Notes sur
l'Alphabet maçonnique
Cher visiteur,
après avoir emprunté les lignes de mes
compagnons de
l'Association des Amis Provençaux de Renaissance
Traditionnelle ( APRT ), chez
qui j'ai publié il y a peu un article portant sur les signatures
maçonniques lequel
nécessite encore quelques recherches en cours, je
vous propose ici celui de Caroline P. dans lequel notre soeur aborde la
question des Alphabet Maçonniques en s'appuyant sur
l'article d'Edmond Mazet,
publié par Renaissance Traditionnelle
n°25, Tome VII, de
janvier 1976.
Bien entendu, il n'est pas question ici de reproduire
l'article
original, mais simplement la conférence
donnée à l'APRT. Ceux d'entre
vous qui souhaiteraient y avoir accès pourront suivre le
lien vers le site de
la revue et les contacter directement, ou passer par l'APRT.
Bien évidément la
publication ici de ce travail, s'effectue avec
l'entier accord des intéressés, le site de l'APRT
propose d'ailleurs un lien
vers cette page, la raison de ce partage est dûe, avnt tout
à la difficluté de
placer les figures et illustrations qui vont avec le texte car le
serveur du
blog APRT n'accepte qu'une seule image par article et vous pourrez
constater
que ce n'est pas le cas ici... ce qui semble logique eu
égard au sujet. Le côté
amusant de la chose est que j'avais confié "les signatures"
à l'APRT
sachant que C.P. donnerait ce texte et qu'il me semblait
intéressant d'avoir
deux approches d'étude graphiques à la suite...
la technique en a décidé
autrement et chacun se retrouve sur le blog de l'autre...
Néanmoins, les commentaires et autres
interventions seront envoyés à
l'auteur...
Digressions sur l'alphabet
maçonnique à partir de l'article d'
Edmond
Mazet - "Notes sur
l'Alphabet maçonnique"
Renaissance
Traditionnelle
n°
25, Tome VII, janvier 1976
L'article
d’Edmon Mazet est articulé en 5 points :
1.
le premier point présente les principes et l'origine de
l'alphabet maçonnique à
partir du « catéchisme des
francs-maçons » attribué à
Louis Travenol , écrit en
1744 (1ère édition de cet ouvrage).
- Une
parenthèse
amusante sur ce petit ouvrage in-12 dont le titre exact est :
« Catéchisme des
francs-maçons, dédié au beau sexe.
» édité à «
Jérusalem, et Limoge », P.
Mortier, 5440, depuis le déluge ( 1740 ). Publié
sous le pseudonyme de Léonard
Gabanon l’ouvrage a connu quelques succès et a
été ré-édité une
première fois
sous le titre « La désolation des entrepreneurs
modernes du Temple de
Jérusalem, ou le nouveau Catéchisme des
francs-maçons, dédié au beau sexe
», en
1744 ( c’est peut être de cette édition
dont il est question ici ). Une
troisième édition plus tardive, en 1748, portait,
cette fois, le titre de «
Nouveau Catéchisme des francs-maçons,
dédié au beau sexe ». On remarquera
surtout l’intérêt de l’auteur
sur le « beau sexe ». Néanmoins, on peut
se
demander jusqu’où va la
crédibilité à accorder à
cette divulgation provenant
d’un auteur plus connu pour ses ouvrages sur la musique et
l’Opéra et dont la
réaction la plus connue fut celle intitulée
« Lettre critique de M. le
Chevalier *** à l’auteur du Catéchisme
des francs-maçons, avec un brevet de
calotte accordé en faveur de tous les
zélés membre de leur
société » publié
à
Tyr par Marcel Louveteau, rue de l’Echelle, à
l’Etoile Flamboyante avec
privilège du Roi Hiram. Les noms, les trois points du
Chevalier et les lieux ne
manqueront pas d’interpeller. Cela ne vient
néanmoins pas en contradiction avec
la mention faite dans l’ouvrage sur l’alphabet
maçonnique.
Ce
« catéchisme », est cité par
Edmond Mazet comme étant la plus ancienne mention
connue de ce type d’alphabet en maçonnerie ce qui
cependant n'apparaît pas
comme certain. En effet, d’autres sources
précisent que la plus ancienne
divulgation est celle du « Sceau Rompu »
publié en 1745, de même on remarquera
que les Statuts « Schaw », depuis le
XVIème siècle, portaient
déjà mention de
chiffres et de marques. Edmond Mazet souligne néanmoins que
l’édition du «
catéchisme » de 1744 ne contient aucune mention
d’alphabet maçonnique alors que
l’édition postérieure du même
ouvrage, publié en 1783, postérieure au
« sceau
rompu » y fait référence. Seule une
consultation des manuscrits en cause
permettrait de départager les différentes
positions.
2.
Le deuxième point présente différentes
formes d'alphabets maçonniques qualifiées
de « variantes » avec notamment l'apparition de la
Croix de Saint André pour le
cryptage de certaines lettres.
3.
Les troisième, quatrième et cinquième
parties sont quant à elles axées sur les
cas plus particulier de l'utilisation des alphabets
maçonniques dans les grades
de maîtres ( par la présentation du cartouche se
trouvant sur le tableau de
loge de ce grade ) et de Maître Maçon de Marque (
en illustrant son propos avec
un jeton de présence où les lettres
maçonniques sont qualifiées de «
chiffres »
reprenant ainsi l’ancienne appellation de
l’alphabet maçonnique ainsi que celle
utilisée dans l’ « Arche Royale
» Américain.
Au
3ème degré, le cartouche qui se trouve
intégré au tableau de loge présente la
particularité d’inverser les lettres et les
chiffres, comme le montre
l’illustration suivante. En fait, il ne s’agit pas
de l’inversion du cartouche
mais bien de l’inversion, en miroir, de la clef de codage
initiale des lettres
comme le montre ce tableau
Cypher
Inscriptions on Harris-type
Third Degree Boards. [p.202,
AQC vol. lxxv,
1962]. Cf.: Edward Somerset,
Cité dans « Some thoughts
on the history of The
Tracing Boards”, Presented at the Vancouver Grand Masonic
Day, October 16, 1999
by Bro. Mark S. Dwor, Centennial-King George Lodge No. 171. Site
internet de la
“Grand Lodge of
British Columbia and
Yukon”)
En
ce qui concerne l’usage de l’alphabet
maçonnique par les Maîtres Maçons de
Marque, l’illustration qui en est donnée dans
l’article ne s’appuie pas sur le
Tableau de Loge dans lequel ne figure pas d’inscription
chiffrée mais la clef
du chiffre, au dessus de la porte, de chaque coté de la
pierre de faîte.
L’illustration
de cet alphabet, reprise par Edmond Mazet repose sur
l’inscription portée sur
les jetons de Marque tel que ceux reproduits ici pour
l’exemple :
Les
jetons de Marque étant dépendant de la Loge et de
la Province qui les utilise,
il est assez difficile d’en trouver de semblables et
c’est la raison pour
laquelle il est aussi assez compliqué d’entrer ici
dans une analyse des choix
scripturaux porté sur ces jetons. Néanmoins, on
peut dire que les inscriptions
portées sur quelques pièces, au delà
des initiales habituelles et systématiques,
HTWSSTKS, sont chiffrées et se rapportent
à :
-
JOPPA
-
Keb Raioth
et,
le plus souvent : MARK WELL qui signifie « Marque Bien
»
En
conclusion, l'auteur présente ses opinions plus personnelles
sur l’origine et
l'existence des différents systèmes d'alphabets
maçonniques.
Plutôt
que de reprendre les différents points de l'article, je vous
propose quelques
éléments sur les alphabets maçonniques.
La
forme première, la plus ancienne mentionnée,
d'alphabet maçonnique repose sur
l'utilisation d'un carré de 9 cases tel que celui
utilisé pour réaliser des
carrés magiques à la différence que
celui-ci ne présente aucun encadrement
extérieur.
Le
carré magique consiste une égale
quantité de colonnes et de lignes que l’on
appelle « ordre » et contenant des nombres
répartis dans les différentes cases
de manière à ce que la somme des chiffres de
chaque ligne soit égale à la somme
des chiffres de chaque colonne et de chaque diagonale. Ainsi, le
carré de 3x3
conduit au chiffre 15.
Le
principe soutenant le carré magique a pu aussi
être utilisée avec des lettres
latines, voir par exemple le carré SATOR (Sator, Arepo,
Tenet, Opera, Rotas
...)
ou
bien avec des lettres hébraïques de 1 à
9 grâce à leur double signification de
lettres et de chiffres.
Ces
carrés magiques ont été
utilisés par les érudits chinois et arabes, puis,
au
Moyen âge, et pendant la Renaissance par les cabalistes juifs
et les
hermétistes chrétiens.
La
référence à des
décompositions géométriques de figures
en vue de constituer des
grilles de codages de lettres, ancêtres de la cryptographie,
apparaît assez
ancienne. Certains restent d’usage comme celui dit des
« Templiers » ou, selon
Maurice Guingamp , « Alchimique ». Il est
formé à partir du dessin d’une croix
de Malte inscrite dans un octogone. Son usage permet à la
fois de coder
l’alphabet, mais il offre aussi une transcription possible
des lettres en
chiffres. C’est sur la base de cette construction
élémentaire que sont
construites certaines marques de bâtisseurs et certains
sceaux aux alentours du
13ème siècle.
Cette
première étude nous amène à
deux conclusions ; d’une part, il apparaît que
l’usage des alphabets maçonnique puisse
être étudié comme une sorte de
référence aux bâtisseurs, comme celle
des « anciens devoirs ». Dans ce cas,
utiliser des formes graphiques proches des marques
relèverait d’une possible
revendication d’origine « opérative
». La systématisation de ce type
d’alphabets et de marques dans les grades d’
« Homme de Marque » et de «
Maître
Maçon de Marque » ne contre dit pas cette option.
D’autre part, il semble que
la construction d'un code de lettres grâce à un
carré de 3x3 ne soit pas propre
à la maçonnerie mais s'inscrive dans une
démarche plus globale d'élaboration
des modes de cryptages et des communications. Ainsi,
Cornélius Agrippa dans son
ouvrage intitulé « La philosophie Occulte
» de 1530 présente deux systèmes de
cryptage :
l'agrégation
de lettres d'un mot entre elles de manière à
former un symbole
le
système de tableau à 9 cases, ce qui
constituerait la plus ancienne mention de
ce système .
Ce
fut cependant Giovanni Baptista della Porta de Naples qui donna ses
lettres de
noblesse à la codification des lettres avec une
répartition particulière de
lettres dans des cases à la même époque
qu’Agrippa. Son système est une forme
de cryptage qui sera couramment utilisée dans les relations
diplomatiques à
partir de cette époque.
Au
sein de chaque groupe, chaque première lettre reprend la
forme du fragment de
tableau décomposé puis les secondes sont
signalées par un point ajouté dans les
angles et les trois autres par deux points. La répartition
entre les lettres
pouvait varier selon le système de codage initial.
Maintenant
que nous avons replacé un cadre global, revenons
à notre alphabet maçonnique et
en particulier à celles mises en avant dans l'article de
Renaissance
Traditionnelle.
Les
alphabets maçonniques y sont décrits comme des
systèmes permettant de
communiquer sans mots, en utilisant des outils maçonniques,
par exemple avec
une équerre, deux règles de 24 pouces et un
maillet pour les points ou
avec deux équerres et un maillet . C’est ainsi que
le figure la version de
l’alphabet contenue dans le « Sceau rompu
» de 1745 :
Grâce
au système de ponctuation, simple et double, les 22 lettres
sont réparties et 4
sont absentes j, k, v, w. Ceci indique que ce type d'alphabet
s’adaptait
au latin et, par voie de conséquences, au
français écrit du 17ème et
18ème
siècle avec les équivalences « u
» pour « v » et « i »
pour « j ».
La
répartition des lettres peut apparaître
arbitraire, mais une analyse
approfondie montre que ce n'est pas le cas. Ainsi, en reliant les
lettres entre
elles, différentes figurent
géométriques apparaissent.
Soit
les lettres sont reliées dans l'ordre
alphabétique ( abc, def, ghi, lmn, opq,
....), alors apparaissent des triangles isocèles, rectangle,
rectangle et
isocèle , une ligne droite, un point au centre de la grille
( source : article
du « cahier d’histoire maçonnique
», n°41 )
Soit
les lettres sont
reliées, toujours dans l'ordre alphabétique, mais
en utilisant la ponctuation,
ce qui donne ( abe, fcd, gil ...). Cela conduit à faire
apparaitre d'autres
figurent géométriques : triangles rectangles,
carré, mais pas de points ou de
lignes.
Ainsi,
on peut constater que le système à double
ponctuation présenté dans le sceau
rompu privilégie les triangles rectangles et plus
particulièrement isocèles.
L'autre
modèle de cryptage est celui qui utilise la croix de Saint
André.
L'apparition
de cette structure en « croix de Saint-André
» dans les alphabets maçonniques
apparaît dans l' « anti-maçon
» de 1748. Le Rev. N.B. Cryer, dans son ouvrage «
L’Arche et l’Arc-en-ciel », cite,
à ce sujet, la mention inscrite par Laurence
Dermott ( 1720-1791 ), qui fut secrétaire de la Grande Loge
des « Ancients »,
dans un registre du Grand Chapitre de la Sainte Arche Royale, d'un
alphabet
maçonnique reproduisant non seulement la grille mais aussi
la Croix de Saint
André.
Les
modes de répartition des lettres peuvent être
variables, comme l'illustrent les
deux alphabets publiés respectivement dans l' « anti-maçon
» de 1748
et le « maçon
démasqué » de 1751:
Au
19ème siècle, le Dr Oliver ( cité, lui
aussi par N.B. Cryer et présenté sur le
site de la « Grand Lodge of British Columbia et and
Yukon » )
a identifié 6 formes d'alphabets utilisant à la
fois la grille et la croix :
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