Obédience : NC Loge : NC 15/05/2012


La Philanthropie maçonnique

A Caen, on voit le V\M\ protestant, d’Union et Fraternité, P\L\D\V\, agir régulièrement avec le curé de la Paroisse Saint Langrune, l’abbé Lemonnier, de conserve pour la philanthropie.

A cette époque (milieu et fin du 18éme siècle), le parvis du Temple est perçu par les pauvres et nécessiteux, comme le parvis de l’Eglise. Il semble que les F\ F\ F\ M\ M\ travaillent ensemble, avec les Prêtres, pour soulager la misère du peuple ; il n’y a pas d’opposition entre l’Eglise et la Loge, du moins sur le terrain, ni concurrence d’ailleurs. Il y a complémentarité !

Au Havre, il y a doublon entre les confréries charitables et les FF\ MM\ (1780), on appartient aux deux sans problèmes de conscience. Le but des deux étant de soulager la misère des pauvres.

On trouve la même concentration de FF\ MM\ dans les confréries religieuses à Bernay et à Pont-Audemer, cette loge comptant 85 FF\, dont une bonne moitié participe aux travaux des confréries. La charité religieuse traditionnelle, ne pose pas de problèmes pour nos FF\.

Mais cette appartenance commune, ne détermine pourtant pas l’absence de fracture entre les FF\. Mais bizarrement c’est cette tolérance religieuse qui heurte les FF\. Pour certain, être maçon et faire partie d’une confrérie religieuse charitable, est inconcevable.

On n’élimine pas facilement des habitudes sociales pour ne pas dire de classe, comme cela, mais il faut noter qu’il n’y a pas encore de conflit réel entre l’Eglise et les Maçons. Notons que des Prêtres, comme des Moines et des Pasteurs travaillent sur les colonnes, et ce fait est accepté par les autres FF\.

Cela m’amène à penser qu’une partie du travail en Loge, devait être l’organisation de la philanthropie active et pratique dans l’Orient concerné.

L’alliance avec l’Eglise catholique, dans la gestion de la pauvreté, aurait pu durer malgré la Révolution, et même se poursuivre sous l’Empire, mais il y a eu divorce, à cause des écrits antimaçonniques de l’abbé Barruel, et les F\ F\, vivant d’une manière plus rationnelle, le siècle des Lumières.

On le voit ce n’est pas la F\ M\ qui déclencha les hostilités, mai les pamphlets antimaçonniques d’un certain clergé.

En un mot, on peut dire que cette séparation annonce les premiers pas de la laïcité. Paradoxe, ce divorce avec l’Eglise catholique a mis en valeur les églises protestantes.

A Caen, la Constante Amitié, confie le premier maillet au pasteur J\S\ S\, en 1804, puis intègre sur ces colonnes un ministre de culte anglican, Mr NEALE.

Je constate que les situations ne sont pas aussi tranchées et bien délimitées, que certains veulent bien l’affirmer, comme toujours la vie est beaucoup plus riche et complexe, que les désirs humains.

Il me semble que la F\M\ de cette époque soit toujours à la recherche d’une spiritualité religieuse (au sens étymologique).

La Maçonnerie normande préfère s’occuper d’œuvre locale plutôt que de prendre part aux œuvres générales du GODF.

Les F\ F\ normands manifestent peu d’enthousiasme pour participer à l’emprunt national de 1787 lancé par le GO pour la construction de quatre hôpitaux.

Mais le choix des Normands, en matière de charité locale, est encore bien arrimé à la charité chrétienne.

Il faut dire que dans les Loges normandes, il y a une forte proportion de curés - ceci expliquant cela.

Mais les temps vont changer, au fil du temps, les FF\ Normands, font descendre « les Lumières », à tout le moins la philosophie et les valeurs des Lumières, dans la vie de tous les jours, en transgressant la barrière sociale des privilèges.

On peut imaginer que nos F\ F\ d’antan, ont pris l’initiative de se faire connaître du monde profane, en dévoilant leurs qualités maçonniques. C’est une hypothèse, qui s’appuie sur le fait que de nombreux curés participaient aux Tenues, donc dans l’esprit des profanes tout cela était logique.

Comme on le sait, les Femmes ne sont pas admises en Loge, mais on n’hésite pas à l’extérieur des Loges, à travailler avec des Femmes sur le terrain caritatif, comme à Pont-Audemer avec Mme de Mursay.

En fait la maçonnerie de cette fin du 18éme siècle passe du cénacle fermé et sélectif au cercle plus ouvert sur le monde profane.

A l’Aigle, au cours de bals donnés à la fin des banquets maçonniques, on ouvre le Temple aux invités profanes.

On constate qu’en Loge on reproduit les activités profanes, en utilisant les compétences professionnelles des F\ F\ ; au Havre au Trois Haches, c’est un restaurateur réputé, le Frère Philippe Sord, qui s’occupe des agapes.

Un doreur le Frère Desjardin décore la Loge avec le tapissier le Frère Nojac.

En fait on utilise au mieux le savoir faire des F\ F\.

On le voit bien, la composition sociale des Loges a évolué, des Nobles nous avons maintenant des artisans. La Révolution a fait son œuvre.

A partir de 1815, la collaboration avec l’Eglise commence à se rétracter, ce qui semble normale si l’on prend en compte le remplacement sur les colonnes des Nobles par de petits bourgeois (les Emigrés de Coblence ne sont pas encore rentrés, quant à ceux qui étaient restés, la guillotine a fait sont œuvre) ces derniers étant plus proche des réalités quotidiennes. Après 1815, on voit émerger une vraie sensibilité aux questions politiques et sociales.

Les F\ F\ comprennent que s’attaquer aux effets de la pauvreté n’est pas suffisant, car les causes ne changent pas.

On prend à cœur, le sort des prisonniers politiques, comme les officiers polonais ou les réfugiés portugais (j’ignore les circonstances de ces moments historiques). C’est le début d’une grande mutation pour la Maçonnerie.

Le Frère Dessaux en 1846 se fait le propagandiste du mouvement en faveur du développement des crèches, puis en 1858, il essaie de convaincre sa Loge de l’utilité des caisses de secours mutuels. En particulier à l’Orient de Rouen.

La Maçonnerie donne, à cette époque en plein dans le social, il est vrai que nous sommes au début de l’industrialisation de notre pays.

Au 18éme siècle, l’activité des loges semble se cantonner dans la pratique littéraire et musicale (je ne trouve pas de trace de planche semblable à celles de nos jours, et j’ignore si dans le collège des Officiers, il y a l’office de secrétaire).

Au milieu du 19éme, le ton change dans les Loges, les MM\ deviennent de plus en plus préoccupés par le social ; mais c’est souvent dû aux initiatives individuelles de F\ F\ novateurs ; comme à Rouen, le Frère Deschamps, grande figure républicaine de cette région.

Dans l’ensemble, l’activité principale des Loges reste le banquet et la bienfaisance. A Caen, la vocation culturelle des F\ F\ qui ont soif de savoir et de connaissance, trouve son accomplissement par l’allumage des feux de la R\ L\ « Les Trinosophes Neustriens » en 1826, dont la vocation savante est clairement affichée. Cette Loge caennaise inonde la Province, de ses sujets de concours aptes à stimuler l’ardeur littéraire des Maçons.

C’est THEMIS qui en 1827 fournira les cadres de la société philharmonique de Caen. On peut dire que c’est l’impact du processus révolutionnaire qui a modifié le comportement des Loges et des Maçons et non l’inverse.

A suivre…

P\ L\


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