Le
statut de l’Embryon et de la Procréation
Introduction
« Les utopies apparaissent comme
bien plus réalisables qu'on ne le croyait autrefois et nous
nous trouvons devant une question bien autrement angoissante : comment
éviter leur réalisation définitive ?
Peut-être un siècle nouveau commence-t-il, un
siècle où les intellectuels et la classe
cultivée rêveront un moyen d'éviter les
utopies et de retourner à une société
moins parfaite et plus libre ? »
Dans notre monde en pleine effervescence où
les illusions côtoient les désillusions,
où les espoirs de tous ordres sont à la mesure
(ou plutôt à la démesure) des
désespoirs, où plus rien ne nous semble
impossible, il me semblait intéressant de débuter
ce travail sur le statut de la procréation et de l'embryon
par cet avis d'Aldous HUXLEY extrait de son Meilleur des mondes.
Malgré le risque que cela représente.
Pourquoi un risque ? Pour la bonne et simple raison que cet ouvrage
universellement connu est inéluctablement remis sur le
devant de la scène dès que l'on aborde
l'épineux problème que nous posent aujourd'hui
l'évolution des connaissances et des techniques relatives
à la procréation.
Référence toujours
d'actualité, prête à bondir et
à sortir son arme la plus redoutable si besoin est : le
terrible terme « eugénisme ».
Association malheureusement trop simpliste qui témoigne
simplement de la peur suscitée par le bouleversement
engendré par l'évolution exponentielle des
connaissances scientifiques notamment dans les domaines du vivant.
Rappelons-nous par exemple des réactions des
médias le lendemain de l'annonce du clonage de Dolly.
Il est pourtant aujourd'hui important de casser cette relation
exclusive procréation assistée -
eugénisme. Aucun progrès humain ne saura sortir
si nous ne faisons pas l'effort de mettre de côté
cette angoisse incontrôlable que nous dissimulons
derrière le mot eugénisme.
Nous allons donc commencer par voir comment la procréation
et l'embryon ont été
appréhendés au cours de l'évolution de
l'Homme. Car il est bien évident que notre approche actuelle
s'inscrit dans une dynamique liée non seulement à
l'évolution des connaissances scientifiques, mais
également à l'évolution du statut
« métaphysique »
et social que nous les sociétés ont
accordée à la procréation et
à l'embryon. Pour être plus précis, ce
questionnement nous renvoie immanquablement à une
série d'interrogations qui hantaient
déjà les hommes du Paléolithique :
d'où venons-nous ? Où allons-nous ? Qu'est-ce que
la vie ? Quand est-elle apparue ? Comment ? Qu'y a-t-il
après la mort ?
Un rapide inventaire des différentes
techniques actuelles liées à la
procréation nous permettra ensuite d'aborder les
problèmes éthiques. Nous essaieront alors de
définir l'eugénisme, ou plus exactement les
eugénismes car, derrière ce mot si
fréquemment employé, existent bien
différents aspects.
L'embryon est selon le dictionnaire Robert de la langue
française un « Organisme en
voie de développement, ce qui commence d'être mais
n'est pas achevé ». Un embryon
a la potentialité de se développer en un
organisme complet, contribuant à la formation de toutes ses
parties. Comment aurait-on pu imaginer qu'un si petit paquet de
cellules, invisibles à l'oeil nu, fasse un jour couler
autant d'encre ? Sous la trop vive lumière des projecteurs,
le voilà au milieu de toutes les réflexions, de
toutes les observations, de tous les commentaires, jugé,
évalué. Chacun y va de son refrain : entre la
religion, la science, la morale, le voici, tout penaud, à
attendre que l'on statue sur lui. Un peu comme le petit
écolier qui attend, anxieux, le résultat du
conseil des professeurs...
A la fois objet de tous les espoirs, de toutes les
craintes, des fantasmes des plus extravagants aux plus dangereux, il
attend de savoir ce qu'il va devenir : va-t-on pouvoir l'utiliser, dans
quelles mesures, pourquoi et comment doit-on le protéger ?
Les conséquences de ces réponses sur la
société sont importantes : les techniques de PMA,
la politique de contraception ou encore le recours à l'IVG
en dépendent.
Comme l'élève, il est là, immobile,
silencieux, forcément silencieux. Et si
mystérieux. Tellement mystérieux que toute
personne qui prétend le connaître, qui affirme
tout savoir sur lui ne peut être que suspecte...
Entre chose et personne, qui est-il vraiment ? Cette réponse
conditionnera son avenir. Selon décision, en caricaturant,
on pourrait dire qu'il rentrera soit au couvent...soit dans un
laboratoire de recherche...
HISTORIQUE DES CONCEPTIONS SUR LA CONCEPTION...
A l'aube de l'Humanité
Les témoignages de l'archéologie, comme les
Vénus préhistoriques, nous montrent la
vénération mêlée de crainte
qu'éprouvaient les hommes de cette époque envers
la femme. Parce qu'ils n'avaient pas encore établi de
relation directe entre l'acte de reproduction et la naissance d'un
enfant, les femmes étaient considérées
comme des Déesses, symboles de la
fécondité.
La sédentarisation des hommes du Néolithique
marque la fin de cet état. Parce qu'il cultive, parce qu'il
commence à domestiquer et à élever des
animaux, parce qu'il observe et fait des analogies, l'homme prend
conscience du rôle qu'il a dans la procréation.
Mais de même qu'ils ont pu considérer la moisson
comme un bienfait de la Terre Déesse-Mère en
réponse à des offrandes de graines
ensemencées, ils ont peut-être vu dans l'acte
sexuel un rite conjuratoire destiné à leur
attirer la bienveillance des divinités de la
fertilité. Rapidement cependant, la femme n'est plus cet
être si inquiétant et fascinant, maître
de la vie. L'homme devient prédominant : si la femme
était porteuse intrinsèquement d'un principe de
vie, elle pourrait concevoir sans copulation.
Les séministes
C'est ainsi qu'après avoir éprouvé
l'honneur d'être traitée de Déesse, la
pauvre femme se voit affligée le rôle unique
de « nourricière »,
de « four » dans lequel les
semences masculines et féminines cuisent, l'embryon
n'étant que l'aboutissement du développement du
sperme de l'homme. Voici ce qui marque l'émergence d'une
première grande conception, appelée
« séministe » (car
relative aux semences), représentée par
les Présocratiques comme Hippocrate (IVème
siècle avant JC). Il faut cependant noter que son origine
est lointaine : le sperme est citée comme étant
source de la vie dans un papyrus égyptien datant de -2 000 !
Parmi les fervents défenseurs du courant
séministe, on retrouvera Pythagore, qui considère
que la semence masculine est « l'écume
du meilleur sang » et
Démocrite, pour qui le sperme est « une
abstraction de toutes les parties du corps »,
ce qui explique « l'étourdissement
de courte durée » qui
accompagne le commerce charnel. Une mention spéciale doit
être décernée à Platon qui,
en -400 explique dans le Timée que la semence masculine
contient des petits êtres vivants destinés
à être déposés dans la
matrice féminine pour s'y développer.
La nécessaire semence féminine, quant
à elle, offre plus à discussion. Hippocrate et
Galien l'identifient aux sécrétions
émises lors de l'acte sexuel, mais dont la plus grande
partie resterait dans la matrice. « La
femme aussi éjacule, écrit Hippocrate,
tantôt dans la matrice, tantôt en dehors si la
matrice est plus béante qu'il ne convient
».
L'origine de la semence prête
également à discussion : certains comme Platon la
voit provenant de la moelle, et d'autres, comme Alcméon et
Hippocrate, profèrent qu'elle vient du cerveau. Ce dernier
suppose que les deux semences se mélangent à part
égale et prennent vie en s'épaississant, sous les
influences contraires d'un esprit chaud venant de la moiteur
utérine et d'un esprit froid provenant de la respiration
maternelle. Jusqu'à cette époque, si le couple
est stérile, c'est assurément que la matrice de
la femme est inadéquate, son utérus
étant trop humide ou trop froid...
Cette conception se retrouvera, à quelques
nuances près, jusqu'au XVIIème siècle.
Le Moyen-Age exacerbera, à quelques exceptions
près, le rôle prédominant de l'homme
dans la procréation. Durant le XVIIème
siècle, les débats concernant la
procréation et l'embryon se multiplient à coup
d'arguments idéologiques, d'explications dogmatiques et
fantasques. La découverte des gamètes
mâles complique considérablement le
problème et, ce, malgré des
découvertes fondamentales. Tel Antony Van Leeuwenhok qui, en
découvrant les spermatozoïdes, croyait observer de
véritables familles d'animalcules. Observant la
semence masculine, il écrit : « J'ai
vu une telle quantité d'animalcules vermiformes y vivant que
plus de mille se mouvaient dans l'espace d'un grain de sable. Ces
animalcules étaient plus petits que les globules rouges du
sang. Ils avaient des corps arrondis, mousses en avant,
terminés en pointe en arrière, et
étaient munis d'une queue ayant cinq ou six fois la longueur
du corps. Ils progressaient par un mouvement serpentiforme de la queue,
en nageant à la façon d'une anguille ».
D'autres théories apparaissent. Les
« moléculistes » comme
Maupertuis considèrent que chaque partie du corps de l'homme
et de la femme participe à l'élaboration de la
semence. Lors de la fécondation, les molécules
s'apparient par genre (visage avec visage, bras avec bras...), selon un
phénomène d'attraction qui n'est pas sans
rappeler celui de Newton.
Les ovistes
Mais la fin du XVIIème siècle marquera la lente
disparition de la théorie séministe au profit de
la mouvance « oviste ». De
nouvelles recherches faites en particulier en 1651 par Harvey mettent
en évidence la présence de petites
« verrues » dans
« la matrice d'animaux en rut ayant
reçu le mâle », dont
la taille augmente progressivement jusqu'à former le fotus.
En 1667, Nicolas Sténon met en évidence l'ovule.
D'autres découvertes, par De Graaf, Van Horme, Malpighi
complètent cette théorie. Fontenelle la
résumera clairement : « Tous
les animaux ovipares doivent constamment leur naissance à
des oufs que les femelles ont jetés hors d'elles ; et il y a
bien de l'apparence que le vivipares ne diffèrent des
ovipares qu'en ce que leurs femelles ont couvé et fait
éclore leurs oufs en dedans d'elles-mêmes ».
Quant à la prétendue semence féminine,
Bartholin la jettera aux oubliettes : c'est « une
substance glanduleuse, presque analogue ou même tout
à fait semblable à celle de la prostate des
hommes ».
Cette énigme fondamentale résolue
grâce des siècles de recherche, on aurait pu
être droit d'attendre une sorte de pause des esprits. Mais
comme souvent en sciences, une réponse donnée
appelle dix nouvelles questions. Dans le cas de la
procréation, la réponse biologique appela
immédiatement un questionnement d'ordre
métaphysique.
QUESTIONNEMENTS METAPHYSIQUES
Historique des réponses
De même qu'il est impossible de déterminer le
premier être vivant apparu sur Terre, il est impossible de
définir à quel moment de la grossesse se fait le
passage à l'être humain. En effet, à
quel moment doit-on parler d'être humain, de personne
humaine, d'individu ? A-t-il une âme ? Si oui,
apparaît-elle dès la conception ou en est-elle
différée ? Et comment l'animation se produit-elle
?
La connaissance que nous avons aujourd'hui de toute la
physiologie de la procréation ne saurait occulter ces
interrogations incessantes relatives au sens de la vie, à la
question des origines, questionnement métaphysique s'il en
est, qui nous renvoie obligatoirement à la notion de
sacré et, pour certains, à la religion. Claude
Humeau écrit ainsi : « Comment
les premiers agriculteurs, constatant que les graines
ensemencées renaissaient indéfiniment,
n'auraient-ils pas imaginé les rites funéraires
dans l'espoir d'une vie après la mort, soit un
éventuel retour, soit la survie dans un monde où
demeurent les dieux ? Comme il est clair que le corps
retourné à la terre disparaît, il
fallait bien imaginer une entité immortelle,
enfermée dans la coquille du corps, qui nous console
d'être mortel. Depuis les temps immémoriaux la vie
est sacrée, elle nous est donnée par les dieux
qui en connaissent la destinée et dont ils coupent le fil
selon leur bon vouloir. C'est la mort qui a donné un sens
sacré à la vie et spécialement
à ses débuts, car l'angoisse viscérale
de la fin n'est que l'expression paroxystique de l'interrogation
académique sur les commencements ».
Et évidemment, plus nous allons vers de « début
de la vie », vers le minuscule, plus les
interrogations appellent des débats passionnés.
Partant de cette constatation, les hommes croyants,
athées, agnostiques, indifférentistes, etc. ont
tous cherché des réponses à ces
questions : qu'est-ce que la vie ? où et quand
commence-t-elle ? où finit-elle ? ou, comme le demandait
Liebniz : « Pourquoi y a-t-il quelque
chose plutôt que rien ? » A propos de
la notion de vie, André Pichot, paraphrasant Saint-Augustin,
écrivait : « Si personne ne me
demande ce que c'est, je le sais, mais si on me le demande et que je
veuille l'expliquer, je ne sais plus ».
Beaucoup de scientifiques s'accordent à dire que la vie ne
« commencerait pas »
à la fusion de l'ovule avec le spermatozoïde, mais
qu'elle « continuerait »,
passant de deux cellules vivantes à un organisme vivant se
développant.
Certains rajouteront l'épineux problème de
l'animation de l'embryon, c'est-à-dire de l'apparition de
l'âme (problème complexifié
déjà par l'impossible définition
consensuelle de l'âme) : Quand apparaît-elle ?
D'où vient-elle ? Certains pensent que l'animation est
immédiate, dès la conception, tel Tertullien qui
soutenait que « la réunion du
corps et de l'âme a lieu dès
l'agglomération des semences ».
D'autres, comme Hippocrate, pensent que le passage se fait
progressivement. Ici, nous retrouverons également les points
de vues relatifs à la place des femmes dans la
procréation et dans la société.
Aristote, ainsi, pensera que l'animation du mâle
s'achève au 40ème jour et celle de la femme au
90ème jour. Peut-être pourrait-on expliquer ainsi
la différence d'espérance de vie entre les hommes
et les femmes ? Certains encore ont des avis plus nuancés,
tels Grégoire de Nysse, Saint-Augustin, Saint-Thomas ou
encore Saint-Jérôme pour qui « les
semences prennent forme graduellement et qu'il n'y a pas d'homicide
tant que les différents éléments n'ont
pas reçu leur apparence et leur forme ».
La réponse apportée par les
différents acteurs de ces débats aura bien
évidemment des répercussions juridiques,
législatives, sociales sur les
sociétés et ce quelque soit l'époque
à laquelle nous nous référons. Au
cours de la Monarchie Absolue, par exemple, l'Eglise Catholique
prédominante prononcera un arrêt
définitif en 1588, par l'intermédiaire de Sixte
Quint : « Par notre constitution valable
à perpétuité, nous décidons
et ordonnons que tous ceux qui ont provoqué des avortements
d'un fœtus immature aussi bien inanimé
qu'animé encourent des peines établies tant selon
le droit divin qu'humain...à l'encontre des meurtriers ».
Il est inutile de préciser que cette fameuse peine encourue
n'était autre que la peine capitale (avec plus ou moins de
tortures préalable) et la promesse de l'enfer...
Mais trois ans plus tard, en 1591, Grégoire XIV prend une
position radicalement inverse : « Nous
révoquons à perpétuité la
constitution précitée comme si cette constitution
n'avait jamais été publiée ».
Trois siècles plus tard, en 1903, le
dictionnaire de théologie catholique exprime toujours la
perplexité des spécialistes :
« Dans l'état actuel de la
question, il semble qu'il n'y ait ni dans la sainte-Ecriture, ni dans
la tradition, ni dans les documents pontificaux, ni dans la
théologie, ni dans la philosophie, ni enfin dans la biologie
aucun argument décisif en faveur de l'une ou l'autre
animation, immédiate ou tardive ; la question reste donc
libre ». Si bien qu'aujourd'hui,
l'église catholique, apostolique et romaine s'en tire en
adoptant une thèse probabiliste selon laquelle, dans le
doute et à tout hasard, on doit faire comme si
l'âme humaine était infuse dès sa
conception.
En résumé, selon ce courant dogmatique, la vie
humaine commence à la conception et elle est
sacrée puisque créée par Dieu. C'est
sur cette interprétation fondamentaliste du christianisme
que les traditionalistes se basent pour s'opposer aujourd'hui
à la contraception (qui est un péché
dans la mesure où elle limite le nombre d'enfant
prévu par Dieu), mais également
l'éducation sexuelle, l'IVG et ITG, les techniques des PMA
puisque toute intervention humaine dans le déroulement du
cycle de la vie est une profanation. L'embryon est
considéré comme une personne, un individu,
dès sa conception car, dès la
fécondation, il possède tout le potentiel
génétique lui permettant de se
développer.
Jérôme Lejeune,
généticien et leader idéologique des
anti-IVG, s'adressait le 23 avril 1981 devant la commission du
Sénat des Etats-Unis sur le projet de loi disant que la vie
humaine doit être tenue pour existante depuis la conception
en ces termes : « si un étudiant
regardant la première cellule du fœtus sous un
microscope était incapable de reconnaître le
nombre, la forme et l'aspect des bandes de ses chromosomes, s'il ne
pouvait pas dire avec certitude si cette cellule provient d'un
être simien ou d'un être humain, il serait
refusé à son examen car accepter le fait
qu'après la fécondation un nouvel être
humain est parvenu à l'être n'est plus une
question de goût ou d'opinion. La nature humaine de
l'être humain, depuis la conception jusqu'à la
vieillesse, n'est pas une hypothèse métaphysique,
mais bien une évidence expérimentale ».
Opinion qui pourrait être respectable si elle
n'était suivie d'actions violentes à l'encontre
de ceux qui ne partagent pas son point de vue. En imposant leur vision
de l'humain, ils veulent se placer en sauveurs d'une
société qu'ils considèrent comme
décadente, comme « Missionnaires
des temps modernes » dixit Xavier Dor.
La position sur la sexualité (sans faire de mauvais jeu de
mots) extrémiste de ces intégristes nous permet
d'élargir le débat : comment
considérer l'embryon ? comme un être humain, comme
personne humaine ou comme individu ?
Là encore, les réponses varient selon les
courants philosophiques et/ou religieux.
De la métaphysique à la législation :
l'origine d'un débat insoluble...
Le législateur a un rôle difficile : non seulement
le sujet à traiter est extrêmement complexe de par
les questions posées, mais les évolutions rapides
des connaissances et des techniques l'obligent à
réactualiser sans cesse ses positions. En prenant soin de
respecter les différentes convictions sur ce sujet, il doit
essayer d'aboutir à un consensus non seulement au niveau
national, mais maintenant au niveau européen et
même au niveau mondial.
Ce n'est bien sûr pas le cas : « l'éthique
d'aujourd'hui est donc infiniment plus complexe que celle d'hier. Il
n'y a plus de questions, ni de réponses simples et c'est
sans doute ce qui choque nos contemporains.
Chaque cas est un cas litigieux dans lequel il faut
peser le pour et le contre »
(René Frydman).
Considérés aujourd'hui dans notre
société comme apprentis sorciers, jouant avec
l'alphabet de l'ADN, jonglant avec les gènes, tel un nouveau
Maharal de Prague, mais dépourvu de sagesse, ou
étiqueté « créateurs
à la place de Dieu » par certains, le
biologiste et le médecin sont appelés
à la rescousse pour répondre à ces
questions.
Situation extraordinairement paradoxale, qui n'est pas sans
révéler la confusion qui règne
actuellement dans nos sociétés.
Le statut actuel : la recherche d'un consensus
La complexité des questions posées et la
pluralité légitime des conceptions philosophiques
a poussé le législateur ou les membres du
Comité Consultatif National d'Ethique, par exemple,
à prendre des mesures contradictoires.
Alors qu'il met en avant le principe intangible de « dignité
de l'embryon », il admet, dans le même
temps, certaines recherches sur celui-ci, qui aboutiront
obligatoirement à sa destruction.
Certaines autres déclarations ont, au contraire,
montré la recherche d'un consensus prenant en compte les
différentes conceptions idéologiques de ses
membres. Ainsi, lorsque le Comité Consultatif National
d'Ethique définit l'embryon en « personne
humaine potentielle »,
définition qui n'éclaire que partiellement le
débat.
L'APRES DOLLY, « ARRETEZ VOS
CLONNERIES » OU « L'EXPERIENCE INTERDITE »
?
Quand la réalité rejoint la
fiction
Et puis un jour, comme le début d'une nouvelle histoire, on
pourrait dire, à la manière de Daniel Rocher :
« Ca a commencé par des
moutons. Les moutons, c'est bien commode : ça se ressemble
déjà avant d'être cloné. Et
puis, ça belle à l'unisson. L'homme, lui, hurle
avec les loups. » Nous sommes
début 1997 ; alors que, comme le soulignait Axel Kahn,
« l'humanité conservait un
reliquat d'insouciance qui la tenait éloignée des
perspectives les plus tragiques de sa condition »,
un homme réussissait ce que l'on pensait impossible. Dans un
laboratoire écossais spécialisé en
agro-alimentaire, l'équipe du Professeur Wilmut
réussissait à cloner une brebis adulte
à partir d'une cellule « spécialisée ».
Oh ! Ce genre de scénario catastrophe, tout le monde y
pensait depuis longtemps. Il est tellement simple d'imaginer un de ces
« savants fous »
à la Tournesol enfermé, la nuit (de
préférence), dans un laboratoire caché
et essayant de mettre au monde des hommes à plusieurs
têtes ou, pire encore, des chimères homme-animal...
Ca y était ! Malgré les conseils de sagesse
émanant de certains (reste à savoir de qui ?) ces
irresponsables avaient dépassé la limite de ce
qu'il ne fallait surtout pas dépasser... Cette fois-ci,
l'homme allait, comme le disait certaines personnes,
« contre-nature ».
Seulement voilà : quand on guérit des maladies,
quand on prend des médicaments, ne va-t-on pas contre-nature
? Quand on pallie à des insuffisances, quand on remplace des
organes touchés, ne va-t-on pas contre-nature ? Quand on
effectue une césarienne, ne va-t-on pas encore contre-nature
? Ce faux argument, avancé afin de condamner un
progrès scientifique, ne saurait sûrement
être retenu lors d'une réflexion
sérieuse sur ce sujet.
Le spectre de l'eugénisme
LA CRAINTE D'UN EUGENISME SOUS-JACENT
D'ailleurs, on peut penser que ce qui fait le plus peur au bon citoyen
que nous sommes était ailleurs : ce prestigieux
développement des techniques de PMA et le clonage
récent de la brebis Dolly ajoutaient une nouvelle crainte
qui n'était cette fois-ci pas relative à une
conception métaphysique de l'être humain, mais qui
concernait les conséquences sur notre
société de l'utilisation de ces techniques.
« Cela fait plus d'une semaine que Dolly,
l'agnelle-clone, écrivait Pierre-Yves Frei à ce
sujet, tient le haut de l'affiche. Elle n'est pas la seule. Depuis le
début, un indésirable intrus la parasite, un
dictateur hypothétique que le futur ne saurait manquer de
créer, un despote annoncé technophile et
féru de génétique dont le seul
rêve prendrait la forme d'une armée
composée de surhommes clonés ».
A l'annonce de la naissance de Dolly, les esprits
s'échauffèrent. Les médias aussi
d'ailleurs. Le nécessaire débat finit par ne plus
porter sur les véritables problèmes, mais sur les
réalisations hypothétiques. Et s'il est un mot
qui revint incessamment dans toutes les pensées, et sur
toutes les lèvres, sur toutes les lignes pendant cette
période troublée, c'est bien le mot
« eugénisme
», sans que ceux qui l'utilisaient puissent clairement le
définir. « La menace de
l'eugénisme tient lieu d'argument à ceux qui sont
hostiles à une technique sans parvenir à formuler
les raisons de leur répugnance. Aussi ce mot de passe
circule-t-il beaucoup. Mais sait-on seulement de quoi on parle
? » s'interroge Jean-Paul Thomas.
Le mot est pourtant banal à l'origine :
« l'eugénisme »,
c'est simplement, étymologiquement, l'art des
« bonnes naissances ».
Et quoi de plus légitime que de souhaiter des enfants en
bonne santé ? Mais les perversions de l'eugénisme
ont jeté l'opprobre sur le terme. Au lendemain de l'horreur
nazie, « l'eugénisme »
porte le sceau de l'infamie. On peut le définir aujourd'hui
comme « l'ensemble des méthodes
qui visent à améliorer le patrimoine
génétique d'un groupe humain, en limitant la
reproduction des individus porteurs de caractères
jugés défavorables ou en encourageant celle des
individus porteurs de caractères jugés favorables
» (Petit Larousse 1997). Même si il peut impliquer
le corps médical (par l'utilisation de la
stérilisation, comme aux USA en 1907, en Suisse et au Canada
en 1908), on oublie trop souvent que l'eugénisme est avant
tout politique (purification de la race), social,
économique...
« Le mot fascine autant
qu'il angoisse » écrivait
René Frydman, avant d'ajouter : « Cette
fascination-répulsion se retrouve jusqu'au sein du
Comité Consultatif National d'Ethique
». Du Diagnostic PréNatal (DPN) à la
thérapie génique somative, en passant par les
interruptions thérapeutiques de grossesse et le Diagnostic
Préimplantatoire (DPI), beaucoup de pratiques
médicales relatives à la Procréation
Médicalement Assistée (PMA) sont
accusées de favoriser l'eugénisme. Tout se passe
comme si le génome humain était
sacralisé, y compris dans ses gènes les plus
défectueux. Car n'oublions pas que ces techniques
s'adressent à des couples présentant des
pathologies liées à la procréation
(soit des problèmes de stérilité, soit
un risque de transmettre une maladie grave).
La science semble aller trop vite. Ses progrès
inquiètent. Est-ce une raison pour caricaturer ses objectifs
? « A l'innocence de la recherche
scientifique, écrit Jean-Paul Thomas, on a
substitué un peu vivement la thèse d'une sorte de
péché originel de la biologie
moléculaire. [...] Au consensus des esprits
éclairés ont succédé
l'émergence d'une réflexion éthique,
puis la crispation sur des positions de repli, comme si les
problèmes éthiques posés
dépassaient de loin la réflexion humaine ».
LE PROGRES DES TECHNIQUES SCIENTIFIQUES FAVORISE-T-IL L'EUGENISME ?
Mais posons-nous la question : le progrès des techniques
scientifiques favorise-t-il l'eugénisme ?
Avant de répondre, notons déjà que
Dame Nature est déjà eugénique dans la
mesure où une fécondation sur trois aboutit
à une expulsion de l'ouf pour cause de malformation. Pour ce
qui est des autres techniques, on pourrait évidemment
aboutir à un eugénisme si :
· ces techniques étaient
détournées de leur sens premier : celui
d'épargner la souffrance de parents et/ou d'enfants ;
· ces techniques devaient être
généralisées et imposées
à l'ensemble de la population, conduisant
systématiquement à l'élimination ou
à la modification génétique d'embryons
porteurs de gènes dits « défectueux
».
Mais la bataille serait perdue d'avance pour un
Hitler-bis qui chercherait à purifier le patrimoine
génétique de la population en supprimant ces
embryons. La magie de l'évolution humaine et
l'extraordinaire complexité de notre ADN font que nous
sommes tous porteurs d'une demi-douzaine au moins de gènes
« défectueux »
qui ne s'expriment pas forcément, mais qui sont transmis au
hasard à nos descendants. Une lutte systématique
contre ces gènes impliquerait la destruction de quasiment
tous les embryons. D'autant plus que notre génome subit
continuellement des mutations qui, si elles touchent les cellules
germinales, peuvent être transmises à nos
enfants... Cependant, des dérives ont eu lieu et il serait
malhonnête de le cacher. Pensons simplement à la
ridicule affaire des banques de spermes pour les lauréats du
prix Nobel, chargée de recueillir la précieuse
semence de donneurs pourvus de « qualités
exceptionnelles ». Près de
deux cents enfants auraient ainsi vu le jour chez lesquels il est fort
à parier qu'il y a la même proportion
d'imbéciles que dans la population.
Le clonage humain
D'autres dérives, plus dangereuses, ont eu et auront lieu.
Et l'avenir proche du clonage humain, même si il se heurte
aujourd'hui à des obstacles techniques difficiles
à surmonter (nombre d'embryons à reconstituer
afin d'aboutir à une naissance viable, différence
physiologiques entre la brebis et l'homme...), ont mis à
jour d'horribles intentions. On a entendu parler de clones qui
deviendraient une réserve d'organes en cas de
problèmes survenant à l'original. Le vieux mythe
de l'immortalité et de l'éternelle jeunesse a
resurgi : il suffirait de se cloner à la veille de notre
mort pour renaître neuf mois plus tard, etc.
A l'instar de la secte Raël qui, dans un communiqué
officiel datant du 4 mars 1997 (10 jours après Dolly),
annonçait :
Mardi 4 mars 1997
COMMUNIQUE * COMMUNIQUE * COMMUNIQUE *
LE CLONAGE D'UN MOUTON: UNE NOUVELLE CONFIRMATION DES
MESSAGES TRANSMIS PAR
RAEL
Le récent clonage d'un mouton par le Dr Wilmut,
embryologiste écossais désormais passé
à la postérité, est une nouvelle
confirmation des messages des ELOHIM transmis par RAEL. Lorsque RAEL
voilà maintenant 23 ans apportait un message des ELOHIM, ces
extraterrestres qui ont créé toute vie terrestre
scientifiquement en laboratoire par une parfaite maîtrise de
l'ADN, et qu'il précisait entre autre que le
mystère de la résurrection de Jésus
était en fait un clonage réalisé
à cette époque par les ELOHIM, nombreux sont ceux
qui disaient que cela était impossible. Maintenant, les
recherches pouvant aboutir au clonage d'un être humain sont
interdites en Angleterre et dans de nombreux autres pays et Bill
Clinton vient de demander à un comité
d'éthique d'étudier si cela devait être
également interdit aux USA. Cela prouve à quel
point cette technologie, jugée impossible lors des
révélations de RAEL, sont maintenant parfaitement
réalisables.
UN PREMIER PAS VERS L'ETERNITE POUR LES HUMAINS
! Mieux, malgré les interdictions
dictées par des pouvoirs obscurantistes
influencées par des églises
moyenâgeuses, le clonage d'êtres humains va
heureusement être réalisé prochainement
et deviendra comme sur la planète des ELOHIM, un moyen pour
les humains d'atteindre la vie éternelle, la prochaine
étape étant le transfert d'information et de
personnalité d'un individu vieillissant à son
propre clone encore jeune. Aucun comité d'éthique
au monde ne pourra empêcher les être humains de
vouloir acquérir l'éternité. Les lois
humaines devront simplement comme chez les ELOHIM, définir
des critères pour savoir qui aura droit à
bénéficier de ces technologies et limiter le
nombre de clones à un par personne et après sa
disparition. Nous sommes à votre disposition pour tout
complément d'information que vous souhaiteriez obtenir, et
pour cela il vous faut contacter : (téléphone:
021/943 60 66)
Intentions suivies de fait puisque, une semaine plus tard, la
« religion raëlienne »,
comme elle se définit elle-même, créait
« Valiant Venture Ltd »
une compagnie dont un de ses services, baptisé
« Clonaid »
permet « d'offrir l'assistance aux parents
potentiels désirant avoir un enfant qui serait le clone de
l'un d'eux », moyennant tout de
même la somme de 200 000 $.
Et le Docteur Brigitte Boisselier, scientifique française et
directeur scientifique de Clonaid d'ajouter « Les
parents ont le droit de décider d'avoir un enfant qui aura
le même bagage génétique que l'un
d'eux. Il est maintenant courant de voir un homme
décédé être le
père d'un enfant grâce au
procédé de l'implantation de
spermatozoïdes congelés. Imaginez la joie d'une
veuve élevant un enfant ressemblant parfaitement
à son époux
décédé ».
Inutile, je suppose, d'épiloguer sur l'ineptie d'un tel
programme ; même si Raël a trouvé un
soutien de taille en la personne du Professeur américain
Richard Seed, spécialiste de physique, quelque peu
givré, qui souhaite se lancer corps et âme dans
l'aventure du clonage humain (avec le soutien financier de
Raël), rien ne justifie, aujourd'hui, le clonage complet
d'humains. Les quelques intérêts qu'il pourrait
montrer se heurtent aussitôt à la
barrière inaliénable du respect de la
dignité humaine et de l'individualité de
l'être humain.
Conclusions
Dans les 2,5 millions d'années de son existence,
l'espèce animale Homo n'a cessé de progresser
dans ses connaissances et ses techniques, repoussant
régulièrement les limites qu'il avait crues
impossible à franchir. Rien ne semble arrêter
cette soif de connaissances et ce besoin irrépressif qui
pousse notre espèce à vouloir modeler son
environnement à ses désirs. Et cette alternance
connaissances/techniques n'a cessé de
s'accélérer. Mais aujourd'hui, la vertigineuse
explosion des connaissances et des techniques scientifiques ne doit pas
nous laisser béats d'admiration. D'autant plus que nous
sommes en train de vivre une des plus grandes révolutions
scientifiques de tous les temps : l'homme savait
déjà domestiquer la vie : il a depuis longtemps
éradiqué des maladies, pallié
à des insuffisances, favorisé le
développement d'espèces animales et
végétales pour des caractères
précis. Mais il peut maintenant déchiffrer (et
modifier !) le code secret de la vie.
Oh ! bien sûr, il reste encore beaucoup de zones d'ombres.
Mais les progrès accomplis au cours de ces cinquante
dernières années nous montrent bien
l'étendue des connaissances acquises dans ce domaine, qui
n'est pas sans poser d'énormes problèmes
éthiques.
Deux points méritent alors d'être
abordés :
La science doit-elle être morale ?
La science doit-elle être morale ? A mon avis (et
à celui, entre autres, d'Hubert Reeves), ce n'est pas son
rôle d'être bonne ou mauvaise,
d'êtremorale ou amorale. La science
(génétique, biologie évidemment
incluses) doit permettre de dire ce qu'il est possible de faire et ce
qu'il n'est pas actuellement possible de faire. Ce qui peut
être amoral, c'est l'utilisation de ces techniques dans une
société.
Mais alors, doit-on ralentir les recherches
scientifiques afin de permettre une réflexion plus
approfondie, à l'instar de Jacques Testart (père
du premier bébé-éprouvette) qui
prônait une « éthique
de la non recherche » ?
Non, je ne le pense pas. D'autant plus que, comme le souligne Claude
Humeau, « l'incitation à
l'abstinence cognitive est une utopie. Il est patent que rien n'a
jamais pu arrêter le progrès des connaissances,
qui a pourtant été freiné ou
enrayé par des puissances régnantes [...] Mais
l'indiscrétion de l'esprit humain est insatiable,
poursuivant même les chimères que sont selon
Maupertuis la recherche de la pierre philosophale, la quadrature du
cercle et le mouvement perpétuel ».
Et il en est de même pour ceux qui préconisent
« l'apnée technique
», c'est-à-dire le ralentissement des applications
des connaissances. Il est probable que la pulsion de
maîtriser la nature est le moteur de la connaissance.
Préconiser qu'il faut définir les
objectifs bons pour l'humanité, selon des
critères qui restent à préciser, et
orienter ensuite le savoir dans ces directions est une
chimère ; toutes les innovations ont eu leurs deux volets,
le vital et le mortifère selon Claude Humeau, ou la pulsion
de vie et la pulsion de mort selon Hubert Reeves.
Quant aux opinions « irrationnelles »,
les décréter hors-la-loi est tout aussi utopique,
surtout en ce qui concerne la procréation. Leur poid est
trop lourd, les fantasmes habitent nos consciences, même
celles des plus éclairés. Et puis, aucun d'entre
nous n'est plus avancé qu'un autre en matière
d'angoisses existentielles, ni même plus avancé
que l'homme du Néolithique. Certes, nous avons des
explications pour beaucoup de choses.
Mais l'angoisse d'exister est la même : les questions
existentielles sur nos origines, notre fin et le sens de ce passage
demeurent sans réponses.
Quelles réponses peut-on apporter en matière de
législation ?
En matière de procréation, tous nos
problèmes de bioéthique viendront de la
discordance entre le savoir, le pouvoir et le croire. Et c'est
l'arrivée des techniques de PMA qui a
déclenché ces problèmes.
Mais, nous ne devons pas oublier que le droit
à la famille (et donc à avoir un enfant) est un
des droits de la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme ratifiée par la France en 1948 et que la recherche
de réponses thérapeutiques à des
problèmes de stérilité ou de
difficultés à concevoir un enfant en
« bonne santé » est
tout à fait justifié.
Alors, quelles réponses apporter ? A mon humble avis, pour
qu'une technique de PMA soit utilisée en
médecine, et donc théoriquement par des
médecins, je pense qu'il faut qu'elle respecte au moins deux
critères (j'insiste sur le mot médecine, qui est
« l'ensemble des connaissances
scientifiques et des moyens mis en ouvre pour la prévention,
la guérison ou le soulagement des blessures, maladies ou
infirmités » (Petit Larousse
1997)) :
Est-elle utilisée pour venir en aide à une
situation de détresse ou de pathologie pour un couple ?
(stérilité, risque de transmettre une maladie,
etc.). Déjà, nous pouvons dire qu'utiliser une
technique X ou Y afin de choisir la couleur des yeux ou le sexe de son
enfant ne peut pas être accepté (c'est pourtant ce
qui se passe en Inde...) sauf, peut-être, si une maladie
grave liée au sexe risque d'être transmise. En
dehors de ce cas particulier, il est difficile de trouver une
justification médicale... Deux autres exemples :
« l'exploit »
réalisé par cet obstétricien italien
qui, il y a 4 ans, a permis à une femme
ménopausée d'avoir un enfant. Là
encore, on ne peut pas dire qu'il ait répondu à
une situation de détresse ou de pathologie. Et dans le cas
d'une femme qui souhaiterait un enfant sans avoir de relations
sexuelles, idem.
Assure-t-on la dignité du futur enfant
à venir ? Si cet enfant est attendu, est
désiré par ses parents, si il est
considéré comme individu à venir rien
ne pourrait s'opposer à l'utilisation des techniques. Ce qui
n'est évidemment pas le cas dans le cas de clonage humain,
et ce dans n'importe quel cas. Car nous savons bien, intuitivement
même, que nous touchons ici à quelque chose de
tabou, à ce qui fonde toute notre civilisation :
l'unicité de l'être.
Il est évident que certains cas ne sont pas si simples.
Restera alors la nécessaire discussion,
réflexion, confrontation d'arguments que chacun doit mener
dans la sérénité, en essayant de
toujours avoir pour préoccupation la
compréhension face à des situations quelquefois
complexes. Aucune réponse définitive ne pourra
être donnée, dans la mesure où, comme
écrit René Frydman, « toute
réponse totalisante qui prétendrait
réduire l'homme à une définition
simple serait, par essence, totalitaire ».
Indubitablement, aucun consensus ne pourra
être trouvé. Mais grâce à la
réflexion de chacun sur ce sujet, chacun pourra apporter une
pierre afin de bâtir une société liant
progrès et humanisme. Il me reste à
vous faire part d'une de mes craintes qui, malheureusement, ne fait
qu'augmenter : c'est celle relative à la puissance trop
importante de l'argent-roi dans notre société.
Pour quelques dollars, euros, ou francs alignés devant eux,
des hommes sont capables de tout transgresser et d'oublier en toute
conscience l'essence même de toute éthique : le
respect de l'être humain.
A nous d'être vigilants, toujours sur le qui-vive, toujours
prêts à nous battre pour ce monde utopique nous
espérons tous : un monde meilleur (et non pas le meilleur
des mondes...), plus juste et plus fraternel, avec toujours moins de
misère et de souffrance.
O\ B\
BIBLIOGRAPHIE
FRYDMAN René Dieu, la médecine et l'embryon
Editions Odile Jacob 1997
BERNARD Jean La bioéthique Dominos Flammarion 1994
DEBRE Patrice La maîtrise du vivant Dominos Flammarion 1998
HUMEAU Claude Procréer - Histoire et
représentations Editions Odile Jacob 1999
KAHN Axel Copies conformes- Le clonage en question Nil Editions 1997
VENNER Fiammetta L'opposition à l'avortement Berg
International 1995
Comité Consultatif National d'Ethique
Comité International de Bioéthique
Dossier de l'Express sur le clonage
Dossier de Libération sur le clonage
Secte Raël
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