GLSA | Loge : La Tradition - Orient de Lausanne - Suisse | Date : NC |
Le LoGos
et son signe
Notre Loge est dite “de St. Jean” et nous prêtons serment sur les trois grandes lumières de la Maçonnerie qui sont Le Compas, l’Équerre et le Volume de la loi sacrée. Le compas et l’équerre sont des sujets souvent abordés dans nos Ateliers, par contre nous débattons rarement de la troisième lumière sur laquelle repose nos deux outils : Le prologue de l’évangile de St. Jean. I Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu. II Il était au commencement avec Dieu. III Tout fut par Lui, et sans Lui rien ne fut. IV De tout être Il est la vie, la vie est la lumière des hommes. V La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas saisie. Pourquoi la tradition maçonnique du Rite Écossais Ancien et Accepté s’attache-t-elle au prologue de St. Jean ? Pourquoi ne prêtons-nous pas serment sur un des trois autres évangiles celui de Matthieu, de Luc ou encore sur celui de Marc? En fait ces trois derniers évangiles racontent en parallèle la même histoire. En cela, ils sont qualifiés de Synoptiques qui signifie “sous le même regard”. Ils sont avant tout descriptifs, ils témoignent de la vie de celui qu’ils considèrent comme le fils de Dieu et, constituent la base de la Foi chrétienne. Leur différence n’est pas à trouver dans le message transmit mais plutôt dans la forme choisie car chacun d’eux s’adresse à des populations et à des cultures différentes. Matthieu, qui avec Jean est le seul apôtre parmi les évangélistes, écrit pour les communautés Juives de Syrie et de Palestine. Son texte original est en Araméen, la langue sémitique du Christ. Il est construit pour être compris par une civilisation organisée à partir de la Loi de Moïse. Luc, qui était un médecin Syrien helléniste, s’adresse à des Païens Grecs. Son texte comporte peu de références au judaïsme, mais il fait la part belle à l’hellénisme. Marc, qui comme Luc n’était pas un apôtre, s’adresse à des païens lointains de culture latine. Le livre qui fait partie de nos grandes lumières est tout autre. Sa structure est différente de celle qui prévaut pour les Synoptiques. Le manuscrit le plus ancien connu provient d’Egypte, il est écrit en grec et porte la date de l’an 115. Malgré l’utilisation de la plus élaborée des anciennes langues indo-européennes, son auteur a su garder vivantes les séquences verbales sémitiques, il introduit également toute une série de correspondances gématriques ou numériques[1] qui seront plus tard développées dans le livre de l’Apocalypse. Plus que les autres
évangiles, il comporte
plusieurs niveaux de lectures :
un premier niveau, relativement simple, corporel et
littéral ; un second
niveau symbolique qui s’adresse à la
Psyché et qui s’exprime par des
personnages absents des autres évangiles tels que
Nicodème, Lazare ou la
Samaritaine et enfin un troisième niveau qui
s’adresse à l’Esprit et qui est en
relation étroite avec la gnose juive
pré-chrétienne. Une quatrième
lecture
existe, elle déborde la raison et, pour l’instant,
je n’en parlerai pas. Écoutez une nouvelle fois le premier verset du prologue qui contient le fondement philosophique d’une de nos trois grandes lumières. - Au commencement était le LoGos et le LoGos était auprès de DIEU (ton Théon) qeon et le LoGos était Dieu (Théos) qeoz En marge de l’idée maîtresse de ce prologue qui est la doctrine du LoGos, il est important de s’attacher au texte original Grec, car lorsque Jean dit « et le verbe était auprès de DIEU », il utilise le terme “ton Théon” qui signifie Le DIEU vivant, celui qui dépasse notre entendement. Par contre lorsqu’il dit, à la fin du verset, « et le Verbe était Dieu », alors il utilise le terme “Théos”. Or chez les Grecs, on appelait Théos tous les êtres parvenus au plus haut degré de spiritualité. Pythagore en parle dans ses “Vers d’Or” et il nous dit que nous pouvons tous devenir des Théos. L’évangéliste, qui nous occupe ce soir, le mentionne également lorsque, relatant les paroles du Christ, il dit : « N’est-t-il pas écrit dans la Tora : vous êtes des Dieux ? ». Jean, dans son prologue, introduit donc 3 niveaux de déité différents, dans leur essence, de la trinité dogmatique : Père ; Fils et St. Esprit. Il y a pour Jean : Le DIEU suprême, (ton Théon), les hommes de haute spiritualité, les éveillés (Théos) et le LoGos, le Christ qui est la parole et la lumière de la Vie, l’intermédiaire et l’intercesseur entre les hommes et leur Créateur. Pour comprendre une des relations cachée de la maçonnerie avec l’évangéliste, il est intéressant de se souvenir que le texte initial est rédigé en Grec ancien et que LoGos s’écrit avec les signes majuscules Lambda et Gamma. Le Lambda ressemble à notre A majuscule sans barre centrale et le Gamma majuscule ressemble à un L inversé. Voici donc le LoGos (LoGos), le verbe créateur, la lumière de la vie. Et le LoGos placé comme ceci sur le prologue de l’évangile de St. Jean, dans une Loge de St. Jean ! Certains d’entres vous penserons que je force la coïncidence, que je joue avec les signes et les symboles ! C’est vrai et je ne prétends pas avoir raison, j’explore simplement un champ auquel nos anciens ont peut-être pensé. J’associe ce qui a été divisé, j’unifie la trinité des grandes lumières et j’utilise le double sens symbolique si cher à la gnose chrétienne dont Jean est le plus parfait représentant. La Gnose & le Nom divin Que savons nous de la Gnose ? Quels sont les liens qui, à travers les âges, nous lient à cette cosmogonie hermétique ? Comment pouvons-nous, dans le fatras maçonnique, entendre les voix de Basilide d’Alexandrie, d’Hermès ou de l’illuminé de Pathmos ? Pourquoi et comment cette gnose se retrouve-t-elle sur notre autel, sur nos murs, dans notre cabinet de réflexion ? Pour comprendre la Gnose, il est tout d’abord nécessaire de se souvenir que, pour un Sémite, le nom… c’est l’essence de l’être. Ainsi, pour la Gnose, la connaissance du Nom divin équivaut à la connaissance de la Divinité. Cette connaissance est le domaine d’étude tout à la fois étroit et immense que se sont donné les gnostiques. Leur but n’étant pas de connaître Dieu, ils savent que cela ne peut pas se concevoir, leur but est celui que nous connaîtrons plus tard au travers de l’Alchimie spéculative, leur but est… la naissance de l’homme intérieur. Lorsque, devant le buisson ardent, Moïse questionne : « si les enfants d’Israël me demande quel est ton Nom, que répondrai-je » Dieu alors dit : « Ehyèh asher Ehyèh ». (eheyeh asher eheyeh Version prononçable) Nombreuses ont été les traductions de cette phrase, peu d’entre elles cependant s’attachèrent à la séquence verbale originelle. Cette approche est pourtant essentielle car toutes les langues sémitiques ont en commun de posséder deux séquences verbales, le temps de l’accompli et le temps de l’inaccompli. Le premier temps peut être compris comme une séquence descendante multiple. Semblable la lumière des étoiles, cette séquence vient vers l’homme, c’est, premièrement le futur qui comporte tout le concept de prédestination, qui inclut les joies et les épreuves auxquelles l’homme ne pourra pas échapper. Lorsque cette lumière touche l’homme, la séquence prend forme matérielle, elle est le présent. Lorsqu’elle le traverse, elle devient le passé et entre dans la mémoire. La seconde séquence, celle de l’inaccompli, est ascendante, elle monte de l’être vers les étoiles. Elle définit la volonté de l’homme qui se dresse face à son destin et cherche à s’accomplir, à se connaître, à changer le court de la vie. Par l’utilisation du terme “asher” qui signifie “le devenir” « Ehyèh asher Ehyèh » (eheyeh asher eheyeh) entre dans cette séquence ascendante et doit donc être traduit par « Je suis celui que Je serai ». Le Dieu d’Israël dit que de tout temps il fut, mais il ajoute qu’il est aussi dans l’inaccompli, dans le changement. De l’indifférenciation, il progresse vers la différenciation et l’homme, sa créature, fait partie intégrante de ce changement. À l’époque du Christ, le Nom Divin ne pouvait être prononcé que par le grand prêtre, dans le temple, le jour des Expiations. Ce nom Divin était redoutable et le prononcer était un grave sacrilège. Ce Nom “Je suis celui que Je serai”, traduit en grec par “Ego Eimi” est le pivot central de l’évangile de Jean. On admet généralement que le Christ fut livré à la crucifixion car son ascendant sur le peuple d’Israël était devenu insupportable pour les autorités religieuses juives. C’est juste mais en partie seulement car les populations juives espéraient de tous leurs vœux le Messie qui les délivrerait du joug romain. Ils attendaient le prophète qui restaurerait la grandeur du peuple élu. Ils livrèrent également le Christ à Pilate pour une raison différente, ils le livrèrent car à chaque demande d’identité, le Christ répondait invariablement : « Ego Eimi », il répondait en utilisant le nom Divin que nul ne pouvait prononcer. En cela le “prophète” commettait un sacrilège et se comportait en mécréant ignorant la loi religieuse. L’humain & sa lumière Revenons à l’évangile de Jean et à la gnose. J’ai dit tout à l’heure que le but de la Gnose était la naissance de l’être intérieur mais aussi, que son domaine d’étude était la connaissance de lu divin. Pourquoi cet amalgame, que pouvons-nous comprendre à cela. La relation en est fort simple, cependant pour ne pas me perdre dans une explication sans fin, je laisserai maître Eckart répondre à ma place : Il dit « L’œil par lequel je regarde Dieu est l’œil par lequel Dieu me regarde ». Le VITRIOL des Maçons ne nous dit rien de différent. La lumière qui brille au tréfonds de la nature humaine est la lumière divine. Tu désires te connaître, connaître ton essence, va à l’intérieur de ton humanité et tu y trouveras le “Théos” qui de tout temps parle à ton oreille en lui disant « Répètes après moi : “Ego Eimi“, toi et ton Dieu vous ne faite qu’Un » Ceci est la révélation de Jean l’évangéliste. Ceci est la raison pour laquelle le signe du Christ est posé sur le livre du Nom dans les loges de St. Jean. Certains diront « cette affirmation est du domaine de la foi » et, bien sûr, ils ont raison. Je répondrai simplement que la foi est aussi indispensable à l’homme que l’air qu’il respire. Je répondrai aussi que je ne connais aucun homme aucune femme qui ne tienne debout sans désirer ardemment une partie de cette certitude éphémère que nous appelons la foi ! Beaucoup cependant croient ne plus avoir la foi, beaucoup croient qu’elle est inutile, qu’elle n’est … qu’une réminiscence d’un passé religieux aujourd’hui dépassé. Ils ont tort, notre foi et nos croyances, même incomprises, sont littéralement la terre sur laquelle nous marchons. Pour ceux qui ont la prétention d’être sans foi, pour ceux qui n’ont pas cultivé leur foi, vient un jour où les circonstances de la vie les forcent, comme le dit si joliment Thérèse d’Avila : « à s’asseoir seul à la table du malheur ». Alors, ils se retrouvent sans aucune des petites croyances imperceptibles qui si longtemps les avaient tenus debout. Beaucoup d’entre vous mes frères savent très exactement, par expérience, ce que veut dire Thérèse d’Avila lorsqu’elle parle d’être assise seule à la table du malheur. Cette expérience de la douleur, par laquelle l’homme perd, en un instant, toutes ses croyances, s’appelle la déréliction[25]. Elle est une grande souffrance, mais peut aussi devenir une chance inespérée que certains ne connaîtront jamais. Les femmes et les hommes se construisent aux extrêmes de la vie, ils se construisent dans l’amour et le partage mais aussi dans la perte et dans l’abandon. L’Âme invisible parle sans cesse, elle parle et elle demande a être entendue mais le bruit du monde, souvent, couvre sa voix. Ainsi va notre nature humaine, c’est dans la détresse et dans le malheur qu’enfin nous pouvons écouter. Alors, lorsque par le temps et par la force, l’oreille s’est ouverte, on l’entend et elle dit la consolation et la tendresse et l’amour. Elle dit que tout a un sens et que, même si nous ne le comprenons pas, il nous faut, à tout prix, garder confiance. Comme Jean nous le répète dans son évangile, l'Âme nous dit que de tout temps, elle fut avec nous. À ceux qui ont su préserver leur foi, elle dit son appartenance à la Lumière. À nous les maçons, elle dit le lieu de rencontre, le lieu où le compas et l’équerre touchent le livre du Nom. Cependant mes frères, je dois, ce soir, vous faire un aveu et une confidence. Tout ce que je vous ai dit concernant Dieu et son Nom n’a pour moi que peu d’importance. Je l’ai fait pour vous, je l’ai fait parce que l’un d’entre vous me l’a demandé. Je vous le dis maintenant car je pense sincèrement que parler de Dieu c’est babiller autour du silence, que parler de Dieu c’est danser en rond autour de l’immobilité. Dans ce sens, je ne crois pas en un Dieu, au contraire, j’utilise mon énergie à me tenir aussi éloigné que possible de toute croyance. Ma certitude et ma foi sont d’un autre ordre : Je sais et, par intuition je connais, un et un seul des mystères du monde, c’est l’unique chose que je puisse aujourd’hui, en toute humilité, partager avec vous : Mes Frères : l’Âme (certains dirons le “Théos”) existe ; elle est notre part de déité et trop souvent nous oublions d’écouter sa voix et trop souvent nos actes ne reflètent pas sa grandeur. Vénérable, j’ai dit |
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