DH | Loge : NC | Date : NC |
Liberté,
Egalité, Fraternité Célèbre
devise
Française d’origine révolutionnaire,
elle se confond avec l’histoire de
l’idée
républicaine, puis avec celle de la République au
point d’en devenir un des
principaux symboles. En
usage entre 1793
et le Consulat,
puis sous la IIème
République (1848-1851), la triade constitue depuis 1871, la
devise officieuse
puis officielle de la République Française. Pour
le franc-maçon,
cette devise possède une force symbolique
intrinsèque dont il prend la mesure
lorsqu’il la prononce en loge après
l’acclamation écossaise. Loin
de s’imposer
naturellement d’elles-mêmes, les valeurs de
liberté, d’égalité et de
fraternité
ne se sont affirmées qu’au terme d’un
long combat. En effet avant d’être
consacrées dans la devise de la République et de
nos loges, elles ont eu des
légitimités différentes. Il
est à l’honneur
de la franc-maçonnerie de les avoir nourries, d’en
avoir perçu la première le
caractère fondateur et d’en avoir
favorisé la synthèse dans le temple et dans
le monde profane. Portées
par la
Renaissance, ces 3 valeurs se sont retrouvées au sein de
différents courants de
pensée humaniste soucieux de lutter contre
l’injustice et l’arbitraire. La
maxime « Liberté, Egalité,
Fraternité » puise ses origines au
XVIIIème siècle (Siècle des
Lumières). En
1755, dans une
ode à la gloire du gouvernement helvétique,
Voltaire associe implicitement les
3 termes : « la
Liberté ! J’ai vu cette déesse
altière avec égalité
répandant tous ses
biens…Les états sont égaux et les
hommes sont frères. » Mais
c’est
Rousseau qui, dans son Discours sur l’économie
(1855) propose cette triade
comme une des bases du contrat social. La
devise n’est
toutefois pas officiellement constituée en 1789 et,
contrairement aux idées
reçues, elle ne devient pas une création
officielle de la Révolution, bien
qu’elle en incarne certaines valeurs clefs. Seuls les deux
premiers termes ont
été associés dans la
Déclaration des Droits de l’homme du 26 /06/1789 :
« Les hommes naissent et demeurent libres
et égaux en droit » La
première triple
association est attribuée à Robespierre dans son
discours prononcé en décembre
1790 lors de la création des Gardes Nationales. Cette
expression a accompagné
l’aventure révolutionnaire de Juin 1793
jusqu’au Consulat (1799). Sans avoir
été devise officielle, l’expression a
tout de même marqué les esprits et s’est
imposé comme le symbole des acquis politiques et sociaux
révolutionnaires,
comme un programme politique et, à terme, comme un point de
ralliement pour les
républicains. De
1790 à 1830, la
devise n’est plus utilisée ; suivent 1846
et 1847, années de grande
tension sociale et politique qui aboutissent à la
Révolution de Février 1848. La
seconde
République consacre l’expression après
que le gouvernement provisoire l’emploie
dans sa première déclaration (24
Février 1848) La IIIème République coïncide avec la renaissance de l’expérience républicaine et la réactivation de la devise tryptique en 1871. Cependant, il faut attendre la révision constitutionnelle de 1879 pour que soit prise la décision de réinscrire les trois mots aux frontons des bâtiments officiels. Le périple de la triade s’achève glorieusement puisque la constitution du 4 octobre 1958 l’impose comme la devise constitutionnelle de la République Française. De
la revue de
littérature, il découle qu’il est
impossible de fixer clairement l’origine
maçonnique ou républicaine de la devise. En
effet, les recherches les plus
récentes engendrées par le Bicentenaire de la
Révolution montrent que
l’antériorité maçonnique de
la devise Liberté, Egalité, Fraternité
n’a aucun
fondement concerté au sein des obédiences et des
rites maçonniques de l’époque
considérée ie de 1770 à 1848.
1848 : apparition de la devise sur le drapeau
français ; 1849 : au niveau du GODF,
l’acclamation devient L, E, F en
lieu et place de vivat, vivat, semper vivat. De
nombreuses
anecdotes peuvent expliquer les rivalités
d’attribution de l’origine de la
devise. On a retrouvé à la
Bibliothèque Nationale, une trace de la création
par
le GO d’une loge militaire portant le titre distinctif
« Liberté, Egalité,
Fraternité » sise à
l’orient de la légion franche
étrangère. Cette loge a
été installée le 14/03/1793 par la
Respectable Loge « L’Amitié et
Fraternité » ( Orient de Dunkerque).
Certes, il s’agit d’un titre
distinctif, d’un nom de loge ; or, ce titre de la
loge est évoqué à chaque
tenue, au moins deux fois, à l’ouverture et
à la fermeture des travaux comme
aujourd’hui. De
là à en faire une
devise… la chose est d’autant plus facile
qu’une loge militaire se déplace et
reçoit de nombreux visiteurs. En
1848, lorsque
Lamartine qui n’était pas franc-maçon
(mais qui adhérait à l’idéal
maçonnique)
proclama la IIème République, il
déclara : « sur le drapeau
national
sont écrit ces mots : République
Française, Liberté, Egalité,
Fraternité,
trois mots qui expliquent le sens le plus étendu des
doctrines démocratiques, dont le drapeau est
le symbole, en même temps que ses couleurs en continuent la
tradition » Quelques
jours plus
tard, Adolphe Crémieux, franc-maçon et membre du
Gouvernement Provisoire, reçut
une délégation des Loges maçonniques
et prononça au nom du Gouvernement, la
phrase suivante : « Dans tous les temps,
dans toutes les
circonstances, sous l’oppression de la pensée
comme sous la tyrannie du
pouvoir, la maçonnerie a
répété sans cesse ces mots
sublimes : Liberté,
Egalité,
Fraternité ! » Jules
Barbier de la
délégation maçonnique a
ajouté : « Nous saluons
des acclamations
les plus vives le gouvernement républicain qui a inscrit sur
la bannière de la
France cette triple devise qui fut toujours celles de la
Franc-maçonnerie : Liberté,
Egalité, Fraternité » Pour le rite écossais,
Adolphe Crémieux,
devenu Souverain Grand Commandeur du Rite Ecossais Ancien et
Accepté en 1869,
entreprit de refondre les Règlements
Généraux du Rite qui dataient de 1846.
Entre autres propositions, il souhaitait inclure à la fin de
l’article II, la
phrase : « l’Ordre
Maçonnique a pour devise Liberté,
Egalité,
Fraternité…. » Sur ce point
précis, point
d’opposition ; le blocage portait sur
l’invocation au
GADLU. Ce blocage suivi de la guerre franco-allemande, de la
surveillance des
loges par la police (1874) , le début des actions
anticléricales ont détourné
les préoccupations des Francs-Maçons du Rite
Ecossais. Finalement, la devise
maçonnique fut affirmée dans un décret
datant du 2/12/1873 avec effet le
1/05/1874. La
discussion porte
sur le sens à donner aux trois mots et à leur
conjonction en une formule :
la liberté est-elle bornée ? si oui, par
quoi ? égalité de droit ou
égalité économique ?
égalité ou
équité ? qu’est-ce que la
fraternité
apporte aux deux premières notions ? Les valeurs
politiques doivent guider
et mesurer la valeur d’un système
d’organisation sociale. La
liberté. Deux
notions s’en détachent : une
liberté de « l’état
de nature »
dite sauvage et une liberté régulée et
policée, définie par des règles
sociales
telles que « ce qui ne nuit pas à
autrui » ou « ce qui
n’est pas
interdit par la loi ». La liberté dite
sauvage institue la loi du plus
fort et la violence généralisée. La
liberté régulée est celle compatible
avec
la vie en société. La liberté doit
être l’aboutissement d’une
conquête et d’une
construction progressive. L’homme libre n’est pas
la brute qui suit ses
instincts et ses passions, mais celui qui pense, sent et agit selon la
pensée.
Dès lors, la liberté de l’individu
n’est pas limitée par celle d’autrui,
mais
au contraire agrandie par elle. A
propos de
l’égalité, le débat le plus
courant oppose l’égalité des droits et
l’égalité
économique. Une autre position introduit
l’égalité des chances qui serait une
sorte de droit à la réussite
économique. Chaque être humain ne crée
pas la même
valeur par ses actes, mais chacun possède la même
valeur en tant qu’être humain
siège de la liberté. Une autre tendance est de
remplacer l’égalité par
l’équité
avec deux cas de figure : soit égalité
des chances et les inégalités
éventuelles ne sont justifiées que si elles
résultent des inégalités naturelles
ou de naissance des individus. Soit une inégalité
sociale qui contrebalance les
inégalités naturelles ou de naissance des
individus. Quelque soit la réponse
considérée, la notion clé concerne
l’égale valeur des êtres humains. La
Fraternité résume tous les devoirs des hommes
à l’égard les uns des autres.
Elle signifie : dévouement, abnégation,
tolérance, bienveillance,
indulgence. Elle est souvent présentée comme la
cerise sur le gâteau de la
formule, comme une sorte d’édulcorant ou de fleur
décorative qui adoucit la sécheresse
des deux premiers termes. La fraternité, c’est un
lien très fort entre les
individus qui inclut une reconnaissance réciproque et une
communauté
essentielle de valeur telle que des passerelles infimes percent le
cloisonnement de notre société moderne. Le bien
n’est pas seulement le bien
pour moi mais celui de tous. Les
fondateurs de la
Seconde République ont tous insisté sur le
caractère logique et indissociable
des trois composantes de la devise. Celles-ci sont solidaires et se
servent
mutuellement d’appui. La liberté
associée à
l’inégalité et la haine instaure le
rapport faible/fort et s’achève en tyrannie.
Quand l’égalité fonctionne avec
la dictature et la haine, c’est un rapport
dominant/dominé qui apparaît. La
fraternité exercée avec la tyrannie et
l’inégalité aboutit au ressentiment et
ou au désespoir. Aucun régime politique
n’incarne pleinement l’idéal de la
devise : sinon, ce régime assurerait une
liberté absolue fondée sur la
pensée seule des individus, une
égalité parfaite sans hiérarchie, sans
privilège, une fraternité franche et
spontanée sans calcul, sans exception,
sans limite. Ce régime serait une utopie anarchiste
suggérant que le pouvoir,
la hiérarchie, l’inégalité
et la haine sont des maux inévitables ou
nécessaires. Les
idées contenues
dans la triade ont leur propre valeur qui doit être
examinée à l’aune de ce à
quoi elles prétendent : expliquer le
réel, justifier les actions humaines,
harmoniser les sociétés selon des normes. Vouloir
ancrer les valeurs sur des
idéaux absolus revient à vouloir leur donner une
force usurpée et, dans cette
mesure même, à les affaiblir si
l’usurpation est découverte. La devise
républicaine vise non pas tant à la
reconquête d’une fraternité originelle
censée être antérieure à la
société qu’à
l’avènement d’une fraternité
nouvelle. Pour
nous maçons,
adopter certaines valeurs comme devise ne signifie pas que
l’on prétend les
incarner, mais que l’on entend être
jugés à leur mesure. Victor
Hugo a publié
en 1875, un ouvrage intitulé « Le droit
et la Loi » dont un extrait
mérite attention : «
Liberté, Egalité,
Fraternité… ce sont les trois
marches du perron suprême. La liberté,
c’est le droit ;
l’égalité, c’est
le fait ; la fraternité c’est le de voir.
Tout l’homme est là… J’ai dit. C\ D\ |
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