effet, le
respect réside en cela
seulement qu'il porte au pinacle la personne humaine et son
inaliénable
liberté. Entre la tolérance et le respect, la
différence n'est pas seulement du
moins au plus. Beaucoup de tolérance ne fera jamais de
respect. Le respect est
le passage à un autre plan qui est celui de la vie morale,
vie dans laquelle ce
n'est pas le comportement de l'autre qui importe, mais
seulement la valeur
infinie de sa liberté. Ainsi, si la tolérance est
sociale, et telle est sa
limite, le respect est moral, et telle est sa valeur. La
tolérance est dans
l'attitude, elle est d'ordre pratique. Le respect est
intérieur, il est produit
dans le mouvement même d'une liberté qui
se connaît en soi et en autrui. Ainsi si je peux vouloir la différence d'autrui, la reconnaître et l'exiger, ce ne peut être que par le respect, en aucun cas par la tolérance qui peut seulement m'amener à l'accepter, c'est-à-dire, une fois encore, mais ce sera la dernière, à le supporter. C\
T\
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