Obédience : NC | Site : Lurker R.A.M. | 06/09/2006 |
Shibboleth... Faut-il tuer l'étranger ? "Ils lui disaient
alors: Hé bien, dis
Schibboleth. Et il disait Sibboleth,
car il ne pouvait
pas bien prononcer.
Sur
quoi les hommes de Galaad le saisissaient, et l'égorgeaient
près des gués du
JourdainIl périt en ce temps-là quarante-deux mille hommes d'Éphraïm." - יאמרו לו אמר־נא שׁבלת ויאמר סבלת ולא יכין לדבר כן ויאחזו אותו וישׁחטוהו אל־מעברות הירדן ויפל בעת ההיא מאפרים ארבעים ושׁנים אלף - Interrogabant eum dic ergo sebboleth quod interpretatur spica qui respondebat tebboleth eadem littera spicam exprimere non valens statimque adprehensum iugulabant in ipso Iordanis transitu et ceciderunt in illo tempore de Ephraim quadraginta duo milia Juges12:6 « Peu
après, ceux qui se tenaient là
s'approchèrent et dirent à Pierre :
Sûrement, toi aussi, tu en es : et d'ailleurs ton langage te trahit. » Mt 26, 73 1 ; 17 « Là où tu mourras, je mourrai et là je serai ensevelie. Que Yahvé me fasse ce mal et qu'il y ajoute encore cet autre, si ce n'est pas la mort qui nous sépare! » « Il
demanda : Quelle est la parole qu'il t'a dite ? Ne me cache rien! Que
Dieu te
fasse ce mal et qu'il ajoute encore cet autre si tu me caches un mot de
ce
qu'il t'a dit. » 1S 3 ; 17 « Tout
le peuple vint inviter David à prendre de la nourriture
alors qu'il faisait encore
jour, mais David fit ce serment : " Que Dieu me fasse tel mal et qu'il
y
ajoute tel autre si je goûte à du pain ou
à quoi que ce soit avant le coucher
du soleil. » 2S 3 ;35 Etranger N.B.
identité de la Loi pour le peuple
d’Israël et pour l’étranger. « Il
n'y aura qu'une loi et qu'un droit pour vous et pour
l'étranger qui réside chez
vous. » Nb 15 ; 16 Néanmoins
il est dit : « Vous
ne pourrez manger aucune bête crevée. Tu la
donneras à l'étranger qui
réside chez toi pour qu'il la mange, ou bien vends-la
à un étranger du
dehors… » Dt 14 ; 21 « Tu
pourras exploiter l'étranger, mais tu libéreras
ton frère de ton droit sur
lui. » Dt 15 ; 3 « tu
ne grappilleras pas ta vigne et tu ne ramasseras pas les fruits
tombés dans ton
verger. Tu les abandonneras au pauvre et à
l'étranger. Je suis Yahvé votre
Dieu. » Lv 19 ;10 « Lorsque
vous ferez la moisson dans votre pays, tu ne moissonneras pas
jusqu'à l'extrême
bord de ton champ et tu ne glaneras pas ta moisson. Tu abandonneras
cela au
pauvre et à l'étranger. Je suis Yahvé
votre Dieu. » Lv 23 ; 22 Au
second grade des principaux rites de la
Franc-maçonnerie, le mot de passe donné aux
impétrants est « Schibboleth ».
Ce mot signifie « épi »
ou bien le « courant de
l’eau », le
« cours du fleuve ».
Certains rituels
et catéchismes proposent une interprétation de
cette traduction en déclinant
les termes de la pluralité : « nombreux
comme les épis de blé »
comme si cette notion plurielle devait être mise en relation
avec le symbolisme
de la grenade que l’on retrouve au chapiteau des colonnes Iod
et Beth tout aussi bien
avec celui de la chaîne d’Union, marquant ainsi une
véritable intégration dans
le cercle des initiés en les comparant à de
nouveaux grains sur l’épi comme
c’est le cas au Rite Français dit
Moderne : « D. : Dites-moi le M:. de P:. R. : Schibboleth D. : Que signifie-t-il ? R. : Nombreux comme des épis de blé. D. : Quel âge avez-vous ? R. : Cinq ans. » Cependant
ni l’âge symbolique, ni le graphisme particulier du
tapis de loge à ce grade -
Rite Emulation compris - ne permettent de penser que le Compagnon soit
véritablement autre chose qu’un Apprenti
à qui l’on va demander de mettre en
ordre les éléments qu’il a appris sur
la colonne du Nord et de montrer qu’il
les a compris en comparant la théorie de
l’enseignement avec l’expérience des
voyages. En d'autres termes, il s'agit de construire avec les outils
qui lui
sont donnés, ce dont les Maîtres auront tendance
à se dispenser. Dans les
anciennes règles des ordres monastiques la
« via purgativa »
- voie de la purgation – précède la
« via contemplativa »
-
voie de la contemplation. Il est bien évident que ces deux
termes sont liés en
un seul parcours initiatique et que le Compagnon ne trouvera
l’équilibre de la
« via unitiva »
qu’après avoir fait la synthèse
intérieure
du choix entre l’illusoire et le nécessaire,
c’est à dire principalement entre
le droit de se taire ( privilège ô combien
indispensable !) et le droit de
parler. Il s’agit bien de droits et non
d’obligations… Mais nous verrons plus
loin s’il y a, ou non, relation entre Schibboleth et la
Parole. Une
autre traduction intéressante est celle proposée
par le rituel dit du
« Duc de Chartres [2](
1784
) » qui nous précise que
« Le mot de passe est Schibboleth qui
signifie « épi de blé sans
barbe » ou
« épi de froment ». La
relation indiquée ici entre le terme Schibboleth et le
froment n’est pas
expliquée par le rituel, pas plus, d’ailleurs, que
ne le sont les autres
relations entre les termes et la symbolique maçonnique.
Ainsi, « nombreux
comme les épis de blé »
pourrait signifier que le Compagnon,
contrairement à l’Apprenti, est
déjà coutumier de la trinité du
« Moi », du
« Surmoi » et du
« Ca ». Mais ce rituel
va plus loin que le précédent dans
l’explication du vocable par le fait que
l’enseignement donné à
l’issue de la cérémonie
d’élévation replace le mot dans
son contexte biblique en indiquant bien qu’il
s’agit de tuer les membres de la
tribu d’Ephraïm sans toutefois préciser
pourquoi. R. Schibboleth. D. Que signifie ce mot ? R. «Épi de blé sans barbe», ou «épi de froment». C'était le mot des tribus qui étaient en guerre avec la tribu d'Ephraïm. Lorsque les sentinelles placées sur le bord du Jourdain demandaient aux Éphraïmites ce mot qu'ils ne pouvaient prononcer comme eux, ils [les] reconnaissaient pour ennemis, les tuaient et les précipitaient dans le fleuve. » Le
Rite Ecossais Ancien et Accepté, quant à lui,
insiste sur l’aspect « tuilage »
du terme, à savoir qu’il ne se présente
plus comme une formule neutre pouvant
revêtir certaines significations rapprochant le rituel de
Compagnon des
croyances liées à un contexte agricole et qui
seraient porteuses de
préoccupations sédentaires. Pour
le Rite Ecossais, il s’agit bien de « nommer »
au
commencement des voyages et c’est le nouveau Compagnon qui
devient lui-même le
fruit en germe. On sait que le pouvoir de création est
porté par la capacité de
« nommer »
les choses et les êtres. Ici, il s’agit bien de
« parole »
porteuse de renaissance puisqu’elle s’exprime
lors d’un rituel d’élévation
au grade supérieur, donc, de création
d’un nouvel
état, car, comme le disait Edgar Morin, « Parler
c'est créer. Le
sorcier crée la chose qu'il nomme, et, un des moteurs de la
.magie, c'est
la parole... », ici, c’est le
Vénérable Maître qui devient le Sorcier
créateur en affirmant au nouveau Compagnon son
identité. D. Que répondîtes-vous? R. Un apprenti qui a fini son temps, et qui demande à être reçu compagnon. D. Comment espérâtes-vous y parvenir? R. Par le mot de passe. D. Vous l'avez donc, le mot de passe? R. Oui, je l'ai, vén.·. D. Donnez-le moi. R. (Il le donne.) D. Que vous dit-on alors? R. Passe Schibboleth D. Que devîntes-vous alors ? R. Je fis cinq voyages autour de la loge [3]. » A
ce point, nous nous trouvons devant trois lignes directrices qui
pourraient
donner une interprétation probable du terme
« Schibboleth ». La traduction du mot
hébreu :
« épi »
ou « courant de l’eau »,
« cours du fleuve » La signification
donnée au mot par les catéchismes
maçonniques :
« nombreux comme les épis de
blé »
ou « épis de froment »
( blé sans barbe ) qui semble
indiquer le lien permanent entre les rituels pratiqués et la
construction de
sociétés
« agraires » donc
sédentaires regroupées en villages et dont
la survie dépend de la possession de la Terre et de la
qualité du bâti
protégeant les personnes et les biens. L’utilisation
de ce terme comme un mot de passe permettant
d’identifier les étrangers autrement que par leur
apparence, par leurs
difficultés de prononciation, et cela en vue de les tuer.
Nous sommes ici en
présence d’une réalité
sociale importante : l’étranger
n’est pas
nécessairement différent de nous au premier
abord. Il faut savoir ce que
cachent les masques car l’étranger est celui qui
prend la nourriture, les
femmes, occupe la place réservée aux membres du
groupe. Néanmoins,
une question revient en permanence, pourquoi avoir choisi un mot de
passe dont
l’usage n’apparaît qu’une seule
fois dans le texte biblique qui reste, on le
sait, la référence en matière de
symbolisme maçonnique ? Mais aussi, dans
le cadre d’une fraternité affirmant sa vocation
universaliste, pourquoi choisir
un mot dont l’unique usage est de désigner
l’étranger afin de le mettre à
mort ? Nombreux comme les épis de blé « Elle a dit : « Permets-moi de glaner et de ramasser ce qui tombe des gerbes derrière les moissonneurs. " Elle est donc venue et elle est restée; depuis le matin jusqu'à présent elle s'est à peine reposée. »Rt 2 ; 7 Le
premier verset du second chapitre du Livre de Ruth nous apporte un
certain
nombre d’enseignements d’une part sur les
épis de blé, mais aussi sur leur
contexte particulier. En effet, Ruth [4],
veuve de
l’un des fils d’Elimélek [5]
choisit de
rester avec sa belle-mère Noémie,
après la mort de son mari, et reste attachée
à elle lorsque cette dernière retourne
auprès de l’un des parents
d’Elimélek : Booz. Cependant, le fait
d’avoir épousé un homme du pays de
Juda n’avait pas pour conséquence
qu’elle fusse acceptée. Ruth restait avant tout
une moabite [6],
c’est à
dire, une étrangère impure [7]
puisqu’un interdit frappait les filles des Moabites comme
nées d’une lignée
issue de l’inceste de la fille aînée de
Loth avec son père et qui donna
naissance à Mo’ab ou Mohabon, leur
ancêtre [8]. L’arrivée
des deux femmes à Bethlehem correspond au temps de la
moisson de l’orge. Ruth
demande l’autorisation de glaner les épis qui
tomberaient du chariot comme la
Loi le permettait puisque les épis tombés
étaient considérés comme perdus. Le
maillon le plus pauvre de la communauté pouvait en
bénéficier, ici l’étranger
vit grâce à la charité de la
communauté qui, non seulement ne le met pas à
mort,
mais de surcroît le nourrit de ce qui ne la prive pas.
C’est donc bien le rôle
de l’étranger que de rassembler ce qui est
épars puisqu’il ne participe pas aux
travaux de la communauté. C’est alors que Booz,
propriétaire du champ, remarque
Ruth et lui accorde sa protection. On observera que dans un premier
temps c’est
le fait de glaner les épis tombés du chariot qui
permettra à la Veuve de se
faire remarquer. Nous
sommes ici en présence de deux symboles
maçonniques forts ; tout d’abord
l’importance de regrouper ce qui est rejeté,
tombé, égaré,
éparpillés autour du
chariot. On se souviendra que la pierre brute rejetée est
celle qui formera la
clé de voûte. Ce sont ici les épis de
blés qui seront ramassés en brassés,
donc, nombreux. D’autre part, c’est sous la
bienveillante protection du
propriétaire du champ que cet acte de regrouper les
épis va pouvoir se
dérouler. Ici le propriétaire se nomme Booz. On
notera que dans le texte
hébreu, l’orthographe de ce nom est identique
à celle qui est attachée à la
colonne du Temple à la gauche de la porte :
Boaz et qui signifie
« dans la force »
ou « sous la protection ».
Il est important, ici, de préciser que, quel que soit le Rite [9],
la Colonne
Boaz est toujours celle à l’ombre de laquelle
siège le Premier Surveillant,
c’est à dire le Maître en charge de
l’enseignement des Compagnons. Cette
part du symbolisme maçonnique nous offre un
développement intéressant
relativement au second grade et particulièrement sur son
obligation de voyager,
c’est à dire de devenir un étranger. Le
droit à la Parole dont il est investi à
ce grade n’est pas, on le comprend bien, une obligation
d’intervenir dans les
travaux de sa propre Loge, mais bien le moyen de se faire
reconnaître, de
donner le mot de passe demandé selon les formes et la bonne
prononciation.
Reconnaître l’étranger est aussi un
moyen de se connaître. Le Compagnon sera
donc celui qui n’est plus une pierre brute
dépendante du regard que l’on porte
sur elle, mais bien celui qui se construit par la dette qu’il
développe envers
son entourage. Le fait d’être
intégré dans une construction, d’avoir
sa place
au sein de l’architecture ne représente
rien d’autre que la possibilité
d’admettre que le regard de l’étranger
puisse être le ciment de la construction.
Comme le souligne l’Histoire de Ruth, les racines,
symbolisées par la référence
à la Déesse Mère, souvent
indiquée comme une veuve, de la tribu, du groupe,
trouvent leur sources dans les éléments
rejetés. Tous ces épis glanés par
l’indigent, l’étranger que
l’on tolère, symbolisent les
éléments que chacun
d’entre nous rejettent inconsciemment hors du champ de la
réflexion parce qu’il
est impossible d’être à la fois
impliqué et témoin.
L’étranger est le témoin
qui glane les restes de la mémoire pour nous permettre de la
reconstituer.
Néanmoins, si nous comprenons pourquoi les
« épis sont nombreux »
et
pourquoi la protection de la
« Force » est
nécessaire à consolider ce
qui est « établi [10] »,
il
nous reste à nous demander pourquoi
l’étranger doit-il mourir et si le
« courant de la
rivière » représente le cours
du temps ou bien autre
chose ? Shibboleth
Ce terme n’apparaît qu’une seule fois dans le texte biblique en Jg 12 ; 6 quand Jephté, Roi-Juge de Galaad, après avoir offert sa fille en sacrifice à l’Eternel, conformément à son vœu, termine la guerre victorieuse qu’il menait contre ses voisins Ammonites en les empêchant de regagner leur territoire par le franchissement d’un gué sur le Jourdain. (5)« Puis Galaad coupa à Éphraïm les gués du Jourdain, et quand les fuyards d'Éphraïm disaient : « Laissez-moi passer », les gens de Galaad demandaient : « Es-tu Ephraïmite ? » S'il répondait : « Non » (6) alors ils lui disaient : « Eh bien, dis Schibboleth ! » Il disait : « Sibbolet » car il n'arrivait pas à prononcer ainsi. Alors on le saisissait et on l'égorgeait près des gués du Jourdain. Il tomba en ce temps-là quarante-deux mille hommes d'Éphraïm. » 30 Et Jephthé voua un vœu à l’Éternel, et dit : Si tu livres en ma main les fils d’Ammon, 31 il arrivera que ce qui sortira des portes de ma maison à ma rencontre, lorsque je reviendrai en paix des fils d’Ammon, sera à l’Éternel, et je l’offrirai en holocauste. 32 Et Jephthé passa vers les fils d’Ammon pour combattre contre eux ; et l’Éternel les livra en sa main : 33 et il leur infligea une très grande défaite, depuis Aroër jusqu’à ce que tu viennes à Minnith, [leur prenant] vingt villes, et jusqu’à Abel-Keramim*; et les fils d’Ammon furent humiliés devant les fils d’Israël. 34 Et Jephthé vint à Mitspa, dans sa maison ; et voici, sa fille sortit à sa rencontre avec des tambourins et des danses* ; et elle était seule, unique : il n’avait, à part elle, ni fils ni fille. 35 Et il arriva, quand il la vit, qu’il déchira ses vêtements, et dit : Ah, ma fille ! tu m’as accablé, et tu es de ceux qui me troublent ! car j’ai ouvert [ma] bouche à l’Éternel, et ne puis revenir en arrière. 36 Et elle lui dit : Mon père, si tu as ouvert ta bouche à l’Éternel, fais-moi selon ce qui est sorti de ta bouche, après que l’Éternel t’a vengé de tes ennemis, les fils d’Ammon. 37 Et elle dit à son père : Que cette chose me soit faite : laisse-moi pendant deux mois, t je m’en irai, et je descendrai sur les montagnes, et je pleurerai ma virginité, moi et mes compagnes. 38 Et il lui dit : Va. Et il la renvoya pour deux mois. Et elle s’en alla, elle et ses compagnes, et pleura sa virginité sur les montagnes. 39 Et il arriva, au bout de deux mois, qu’elle revint vers son père ; et il accomplit à son égard le voeu qu’il avait voué. Et elle n’avait point connu d’homme. 40 Et ce fut une coutume en Israël, que d’année en année les filles d’Israël allaient célébrer la fille de Jephthé, le Galaadite, quatre jours par année. Jgs 11 ; 30-40 L’histoire
du vœu de Jephté a pour fin d’expliquer une
fête annuelle que l’on
célébrait en Galaad, v. 40, et
dont la vraie signification est inconnue. Livre des Juges « …d'année en année les filles d'Israël s'en vont se lamenter quatre jours par an sur la fille de Jephté le Galaadite. » ( Jg 11 ; 40 ) |
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