Obédience : NC | Loge : NC | 23/11/2008 |
Le
Progrès de l’Humanité
Au travers de la Franc-Maçonnerie La Planche qui m’a été demandée m’a posé un problème d’interprétation. M’a-t-on demandé d’établir un catalogue des hauts faits maçonniques au cours de l’histoire ? I. INTRODUCTION-PRECISIONS.(1) J’ai choisi une autre prise de vue pour parler de la problématique des progrès de l’humanité grâce à la franc- maçonnerie, une voie qui conduit aux fondamentaux de la philosophie et notamment au système aristotélicien. Car c’est bien chez Aristote que se trouve l’origine des réflexions d’où, plus tard, émergeront les grands principes de la franc-maçonnerie. Aussi, j’y ajouterai le sous-titre «Limites de l’homme — Aristote et la règle d’orÈ. Je ne parlerai pas des origines mythiques de la franc- maçonnerie et la symbolique que nous connaissons, mais je tiens simplement à rappeler que mythes et symboles ne peuvent prendre corps qu’au travers d’une réflexion rationnelle. Et les premières armes forgées pour formuler et comprendre la charge symbolique enseignée dans les premiers grades de la franc- maçonnerie se trouvent dans les interrogations et étonnements d’Aristote (384 – 322 av. J.-C.). Préalablement à l’exposé, quelques précisions sont nécessaires. Aristote est à l’origine du premier grand système philosophique que l’Occident a connu. Il faut comprendre la sens du terme “système” : il ne s’agit pas d’une totalité de connaissances bien rangées dans un placard. Un système philosophique figé dans sa propre suffisance ne servirait à rien, car il serait incapable d’appréhender les évolutions de l’histoire humaine sur la palette de ses diversités. C’est d’ailleurs une des critiques que l’on peut adresser à la franc-maçonnerie telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui trop souvent. Je reviendrai brièvement sur ce point en fin de planche. Un système philosophique vrai est un puits de réflexions ou, dit autrement, un arbre avec ses racines, un tronc et des branches charpentières — la symbolique de l’arbre est bien connue. À partir de ce tronc, d’autres branches vont se développer au fur et à mesure des avancées de la connaissance. D’autres philosophes et maîtres de pensées y grefferont des variétés nouvelles et ainsi féconderont le vieux tronc. Le système philosophique est donc à l’origine d’un processus de pensée qui doit être compréhensible et témoigner de l’unité d’une dynamique évolutive jamais achevée et à quoi la franc -maçonnerie participe. II. SCIENCE ET PHILOSOPHIE. En même temps, comme l’arbre doit donner des fruits, un système doit produire des idées, des actes (des idées comme préalables aux actes), autrement dit, dans le langage aristotélicien, doit produire des formes. Aristote a été le premier des plus grands maîtres de la rationalité — et toute son œuvre portera sur le rapport entre les concepts généraux et le réel, c’est-à-dire entre l’arbre, ses fruits — la vie quotidienne. Qu’est-ce à dire? La science moderne se préoccupe de quantité (mesures) et de qualité des choses (composition et organisation de la matière). La philosophie, elle, pose la question de la cause première, c’est -à-dire de l’origine de toute chose. Nous connaissons tous ces jeux de l’esprit: qu’est-ce qui est à l’origine d’une plante ? C’est une graine. Mais qu’est -ce qui est à l’origine de la graine ? Etc. En remontant ainsi la chaîne des causalités par la pensée, Aristote en arrive à désigner un concept qui se situe très au-delà des possibilité de la pensée humaine : l’être en tant qu’être2. Une précision : l’être en tant qu’être, pour faire court, n’est pas une représentation de Dieu tel qu’en parle le christianisme, la religion juive ou encore l’islam s’agissant des grandes religions monothéistes. L’être en tant qu’être ne se situe pas quelque part, il est. Il est éternel, non pas qu’il n’ait ni de commencement ni fin, mais il faut comprendre “éternel” dans le sens d’ “immuable”, il échappe à toute catégorie temporelle; il est au-delà de l’idée même d’éternité puisqu’il “porte” l’éternité; il est au-delà de tout changement parce qu’il porte le changement; les choses changeantes sont (sont ce qu’elles deviennent) dans son immuabilité. Nous aurons encore besoin plus loin de cette référence à l’être en tant qu’être. Pour revenir sur ce que j’ai dit peu avant, la science mesure et qualifie, alors que la philosophie pose la question ontologique (3), c’est-à-dire la question des rapports entre le réel manifesté tel que nous l’observons dans notre quotidienneté et l’être en tant qu’être. III. L’ÉROS, FORCE D’ACCOMPLISSEMENT. La question maintenant est d’essayer de situer l’homme dans cette “immuabilité” et de voir ce que veut dire “perfectionnement” dans ce contexte qui échappe à notre entendement. La partie de la substance accessible à nos sens, c’est la matière qu’Aristote appelle matière en puissance , une matière brute qui n’a pas encore subi de transformation de la main de l’homme, ni par son intelligence; elle est encore indéterminée. Lorsque la matière est travaillée, elle s’actualise, son indétermination diminue au profit d’une forme qui devient. Lorsque la matière est en forme, elle est dite en acte, c’est-àdire en une forme déterminée, actualisée, achevée. Pour illustrer ce raisonnement, aidons-nous de l’exemple classique du bloc de marbre. Le bloc de marbre et une matière indéterminée4. Sous l’action du ciseau, du maillet et de l’intelligence du sculpteur, de son talent, le bloc s’actualise. D’indéterminé, il se profile, son indétermination décroît: le bloc devient statue, animal, décor, dalles, marches d’escalier, etc. Il en va de même des idées humaines. Ce processus est dicté par une force dynamique qui implique que tout ce qui comprend une possibilité d’évolution, une virtualité, tend à s’actualiser, c’est-à-dire à produire une forme achevée dans le cadre des possibilités humaines. La matière indéterminée contient en elle-même une pulsion, une force qui tend vers un achèvement et cette force énigmatique, c’est l’Éros, la force du désir d’accomplissement, inconscient de lui- même. On voit concrètement l’Éros à l’œuvre dans nos expériences quotidiennes : la force qui va conduire la main du créateur à réaliser son oeuvre à partir d’une matière brute (bloc de marbre, feuille de papier vierge, laboratoire d’expérimentations scientifiques, pensées et projets politiques, chantiers divers, etc.). De même, rien ne peut empêcher les organismes vivants de croître, de se reproduire et de disparaître pour se renouveler («meurs et deviens»). Plus loin de nos préoccupations et observations ordinaires, la matière, dès l’origine de notre univers (une “soupe de particules” selon une expression courante), va s’organiser, s’actualiser et donner des formes de plus en plus achevées jusqu’à produire le cerveau de l’homme, «cette pincée de poussière d’étoiles qui réussit l’exploit de se pencher sur son passé de poussière» (Hubert Reeves). L’Éros, cette force impérieuse et irrépressible qui veut toujours plus d’achèvement, est présent partout dans l’univers en expansion (naissances, morts puis renaissances d’étoiles, formes toujours plus organisée de la matière...). Cette force et ces transformations appartiennent à l’être en tant qu’être. Aristote explique, pour ce qui concerne l’homme, que dans le processus d’actualisation des idées ou de la matière, le projet précède l’oeuvre — ce qui aujourd’hui nous paraît évident. La pensée ou une intention imprime la matière brute d’une ébauche avant même de commencer le travail. Cela signifie que la forme achevée est comprise dans la matière en puissance et que l’Éros est le moteur de la réalisation, c’en est le principe actif. IV. LA PLACE DE L’HOMME. Cette conception des choses implique une conséquence importante : l’âme qui habite l’être humain n’est pas étrangère au corps contrairement à la conception de Platon pour qui l’âme est prisonnière d’un corps qui lui est étranger. Pour Aristote l’âme est immanente comme une parcelle subliminale de l’être en tant qu’être, l’âme est agissante par l’Éros qui anime l’homme, l’homme qui veut... l’homme qui désire... l’homme qui aspire à toujours plus d’achèvement, toujours davantage de réalisation de lui-même. Nous commençons ici à voir l’importance d’Aristote dans la formation de la tradition maçonnique. La pensée d’Aristote est profondément finaliste et voit le monde comme doué d’une intelligence ou d’une raison active inconsciente d’elle-même conduisant vers toujours plus de perfection. Et, pour nous, cet achèvement n’est autre que le Temple de l’humanité. Aucun humain n’aura jamais la capacité d’appréhender ce processus qui va de la cause première à la forme suprême qui est l’être en tant qu’être. Nous ne sommes que des maillons éphémères de ce processus qui nous dépasse et nous n’avons que la possibilité de nous occuper de ce qui nous est intelligible et c’est précisément la juste mesure dont parle Aristote. Les aspirations de l’homme sont guidées par la raison désirante, l’Éros, pour accomplir les virtualités dont je parlais plus haut. Plus cette raison désirante s’élève et moins elle attache d’importance aux choses matérielles. C’est le domaine de la liberté active, puisque de moins en moins empêtrée dans la basse matière. C’est ce qu’il faut entendre lorsque le Vénérable Maître prononce ces paroles au moment de la chaîne d’union «Et voici que s’ouvre pour le franc-maçon le vaste domaine de l’action...» C’est l’intellect actif comme le nomme Aristote, celui des hautes aspirations. Mais la raison humaine a une autre préoccupation, une raison pratique dont les hommes ne peuvent s’affranchir, comme les captifs au fond de la caverne de Platon, celle qui doit être mise en œuvre simplement pour réunir des moyens d’existence en suffisance (dans la Caverne, symboliquement). V. LA BONNE VIE. La question de savoir à quoi sert la philosophie a reçu de nombreuses réponses, dont une des plus fréquentes pour les premiers philosophes grecs, et encore maintenant, c’est que la philosophie ne se préoccupe que de connaissance. Une brève citation d’Aristote dans sa «Métaphysique» : «Ainsi donc, si ce fut pour échapper à l’ignorance que les premiers philosophes se livrèrent à la philosophie (É), c’est en vue de connaître et non pour une fin utilitaire.» Mais ce n’est pas le seul but. Aristote lui-même, dès son exil sur l’île d’Eubée où il mourut, reconnut que la philosophie a une raison d’être “pratique” et c’est cela que nous retiendrons puisque nous, francs -maçons, nous préoccupons principalement de philosophie pratique justement, de philosophie de vie et plus rarement de philosophie académique. Citons à ce propos un commentateur d’Aristote : «A quoi bon tenter d’expliquer les phénomènes mystérieux si ce n’est dans l’optique d’une vie meilleure, plus sereine ? La philosophie n’a-t-elle pas aussi pour but de répondre aux interrogations que l’homme se pose sur lui-même afin de lui permettre de passer une vie heureuse, en mettant fin à ses peurs ? La philosophie peut donc avoir un but éthique et donc pratique, en aidant les hommes à mieux vivre. Il se pourrait donc que la philosophie ne trouve pas en elle-même sa propre fin, mais qu’elle soit tout simplement au service de la vie tant privée que publique.» La philosophie se préoccuperait donc de “bonne vie”. Encore faut-il définir ce qu’est une bonne vie et c’est là qu’Aristote va encore nous aider. Une bonne vie, c’est une vie conduite selon la vertu, seule source du bonheur véritable. VI. VERTU, JUSTE MESURE ET REGLE D’ OR. Ceci nécessite des éclaircissements. Nous avons vu que le vaste processus qui va de la cause première à l’être en tant qu’être échappe à l’entendement humain et nous ne pouvons donc observer que ce qui est à notre mesure. Il est vain de vouloir tendre vers les extrêmes, nous devons nous en tenir précisément à la juste mesure ce qu’Aristote appelle la “règle d’or”. Voilà qui nous rapproche singulièrement de notre “Art royal” puisque l’étymologie est très voisine entre règle, symbole de droiture et donc de vertu et roi, celui qui guide sa vie selon la règle. (Voir note en marge de la présente planche.) Les hommes ont reçu à leur naissance des talents divers. La règle d’or consiste à vivre le mieux possible sa destinée selon ses capacités et à travailler de son mieux à son achèvement spirituel. Cette quête doit être comprise comme le caractère de ce qui apparaît véridique à la raison et au cœur de l’homme que l’on retrouve dans V.I.T.R.I.O.L. Cette quête intérieure rejaillit nécessairement sur sa vie d’homme au quotidien. Et c’est là l’origine du bonheur et du sens de la vie : conduire sa vie selon la vertu, faire de sa vie un chef-d'oeuvre comme s’il était lui- même une cathédrale à construire au sens des anciens opératifs. C’est l’oeuvre de l’Éros aristotélicien. Et c’est précisément pour cela qu’Aristote m’apparaît comme l’un des maîtres fondateurs de la franc-maçonnerie. Thomas d’Aquin éleva Aristote au rang de chrétien d’honneur; nous pourrions tout aussi bien élever le philosophe au rang de franc-maçon d’honneur. (Je m’étonne d’ailleurs qu’aucune loge du GOS ne porte son nom comme signe distinctif.) 5 C’est la raison la raison principale pour laquelle nous devons diffuser le plus largement possible notre idéal maçonnique. Nous le savons, le cheminement par degrés (l’Éros «cadré») sur la voie initiatique met en mouvement une dynamique qui conduit à la connaissance de soi par étape, connaissance conduite par soi-même et soutenue par l’œuvre collective des maçons en leurs loges dans la juste mesure vers une destination de juste milieu. La mesure de l’homme ne peut s’accommoder d’exaltations écervelées, ni de désirs d’absolus échevelés. VII. PERFECTIONNEMENT DE L’INDIVIDU OU DE L ’ HUMANITE ? Ce qui est vrai pour l’individu l’est aussi pour la société6. Je n’aborderai pas ici la représentation du monde selon Aristote. Cette question, des plus passionnantes, déborderait largement le cadre du sujet. Je me suis limité à un essai très simple: dégager en quelques paragraphes, la place de l’homme dans cette immuabilité qui va de la cause première à l’être en tant qu’être et de constater les limites au perfectionnement de l’humanité. Hors tout cadre historique, je vais simplement transporter l’homme des catégories aristotéliciennes dans notre modernité et dans nos loges. La diffusion de notre idéal se heurte à de grandes difficultés. Je me suis beaucoup engagé avec les Frères de ma Loge pour ouvrir un grand débat sur le sens de nos engagements et sur la place de la franc-maçonnerie dans la Cité afin de rendre les Frères attentifs au déclin qui nous menace — du moins dans nos régions. Il est, en effet, très difficile de convaincre des gens de valeur de l’excellence de la franc-maçonnerie et surtout de les convaincre d’en accepter les contraintes, à quoi s’ajoute le fait que les modes de vie ont profondément changé depuis plusieurs années. Songeons aux obligations familiales, aux soucis professionnels, aux sollicitations multiples, aux exigences de la vie moderne qui induisent des agitations de toutes sortes et de tous ordres, au temps qui manque, etc. Vont de pair l’affirmation parfois farouche de l’individualisme et des replis exacerbés sur l’ego, au détriment du sens des responsabilités collectives et du sentiment d’appartenance à une communauté de destin. Et j’observe que face à ce phénomène de mutation sociologique profonde, les loges s’épuisent, se flétrissent et finissent par se scléroser. Le résultat est que l’esprit de la maçonnerie se replie sur une acception limitée de son sens et ne dépasse plus guère le champ clos des loges. Tout me semble se passer, hélas, comme si l’Éros aristotélicien avait déserté nos temples. Alors, les progrès de l’humanité au travers de la maçonnerie ? Il ne faut pas se bercer d’illusions. Personne ne s’en berce plus d’ailleurs. La maçonnerie peut améliorer l’homme désirant, c’est indiscutable. Les observations d’Aristote que j’ai évoquées dans ces quelques paragraphes sont éclairantes à cet égard. Mais la maçonnerie ne peut pas agir sur le cours de l’histoire. Elle n’a jamais été le maître d’oeuvre des grands moments de l’histoire, toujours tragique («L’histoire est essentiellement tragique» disait Raymond Aron). Le Grand Récit se déroule selon une logique qui nous échappe. Je ne pense pas, en effet, que les hommes pilotent l’histoire, mais ils sont, en revanche, à l’origine d’événements ou de moments historiques. Dès lors, l’histoire pourrait n’être que la course des hommes après les conséquences de ce qu’ils ont mis en oeuvre et qu’ils ne savent pas maîtriser. La crise mondiale actuelle en démontre toute l’évidence. Ce n’est autre que le mythe de l’apprenti sorcier. La franc-maçonnerie n’est pas le grand maître sorcier qui viendra mettre de l’ordre dans «Le grand merdier», titre d’un ouvrage célèbre et prémonitoire de Louis LePrince Ringuet (1978). Alors que peut la franc-maçonnerie ? Améliorer l’humanité ? Assurément pas, mais améliorer des hommes, oui. Plus largement, elle a un autre rôle à jouer, un rôle d’accompagnement. Plutôt qu’un grand discours théorique, il m’apparaît qu’ici un exemple permettra de saisir ce que je veux dire. Imaginons que Coluche ait été maçon et qu’il ait créé ses “Restos du cœur” sous l’égide explicite de la maçonnerie et que les restos soient «ombilicalement» et visiblement liés à la franc- maçonnerie. Imaginons un peu. Dans ce cas il est certain que nous n’aurions aucune peine à recruter. J’écrivais plus haut que les gens sont empêtrés dans la marchandise et dans leur ego et que, de ce fait, ils ont perdu le sens des responsabilités collectives. Mais on observe aussi que les gens sont prompts à s’engager dans des causes de portée sociale pour satisfaire le besoin inné d’altruisme qu’ils éprouvent confusément. Nous le savons : quelque chose d’indistinct pousse les hommes à s’impliquer au-delà du matérialisme ambiant et de leurs sphères égotiques — ce n’est autre que l’Éros en œuvre. Et c’est en agissant sur le levier de ce besoin, paradoxal en apparence, qu’ont les gens de se sentir utiles et de donner du sens à un engagement, que la franc-maçonnerie pourrait améliorer non pas l’humanité, mais de justifier les gens qui s’engagent, de valoriser ce qu’ils ont de meilleur en eux et d’être utile à la société, chacun à son niveau. La franc-maçonnerie ne peut intervenir dans la marche du temps, elle ne peut désactiver les baguettes magiques dont les apprentis sorciers se servent en toute inconscience et impunité. Elle n’a aucun moyen de combattre les causes qui ont amené à rallumer les fourneaux des soupes populaires, mais elle peut préparer la soupe. VIII. CONCLUSION — PROPOSITION. Je voudrais conclure sur une brève réflexion constructive, charge aux loges bleues de comprendre. À l’avenir, elles devront s’engager dans la Cité de manière visible et coordonnée, au risque de péricliter encore davantage et de disparaître pour certaines. Il faut comprendre que des activités patronnées explicitement par la franc-maçonnerie aideraient grandement à balayer les fables et idées fausses qui nous ont tant desservis et créeraient un courant de sympathie à l’endroit de notre mouvement. Que des maçons, à titre privé, aient des activités sociales utiles, c’est une très bonne chose et très honorable, bien évidemment. Mais si diverses activités étaient organisées et coordonnées explicitement sous notre bannière, ce serait plus utile encore. La vérité maçonnique active au grand jour susciterait des adhésions au bénéfice des hommes eux- mêmes et de la société enfin — ce qui est la raison profonde de notre volonté de recruter. Il ne s’agirait aucunement de concurrencer les clubs services, car la maçonnerie conservera toujours sa spécificité première et irremplaçable: le travail symbolique sur ses rites et rituels dans le secret des loges et le perfectionnement de l’homme. On retrouve ici le souci d’actualisation de l’intellect actif d’Aristote que j’ai abordé, appliqué à l’idée problématique du perfectionnement de l’humanité. ANNEXE. Règle et Art royal. Les explications ci-dessous sont tirées du Dictionnaire historique de la langue française de Robert et qui donne une origine commune au mot roi et règle. Dans un premier temps, le mot roi vient du latin rex qui désigne un monarque au sens ordinaire du terme. Mais l’origine plus ancienne est complexe. Je cite Robert en allégeant le texte : «[...] la racine se trouve dans la langue védique (hindi ancien) qui donnera rajah. L’on doit être également en présence de l’un de ces archaïsmes provenant des langues périphériques du domaine indo-européen (de la fin de la Préhistoire au tout début des premières civilisations — Protohistoire) où l’on retrouve une autre acception de rex qui est apparenté à directio (direction, droit) comme attribut du grand prêtre qui définit l’axe de séparation entre sacré et profane. L’article du même dictionnaire concernant la règle semble bien confirmer l’origine très voisine de règle et de roi. Robert : «Le dérivé le plus important de règle est régler avec le sens figuré de gouverner». Ainsi donc, est royal celui qui gouverne (ou qui se conduit) selon la règle, selon la règle morale, selon les préceptes de Gaïa, c’est-à-dire selon des principes où le souci de Vérité est permanent et où l’Intelligence préside aux actes. La vertu selon Aristote. O\ M\ 1 Les quelques réflexions qui vont suivre nous rappelleront pour beaucoup nous nos glorieuses époques de lycée ! Petit rafraichissement de mémoire sans prétention... Il ne s’agit, bien sûr, que d’une intrusion très limitée dans l’œuvre immense du maître. 2 «L’au-delà de la pensée est impensable.» 3 Dans ce cadre, «ontologie» et «transcendance» sont synonymes. 4 Cette matière est la résultante de multiples causes jusqu’à remonter à la cause première, l’être en tant qu’être. Mais cela dépasse nos capacités de penser. Aussi constatons-nous le bloc de marbre, matière qui est à la mesure de nos compréhensions. Certes, les géologues peuvent expliquer d’où provient le marbre, mais ne peuvent de toute façon pas remonter la chaîne des causalités au-delà de ce que permettent nos sens et nos moyens scientifiques d’investigation. 5 Hors planche: le Grand Orient de Suisse (GOS), lors du Convent de novembre 6010 a reçu une nouvelle Loge bleue sous le signe distinctif «Aristote» dont j’ai été la principale cheville ouvrière. J’en suis le 2e Surv. 6 Selon la formule adaptée : «L’ontogenèse récapitule la phylogenèse» (Ernst Haeckel). |
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