La basilique
de Vézelay symboles
« Ce temple
est comme le ciel en toutes ses proportions »
(inscription sur un fragment du temple de Ramsès II)
À toutes les
époques, sur tous les continents, les hommes ont
cherché à exprimer ce qui devenait pour eux, au
fur et à mesure de leur prise de conscience,
l’expérience d’une transcendance. La
contemplation de la voûte étoilée, la
méditation sur le renouvellement constant du temps,
l’attention portée aux ondes concentriques
provoquées par un caillou jeté dans
l’eau…tout va être transcrit par lui en
symbole ayant pour but de rejoindre, d’exprimer le
sacré.
Le
symbole est de tous les temps et de toutes
les religions. Il n’est pas à confondre avec
l’allégorie ni avec le signe.
Dans le chapiteau de la conversion de saint Eustache, le chien est
allégorie de la fidélité ; le geste du
personnage qui, dans une sculpture romane, se tient la tête
dans la main, est le signe qu’il est devant un
mystère qu’il ne comprend pas (cf. Daniel dans la
fosse aux lions). Le symbole est
création ; il est le lieu où l’homme et
Dieu se rejoignent.
Le cercle,
figure parfaite, symbolise Dieu. La voûte
céleste sera donc souvent symbolisée
par une circonférence ou sa transformation en volume, la
sphère ou la demi-coupole.
L’étude
attentive par l’homme du mouvement du soleil, d’Est
en Ouest, de haut en bas, va engendrer un des plus beaux symboles : la
croix, matérialisée par
l’équerre et devenant le carré. Les
premiers attributs du Divin seront l’équerre et le
compas que l’on retrouve dans beaucoup de tracés
sous toutes les latitudes.
La croix,
commune au cercle et au carré, relie ces deux
éléments en plan (longueur et largeur) ou en
élévation (hauteur et profondeur).
« À
l’époque romane, Dieu constitue le climat de
l’existence » (M.-M. Davy).
Toute église
est ordonnée en espace, nombre et proportions.
Espace et symbole
Le premier symbole est l’église,
demeure de Dieu et des hommes, lieu où ils se rejoignent.
L’église romane emprunte pour sa construction tous
les symboles de base; la coupole et la voûte, le
carré ou le cube du transept qui en se
développant forme la croix : « Hauteur, largeur,
longueur et profondeur de l’amour de Dieu » (lettre
de saint Paul aux Éphésiens 3, 18-19).
Le carré symbolise
la terre créée, le chiffre 4, ce qui est
terrestre (4 saisons, 4 éléments, 4 points
cardinaux, 4 Évangiles).
L’autel,
situé le plus souvent sous la voûte à
la croisée du transept, est le centre du cosmos. Il est en
plan ou en élévation le centre où se
rejoignent les quatre directions, ce qui est en haut comme ce qui est
en bas puisqu’il fait aussi communiquer avec le monde des
morts, en l’occurrence à Vézelay, la
crypte où sont gardées les reliques de
Marie-Madeleine.
Nombres et symbole
3,
pour la divinité ; le triangle, figure
indéformable, ne peut être divisé
qu’en triangle. Équilatéral, il dit
Dieu.
4,
chiffre de la terre.
5, le
pentagramme est considéré comme
l’emblème du microcosme; l’homme, jambes
et bras écartés, est inscrit dans un cercle.
L’équerre
parfaite, 3, 4, 5, sert à la construction de tout
édifice.
7
indique la plénitude des temps, achèvement du
monde (le 7è jour, Dieu regarda son œuvre, et il
se reposa de toute l’œuvre qu’il avait
faite, Genèse 2, 3).
8,
octave du premier jour de la création:
résurrection, re-création (cf les 8 grosses
colonnes du chœur.
12, 4
x 3: carré et triangle, le temps du monde est
transcendé par le temps sacré (les
apôtres du tympan sont sculptés en 4 groupes de 3).
144,
12 x 12: les colonnettes du pourtour du chœur indiquent la
multitude des élus.
Sculpture et symbole
Une roue,
avec une croix à l’intérieur, devient
symbole du Christ (cf chapiteau du Moulin mystique). Le nimbe
crucifère permet de reconnaître le
Christ au milieu d’autres personnages (cf petit tympan Nord,
Jésus avec les pèlerins
d’Emmaüs).
Les culs-de-four,
dans lesquels sont présentés la
Nativité ou les pèlerins
d’Emmaüs, aux linteaux des petits tympans Sud et
Nord, indiquent que le ciel est descendu sur la terre; ce que nous
retrouvons dans les textes de liturgie byzantine pour les
fêtes de Noël : « Une grotte
est devenue le ciel ».
La mandorle,
ou amande, est l’interpénétration de
deux circonférences, base de toute épure. Secret
et révélation, elle entoure le corps du Christ et
des saints indiquant à la fois qu’ils sont dans la
lumière et la vision béatifique.
La spirale,
symbole universel d’involution et
d’évolution, de naissance et de mort, de mort et
de renaissance. Reliée au yin-yang, elle
représente l’aspect céleste et
terrestre, féminin et masculin de toute chose. Le levain du
monde est inscrit sur la hanche et le genou du Christ du grand tympan ;
articulations fortes du corps, comparables aux chakras hindous
qualifiés par A. Avalon de tourbillons de matière
éthérique.
L’homme qui
pénètre le monde des symboles est
appelé à se mettre debout pour devenir lui aussi
un temple puisque, microcosme, possédant les mêmes
caractéristiques que le temple, il est
l’intermédiaire entre la création et
Dieu. « La création toute entière
attend la révélation des fils de Dieu »
(lettre de saint Paul aux Romains 8, 19).
Le maître
d’œuvre de l’église de
Vézelay, connaissant tous les symboles et la tradition de la
construction des temples, a confronté cette connaissance
avec sa foi et a fait passer toute son espérance dans le
plan.
Le monde roman connaît
la vérité du monde de Dieu parce qu’il
croit au pouvoir qu’a ce domaine-ci de la création
de renvoyer à l’autre. Il n’est de mal
qu’où le sens est perdu ; lorsque le monde oublie
ce qu’il avait à dire, le témoignage
qu’il devait porter : lorsqu’il est devenu
in-signifiant, ou, pour employer un bien vieux mot,- absurde. (Philippe
Beaussant)
« Vous-mêmes,
comme des pierres vivantes, devenez un édifice spirituel
» (1ère lettre de saint Pierre 2, 5)
O\ V\ - B\ de V\ -
F\ J\-B\ |