Question
à l'étude des Loges
Année
6011 V\ L\
L'utopie,
est-elle
soluble dans le progrès, et encore d'actualité ?
Et d’abord,
qu’est-ce que l’utopie?
Ce terme a été
inventé, en 1516, par Thomas More, philosophe humaniste,
dans son livre (en
latin)
«
Utopia.» Il
est construit avec le préfixe grec ou - ou- de sens
privatif et noté à la latine au moyen
de la
seule
lettre u, et topos - tόpos - (« lieu
»), signifiant
donc « (qui n’est) en aucun lieu ».
Pour
le
dictionnaire, c’est une construction imaginaire et rigoureuse
d’une société qui
constitue, par
rapport
à celui
qui la réalise, un idéal total. C’est
un projet dont la réalisation est
impossible.
Il semble que
toute société
ait
besoin d'utopies. Toute société a besoin de
rêve pour avancer…
L’Histoire
s’est nourrie d’utopie depuis toujours, par exemple
:
Au
cours de ce
qu’il est convenu de nommer les « temps modernes
» ce fut, ainsi, l’Exploration
de
la
planète.
Au
XVIIIe
siècle, avec les Lumières, les idéaux
de liberté, d'égalité, de raison
éclairée,
d'humanisme,
de
science, d'éthique, de démocratie. Imaginer une
République en France au début
du
XVIIIe
siècle
pouvait être une UTOPIE: elle s'est pourtant devenu une
réalité !
Au XIXe siècle,
la construction urbaine, la modernité,
l‘École laïque, gratuite et
obligatoire,l’industrialisation,
la démocratisation de l'énergie, le chemin de
fer, la conquête du
monde
et le
colportage, au-dessus les frontières, des techniques et des
idéaux.
XXe
siècle: la
démocratisation du confort, les droits sociaux, le vote des
femmes, la
vaccination,
l’accès
aux
soins, la possible éradication des famines et des maladies
infectieuses, le
possible accès
universel
au
savoir, la construction européenne, les grandes institutions
internationales,
la laïcité, et
les
espoirs de
paix dans le monde.
Étymologiquement
ambiguë, philosophiquement et sociologiquement paradoxale,
historiquement
suspecte,
l'utopie se révèle être, à
l'analyse, un concept particulièrement délicat
à
manipuler.
Elle
est
couramment définie comme ce lieu ne pouvant être,
et qui, de ce fait ne peut
exister qu'en
tant
qu'objectif imaginaire, jamais atteint, mais fixant le cap d'une
démarche
progressive vers cet
impossible
but.
Dans « La République », Platon avait
déjà imaginé une
société parfaite. Il fut
le
premier
grand
idéaliste de la pensée occidentale.
Mais cette
acception du terme peut conduire à la
construction d'une société supposée
idéale,
lequel idéal
reposerait
sur une
définition a priori du bien et du mal appliquée
à un groupe humain.
On
l’a vu -
dramatiquement-, au cours des siècles
précédents, les modalités de l'action
politique et
sociale
qui en
découlent divergent, aboutissent souvent sur les
échecs cuisants, des dérives
tragiques.
Ainsi, l’utopie
serait un sentiment potentiellement dangereux que nous cultivons tous
plus ou
moins
et que
nous
assimilons à l’espérance… ?
Pour
autant,
l’utopie n’a pas besoin d’aboutir
complètement pour provoquer des effets car
toute
utopie
forte
possède, en conséquence, la puissance
d’irradier la réalité.
Une utopie peut
devenir réalité si l'humanité le veut
vraiment, le désire réellement Mais
doit-elle
rester
en
contact avec la réalité ou doit -elle faire
avancer les choses selon le rêve
des hommes? Il
n’y
a d’utopie
efficace que si elle est réaliste et de réalisme
raisonnable que si il est
utopique. Elle
porte
donc en
elle-même, une grande part d’impossible et une part
difficilement appréciable
au
départ,
de
possible.
Mais
l’utopie
sous-entend nécessairement une foi en l’avenir. Or
le monde d’aujourd’hui ne
nourrit
plus
que des
craintes, des angoisses, des replis nostalgiques vers un
passé supposément
meilleur.
Nous savons
aujourd'hui, que le modèle libéral
prôné au cours du XIXe siècle,
(l’utopie du
libéralisme)
,
a conduit à la pire aliénation de
l’Homme. Cette utopie-là, est devenue
le
vrai cancer
de notre société contemporaine.
Aujourd'hui,
il
est impossible d'avoir une vision d'ensemble de la
société. On ne peut
apporter
que
des réponses fragmentaires , mais pas de réponses
globales aux maux de la
société.
Où
sont donc
les penseurs , les philosophes, les humanistes des XVIIIe et XIXe
siècles ?
Ceux
d'aujourd'hui
sont inaudibles, parce qu’absents des médias . Les
préoccupations du monde
dirigeant
sont
tout
entières orientés vers la
réal-politique. Les Grands Idéaux n’ont
plus de place
dans le
monde
actuel.
…Et qu’est-ce
que le Progrès ?
C’est
l’amélioration, le développement des
connaissances, des capacités de
quelqu’un.
C’est le changement graduel de quelque chose, d’une
situation par amélioration
ou par
aggravation.
C’est enfin le développement de la civilisation.
L’idée
même de
progrès intègre une promesse, un bonheur
différé qui procure à
l’anémie du
présent
une sorte
de fortifiant. En somme, elle rendrait le présent
tolérable en faisant aimer
l’avenir.
La notion de
progrès en tant qu’amélioration ou
changement positif, n’est venue qu’au
XVIII° siècle
avec les
Lumières, en associant progrès technique et
amélioration des conditions de vie
du
citoyen.
Seul
Rousseau a
perçu à ce moment que tout progrès
était à double tranchant et il a
souhaité
qu’on
n’en
fasse pas
une idéologie. Il a aussi posé alors la
connaissance comme facteur de progrès
humain,
en
l’associant à la marche en avant de la raison.
La notion de
progrès, qui semblait évidente aux hommes de la
fin du XIXe siècle, est, en
fait, une
notion
historiquement acquise et diversement comprise selon les temps, les
lieux et
les civilisations
mais
aussi, de
ses applications particulières.
Il
serait
illusoire de penser que la Paix, la Démocratie et la
Liberté sont
définitivement acquises à
nos
sociétés.
Il existe des hommes qui honnissent ces valeurs car elles
contremaître leurs
projets et
leurs
aspirations au pouvoir, à la fortune… Et ces
hommes-là sont, en général, assez
puissants pour
entraver
la
marche du progrès dans ce que nous qualifierions de
« bon » sens.
Peut-on croire
encore à un progrès social ? C'est l'inverse qui
se produit avec la
mondialisation du
commerce,
verrouillé par les monopoles de la finance bien à
l'abri, dans les paradis
fiscaux.
L'hégémonie de
l'argent-roi est la cause des délocalisations massives de
l'industrie et des
technologies
vers les pays dits « émergents », afin
de créer de colossaux profits en
exploitant la
misère,
la
famine et l'ignorance. De la même façon,
l'information est verrouillée elle
aussi.. Le
monde
politique
est impuissant à émettre des idées
neuves, étant souvent corrompu, lui aussi,
par
l'argent
. La
préoccupation principale des hommes politiques, n'est pas de
mettre en
application
l'idéal
des
utopistes: elle est strictement d'ordre économique et
financier .
Nous savons,
aujourd’hui que la marche inexorable du progrès
est un leurre. Tous les rêves
qui ont
accompagné
l’idée de procès dans les
dernières décennies du XIXe siècle et
jusqye dans les
années
70 se
sont
effacés devant une réalité
quasi-cauchemardesque: le « quotient de misère"
a augmenté
dans
la plupart
des pays, l’injustice s’institutionnalise dans
toutes les sociétés et des
preuves
irréfutables
et
massives comme l'augmentation des taux de maladies mentales, de drogue,
de
crime
et de
dépression, tendent à démontrer que
les résultats,
l’enrichissement matériel,
n’engendrents
guère
de
bonheur individuel. Tout lien social tend à
disparaître, dans nos sociétés.
Et les
francs
maçons, dans tout ça ?
La Franc
maçonnerie « travaille à
l'amélioration matérielle et morale, au
perfectionnement
intellectuel
et
social de l'humanité. »
Comme
le disait
le F\ Oscar Wilde, le
«Progrès n’est que
l’accomplissement des utopies », il
est
donc
dans sa
continuité, ainsi l’utopie n’est pas ce
qui est irréalisable mais ce qui reste
à réaliser,
elle
est un
acte, un courant, une espérance qui permet tout simplement
à l’humanité de ne
pas se
contenter
de ce
qu’elle a, mais de continuer à vivre et
à progresser.
Étrangère
à
toute crise, l’utopie est un modèle
«sans histoire», dans tous les sens de
l’expression, ce
qui
lui enlève
toute réalité temporelle, soumise aux
fragilités de la durée mais lui conserve
la réalité
intellectuelle
d’une hypothèse de travail, comme celles que
l’on sollicite dans un
raisonnement
mathématique
ou
philosophique.
Par ailleurs,
le Progrès, laissé à
lui-même, peut devenir un instrument de destruction et de
régression
voire un instrument de mort et de destruction : lors de la
découverte de la
radioactivité,
pouvait-on
imaginer qu'elle servirait à fabriquer ces armes de
destructions massives que
détiendront
bientôt
les
terroristes … Mais il permet aussi aux hommes de vivre
mieux, d'améliorer
infiniment
les
conditions
matérielles de
Leur
existence
et d'aller toujours plus loin dans la saine conquête de la
nature.
La franc
maçonnerie est une philosophie de fraternité et
d'humanisme, elle est à même de
recréer,
entre
les
humains, les liens sociaux qui se délitent dramatiquement
entre voisins, dans
les quartiers,
les
bureaux,
les ateliers, etc... La franc maçonnerie peut
rebâtir du dialogue.
Nos FF\
aînés des XVIIIe et XIXe siècles ont
été des utopistes. N’est-ce pas
là la
réelle vocation
de
notre Ordre?
Nous avons le devoir d’éclairer la marche de
l’humanité. Nous avons le devoir
d’émettre
des
idées neuves ? Soyons les gardiens de la morale et de
l'éthique face aux
apprentissorciers
en
tous genres.
Mesurons avec sagesse et pondération les risques de
dérapages dans les
découvertes
scientifiques de l'infiniment petit, sur les O.G.M., sur le clonage
humain
ainsi que sur
les
futures
découvertes...
Grâce
à la
mondialisation, tous les moyens sont là pour instaurer
l'universalisme si cher
à notre
pensée
!
Par notre
travail, nous pouvons contribuer à faire en sorte que toute
l'humanité ait
accès aux droits
fondamentaux
que sont la nourriture, l'eau, les soins médicaux, le
logement, l'éducation.
Heureusement
que, dans ce monde à vau-l’eau, il reste des
îlots de pensées utopistes. La
Franc-Maçonnerie
est un de
ceux-là . |