Bienvenue...
Compagnons...
"Il
y avait un
homme connu pour tout ce qu'
Il avait oublié en prenant le bateau:
Sa montre, ses bijoux, son parapluie, ses bagues,
Et les hardes acquises en vue du voyage
La perte de ses hardes importait peu, puisqu'En arrivant à bord, il
portait sept vestons
Et trois paires de chaussures; mais le pis est qu'Il avait oublié
totalement son nom."
Lewis Carrol - La
chasse au snark
Quel peut bien
être cet homme et quel genre
de voyage a-t-il entrepris. Est-il bien sûr que ce voyage
soit le bon, celui
pour lequel il n'existe que sa vie ?
Pour quelle route un tel viatique est-il nécessaire qu'il
faille oublier
jusqu'à son nom pour la parcourir ?
Êtes-vous bien sûr de n'avoir rien
oublié en route, de n'avoir pas voulu prétendre
franchir des caps qui n'étaient que l'illusion de bornes sur
la route. Aimez
vous les oranges pour leur aspect ou pour les vitamines invisibles
qu'elles
vous procurent ?
Vous qui en êtes à ramasser les pierres
taillées sur le bord des chemins alors
que vous pensez les tailler vous-même, vous devez
connaître les réponses...
vous devez aussi savoir que peu importe l'arrivée ou le
départ.
Il y a une route... On la prend bien souvent sans savoir ce qu'il en
coûte,
comme on se prend la tête entre les mains ou les pieds dans
le tapis et nos
estimations de sa longueur sont toujours erronées. Comme les
estimations de nos
chagrins, de nos amours, on y va à grand coups de jamais et
de toujours et on
s'arrête en route... Blasés... Certains...
Victorieux... Orgueilleux...
Meurtris... ou, pire, Humbles.., Misérables... Les pires
formes de l'orgueil,
celles de l'exemple, celles de la démonstration, de
l'affirmation, de la bonne
conscience, de la foi en soi, en ce que l'on touche, en ce que l'on
sait, en
oubliant ce que l'on ignore, en parlant du passé
pour justifier l'avenir
ou pour le fustiger. Bref, comme le chien que l'on croise sur la route,
on se
laisse mener par la queue, parce que celle là, au moins, on
est sûr qu'elle
existe....
On croit pouvoir signaler au chef de gare l'heure d'arrivée
du train et lorsque
celui-ci n'est pas à l'heure, c'est qu'il est en retard. En
est-on bien sûr...
Ne s'agit-il pas plutôt d'une illusion, l'horloge est
restée dans nos bagages
comme celle du chasseur de Snark, et nous ne savons plus
très bien dans quelle
gare... Il y en a tellement. Mais, peu importe, seule compte
l'arrivée, du
moins, l'impression de l'arrivée. Les baisers
sucrés du passage des mots.
Alors, on lève les yeux pour prendre à
témoin l'invisible chef de gare et
l'on se rend soudain compte que rien n'est plus beau qu'un ciel sans
étoile,
d'un bleu limpide, très chaud à la
fragilité d'un voile.
On y voit très loin, jusqu'au matin, comme des lignes sur la
peau, c'est un
espace sans fin.
Au début de l'enseignement, tous les étudiants
sont généralement étonnés
de
voir que les récits qu'ils font de leurs
expériences n'éveillent guère de
curiosité chez ceux qui ont déjà
reçu une formation du même ordre. Voire, que
ceux-ci leur demandent de se taire... Pour quoi faire, puisque la
parole crée
des mondes...?
Le plus sain, pour eux, serait certainement de garder le
silence sur ce
qu'ils ont ressenti et de parler uniquement de la
difficulté ou de la
facilité qu'ils éprouvent à pratiquer
les règles de conduite. Non pas face aux
règles elles-mêmes, mais face à la
difficulté que l'on peut ressentir à les
rompre... Qui sommes nous pour détruire le monde ?
Pour juger de nos progrès, celui qui a
déjà subi une formation puise à de
tout
autres sources qu'à ce que les néophytes disent
d'eux mêmes. En fait, dans la
plupart des cas, celui-ci apprend de celui-là, mais, cela a
toujours pour
résultat de nous durcir alors que nous devrions rester
essentiellement souples
et flexibles.
La vie ne serait-elle pas un long fleuve tranquille ?
Un exemple: supposons que j'apprenne une nouvelle et
qu'aussitôt, je ne forge
un jugement, une opinion à ce sujet. Si, peu de temps
après, j'apprends sur le
même événement d'autres nouvelles qui
contredisent la première, me voici forcé
de modifier mon jugement. La chose eût
été tout autre Si je m'étais tu,
intérieurement dans mes pensées,
extérieurement dans mes paroles, jusqu'à ce
que je fusse assez sûrement documenté pour
édifier mon jugement.
Ce qui doit devenir notre caractéristique, c'est la
manière circonspecte de
former et de formuler des jugements. Ce qui peut
être une caractéristique
des voyages du Compagnon, c'est, peut être, de construire le
monde puisque dans
l'analyse des rêves, l'Homme est
généralement l'expression de l'univers.
Nous sommes ici ailleurs et non pas autre part. Pour en revenir au
voyage que
vous allez entamer, j'aimerais vous parler, une fois n'est pas coutume,
de
l'Évangile de Jean. Pas pour y faire
référence et vous resservir à une
nouvelle
sauce le Logo, la Lumière et les
Ténèbres. Il est bien entendu qu'au rite
français, le Logo est le petit signe typographique qui
désigne une entreprise
et que la Lumière et les Ténèbres ne
dépendent que de l'interrupteur
électrique, Je vous ferais grâce du sens du
courant et des règles de la photocomposition
pour lesquels Je vous renvoie à l'immensité des
rayons bricolage de la FNAC.
Non, Je voudrais vous parler de ce texte parce qu'il comporte un
passage qui me
semble intéressant.
Après sa résurrection, Christ demande
à Simon Pierre: "Simon, m'aimes-tu
?" Et Pierre répond: "Oui, Seigneur, tu sais que Je t'aime"
et
Christ lui dit alors:
"Fais paître mes agneaux"
Pour n'a part, Je ne parle pas grec, mais j'ai trouvé, dans
une analyse
d'Arnaud Desjardins sur le texte grec, un passage que je vous livre:
"Agapè désigne une forme d'amour au
delà des actions, des peurs, des
désirs, des attachements. /.../ Et phileo correspond
à l'amour instable que
nous connaissons tous; on peut aimer, ne pas aimer. Or, le Christ
emploie, dans
ses questions à Pierre, le terme agapè, mais
Pierre répond en utilisant le mot
phileo. Pierre utilise un autre mot, comme si le Christ lui demandait:
"Pierre, m'aimes-tu de 1'amour libre, conscient, de l'amour dans la
non-dualité ?" et que Pierre réponde à
un autre niveau: "Mais tu sais
bien que je t'aime de l'amour humain ordinaire." Cet échange
entre le
Christ et Pierre a lieu deux fois de suite. Et, la troisième
fois, le Christ
n'emploie plus le terme agapè, mais phileo."
Et les questions se posent et se reposent encore et j'envie de plus en
plus
ceux qui ont les réponses et qui m'affirment savoir...
Alors, j'ai repris mon bâton de pèlerin et j'ai
demandé à Sigmund la
signification des voyages que j'effectuais en rêve, la
signification du Temple,
des Colonnes en couple à l'entrée du Temple, du
Compas, de l'étoile... Cette
dernière, c'est toi-même, m'a-t-il dit, une
étoile qui brille dans la nuit.
Pour le compas, son analyse fut plus qu'ambiguë. Les deux
Jambes articulées
figurent la marche, la marche vive... Refermé, il est
phallique, mais que peut
bien être ce rêve du croisement d'un
compas sur une équerre rigide...
Quel genre de marche peut bien construire un homme doté du
Nombre 5 dont
pythagore disait qu'il était le Nombre de l'accouplement ?
Il m'a parlé d'un
grand vide, de peurs enfantines... De sexes béants et
dressés, de la chaleur du
ventre dont le Temple est l'image, de ma vie, de ce voyage de noces qui
parcours le monde vers une fin connue dont j'ignore le moment; "partir,
c'est mourir un peu".
Il m'a parlé d'amour, de ses chairs palpables, de destins
mortifiés, de
présents invivables ou tout est à
créer et j'ai repris la course, la marche,
sur un sable d'azur où se brisent les marées de
coeurs purs.
Alors on crache dans les cendres fumantes de nos illusions qui pleurent
en
d'innombrables braises ardentes. Avec courage on déchire les
voiles de vies
perdues en nuits sans étoiles, on descend au fond des enfers
entre deux lignes
de statues de pierre aux visages et aux membres brisés par
tout ce que qu'elles
ont oublié.
Les corps déchirés de Dieux improbables,
anciennes images de poudre et de
sable. Orphée est inconnu sur les rôles de
l'Hadès, et chacun, comme Ulysse,
est Jouisseur de Déesses.
Ce soir, chacun de vous est la dernière femme
chargée de reproduire ces êtres
que vous êtes, pentagones parfaits.
Des êtres de plaisir, d'espoir, à qui il manque un
corps. Proliférer, produire,
reproduire jusqu'à la Mort.
Puisque le créateur absolu, le Pygmalion, s'il fait vivre
les formes, leur
donne aussi la Mort pour qu'elles soient achevées.
Mais pour donner la Mort, on doit mourir soi-même.
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage, partez mes soeurs et
mes
frères et revenez un jour, riche de Calypso, de
Circée et de l'enfer. Vous
retrouverez Pénélope qui coupera le dernier fil
de sa tapisserie au Jour de
votre arrivée. Dans un murmure, dans un souffle, un baiser,
elle dira :
"Ta place t'attend au soleil du Midi".
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