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Symbolisme des nombres

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L'origine du nombre est probablement liée à un besoin d'appropriation. Dénombrer c'est mesurer, mesurer l'étendu d'un avoir . Dénombrer le nombre de têtes d'un troupeau, mesurer une parcelle de terre, qualifier une proportion. Dénombrer suppose un certain nombre de processus intellectuels qui bien que naturels à notre époque ne sont pas aussi évidents que cela. Ainsi pour dénombrer le nombre de bêtes dans un troupeau, encore faut il qualifier ce qui est semblable de ce qui est dissemblable, autrement dit sélectionner et discriminer donc classer les objets par famille, races, ressemblances, différences, analogie autrement dit de structurer la pensée. Pour donner une idée de la complexité des choses essayons d'imaginer ce que pourrait être un programme permettant à un ordinateur de distinguer et de dénombrer le nombre de fruits dans un plateau.

L'arithmétique ou opération sur les nombres est une étape ultérieure qui permet, à partir du dénombrement de faire des opérations non plus sur le réel amis sur le nombre lui même.

Pour illustrer ceci, on peut concevoir qu'existe une différence entre dénombrer ,ce que l'on fait encore en pointant des objets (petits bâtons) et faire des opérations sur des nombres naturels ce qui suppose un système numéral et un certains nombres d'outils spéculatifs. Le calcul en base 10 qui nous paraît si naturel n'est pas universel, de même le type d'opération que l'on peut concevoir sur les nombres a beaucoup évolué au cours du temps et il y a une grande différence de complexité entre une simple addition et une fonction mathématique complexe.

Une autre propriété des nombres est celle de caractériser des rythmes, à partir de faits récurrents. C'est la mesure du temps, c'est le cycle des saisons, mais c'est aussi la possibilité de prévoir en fonction de la connaissance réelle ou supposée des rythmes de la nature.

Et enfin, le nombre peut être caractériser l'harmonie, la proportion entre les choses, l'équilibre qui est également justice.

Le langage des nombres est donc un langage universel qui permet de rendre l'univers perceptible, intelligible à la pensée humaine.

Il y a une très forte analogie entre numération et structure psychique de l'homme, a tel point qu'on peut imaginer que l'un influe sur l'autre. D'où la théorie des nombres-idées qui vient en complément de celle des nombres qu'on pourrait qualifier de "scientifiques". Le nombre idée caractérise l'être alors que le nombre scientifique caractérise l'avoir.

En ésotérisme, on travaille essentiellement sur les nombres naturels. L'idée de base est celle qui consiste à penser que chaque nombre possède ses propres qualités, sa propre symbolique et que les opérations sur ces nombres-idées permettent de définir les lois de la nature ou celles de la surnature. Dieu est géomètre dit on.

Le nombre est donc porteur de son propre symbole qui dépend des pré-supposés métaphysiques du système en vigueur. L'étendue du système symbolique dépendant en grande partie du système numéral et de la façon d'écrire les nombres. Dans l'ésotérisme occidental il y a dix chiffres 0-1-2-3-4-5-6-7-8-9 ( et encore , le zéro est d'invention relativement récente) dans le système hébraïque 22 qui correspondent aux 22 lettres de l'alphabet. La décade découle du système pythagoricien dont le triangle donne 1+2+3+4 = 10

Le travail symbolique repose sur trois outils, une définition du sens, liée à la Nature du nombre dans un système donné, des outils opératoires, addition, soustraction, permutation, guématrie, une définition selon la loi des correspondances des accords et désaccords entre les nombres.

Prenons un exemple.

Système de numérologie occidentale.

A

B

C

D

E

F

G

H

I

J

K

L

M

N

O

P

Q

R

S

T

U

V

W

X

Y

Z

 

1

2

3

4

5

6

7

8

9

APH  = 1+7+8  soit : 16 qui en réduction théosophique donne : 6+1 = 7

Dans ce système symbolique le 7 est un nombre spirituel superposition du 3 et du 4,image de la trinité triomphant sur les 4 éléments. Le 7 participe à la nature mystique mais signe aussi le mystère et l'imprévisible. Négatif le 7 est utopie, fanatisme. Il y a 7 jours, 7 planètes, 7 notes de la gamme, 7 métaux des alchimistes, 7 vertus.

Autre opération analogique le 7 c'est aussi la lettre G, géométrie, gnose, génération.

La 7ème Lame du tarot est le chariot, image de l'équilibre des forces

Dans APH il y a 1 voyelle et 2 consonnes qui caractérisent son nombre d'idéalité (les aspirations) et de personnalité (jauge du caractère).

Comme on le voit dans cet exemple, la symbolique des nombres peut donner lieu à de multiples développements plus ou moins heureux en fonction du système auquel on se rattache.

Ainsi en partant de la tetrakys Pythagoricienne

Le nombre 1 représente l'unité avant la manifestation, le chaos des alchimistes, Kether pour la Qabal

Le nombre 2 résulte de la séparation du 1 en deux phases égales mais de polarité opposées, sel et Nitre pour les alchimistes, Chokmah pour la Qabal

Le nombre 3 est le symbole de l'unité et de la dualité réunis dans la manifestation, ce sont les trois principes Sel Souffre et Mercure parfois le Mercure seul. Les Qabalistes voient dans le 3 le nombre de Binah

Le nombre 4 représente les 4 éléments en alchimie, c'est aussi le nombre de Chesed pour les qabalistes

Ces nombres déterminent et régissent les grands cycles de la tradition. Dualité jour-nuit, 4 saisons divisées chacune en 3 signes, eux mêmes divisés en 3 décans, 12 heures ( 3*4) du jour et de la nuit,.Mais aussi 12 travaux d'Hercule, 7 (3+4) métaux planétaires.

La numérologie, comme pseudo-science, utilise l’illusion du nombre. Dans ce sens, le texte ne fait aucune allusion cachée à cette numérologie, qui existait à l’époque dans les loteries et les tirages par chance avec des abaques sous forme de tableau à colonnes pour favoriser le sort.

Cela n’existe pas dans les ouvrages de Saint Martin au 18ième siècle, pour qui le nombre est lié à des principes et non à des calculs hasardeux. Il ne me semble pas d’ailleurs pas plus qu’il utilise le terme cabale. Si la comparaison est faite (malencontreusement et avec violence par St Martin) entre mathématiques et nombres, c’est que pour les ésotéristes de l’époque il y a deux domaines différents d’application des chiffres. L’un quantifie et l’autre qualifie. Une fois cette distinction faite, cela devient plus clair.

D’un côté on chiffre, on quantifie, de l’autre on dénombre et on recherche une qualité. Il ne viendrait pas à l’idée d’un peintre de jeter un tube de couleur sous prétexte qu’il a juste besoin de la couleur. Le tube c’est le chiffre que l’on peut compter, la peinture c’est la qualité de la peinture dans le tube, le nombre que l’on peut qualifier de rouge, noir, bon, pas bon etc... . Les nombres existent depuis la plus haute antiquité. Moïse dénombre, mais ne compte pas. En effet, il compte la communauté des fils d’Israël tête par tête, d’après leurs familles, leurs maisons paternelles, en comptant les noms. Il ne s’agit pas d’un chiffrage, mais bien d’un classement selon les milices, les tribus, les chefs de maison paternelle. Les lévites ne furent pas mélangés « au commun ». La tribu des Lévites ne doit pas être dénombrée car elle est et doit resté exclusivement au service de la demeure du témoignage avec des rôles très précis.

En outre on voit que, à la suite de ce classement, les régions de l’espace sont clairement déterminées pour l’attribution des campements. Après avoir été dénombrés depuis l’âge de vingt ans, les 603150 sont orientés dans l’espace et reçoivent un ordre de priorité de déplacement, la dernière tribu à partir étant celle de Dan. Ainsi non seulement les nombres ont donné un chiffre, mais le nombre donne une priorité de classement, de campement et de départ. Seuls les Lévites ont droit à être à la garde du sanctuaire, tout profane s’approchant du temple consacré (autre que Moïse, Aaron et ses fils) était mis à mort. Enfin, le second recensement recense le tout premier-né mâle des fils d’Israël depuis l’âge de un mois pour relever le nombre de leurs noms.

Ils seront 22273 dont 273 en excédent, également bien répartis géographiquement. (Nombre III, 22 à 49). Enfin parmi les lévites une double classification fut faite, ceux qui ne pouvaient pas mourir dans le sanctuaire et ceux des fils de Quehath qui pouvaient mourir en voyant la chose sainte et âgé entre trente et cinquante ans, pour faire du travail dans la tente du rendez-vous. Les fonctions sont elles aussi bien déterminées. Par la suite, même les jours d’offrande avec six chars couverts et douze bœufs furent codifiés selon un ordre de préséance, la tribu de Dan passant au dixième jour et celle de Nephtali au douzième, pour la dédicace de l’autel.

Après cela et l’onction de Moïse, Dieu parla. Ce qui suppose que Nombre et parole semblent liés mais aussi qu’il a fallu rythmer quelque chose. Enfin, les villes furent comptées et données aux Lévites, les héritages codifiés de façon qu’il n’y ait pas de transfert entre les tribus. Nombre et chiffre ne font donc pas bon ménage. Mais ce chapitre des nombres pourrait être intéressant pour retrouver à quoi correspondent les différents nombres évoqués. (Nombres cycliques, périodiques ? nombre cosmique, symboliques ? ou ... rien de tout cela)

Il est vrai que le nombre a engendré des superstitions. Ainsi Platon comparait le nombre deux à Diane stérile, donc ce principe de stérilité entraînait la malchance. Chez les romains, tout ce qui était de mauvais augure se retrouvait le deuxième jour du mois. Le nombre trois était utilisé pour cracher trois fois pour détourner les enchantements.Trois bougies allumées portent malheur ainsi que le cri de la chouette prononcé trois fois. Le nombre cinq est considéré comme maléfique. Les conjurations des démons et exorcisme se font selon certains jours de la semaine, certaines tranches d’heures. Pour beaucoup ce ne sont que des stupidités. Mais dans la superstition et l’inconscient que de drames en instance !

Et il est curieux de constater que l’avancée du scepticisme et de la rationalité n’empêche pas les progrès de la crédulité et le changement de croyance.

Ainsi les nombres sont-ils déguisés dans un langage pseudo-scientifique pour masquer les incompétences de la numérologie. Les mouvements cabalistes n’ont pas cherché des recettes miraculeuses pour faire parler les nombres en facteur chance, amour, santé. Ils ont prétendu détenir des méthodes philosophiques où cabale signifie recevoir la sagesse, à travers des concepts complexes et difficiles d’accès qui « ouvre » l’intelligence. Que les nombres aient déviés, cela ne fait aucun doute si l’on lit qu’il s’agit d’un système christiano-kabaliste, divino-magique et phisico-chymique, histoire de faire plus vrai que nature. Comprenons l'Homme du XXIème siècle qui hurle contre ce type de phraséologie creuse et stérile qui laisse le lecteur sur une impression de vide absolu. Cependant, c’est grâce à ce mystère de la création abordée par les cabalistes que Fludd fait des représentations de la lumière, avance les théories de Copernic en mêlant les données bibliques, seules admises à l’époque avec la cosmographie des grecs.

Les adeptes de la cabale sont en avance sur les théologiens de l’époque. Ce sont eux qui partant des anciens éléments de la nature, de la philosophie des nombres vont pouvoir reclasser la nature, les plantes, les animaux et ouvrir le chemin à des Bacon ou Newton. Kircher dans son Oedipus Aegyptiacus ouvre la période de l’intéressement à l’Egypte, même s’il se trompe ouvertement, pendant que l’alchimie hérite des théories des nombres et de la cabale. L’église ne condamna pas l’astrologie tout en la blâmant par suite d’une sorte de prédestination des astrologues. Les nombres échappent à toute classification et se trouveront alors introduits dans de nombreuses « disciplines ». Les nombres astrologiques entraînent des représentations corporelles où par exemple Gichtel en 1736 localise les planètes dans le corps et leurs influences à travers les quatre éléments et les quatre organes du foie, du coeur, des poumons et de la vessie.

Les nombres sont utilisés dans la loterie royale installée en 1758 et entraîne des méthodes secrètes pour gagner, l’utilisation des songes et des prières « instruisez moi des nombres que je dois prendre pour gagner (Collin de Plancy). La numérologie, les fantaisie cabalistiques, la loterie, la supercherie, les méthodes secrètes n’ont rien à voir avec les nombres et la cabale qui découle d’une intense réflexion. Pour citer Grad dans « pour comprendre les nombres et la cabale », il faudrait posséder la langue hébraïque, ce que des courants cabalistiques contestent, mais surtout se placer dans une perspective de structure et d’articulation onto-numérale. Le nombre n’est pas un chiffre. Il faut pénétrer un climat mental particulier, qu’un rejet ne peut même pas envisager.

Il faut un rapport singulier entre le sujet et l’objet étranger à la mentalité occidentale. Dire que « trois n’est pas la dualité » sans autre affirmation que de dire cela n’est pas, n’est pas dans l’optique du cabaliste qui expliquera pourquoi la question, face à ce qui semble une inconvenance, puis pourquoi cela est ou pourquoi cela n’est pas. Pouvez-vous d’ailleurs simplement en lisant rétorquer à « cela n’est pas la dualité ».

La cabale c’est recevoir, accueillir, analyser et chercher à comprendre l’incompréhensible. Le nombre est la structure d’accueil de cette réception à travers l’intelligence qui parle en symbole pour découvrir la réalité ontologique. Ce n’est pas seulement dire, mais c’est le dire qui fait pour permettre la connaissance. Ainsi selon Grad, le kabbaliste ne cherche pas la vérité discursive, il fait le devenir et participe au devenir.

C’est alors un art de penser et un mode de vie spirituel. Rien à voir avec la raison rationalisante, ni avec le scientifique qui exerce son métier, son intelligence et sa raison et chez lui enfile ses pantoufles avec un soupir de soulagement « Quelle journée ! ». Les nombres cabalistiques entraînent donc une volonté humaine de présence et de continuité sous forme d’un courant qui se vit au jour le jour, au fil des heures.

Et si certains cabalistes sont devenus des Maîtres porteurs de Sagesse, c’est qu’ils ont vécu par l’intensité de leurs méthodes la vie cabalistique dans la réalité quotidienne. Ce n’est peut-être pas dans notre démarche qui vise à s’intéresser à des processus intellectuels et généraux, face à des êtres qui ont élaboré une science de l’Etre pour être vécue. Il n’est donc pas étonnant que les grands cabalistes furent des Maîtres entraînant dans leur sillage des Ecoles et des disciples, ou des moines et des érudits consacrés à l’étude.


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