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L'Ordre de
l'Annonciade Beaucoup
d'ordres de
chevaliers ont brillé au Moyen-Age. Parmi ceux-ci, l'ordre
du Collier de Savoie
est sans contredit un des plus nobles et des plus anciens qui soit
arrivéjusqu'à
nous. Il est connu sous le nom de l'Annonciade, vieux mot qui se disait
pour
Annonciation, en souvenir du message de l'ange Gabriel à la
Vierge Marie pour
lui annoncer le mystère de l'incarnation. La fête
de l'Annonciation, comme
celle de l'ordre de l'Annonciade, se célèbre le
25 mars. LA FONDATION DE L'ORDRE Il est admis
que l'ordre du Collier de
Savoie a été fondé par
Amédée VI, dit le Comte Vert, en 1362,
à l'occasion de la guerre contre le
marquis rebelle de Saluces, Frédéric Il. Le premier chroniqueur savoisien, Jean d'Orville, dit Cabaret, qui termine en 1419 sa Chronique de Savoie, écrite par ordre du duc Amédée VIII, nous en donne une brève relation et précise la fondation d'un monastère à Pierre-Castel en Bugey, où quinze chartreux devraient dire la messe tous les jours en l'honneur de quinze allégresses de la Sainte Vierge et pour le salut des quinze chevaliers. La Chartreuse
est
achevée en 1392. Quant à Jean Servion, dans une
brève allusion de la Chronique
de l'abbaye d'Hautecombe, achevée en 1466, il
prétend qu'Amédée aurait
créé
l'ordre pour éviter le désœuvrement et
l'ennui, peut-être aussi pour un caprice
profane, tel que donné au Tableau des armoiries (Paris,
1619) : celui d'un
bracelet d'amour appartenant à une noble dame,
rencontrée par hasard. Plus certainement, selon l'ouvrage paru à Turin en 1601, "Des principes chrétiens", l'expert en héraldique et en chevalerie, Sansovino, précise que le Comte Vert tenait à honorer ses partisans. Armes
d'Amédée VI
(extrait de l'Armorial de Foras)fondateur de l'Ordre de l'Annonciade Une autre
thèse soutenue
en 1910 par Muratore donne pour origine de l'ordre de l'Annonciade les
préliminaires de l'expédition du jeune
Amédée VI en Orient, croisade
générale
contre les Turcs, proclamée par le pape Urbain V en Avignon
(1363). Le
promoteur de la sainte entreprise, Pierre 1er de
Lusignan, roi de
Chypre, parvient à convaincre le chef du Comité
de Savoie de la nécessité d'un
concours unanime et sincère. Pour assembler autour de lui
les puissants
seigneurs des terres transalpines et des confins des états,
pour en faire ses
dévoués compagnons, pour les unir en un commun
sentiment de justice, de courage
et de piété, il est fondé un ordre de
chevalerie. Parmi les devoirs communs qui
unissent les chevaliers, en souvenir des ordres glorieux de
l'âge d'or des
Croisades, se trouve celui de défendre la cause du Christ. Le Comte Vert
désire
aussi, en créant un ordre, égaler les souverains,
ses pairs par la noblesse,
mais supérieurs par la puissance. Enfin, raison politique,
destinée à
concentrer les meilleures énergies individuelles des
seigneurs, trop souvent
récalcitrants, et à les faire servir, sans effort
apparent, à la défense et à
l'armement du trône. Les gouvernements monarchiques, partout
affermis, sont
portés, au XVème siècle, à
la centralisation. Ainsi, le 23
janvier
1364, Amédée reçoit des mains papales
la Croix rouge d'outremer. Suivant les
conseils, l'approbation et la bénédiction du pape
Urbain V, la fondation du
nouvel ordre daterait de ce jour. LES
INSIGNES DE L'ORDRE A l'appel lancé par le
comte, de
nombreux seigneurs sont accourus, prêts à
obéir à ses désirs. Il en choisit
quatorze, les plus hardis, les plus forts, les plus fidèles.
Il les nomme
compagnons et frères, et, pour leur donner une haute
attestation de son
affection, de sa main, il leur met autour du cou le collier portant le
noble insigne,
qui, dans sa simplicité, devait dire toujours quels liens
uniraient jusqu'à la
mort les nouveaux chevaliers. Un collier d'argent doré,
formé d'une large lame
plate, fermée à l'extrémité
par une boucle à laquelle est suspendu l'emblème
préféré du comte. Cet insigne est
composé d'un anneau, ou cordon circulaire,
formant sur lui-même trois nœuds ou lacs d'amour. Le lacs
d'amour, ou
lacet, est au Moyen-Age, de même que les deux mains
entrelacées que l'on voit
souvent en héraldique, le symbole d'une amitié
indissoluble, de la foi jurée.
C'est, au fond, un nœud desserré et
stylisé tel que, lorsqu'on le tire des deux
bouts, se resserre toujours plus, et, toujours plus, forme un
nœud indénouable
(fig, 1). Pour qui connaît le Moyen-Age, l'esprit mystique et
symbolique de
cette époque, les trois lacs d'amour sont l'insigne de la
Trinité, disposé en
cercle, anneau sans solution, symbole de
l'éternité. Quinze colliers
sont
confectionnés en Avignon, où Antoine Maillet,
majordome, inscrit dans son
compte le prix de ces colliers, soit 282 florins d'or. Le nom de
collier est
conservé, afin de marquer la noblesse de l'ordre,
supérieure à celle de la
croix ou de l'éperon. Quinze, puisque sont les
mystères du Rosaire, composé en
l'honneur de la Très Sainte Vierge, sous la protection de
laquelle l'ordre est
placé. · Amédée VI, comte de Savoie · Gaspard de Montmayeur · Etienne, bâtard de la Baume · Aymon de Genève-Anthon · Guillaume de Grandson · Jean de Vienne · Hugues de Châlons · Guillaume de Chalamont · Aymon Bonnivard · Berlion de Foras · Roland de Vayasy · Richard Musard, chevalier d'Angleterre · François de Monthou, dit Chivard · Simon de Saint-Amour, gouverneur de Bresse. A tous, leur
devoir est
d'être nobles et profondément religieux, de
veiller au bien, à l'honneur et à
la prospérité du Souverain et de l'ordre, de la
favoriser, de lui aider, de
s'en remettre à son avis et à celui des autres
pour toute difficulté,
d'observer les statuts établis, de porter toujours le
collier, de n'accepter
aucun autre insigne chevaleresque, de s'entraider les uns les autres,
et de
défendre leur honneur, leur situation personnelle et leurs
biens envers et
contre tous. Tous ces
chevaliers
portent le collier, dont celui du Comte Vert, longtemps
abrité, selon
Guichenon, dans le trésor de la sacristie de l'abbaye
d'Hautecombe, a été
détruit à la Révolution, lors du sac
des reliques : "Ce collier est de vermeil
bien doré, large de trois doigts, avec les lettres
FERT, et, pendant, les
trois lacs d'amour en rond." Ce collier est "peint
en teste
des Statuts de l'ordre faits parle duc Amédée
VIII, dont l'original en
parchemin est en l'archive de S.A.R. à Turin". Le collier
ordinaire,
formé d'un gros cordon en fils dorés et
tressés, est porté journellement par
les titulaires. Claude de Seyssel se servait d'une chaîne.
Aujourd'hui,
l'insigne se suspend à une chaînette et se porte
en sautoir. En temps
ordinaire, il se met, à la boutonnière avec un
ruban bleu clair. LA
DEVISE DE L'ORDRE Les lettres FERT placées
sur la
décoration sont la devise de l'ordre. Bien que tant
d'explications en aient été données,
il semble que le mot soit antérieur à ce
mémorable événement qu'est la
création de cette chevalerie. Le FERT se
trouve dans
le centre de l'insigne. Il est parfois remplacé par la rose,
fleur de la Vierge
par excellence. Cette fleur apparaît, pour la
première fois, sur le collier en
tête des Statuts d'Amédée VII (fig. 2).
A la fin du XVe siècle, les roses sont
introduites définitive ment dans le collier, en témoignage de la dévotion au Rosaire, qui se répand partout à cette époque en Europe, grâce à l'impulsion donnée par Alain de la Roche (+ 1475), fondateur de la confrérie. Or, dans le Rosaire, on médite les quinze mystères dont le premier est "I’Annonce". Insigne de l'Ordre avec sa devise Le FERT
primitif a été
interprété "Fortiotudo ejus Rhodum
tenuit'(son courage a sauvé
Rhodes). L'auteur Favyn l'a interprété "FRAPPEZ,
ENTREZ, ROMPEZ
TOUT". Certains auteurs s'en tiennent à l'explication la
plus simple,
c'est-à-dire la troisième personne du singulier
du verbe latin ferre (porter)
et qui se dit Fert, ou usage de porter sur les armes le nœud
d'amour préféré.
D'autres le traduisent comme le cri de guerre Savoye, ce qui semble peu
possible. Enfin, la préface des statuts de l'ordre de 1409
interprète le Fert
comme la foi jurée à Marie (Fert vincula fidei),
vénérée alors dans les
sanctuaires de Turin, de Lausanne et de Bourg-en-Bresse. C'est, en tous
cas,
cette image de Marie qui orne le gonfanon de l'ordre,
bannière, de riche
taffetas bleu d'azur semé d'étoiles d'or,
toujours au premier rang contre les ennemis
du monde chrétien. En conclusion,
nous
voyons que la fondation de l'ordre du Collier de Savoie trouve son
origine
parmi des raisons naturelles politiques, mais aussi dans l'esprit
religieux et
l'enthousiasme d'une noble cause. D'autres temps
vinrent :
réorganisé le 3 juin 1859 par le roi Victor
Emmanuel II, il est réservé aux
souverains et aux grands personnages. L'ordre a cinq officiers : · le secrétaire, qui est toujours le ministre des Affaires étrangères, · un aumônier, qui est celui du roi, - un trésorier, · et un héraut d'armes, qui est toujours un maréchal ou un officier général. Le souffle
idéal de son
origine, né d'un serment de Croisade, l'ordre le
reçut dans la personne de son
chef et de ses compagnons, dans un baptême de gloire et de
sang. R. BOUVET |
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