Le Grand
Architecte de l’Univers
Il est intéressant, je pense, de remarquer
que toutes nos planches, du moins au grade d'apprenti, commencent
ainsi. Mais justement pourquoi parle-t-on de Grand Architecte de
l'Univers ?
Pour approfondir ma réflexion et être digne de vos
remarques et compléments futurs, je pense que nous devons
partir des textes fondateurs (ou ceux qui sont reconnus comme tels) de
la Franc-Maçonnerie, à savoir, les anciennes
obligations concernant Dieu et la Religion, et ensuite la
déclaration de principes de la Grande Loge de France.
En effet, n'ayant rien au départ de cette
planche, il me faut recueillir quelques matériaux pour
pouvoir commencer mon travail.
Nous essaierons, dans un premier temps, d'interpréter sinon
de comprendre ce qu'ont voulu dire nos aînés puis,
nous essaierons d'avoir une vision plus personnelle correspondant
à notre propre engagement dans la
Franc-Maçonnerie.
Des Anciennes Obligations :
« Concernant DIEU et la RELIGION, un
MAÇON est obligé par sa Tenure d'obéir
à la Loi morale, et, s'il comprend bien l'Art, il ne sera
jamais un Athée stupide, ni un Libertin
irréligieux.
Mais, quoique dans les Temps anciens les
Maçons fussent astreints dans chaque pays d'appartenir
à la Religion de ce Pays ou de cette Nation, quelle qu'elle
fût, il est cependant considéré
maintenant comme plus expédient de les soumettre seulement
à cette Religion que tous les hommes acceptent, laissant
à chacun son opinion particulière, et qui
consiste à être des Hommes bons et loyaux ou
Hommes d'Honneur et de Probité, quelles que soient les
Dénominations ou Croyances qui puissent les distinguer ;
ainsi, la Maçonnerie devient le Centre d'Union et le moyen
de nouer une véritable Amitié parmi des Personnes
qui eussent dû demeurer perpétuellement
éloignées. »
Nous voyons là qu'il s'agit bien de Dieu.
Croire ou ne pas croire, telle est la question. Le texte ne dit pas ce
que doit être le Franc-Maçon mais il dit ce qu'il
ne doit pas être : il ne sera jamais un Athée
stupide, ni un Libertin irréligieux.
Cela a le mérite d'être clair : le
Maçon doit chercher sa voie tout en étant :
Hommes bons et loyaux ou Hommes d'Honneur et de Probité. Le
Maçon n'est donc pas un homme des extrêmes, il se
doit de chercher sa vérité mais de ne pas
l'imposer aux autres.
Donc en ce qui concerne Dieu, il faut je pense, se
placer dans le contexte de l'époque avec la domination en
Occident du Catholicisme, l'apparition de la Réforme puis du
libertinisme et enfin de l'athéisme. L'homme cherchait Dieu
puis, l'homme se cherche lui-même, mais tout cela autour de
l'existence de Dieu. On passe du refus du dogme de l'Eglise apostolique
et romaine à la Réforme, c'est-à-dire
au refus du droit divin de l'église. Puis ou en
même temps l'homme refuse le dogme et brave les interdits de
l'Eglise et de Dieu par le Libertinage qui le conduit donc à
l'Athéisme.
Mais la quête est vaine, l'homme ne croit en rien et pas
encore en lui.
Croire en un principe créateur permet donc de rassembler les
hommes sans heurter leur refus ou leur croyance en Dieu.
De la déclaration de Principes de la Grande
Loge de France du 5 décembre 1955 :
Il est dit que « la Grande Loge de France
travaille à la Gloire du Grand Architecte de l'Univers et on
précise même, à la Grande Loge de
France, le Grand Architecte de L'Univers est perçu comme un
principe créateur ».
On remarque que la déclaration de principes
de la G\ L\ D\ F\ n'est pas éloignée des
anciennes obligations mais en est une continuité qui
universalise les religions monothéistes en supprimant les
dogmes et en permettant ainsi aux hommes de s'affranchir des passions
religieuses pour ne s'intéresser qu'au principe
Créateur.
Si ce n'était que cela, pourquoi faire une
déclaration ?
Essayons d'aller au-delà des mots.
Au milieu du XXème siècle, les
hommes (en occident et relativement instruits) ont une idée
de ce qu'est l'univers. On connaît (un peu) les galaxies, on
se demande s'il n'y a pas de la vie ailleurs, enfin on a du monde une
vue plus vaste. L'Univers représente donc quelque chose. On
connaît la théorie de BIG-BANG mais qui l'a
créé ? Plus on avance dans la connaissance, plus
on repousse les limites, on se pose toujours la même
question, Dieu existe-t-il ?
La G\ L\ D\ F\ admet donc un principe créateur qu'elle nomme
Grand Architecte de L'Univers. Chaque homme, chaque Maçon en
Loge est libre d'interpréter ce principe. Je pense qu'elle
le nomme ainsi par référence à
l'architecte du temple de Salomon.
A partir de là, se développe ma
propre recherche.
De quel Univers ou de quel temple s'agit-il ?
Quel est donc ce Grand Architecte ?
Et si moi je fais partie de l'Univers, suis-je l'Architecte de mon
temple intérieur ?
En glorifiant le G\ A\ D\ L\ U\ glorifie-t-on Dieu ou l'Homme ?
Voilà mon chemin...
Avant de regarder l'Univers, je pense que je dois
d'abord regarder au fond de moi-même. Comme le fil
à plomb est attiré par le centre de la terre, je
dois regarder au fond de moi et peut-être ainsi, par
réaction ou par la force de rappel, je verrai la
voûte étoilée et ainsi embrasserai-je,
peut-être, l'Univers.
Qu'y a-t-il au fond de moi ?
Rien de plus, mais aussi rien de moins que chez les autres hommes, si
ce n'est le désir de chercher la lumière ou du
moins la petite étincelle qui réveillera la
flamme.
Comment et que chercher ?
A partir de là, je suis dans une impasse. Je ne sais
où aller, alors je demande à 2 FF\ autour de moi.
L'un me répond : « ton
travail n'est pas mal mais regarde les symboles qui sont dans le Temple ».
L'autre me répond par une autre question (Jésuite
peut-être ?) : « Pourquoi
à la gloire de ? » Devant mon
désarroi, il se fait plus explicite et me dit que s'il y a
Architecte, il doit y avoir plan, puis il me demande de
réfléchir sur les 2 phrases suivantes :
« Peu importe le livre sacré
pourvu que Dieu soit bien aimé. »
« Celui qui dit aimer Dieu sans aimer son
Frère n'aime pas Dieu. »
Il me demande en outre de lire le prologue de St Jean.
Voilà, j'ai à nouveau du
matériau, à moi de tailler ma pierre.
De tout ceci il ressort que je dois travailler sous un autre angle,
comme me le confirmera un autre F\ le soir aux agapes. Je dois changer
de plan, voire de dimension. En fait, ce qu'essayaient de dire mes FF\,
c'est que je retombe dans le monde profane et dans un discours de
bistrot. Il me faut voir le G\ A\ D\ L\ U\ non pas comme un Dieu
probable mais une façon de s'élever, de
spiritualiser. Ce n'est pas la négation de Dieu, peu importe
qu'il existe ou pas, nous ne nous situons pas sur un plan de croyance,
(peu importe le livre sacré), nous changeons de dimension.
Nous voulons atteindre une dimension spirituelle.
Je mesure là une partie de la puissance de cette Planche.
Une voie nouvelle s'ouvre à moi. Le plan
existe, à moi de le trouver.
Nous faisons partie du Plan. Bon, mais que faire, comment le suivre,
comment s'y intégrer ? Le Plan se
découvre au fur et à mesure du Chemin, m'a dit
mon F\, mais c'est frustrant car je ne voie pas sa globalité.
Une façon de l'appréhender commence par aimer son
F\ ; ainsi on aime Dieu, donc on le découvre. Je ne
peux voir que le chemin parcouru depuis mon initiation,
incontestablement j'ai changé. Du cabinet de
réflexion au silence de l'Apprenti, ma perception du monde
change, le Vieil homme est mort, même s'il a tendance
à ressusciter parfois et le nouveau ne sait pas encore
parler mais il découvre le monde et par là
même, Dieu.
Au commencement était le Verbe, et le Verbe
était avec Dieu, et le verbe était Dieu. Le Verbe
ou la Parole. Relation de cause à effet, si je parle, je
suis conscient et je crée mes propres pensées,
ainsi je m'élève du matériel et
j'approche de Dieu.
Mon chemin est donc la voie qu'ont tracée tous les FF\ avant
moi, le plan se découvre petit à petit, et ainsi,
une des clefs du chemin est de regarder au delà des
apparences, de chercher le sens caché, de retrouver le
chemin perdu.
La parole, c'est avant tout le son, c'est
immatériel, on peut entendre ou pas, c'est selon. Cela
dépend à la fois de l'émetteur et du
récepteur.
Ce qui est clair maintenant c'est que le son est là,
à moi de le démoduler et à comprendre.
La parole, aussi immatérielle soit-elle, sert à
véhiculer les pensées, les concepts. Pour
atteindre le but, je dois apprendre, je mesure donc les bienfaits du
Silence.
J'écoute le Verbe. Ce qui était un devoir devient
peu à peu un droit.
En écoutant mes FF\, je me ferme au monde profane et m'ouvre
donc à une autre dimension. Le corps se discipline sous
l'oeil du Vénérable et donc par transition du
Grand Architecte. Ainsi durant de courts instants, l'âme
s'élève. Malheureusement, elle retombe bien vite.
C'est un effort de tous les instants mais le Silence seul permet
d'entendre le Verbe.
Dans notre rituel, du moins au 1er degré,
nous ne nous adressons pas directement au G\ A\ D\ L\ U\ mais nous
disons toujours à la gloire de.
Alors pourquoi à la gloire de ?
Tout simplement parce que, nous ne faisons pas cela par
égoïsme. Si nous travaillons à la
construction de notre Temple, notre désir de
spiritualité nous élève, ainsi, nous
approchons de Dieu. Nous quittons le monde profane, nous nous
élevons en aimant nos FF\, ainsi nous imitons Dieu et nous
tendons vers Lui.
Glorifier le Grand Architecte c'est admettre que quelque
chose de plus grand que nous existe. On glorifie les hommes qui ont
accompli des exploits et on glorifie Dieu, qui, pour les croyants, est
au-dessus de tout.
Glorifier le Grand Architecte c'est implicitement reconnaître
que nous n'arriverons jamais au bout du chemin, mais que le but est le
G\ A\ D\ L\ U\ V
Voilà la Lumière.
Un F\ m'a dit un jour, l'Initiation c'est ce que tu vis. J'ai mis
longtemps à comprendre cela. Je ne comprends, ou du moins
ressens, que ce que je vis.
Le chemin se découvre au fur et à mesure, et
l'initiation c'est la mesure et la compréhension du chemin
parcouru.
Cette planche m'apporte plus de questions que de
réponses mais justement ces questions sont sources
d'enrichissement, des portes nouvelles s'ouvrent et vous mes FF\ par
vos questions et vos remarques me faites encore
réfléchir.
Je pense ainsi utiliser le fil à plomb et être
digne de vous. Aussi, je sollicite votre aide pour
appréhender encore plus la symbolique du G\ A\ D\ L\ U\ car
j'ai conscience que cette planche est récurrente et qu'elle
ne sera jamais finie.
Aussi, comme vous, je travaille à La Gloire
Du Grand Architecte De L'Univers, car travailler à sa
Gloire, c'est travailler pour nous et pour le bien être de
l'Humanité.
Venerable Maître, J'ai dit.
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