Loge : La fidèle amitié - Orient d’Uzerche

Dans son ouvrage « La Pensée Maçonnique », Jean Mourgues a écrit : « Tout ce qui est dans l'univers est symbole. Le Temple même est symbole ».

Le Parvis

Plus exactement « Les parvis ». Ce terme, dont l'étymologie incertaine proviendrait de « paradisus » (paradis), s'emploie au pluriel si l'on considère, nous dit Jules Boucher, que « les parvis du Temple de Jérusalem étaient formés de trois terrasses superposées : le parvis des Gentils ouvert aux infidèles, le parvis d'Israël, réservé aux Juifs, et le parvis des Prêtres, celui où seuls, accédaient les prêtres ». (La Symbolique Maçonnique).

Pour nous c'est le lieu de rassemblement des Frères qui s'apprêtent à entrer en Loge, lieu de recueillement par excellence, où la voix du Frère Maître des Cérémonies nous invite à laisser « nos métaux », nos préoccupations profanes, et à retrouver le calme de notre moi intérieur.

La Porte du Temple

Le symbole de la porte a de nombreuses significations. Rencontre d'un plan vertical sur une surface horizontale qui nous indique le passage d'un état à un autre. La porte protège mais elle peut aussi interdire. N'oublions pas que le profane doit franchir une « porte basse », en signe d'humilité mais aussi par un effort de concentration sur soi. Désignée aussi sous le nom de « porte d'Occident », c'est au seuil de cette porte que le soleil se couche et donc que la Lumière s'éteint; au-delà et en dehors, tout n'est que ténèbres. Franchir cette porte, alors c'est quitter le monde profane pour entrer dans le « Sacré ».

Les Colonnes

Elevées à l'extérieur, elles décoraient l'entrée du Temple de Salomon. Mais pour nous, symboliquement, elles sont à l'intérieur du Temple. Elles sont identiques, fondues en airain, et surmontées d'un chapiteau ; seul leur nom change. L'une à gauche, nommée Boaz (qui signifie « en force »), se trouve au septentrion, donc dans le prolongement de la Lune, qui, elle décore l'Orient ; l'autre à droite, portant la lettre J, se trouve du côté du midi, et face au Soleil décorant l'Orient. Ces deux noms forment incontestablement les deux parties d'un même mot : « Le mot du Maçon ». (Manuscrit des Archives d'Edimbourg - 1696).

Boaz, la lettre « Beth », deuxième lettre de l'alphabet hébreu, est considérée comme essentiellement « féminin », sa signification étant « maison », « habitation » d'où l'idée de « réceptacle », de « caverne ». Boaz serait la représentation du solstice d'Hiver, et l’autre colonne celle du solstice d'Été. Les colonnes sont surmontées de grenades dont Ragon nous dit : « un millier de pépins contenus dans un même fruit, un même germe, une même substance, image du peuple Maçon qui, tout multiplié qu'il est, ne fait qu'une seule et même famille. La pomme de grenade devient l'emblème de l'harmonie sociale ».

La Voûte Etoilée

Nous pouvons imaginer que le Temple, avec sa voûte à ciel ouvert, est inachevé ; mais il n'en est pas moins propice au travail maçonnique, exposé aux influences spirituelles, directement rattaché à l'image du cosmos. Selon RAGON : « La voûte du temple est azurée et étoilée comme celle des cieux, parce que, comme elle, elle abrite tous les hommes sans distinction de rang ni de couleur ». L'esprit emprunt d'une grande sérénité, nous sommes donc invités à la méditation.

Le Pavé Mosaïque

Pour Oswald WIRTH « Le Pavé Mosaïque composé de dalles alternativement blanches et noires est, en Maçonnerie, l'image de l'objectivité ; ce damier proportionne exactement les satisfactions et les peines, les joies et les douleurs des vivants ».

Pour Plantagenet il a pour signification d'après les vieux rituels, l'union étroite qui doit régner entre les Francs-maçons liés entre eux par la vérité. Cette vérité, toutefois, ne nous apparaît pas ici uniforme, puisqu'elle est symbolisée par une alternance régulière de blanc et de noir. On peut donc dire que le Pavé Mosaïque continue, dans le Temple, le Binaire des deux Colonnes ; et l'on doit en déduire que le Maçon comme le profane est soumis aux rigueurs de la loi des contrastes, confirmation non équivoque de la relativité des vérités qui se peuvent révéler au néophyte en Loge d'Apprentis. Bien et mal, Corps et Esprit, Ténèbres et Lumière sont donc liés dans le Pavé Mosaïque, séparés par une ligne virtuelle que doit suivre l'Initié, afin de s'élever au dessus de la morale ordinaire. Le profane ne voit que les dalles noires et blanches. C'est la voie exotérique. L'initié en revanche progresse sur le fil du rasoir en suivant la ligne qui sépare le blanc et le noir ; c'est la voie ésotérique. La spiritualité conduit alors à la plénitude de l'initiation.

Les Trois Piliers : Sagesse, Force, Beauté

Surmontés de trois chandeliers, et donc de « trois lumières » (que l'on appelle aussi « étoiles »), associés chacun à un ordre d'Architecture, les trois Piliers se situent aux trois des quatre angles du Carré long constituant le Pavé Mosaïque, composé comme on l'a vu précédemment de carrés noirs et blancs alternés, de la façon suivante :

- l'un à l'angle orient-midi, a pour nom « Sagesse » et correspond au V\ M\ ; l'ordre d'Architecture qui lui est attribué est le Ionique.

- le 2ème se nomme « Force », occupe l'angle Occident-Septentrion, et correspond au 1er Surveillant. Son ordre d'Architecture est le Dorique.

- le 3ème enfin à l'angle occident-midi, a pour nom « Beauté », et correspond au 2ème Surveillant ; l'ordre d'Architecture qui le représente est le Corinthien.

On peut s’interroger sur l’absence d’un 4ème pilier, ce que ne manqueront pas de faire nos Frères Apprentis…

Irène Mainguy nous dit : « Dans l'ensemble la symbolique du pilier se rattache à celle de l'axe du monde et de l'arbre. Il exprime la relation entre les divers niveaux de l'univers et de l'être. Trois appuis sont le soutien le plus stable à toutes forces verticales et la disposition en équerre résiste le mieux à toutes les forces horizontales ».

Les Trois Fenêtres

Trois fenêtres ornent les murs du Temple. Si nous suivons la course du soleil, une première fenêtre à l'Orient, « apporte la douceur de l'aurore et son renouveau d'activité » (d'après Jules Boucher), une deuxième au Midi conjugue force et chaleur, et la troisième à l'Occident, distille une lumière sans cesse faiblissante. Aucune fenêtre au Septentrion, puisque le soleil n'y vient pas. Elles sont grillagées pour défendre l'accès du Temple (Bible 1er Livre des Rois, VI, 4). Symboliquement, les apprentis, au Nord reçoivent la Lumière provenant du reflet lunaire. Les Compagnons sont éclairés par le soleil du midi. Le 1er Surveillant est alerté par le lever du soleil : c'est en effet à lui que revient la tâche de relancer les travaux des deux premiers grades. Enfin le V\ M\ reçoit la lumière apaisée du crépuscule, appelant tempérance et modération.

Les Trois Grandes Lumières

Il est écrit dans le rituel de l'instruction au premier degré : « Qu'avez-vous vu en recevant la Lumière ? » « Le Soleil, la Lune et le Maître de la Loge », répond aussitôt l'Apprenti.

En effet le soleil est indissociable de la Lune, avec laquelle il symbolise l'alternance du jour et de la nuit, et par voie de conséquence, de la vie et de la mort. Le soleil, source de chaleur et de lumière rassemble les influences célestes à travers le cosmos. Il se trouve à droite en face de la colonne J. Principe actif, il préside à l'ouverture des travaux à midi, lorsqu'il est au zénith ; c'est donc lui qui rythme les travaux en Loge. Son déplacement se faisant de l'orient à l'occident, il embrase ainsi la moitié sud de la Loge. On lui fait aussi correspondre l'élément FEU, ainsi que l'élément Soufre. Il symbolise aussi le principe de la naissance, de la mort et de la renaissance. C'est l'esprit et la conscience s'ouvrant à l'universel.

Par voie de complémentarité, la Lune se situe sur la moitié nord de la Loge. Elle se trouve placée à gauche en face de la colonne B ; son rôle est passif. On lui fait correspondre l'élément EAU, mais également le Mercure. En loge elle est représentée dans sa phase ascendante de cinq jours, espoir de renouveau pour la loge. Elle symbolise aussi l'enseignement initiatique.

Enfin elle concrétise, à minuit plein, le terme des travaux des Maçons, heure à laquelle elle irradie dans le ciel la lumière blanche qui la caractérise, reçue du soleil puisqu'elle n'a pas de lumière propre. Elle est symbole d'imagination, de fluctuation du psychisme des êtres en perpétuel devenir. Le Dictionnaire Thématique Illustré de la Franc-Maçonnerie répond à la question posée de savoir :

D'où vient l'association du soleil, de la lune et du maître de la loge ? – « Bien avant l'apparition de la maçonnerie spéculative, on trouve dans l'Antiquité et au Moyen Age de nombreuses iconographies dans lesquelles le soleil et la lune flanquent ou du moins accompagnent un personnage divin ; ou encore un symbole de la divinité. Ils signifient alors la domination universelle ».

Cette citation permet de faire le lien avec le Delta Lumineux, œil symbole d'omniscience, situé au dessus du Vénérable Maître, représentant la conscience en éveil permanent. Il se compose d'un triangle isocèle dont l'angle au sommet est de 108 degrés, les deux angles à la base valant chacun 36°. Jules Boucher y voit : « en son centre l'Œil divin, qui symbolise, sur le plan physique, le Soleil visible d'où émane la Vie et la Lumière, sur le plan astral, le Verbe, le Logos, le Principe Créateur, sur le plan spirituel, le G.A.D.L.U. ».

Irène Mainguy parle d’ « un œil frontal unique qui voit tout ; qui discerne l'Unité dans la multiplicité, et qui représente donc l'intelligence supérieure pensante ».

Mais les trois grandes Lumières c’est aussi le volume de la Loi sacrée, l’équerre et le compas.

Le Volume de la Loi Sacrée

Dans les loges « régulières », le livre figurant sur l'autel devant le plateau du Vénérable Maître est la Bible. Il fait l'objet du 6ème Landmark de la Grande Loge Unie d'Angleterre. Appelée « Livre de la Loi Sacrée », la Bible est ouverte, pendant les Tenues, au chapitre de Saint-Jean. Irène Mainguy précise : « La Tradition révélée par le Volume de la Loi Sacrée dans son sens ésotérique est source de connaissance et de méditation. Un livre fermé garde son secret, mais un livre ouvert instruit celui qui le lit, dévoile ce qui est caché ».

L'Equerre et le Compas

Il est impossible de les dissocier ; l'équerre symbolise la terre (microcosme), le compas symbolise le ciel (macrocosme). Le compas sous l'équerre est ouvert à 30° au stade de l'apprenti, « les contingences du monde profane dominent ». L’angle d’ouverture du compas et son positionnement par rapport à l’équerre diffèrent aux grades de Compagnon et de Maître.

Les trois marches

« Les trois marches forment un escalier symbolique correspondant à la hiérarchie des loges bleues ». Apprenti, Compagnon et Maître se retrouvent ainsi au pied de l'Orient, dans une démarche ascensionnelle vers la Lumière et l'endroit le plus éclairé du Temple. On peut reconnaître dans ce schéma la division ternaire du corps humain : le corps, l'âme et l'esprit. L'apprenti prend connaissance des efforts qu'il doit accomplir pour sortir de sa bogue de profane, le Compagnon s'élève et prend conscience de la verticalité, et le Maître parvenu au 3ème degré, conscient de ses devoirs envers ses frères, saura le moment venu, redescendre les marches afin de leur communiquer la Lumière.

La Pierre Brute

La pierre, matière minérale, est le degré extrême de solidification de la matière. La pierre est le symbole de la nature humaine. L'apprenti se voit donc confier la taille de cette pierre, qui est en réalité sa propre nature. Le Maître lui communique les croquis les schémas qui, successivement l'amèneront, grâce à ses propres outils, le maillet et le ciseau, à rendre cette pierre plus « présentable » ; de ce fait sa pierre s'intégrera mieux dans l'ouvrage collectif auquel il participe avec ses Frères. La pierre est ainsi le symbole de la construction ; c'est un symbole sacré, que Jésus lui-même invoque « tu es pierre et sur cette pierre je bâtirai mon église ».

La corde à nœuds ou houppe dentelée

Chez les maçons opératifs elle était la chaîne d'arpenteur. Sur les murs de la loge, elle représente la limite du monde créé dans l'espace sacré du Temple, partant de la colonne B, et se terminant à la colonne J, après être passée par l'Orient. La corde à nœuds présente un ensemble de lacs d'amour qui servent de repères. Chaque nœud constitue un carrefour, qui signale, soit une difficulté à vaincre, soit une attache destinée à rassembler. D’où cet aspect tantôt négatif tantôt positif. Chacune des extrémités de cette corde est terminée par une houppe en forme de gland.

Les outils de l'Apprenti. La Symbolique binaire

Le mot outil vient du latin « utere » qui veut dire « se servir ». L'outil sert donc à identifier le métier, et se faisant, permet d'identifier celui qui se sert de cet outil.

Maillet et Ciseau

Le Maillet. Présenté comme symbole de la fermeté et de la persévérance, il est l'outil de l'apprenti et du compagnon en tant que tailleurs de pierre, symbole de pouvoir sur la matière et de constance dans le travail. Mais il a aussi d'autres applications ; entre les mains du V\ M\ de la Loge, il symbolise également son pouvoir et sa puissance directrice. Le maillet est le symbole du commandement, de la volonté agissante. Les trois officiers de la loge ponctuent le rituel de coups de maillet. A noter que le maillet du V\ M\ est d'un modèle un peu différent de celui du 1er et du 2ème Surveillant. Il a aussi une influence spirituelle puisque le V\ M\ s'en sert pour l'initiation du récipiendaire. Il créé, constitue et reçoit le néophyte par trois coups frappés sur l'Epée Flamboyante.

Le Ciseau. Indissociable du maillet, le ciseau est indispensable au dégrossissement de la pierre brute, travail de l'apprenti. En effet, il n'est pas imaginable de tailler une pierre brute avec un maillet seul. Le ciseau met en évidence « la loi d'action et de réaction », permettant une grande précision dans la taille. C'est un symbole de détermination dans l'action et de discernement dans les choix, en coordination avec le maillet dont la force est d'autant plus nécessaire que l'obstacle est plus ardu à vaincre. Lors de son initiation, le néophyte est invité à frapper trois coups sur la pierre brute avec le maillet et le ciseau qu'il trouve réunis au pied de l'Orient : « ce premier travail invite à entrer dans un autre monde et à pénétrer une autre réalité ».

Perpendiculaire et niveau

Le fil à plomb (ou perpendiculaire) met en évidence l'existence et la direction de l'attraction terrestre. On le retrouve matérialisé au centre de la loge sous la forme d'un mince fil, dont l'une des extrémités est fixée à un cône métallique inversé, et l'autre, reliée à un carré percé d'un trou en son centre. Et le côté du carré est égal au diamètre du cône. Relié entre le ciel et la terre il représente l'outil de référence de la verticalité. Il représente l'axe du monde, là ou se situe l'Etoile Polaire. Le fil à plomb, confirme qu'à ce qui est le plus haut dans l'Esprit correspond ce qu'il y a de plus bas dans la Manifestation, mais en mode inverse. C'est aussi l'attribut du 2ème Surveillant qui doit veiller constamment à ce que les Frères nouvellement initiés progressent dans le droit chemin de l'Honneur et de la Vertu.

Le niveau

Lorsque l'Apprenti devient Compagnon, on dit qu'il passe de la perpendiculaire au niveau. En fait, le niveau indique l'horizontale ; mais il comporte aussi un élément supplémentaire, la perpendiculaire. A lui seul, il réalise donc la réunion du plan horizontal et de la verticale. Jules Boucher précise : « Le Niveau montre que la connaissance doit être rapportée au plan terrestre; c'est en partant d'assises stables et bien établies que le Maçon doit travailler en vue de son élévation spirituelle ».

Il est l'attribut du 1er Surveillant. Outil passif, il est le symbole de notre soumission à la Loi, qui s'impose à tous, et devant laquelle nous sommes tous égaux.

CONCLUSION - La synthèse initiatique

Le Maçon a choisi sa voie, celle de l'amélioration de son Temple intérieur, par la lutte contre ses passions, par le travail sur lui-même et par la création de ses propres valeurs. Il a choisi le Temple se perfectionner, approcher la Connaissance avant de transmettre à son tour. Le Temple est l'Image de l'union qui rassemble tous les Francs Maçons de la Terre, voyage au sein de la fraternité dominée par l'esprit de solidarité. Le Tronc de la Veuve rappelle, si besoin était, que cette solidarité peut quelque fois n'être pas un vain mot.

« Que la paix règne sur la terre ; que l'amour règne parmi les hommes ; que la joie soit dans les cœurs ».

J'ai dit.

P\ V\