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Les Liens vers plus de 15 Planches sur ce sujet, sont au sommaire du Recueil R189Les Colonnes J&B et les Grenades

Les Deux Colonnes

 « Il dressa les colonnes sur le devant du Temple, l’une à droite, l’autre à gauche : il nomma celle de droite Jakin, et celle de gauche Boaz…» (Les Chroniques, II – 3 – 17)
« Il fabriqua les deux colonnes en airain ; la hauteur d’une colonne était de dix-huit coudées et un fil de douze coudées mesurait la circonférence de la deuxième colonne. Il fit deux chapiteaux d’airain fondu, pour les placer sur les sommets des colonnes ; la hauteur d’un chapiteau était de cinq coudées et la hauteur du deuxième chapiteau était de cinq coudées. Il y avait des treillis en forme de réseaux, des festons en forme de chaînettes, aux chapiteaux qui surmontaient le sommet des colonnes, sept à un chapiteau, sept au deuxième chapiteau. Il fit deux rangs de grenades autour de l’un des treillis, pour couvrir le chapiteau qui surmontait l’une des colonnes ; et de même fit-il pour le second chapiteau. Les chapiteaux qui étaient sur le sommet des colonnes, dans le portique, figuraient des lys ayant quatre coudées de hauteur. Les chapiteaux placés sur les deux colonnes étaient entourés de deux cents grenades, en haut, près du renflement qui était au-delà du treillis, il y avait aussi deux cent grenades rangées tout autour sur le second chapiteau. Il dressa les colonnes au portique du Temple ; il dressa la colonne de droite et la nomma Jakin ; puis il dressa la colonne de gauche et la nomma Boaz. Et il y avait sur le sommet des colonnes un travail figurant des lys. Ainsi fut achevé l’ouvrage des colonnes.» (1er Livre des Rois, VII)
Yann Druet dit : « …le premier pas se fait en Jakin et Boaz… » (Le Chantier de Maître Hiram – Ed. Tredaniel)

Ces deux colonnes revêtent un rôle de première importance dans la symbolique maçonnique ; peut-être, c’est pour cela que beaucoup d’encre a coulé à leur sujet et notamment sur la question de leur juste place.

Sont-elles à l’intérieur ou à l’extérieur du Temple ? La Grande Loge Unie d’Angleterre et le Rite Ecossais placent Jakin à droite et Boaz à gauche ; tandis que le Rite Français inverse leur place, peut-être dans son souci permanent de se différencier des Anglais et d’en être plus régulier ! Celui ou celle qui voudrait voir dans cette diatribe un mystère initiatique, une voie cachée vers la connaissance suprême, il serait fort déçu et il gaspillerait certainement son temps. Car il s’agit de querelles d’églises, même si elles s’appellent Obédiences Maçonniques…!

N’oubliez pas que « lorsque le sage indique la lune, le sot regarde le doigt ! »
L’emplacement des deux colonnes n’a aucune importance, si l’on ne se pose pas la question de leur signification.

J’essaierai, donc, de commencer par-là et vous pourrez constater que leur symbole est très complexe, mais qu’il recèle en son sein l’essence même de l’Initiation.

Un couple de colonnes a toujours marqué l’accès vers un autre espace. Par exemple les Colonnes d’Hercule définissaient l’espace du monde réel, physique, des vivants, par rapport à la réalité inconnue du monde post-mortem, l’au-delà, le mystère. Les colonnes ont toujours marqué cette ligne fictive que nous appelons « limite » et au de la de laquelle nous devons être capables de faire face à un état différent de celui d’où nous provenons. Les colonnes contiennent le sens de l’épreuve.
Pourquoi, donc, la Franc-Maçonnerie les a introduites dans le Temple, alors qu’elles auraient dû en marquer le seuil ? Quelle tradition, est-elle véhiculée par ce symbole ?

Le seul texte situant les colonnes à l’intérieur est le Livre des Morts de l’Ancienne Egypte.

Lorsque l’âme se trouve devant le Tribunal du Véridique, elle est questionnée sur les noms sacrés de tous les éléments architecturaux constituant la salle du Temple, et parmi ces noms il y a ceux des deux colonnes à l’intérieur. La connaissance des noms sacrés signifiait la possession des mystères. Or si nous considérons que les deux Colonnes bibliques étaient en airain et creuses, cela confirme cette fonction de « coffre des secrets ».

Le but consiste, donc, à comprendre la nature de ce secret caché par les colonnes. Essayons, tout d’abord, d’analyser leur forme et leur appellation. A partir du 1er Livre des Rois, chapitre VII, nous pouvons partager la description reportée par le F\ Jules BOUCHER, à savoir :

Les Colonnes n’avaient pas de base. En effet l’Histoire de l’Architecture montre que la base de la colonne est introduite en période Ionique, c’est-à-dire vers le 300 avant J.C. Donc les colonnes du Temple en étaient dépourvues, étant beaucoup plus proches de celles égyptiennes ou mycéniennes. Leur hauteur mesurait 18 coudées judaïques, c’est-à-dire 18 x 0,525m = 9,45m ; suivait un espace entouré de 7 rangées de chaînes contenues par deux rangées de 200 grenades ; l’ensemble mesurant 5 coudées, donc 2,625m. La colonne était surmontée d’un chapiteau floral en forme de lys ; ce chapiteau était haut de 4 coudées, soit 2,10m. Nous pouvons supposer avec un certain réalisme que les colonnes mesuraient 27 coudées, c’est-à-dire 14,175m.

La Bible rajoute que la circonférence à la base mesurait 12 coudées ; selon la formule : C = 2Rπ, c’est facile de calculer le diamètre : 2,006m. En tenant compte de ces calculs, nous nous apercevons que les colonnes du Temple étaient assez semblables à celles du palais de Knôssos : la hauteur jusqu’à la base du chapiteau était égale à 6 fois le diamètre de la colonne. Il faudra attendre l’époque dorique pour qu’elle s’élance, en devenant 7 fois le diamètre.
Tout ceci pour donner un aperçu matériel des colonnes. Intéressons-nous maintenant à leur nom : Jakin et Boaz.

Ces noms s’écrivent en hébreu avec les lettres Jod – Caph – Jod – Nun : יכינ (Jakin) dont la valeur numérique est 90, donc correspondant à un polygone de 9 côtés construit sur les sommets d’un double pentagone. Selon le symbolisme géométrique nous sommes face au miroir énergétique qui se met en action entre les sens de chaque être et ceux du milieu ambiant. Il y a jeu de forces sur le monde émotionnel et sensible.
Boaz s’écrit avec les lettres Béith – Aïn – Zaïn : בעז  ; leurs valeurs numériques donnent 79, qui peut être reduit à 7. Ce dernier est un nombre évocateur qui nous renvoie au dodécagone, soit au système rationnel des douze idées. Nous entrevoyons déjà une partie de la démarche initiatique.

Toute connaissance nous vient des sens ; elle nous produit des émotions intérieures plus ou moins fortes, par réaction au milieu qui agit sur l’initié. C’est le Cabinet de Réflexion, le V.I.T.R.I.O.L., les épreuves rituelles suivies d’une longue période de silence et d’observation.

Ensuite il y a le Compagnonnage, pendant lequel l’initié doit se construire rationnellement, comme seul un bâtisseur sait le faire. Il est appelé à connaître, à mesurer, à maîtriser les émotions afin d’acquérir une vraie sensibilité au monde de la connaissance et à repousser toute sensiblerie fallacieuse. Il doit intégrer le savoir acquis et non pas dériver dans le rêve éveillé. Je suggère aux Compagnons et aux Maîtres, de se questionner sur la relation entre ces concepts et les notions mathématiques d’intégrale et de dérivée…!

Les Colonnes d’Airain, que peuvent-elles contenir encore dans leur creux ?
Une indication intéressante nous est fournie par leurs initiales hébraïques : Jod י et Béith ב .

Le Jod, dixième Lettre-Force de l’alphabet sacré hébraïque, représente un retour à l’Unité ; il est en quelque sorte un Aleph א intériorisé. La Source de Vie représentée par la lettre Aleph, qui est le germe de toute chose, devient en Jod une Force Agissante, qui nous stimule de l’intérieur, qui nous donne la possibilité de créer. Le Jod établit en nous la base rationnelle pour comprendre la mécanique de l’œuvre. Tout initié qui n’a pas construit ce côté Jod, qui n’a pas intégré Jakin, sera certainement très fraternel, mais il continuera à errer sur les Parvis du Temple, faible proie de ses émotions et de ses passions. Jod est un élément Air créateur et transformateur. Dans le monde matériel il représente la phase dans laquelle les graines de la Pensée, transportées par l’Aire, sont aspirées et incorporées dans l’organisme.

La lettre Béith est la deuxième et représente la condensation des acquis, l’intériorisation de la Lumière. Pour que l’énergie puisse se manifester, à n’importe quel niveau, elle doit passer par une phase d’intériorisation et de condensation. Cette condensation de la Force Primordiale produit l’Amour. Au niveau humain c’est un amour non révélé, mais qui en agissant de l’intérieur nous fait avancer sur le chemin de l’œuvre, et nous serons ainsi fidèles au devoir.

La lettre Béith symbolise la maison, le réceptacle de la force créatrice Jod.
Selon ce symbolisme des lettres, l’initié devrait passer d’abord par Jod, entité masculine, force productrice, rationalité dans la connaissance, ensuite, lorsqu’il saura lire et écrire, il pourra approcher Béith, élément féminin, éveil de l’Amour non plus passionnel, et bâtir sa Maison, son Temple Intérieur dans lequel le travail de la force créatrice se développera aisément.

Cette analyse, même si elle est sommaire, ne peut pas éluder un dernier aspect de ces symboles, évoqué conjointement par la forme et les noms hébraïques.

Une règle fondamentale en ésotérisme est celle qui consiste à inverser les mots, afin d’en crypter la signification (comme le dit justement Jules BOUCHER). Les deux colonnes se nomment Jakin et Boaz ; en inversant ces mots nous obtenons : NiKai et ZaoB. Or dans la tradition linguistique sémitique, seulement les consonnes ont une importance, les voyelles pouvant être même omises. Donc il faut retenir de ces noms : pour Jakin, NK, Nun et Caph signifiant « le coït », l’acte sexuel et générateur. Pour Boaz, ZB, Zaïn et Béith signifiant l’organe fécondateur, « le phallus ».

Les Colonnes semblent évoquer un symbolisme sexuel de génération et fécondation. Avant d’avancer des conclusions définitives, examinons leur forme attentivement.

Dans toutes les traditions anciennes, les cylindre élancé est une représentation phallique ; tout comme la grenade est associée à l’ovaire générateur. L’association de ces deux symboles ne pourrait pas être plus explicite. Enfin, les chapiteaux sont des lys. Cette fleur n’existe pas à la latitude du Moyen Orient ; dans ces pays on appelle lys l’anémone, auquel on attribuait une valeur sexuelle et érotique. Cette fleur a été remplacée par le lys blanc, qui dans la tradition occidentale revêt le double symbolisme de pureté (le blanc) et de fécondation, exprimée par les pétales s’ouvrant à des étamines très prononcées, ainsi que par son parfum enivrant, considéré aphrodisiaque.

Cet ensemble de formes évocatrices, confirme bien le rôle des Colonnes : la fécondation et la génération. La génération d’un nouvel être dans chaque initié, qui fait son premier pas entre Jakin et Boaz après être sorti du Cabinet de Réflexion avec son décor mortuaire. Cet aspect lié à la génération d’un nouvel Homme est confirmé par la relation entre les Colonnes et les Sephiroth de l’Arbre de Vie de la Kabbale.

La colonne Jakin correspond à Netzah et Boaz à Hod, formant une triade avec Jésod, qui est considérée par les kabbalistes comme l’élément générateur et fécondant.
Netzah – Hod – Jésod se trouvent à la racine de l’Arbre. C’est la triade qui permet à l’être humain de se manifester une fois quittée son animalité. Netzah fournit l’énergie nécessaire aux différentes fonctions internes et externes. C’est une force qui permet l’attraction et la répulsion, le flux et le reflux du désir. Elle transmet aussi l’énergie à Hod, qui exerce ainsi la volonté et le contrôle dans les actions : les émotions, les désirs, les passions éveillées en Netzah sont maîtrisées par Hod. Il s’agit des deux colonnes que les Orientaux appellent Yin et Yang.

L’énergie remonte depuis Malkout et canalisée en Jésod le transforme en agent fécondant. Ainsi l’être devient réalité matérielle et intellectuelle, dans un balancement continu entre les sens et la raison, entre l’élément masculin et celui féminin.

Le travail d’initiation consistera à équilibrer ces deux polarités, afin de donner naissance à la Beauté, qui ne sera pas l’esthétique, mais l’Harmonie sublime créée par la Force et guidée par la Sagesse.

Cette Sagesse fait de nous des vrais initiés et certainement pas le fait de savoir si Jakin est à gauche ou à droite. Nous devons connaître les noms secrets, c’est-à-dire l’essence intime de ces Colonnes si nous voulons franchir le Tribunal du Véridique, comme dans l’Ancienne Egypte.

G\ C\ 

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