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La
modération des Passions
Le dictionnaire nous donne l’explication suivante : passion, du latin passio : souffrir. Mouvement violent, impétueux de l’être vers ce qu’il désire. Autrement dit la passion désigne les phénomènes ou la volonté est passive par rapport aux impulsions du corps et l’inclination violente vers un objet. Cet état affectif durable pour la plupart des passionnés provoque des déséquilibres psychologiques. Est-ce une impulsion incontrôlable empêchant toutes actions naturelles du comportement humain ? Est-ce un état d’inconscience ? Ou d’égarement involontaire que subit le passionné pour le sujet qui l’obsède et le détourne de sa vraie vie en l’entrainant dans la servitude de cette émotion qu’est la passion. Si c’est un égarement involontaire, il faut souhaiter que cette passion ne soit que passagère et que ce dernier retrouve le contrôle de ses pulsions. Mais s’il s’agit d’un état d’inconscience, combien de temps cela dure t-il ? Je n’ai pas la réponse affirmative à donner ; chacun de nous étant unique… Au moyen âge les passions étaient interdites, l’église considérait qu’elles empêchaient d’accéder à la sagesse. Mais elle freinait également tout dynamisme passionnel qui permettait l’avancée de l’humanité. L’action peut elle exister sans le dynamisme passionnel de l’homme ? Pour les stoïciens, la passion est une perversion de la raison, un égarement du jugement qui écarte du devoir naturel. Cicéron affirme « la passion est un ébranlement de l’âme opposé à la droite raison et contre nature ». Kant précise que « l’inclination à une passion » est un manque de maitrise de l’âme qui subit l’impulsion du corps. Descartes, nomme les passions comme telles : « toutes les pensées qui sont excitées dans l’âme sans le secours de la volonté et par conséquent sans aucune action qui viennent d’elle par les seules impressions qui sont dans le cerveau. Car tout ce qui n’est pas action est passion. » La plus fondamentale selon Descartes est l’admiration. Benjamin Franklin cite que deux passions ont marquées les actions humaines : l’amour du pouvoir et l’amour de l’argent. On sait avec les derniers événements qui ébranlèrent la planète que le pouvoir de l’argent est le plus dévastateur et le plus puissant en combinant les deux ! Ce dernier, l’argent a deux effets possibles, soit la personne, par attirance de confort et de réussite sociale sera économe et pragmatique dans ses placements financiers. Ou par amour immodéré de l’argent tombe dans l’effet pervers et sera un avare, dont Molière nous a laissé une belle caricature. Spinoza, décrit la passion comme une idée confuse essentiellement imaginaire et souvent abstraite par laquelle l’esprit affirme une augmentation ou une diminution de la force d’exister de son corps. Dans son explication Spinoza nous démontre clairement la servitude qu’exerce une passion sur le passionné. Hegel, explique que c’est une tendance puissante qui pousse un individu ou un peuple à unifier toutes ses énergies spirituelles et physiques pour créer une œuvre artistique ,technique ou politique unique, originale et déterminante dans le cour de l’histoire. Nous disons que rien ne s’est réalisé sans être soutenu par l’intérêt de ceux qui y ont collaborés. Cet intérêt se nomme passion, lorsque refoulant tous intérêts ou buts appartenant à l’individualité, il se projette sur un objectif avec toutes les fibres intérieures de sa volonté et concentre dans ce but son énergie et ses besoins. Les exemples sont nombreux dans ce domaine : l’édification des temples religieux aux quatre coins du globe à différentes époques nous montre la vénération que nous éprouvons pour le créateur sans aucune certitude d’affirmation. Et la lutte incessante que ce livrent les fanatiques politiques, ou les intégristes religieux en est une autre, en cherchant à imposer leur vérité de l’existence qu’ils vivent avec passion. Autrement dit sans tolérance pour qui pense différemment. Le passionné n’a de cesse d’imposé sa raison, sa raison qui n’en est plus une puisqu’il affirme sans accepter la controverse. Je m’arrête là pour les citations des philosophes. Elles sont trop nombreuses pour être énumérées Quelles sont ces passions qui peuvent nous affecter ? La passion amoureuse La plus connue est la passion amoureuse qui rapproche deux êtres. L’amour est un sentiment naturel, c’est un élan du cœur. Mais l’amour passionnel transforme cet élan en désir de possession exclusive de l’être aimé, où la seule évocation de son visage provoque le désir et tourmente le passionné. Cette passion amène la jalousie. Terrible dérive qui transforme l’être aimé en objet personnel qui n’appartient qu’au passionné. Comme un enfant capricieux qui ne prête pas ses jouets et préfère les casser. Il en est de même pour cette passion qui pousse certains individus malgré eux jusqu’à l’irréparable, le meurtre !... Le cinéaste Georges Clouzot, dans son dernier film inachevé, L’ENFER, nous décrit le calvaire d’un homme follement amoureux de sa femme et hyper jaloux. La passion exacerbée de cet homme est révélatrice du dérèglement qu’elle provoque chez le passionné qui ira jusqu'à l’irréparable, nous prouvant ainsi le dérèglement des sens du passionné qui devient une victime de ce qu’il croit être légitime à ses yeux. La passion est une émotion passive par le fait qu’elle envahit la totalité du moi. Dans la passion amoureuse notamment, la possession est une joie de posséder l’objet du désir vénéré, si elle est continue ! Mais si elle est incertaine, et c’est toujours le cas pour la passion amoureuse, nait la jalousie. Manque de confiance en soi et de la perte de l’être aimé, de là vient la peur qui engendre la tristesse et le désespoir. Et lorsque tout est perdu, l’impuissance de retrouver ce qui est terminé est vécu comme un arrachement de soi. Apparaît alors l’abattement qui peut précéder en certains cas la violence meurtrière. Ce qui devient un crime passionnel. Le droit pénal est d’ailleurs plus clément pour le crime passionnel à qui l’on trouve des circonstances atténuantes, alors que le crime prémédité froidement n’en bénéficie pas. Tout simplement parce que le passionné ne s’appartient plus. Il subit sa passion. C’est une maladie en ce cas. Pathos en grecque se traduit par maladie, ce qui nous donne par extension : pathologie ! Et certaines de ces passions la nécessitent lorsque le passionné réalise l’emprise qu’ ’exerce sa passion sur son comportement, si toutefois la volonté apparaît dans un sursaut de lucidité de ce dernier! Telle la suivante ! La passion du jeu Nous connaissons la passion du jeu, terrible passion ou le joueur ne s’appartient plus. Rongé par son mal, il ne prend plus aucun plaisir si ce n’est que celui de jouer ! Gagner, lui permet de rejouer, l’appât du gain n’est pas le but réellement recherché ! Seule l’adrénaline du joueur lui donne du plaisir. Plaisir qui peut se révéler sadique envers un autre joueur perdant ou le gagnant se montre en dominateur. Mais aussi plaisir qui le détruit comme une drogue en le transformant comme une loque. Jouer est un plaisir, mais, hélas, le plaisir ne dure pas. Il se doit donc de renouveler ce plaisir au plus vite tout comme le débauché qui n’a pas de limite dans ses plaisirs, et qui en demande toujours plus. Tel un toxicomane qui se sature vite de sa dose journalière et réclamera davantage jusqu’à la déchéance totale qui peut le conduire à la mort ! D’après certaines statistiques, en ce qui concerne cette passion vingt pour cent de ces joueurs se suicident. L’isolement dans leur passion, l’endettement et le manque de dialogues pour exprimer leur détresse les poussent à cet acte. Il existe également une autre passion capable de provoquer la fascination pour une autre personne : L’adulation artistique La passion pour un artiste. Etre en admiration devant une personne si ce n’est pas de la passion, qu’est-ce ? Cette admiration qui est une vénération ne supporte pas la moindre critique sans provoquer le mépris ou la colère du passionné nommé communément un fan, abréviation de fanatique. Ce qui en dit long sur le dérèglement psychique subit par le passionné. En certains cas, celui-ci s’identifie à l’artiste vénère, ne vivant qu’à travers la vie de ce dernier. Ses joies et ses peines sont les sienne. Il se dépersonnalise au profit de cette chimère qui l’empêche d’être soi. Il existe également une autre passion qui, elle ; est bien le fruit de notre société moderne. La passion matérialiste. La passion matérialiste, dont malheureusement nous sommes tous témoins et victimes. La société de consommation dans laquelle nous vivons a su pervertir la jeunesse et bien des adultes par la sophistication de ses artifices et ses gadgets. Ces derniers les menant à se passionner pour les artifices et l’art de paraître, en créant la notion de besoin de posséder tel ou tel objet venant de la téléphonie, de l’informatique, voire du dernier progrès technologique automobile ou autres dont nous vante la société par l’instrumentalisation des médias. Ou bien même de se vêtir de vêtements de marque qui donnent l’illusion d’appartenir à un groupe et d’exister. Si tel en est vraiment la nécessité pour donner une apparence de soi pour trouver l’équilibre ; c’est bien triste ! Car c’est une perversion qui n’a pas de limites, il n’y a que l’acquisition de l’éphémère à renouveler sans cesse ses produits, provoquant bien des dégâts dans la vie de certaines personnes victimes de ses mirages qui ne rendent pas plus heureux. On dit que le sage ne désire que ce qu’il dépend de lui d’atteindre. Attention ! …Ne vous imaginez pas que je réfute la totalité de ce qui nous amène le confort de notre temps ! Loin de là mes pensées ! Je blâme simplement le manque de discernement qui rend esclave ! La technologie doit rendre l’homme plus libre mais il ne doit pas en être son esclave. Il existe d’autres passions. Pour exemples : certains collectionneurs peuvent se transformer en passionné, n’hésitant pas à se ruiner pour l’acquisition de pièces importantes de leur collection au détriment des besoins journaliers de tout un chacun et se gonflant d’orgueil de posséder ce que les autres n’ont pas. Ou en ceux qu’ils considèrent comme profanes à leur passion, ne sont que d’ignares méprisables incapable de comprendre leur passion. Le passionné d’une équipe de sport peut également se transformer en dangereux fanatique aux accès de violences incontrôlables durant l’épreuve sportive en perdant toutes impartialités sur les règles du sport qui sont avant tout de rester fair play et courtois. Les médias nous renvoient régulièrement des images de ces dérèglements de masses qui peuvent en dégouter plus d’un du sport. Et le dénaturant de sa fonction première qui est de participer dans une épreuve en toute fraternité. Comme nous le constatons, la liste des passions est interminable ! Au travers de ces quelques passions qui peuvent affliger certains de nos semblables, j’essai de comprendre ce qui peut les provoquer. Et quels sont les signes distinctifs des passionnés. Le manque de discernement est une caractéristique du passionné qui l’empêche de vivre pleinement sa vie. Le passionné ne vit que pour sa passion, au travers d’elle et elle est sa seule raison d’être. Désir sans passion ou passion sans désir ? La passion est la tension extrême du désir sans concession. C’est le caractère exclusif du désir qui donne naissance de la passion. La passion refuse tout compromis. Le passionné est un écorché vif. La passion entraine une perte de contrôle de nos réactions exacerbé par cette dernière qui est une exigence fantasmé du désir de possession exclusive sans partage. Spinoza explique qu’il est possible de les maitriser en leurs opposants des affects actifs relevant d’une force d’âme véritable telle que la fermeté ou le courage, la générosité et l’acquiescement intérieur qui naissent de la joie de comprendre les causes de nos déterminations et notamment de nos passions. Je prends cela pour un conseil, mais toutefois je note qu’il s’adresse à des personnes d’un caractère possédant une grande maitrise de ses impulsions. Ce qui rapproche de l’enseignement du bouddhisme pour accéder au nirvana en ôtant tous désirs et passions de son âme ! Comment modérer ces satanées passions ! Voila bien le problème ! Mais avant de les modérer il serait bon de se demander si elles sont réellement néfastes à notre évolution .Existent-ils des passions positives ? Est-il possible d’imaginer de grandes réalisations humaines sans la passion ? J’en doute ! Hegel affirme que rien de grand ne s’est accompli dans ce monde sans passions ! En prenant garde précise t-il de discerner les intentions égoïstes au profit desquelles le passionné sacrifie tout le reste.Est-il possible d’imaginer des scientifiques tel que Pasteur ou Pierre et Marie Curie, travailler sans passions ! Mozart,… sans passion de la musique, ou Beethoven, qui passait pour un impatient colérique passionné La passion sincère collabore au développement de l’humanité lorsque ses desseins se tournent vers l’amour et le progrès de cette dernière. Même si la passion est bien souvent éloignée de la raison, elle participe au développement de l’homme en perfectionnant la raison par son activité dynamique qui lui est personnelle. Car on se tourne davantage vers la passion qui est bien plus proche de nous que ne l’est la raison. La raison est tempérance et modération tandis que la passion se vit comme un excès. Illusoire, certes ! Dans sa satisfaction éphémère mais néanmoins nécessaire car elle permet de transformer le réel. Car si en apparence le passionné sincère vit dans l’illusion aux regards des autres, qui sont dans un état statique par les fait établit, le passionné contribue à l’avènement de la raison ! Einstein disait : Celui qui vit avec l’imagination va toujours plus loin que celui qui se limite à la rigueur (Galilée et bien d’autres dans son cas ne pouvaient être que passionné !) Bossuet, dans son Traité de dieu et de la connaissance de soi meme, mélange sous le titre de passions les inclinations et les émotions qui d’après lui sont aux nombres de onze, dont dix qui s’opposent deux à deux dans cet ordre L’Amour et la Haine / Le Désir et l’Aversion / La Joie et la Tristesse / L’Audace et la Crainte / L’Espérance et le Désespoir / enfin la colère. Toutes peuvent selon Bossuet se ramener à l’amour et la haine. Et la haine d’un objet n’étant que l’amour de son contraire. Il n’y a qu’une seule passion pour lui : l’amour et ce pour moteur essentiel de l’existence et de la naissance de toutes ces émotions pour trouver le bien être. Car c’est peut être la recherche d’un bonheur constant qui poussent certaines personnes dans cette recherche ; par des abstractions éphémères que sont les passions. Les éloignant de la vraie vie pour fuir la tristesse et la misère d’une existence qui n’a pas trouvée sa raison d’être. En fait nous ne cherchons à connaître parce que nous désirons jouir. La jouissance apparaît toujours comme une promesse de plénitude, même si nous savons quelle est éphémère. Pour que nos passions restent constructives, nous devons conserver des réflexions rationnelles de conduites sans excès de raison, qui pourraient freiner ces élans du cœur. Si nous sommes capables de conserver l’intégrité de nos pensées sans l’influence de l’extérieur. Alors les seules passions qui méritent d’être entreprise sont celles qui dépendent de nous, de l’intériorité de notre conscience, et de notre volonté désirée. Acceptons ce que notre volonté ne peut atteindre et prenons cette citation de l’empereur Marc Aurèle comme maxime : Abstient
toi et supportes.
En conclusion je vous suggère une de mes réflexions « Vivons la vie comme seule
passion
raisonnable qui mérite d’être
savourée »
J’ai dit ! P\ P\ |
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