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Ecoles
et Libertés -
L’Education est-elle source de
liberté ou au contraire
contribue-t-elle à l’aliénation de l’individu le soumettant à un
système de
pensée, de savoir et de savoir-faire ? -
Si l’homme et ses libertés sont
la mesure de toute
éducation comment concevoir un système éducatif qui protège de toute
aliénation
et favorise le progrès ? Jadis
à la diversité des cultures, répondait l’uniformité des individus à
l’intérieur
de ces cultures. C’étaient les cultures qui créaient les individus. A
l’avenir,
ce seront les individus qui créeront les cultures différentes les unes
des
autres. Ce
sont les individus qui en
fonction de leur affinités se grouperont pour créer des cultures qui ne
seront
plus tout à fait conditionnées par le système de production car on
oublie un
peu trop souvent le despotisme des cultures traditionnelles. L’homme,
dit Kant est la seule
créature qui doit être éduquée. L’enfant ne saurait en effet devenir un
homme
au sens plein du terme sans le secours de l’adulte transmetteur du
patrimoine
culturel qui s’ajoute à l’animalité en la disciplinant. L’Education
implique la
dualité de la nature humaine et l’existence de la vie en société, le
soucis de
conserver et de promouvoir une prise en considération des hommes tels
qu’ils
sont et tels qu’ils devraient être, un réalisme et un idéalisme. Elle
constitue
un problème fondamental pour les sociétés et pour l’humanité qui reçoit
des
solutions très diverses et toujours remises en question. La
famille et l’Etat tantôt se
rejette, tantôt se partagent, tantôt se disputent le droit ou le devoir
de
l’exercer. Tantôt on fait consister l’éducation, surtout même
exclusivement
dans l’instruction, tantôt on y voit par opposition à celle-ci la
formation des
sentiments et des caractères et une initiation à la conduite morale.
Tantôt on
la considère comme une préparation directe à la vie, dans une société
donnée où
des tâches précises attendent l’enfant quand il entrera dans la vie
active et
productive, tantôt on la veut formatrice de personnes à l’essentiel de
la
culture humaine, capable de s’adapter à des tâches différentes et à des
structures sociales diverses. On en attend beaucoup ou on en attend peu. Les
fins de l’Education étant
supposé fixées, ses moyens n’en sont pas moins controversés puisqu’ils
dépendent en partie de celle-ci. L’Education peut être pratique, ou
théorique,
didactique, autoritaire ou libérale, recourir à la contrainte ou aux
châtiments
ou faire confiance à la spontanéité de l’enfant et l’aider discrètement
à
s’élever à l’autonomie et à la coopération. D’autre
part, l’Education pose de
multiples problèmes techniques qui croissent avec sa durée et son
extension au
plus grand nombre d’enfants : financement et moyens à mettre à
la
disposition des éducateurs, qualité de ceux-ci pour leur recrutement,
contrôle
de leur activités et des résultats qu’ils obtiennent. Les
systèmes d’éducation
ordinairement adoptés sont des compromis entre des tendances diverses,
aussi
sont-ils soumis vu l’évolution des sociétés et des conceptions
régnantes à une
révision et à une réforme quasi permanente. Où
est alors la
liberté ? Les
enfants d'ouvriers, de paysans et d'employés sont de plus en plus
nombreux dans
les lycées ou les universités. Après l'école primaire tous les élèves
sont
réunis sous un même toit dans les collèges d'enseignement secondaire.
Malgré
cela l'égalité des chances n'existe pas toujours. Les enfants du peuple
n' ont
pas les mêmes débouchées. Ils apprennent moins vite à lire, redoublent
davantage. Pour l'essentiel le destin des uns et des autres est tracé
avant
même l'entrée à l'école maternelle. La
démocratisation de l'enseignement pour massive qu'elle ait été n'a
pratiquement
pas entamé l'incroyable rigidité de la société française. Un
système d'enseignement remplit certaines fonctions issues soit de la
société
dans laquelle il baigne, soit de lui-même. Il obéit à une certaine
rationalité
tant extrinsèque qu’intrinsèque. La liberté n'est guère autre chose en
ce
domaine que la possibilité pour les individus de bénéficier des
diverses
fonctions du système d'enseignement. Cette notion est intégriste :
celui qui
réclame une plus grande part de gâteau admet qu'il est bon, même s'il
eut voulu
qu'il fut meilleur encore. Mais la liberté peut prendre un autre aspect
plus
radical et consister en une remise en question des fonctions
elles-mêmes que
remplit le système d'enseignement. Dans
la société actuelle, l'une des fonctions essentielles de l'enseignement
est de
pourvoir aux besoins des différentes couches de la hiérarchie
professionnelle
et partant sociale. I1
s'agit alors d'être individuellement le mieux placé possible dans cette
grande
opération de dispatching social, chacun bénéficiant d'une prestation
d'enseignement maximale, compte tenu de ses possibilités
intellectuelles et de
ses goûts. Le
système d'enseignement a enfin une autre fonction extrinsèque qu'il
exerce en
faveur de la classe dirigeante de la société à laquelle il appartient,
la
fonction de conservatisme politique et social. Or si la classe
dirigeante doit
impérativement se renouveler, elle a tendance à favoriser ses propres
enfants.
La culture enseignée, les attitudes devant celle-ci, les méthodes
d'enseignement sont celles de la classe dirigeante. I1 n'est dés lors
pas
étonnant que les élèves et étudiants appartenant à cette classe
obtiennent de meilleurs
résultats que ceux des couches sociales inférieures. Les obstacles à la
démocratisation de l’enseignement ne sont pas seulement d'ordre
financier. I1
s'agit d'abord de rendre la fréquentation de l'école plus longue et
plus
variée, plus longue aussi bien pour répondre à une forte poussée
démographique
que pour satisfaire à un idéal de justice et d'égalité. I1 s'agit aussi
de
rendre aptes les jeunes à faire face aux conditions d'une vie trop
changeante. Mais
cette longue vie d'écolier, la dépendance du jeune sujet d'un cadre
scolaire,
sa prise en charge par la société durant les années mêmes où se situe
le
passage de l'enfance à l'âge adulte, cet aplanissement de bien des
difficultés
et la suppression d'une certaine lutte que les jeunes générations
avaient à
soutenir autrefois pour se viriliser, tout cela ne risque-t-il pas de
supprimer
une sorte de réalité dont la formation d'un caractère ne saurait se
passer ? I1
en est de même pour la grosse majorité des enseignants qui passent de
l'état d'élève
à celui d'étudiant puis sans transition d'étudiant à professeur ou
maître. Ils
ne peuvent alors que transmettre des connaissances acquises sur les
bancs de
l'institution scolaire perdant ainsi contact avec les réalités de la
vie. Et
l'école qui même dans les projets de réforme les mieux intentionnés,
continue
de rester l'institution qui transmet le savoir, comment
parviendrait-elle à
former des personnalités fortes, capables de s'adapter à une vie sans
cesse
changeante ?, Mais
dans toutes ces réformes l'école risque de se trouver engagée dans une
course
où le temps manquera de plus en plus pour se pencher sur l'être humain
et ses
problèmes personnels. Et de plus en plus, il paraîtra indispensable
d'imposer à
chaque être un séjour entre les murs de l'école durant un quart tout
entier de
sa vie. En
plus de l'intensification d'une scolarité chargée d’apprentissage, de
plus en
plus orientée vers une destination professionnelle, menaçant d'ignorer
à
l'avenir, la gratuité nourricière d'une culture générale et qui par sa
longue
durée risquerait de priver le jeune être d'une certaine expérience, un
autre
fait dans notre civilisation posera sans doute sur le destin de
l'enfant, les
changements survenus dans la famille moderne. Nous n'en citerons qu'un.
L'émancipation
de la femme et son activité professionnelle, le foyer avait commencé
déjà a
souffrir du métier du père devenu dans certains secteurs trop
absorbant. Il
doit supporter maintenant une carence qui l'atteint au plus profond de
sa
vitalité. Démission
de plus en plus étendue de l'autorité paternelle maison souvent vide,
lorsque
l'enfant rentre de l'école, ce sont là des choses dont pâtira non
seulement
l'être en formation mais un jour peut être la société devant des
membres qui
n'auront pas la possibilté de traverser bio-socialement les étapes
menant à
l'âge adulte. On ne le sait que trop l'histoire du petit de l'homme
commence
dans les bras d'une mère nourrice, continue auprès du chef de famille
et se
consolide à l'intérieur d'une école. Rappelons
un autre fait plus inquiétant des temps modernes et que l'école des
années à
venir ne saurait ignorer : la délinquance juvénile, phénomène plus
grave et
plus organisé qui illustre à son tour, cette carence d'encadrement dont
souffre
de plus en plus l'enfance dans le climat de nos agglomérations modernes Face
aux réalités quotidiennes de l'éducation les parents s'interrogent,
l'école est
l'affaire des maîtres ! la boutade est facile. En fait dés qu'ils
envoient
leurs enfants en classe, les parents s'interrogent sur les maîtres,
leur
compétences, leur enseignement, leurs méthodes, leurs attitudes avec
les
enfants. Au
nom de quel principe archaïque et jacobin les familles devraient-elles
laisser
administration et enseignants régir seuls un système éducatif qui
présente de
si nombreux dysfonctionnement ? Comment
ne pas s'insurger contre ces enseignants sûrs de leur fait qui décident
de
l'orientation d’un élève vers un cycle professionnel dont ils ignorent
parfois
tout ou presque ? La
surprotection des enseignants, rarement passibles de sanctions
pédagogiques,
apparaît naturellement aux yeux des parents comme l'injustice suprême. L'éducation
nationale est fertile en paradoxe. Le moindre n'est pas de s’intéresser
davantage au million d'agents qui la composent qu'aux quelques 25
millions de
parents d'élèves qui en sont les usagers naturels. Certes la condition
enseignante exige d'être sérieusement révisée et le débat ne s'est
animer que
trop tard autour du sort difficile des instituteurs et des professeurs.
Mais le
choc des corporatismes, l’archaisme du discours syndical, les lâchetés
politiques ou les maladresses ministérielles aboutisses à un constat de
faillite. Préoccupée
avant tout du renouveau de ses élites la France a tragiquement négligé
l’enseignement de masse, l'école primaire et les lycées qui ont fait la
république voilà un siècle. Oubliés les sages conseils de notre frère
CONDORCET
qui recommandait le contrôle du citoyen sur l'effort éducatif de la
nation. Au
fil des ans, à la suite surtout de l'accroissement démographique des
années 50,
l'éducation est devenue une affaire de techniciens, d'enseignants et de
syndicalistes. Or cette gestion tripartite qui prévaut depuis 30 ans a
désormais fait la preuve de ses carences de manière plus que probante.
En 31
ans de 5e République, la France s'est offert une bonne douzaine de
réformes,
quelques 18 ministres de l' Education et des centaines de grèves. Aucune
tentative n'a su se passer de son cortège de manifestations, de son
train de
grèves ou de son concert de protestations. Dépréciée,
dévalorisée, la situation matérielle de l’enseignant n'incite guère à
embrasser
la profession. Lorsque
Lionel JOSPIN, à l’époque ministre de l’Education Nationale, demande
gentiment
aux enseignants, dans le sillage de la FEN, de "travailler autrement"
et propose une esquisse de "salaire au mérite", le voilà qui retire
ses propositions quelques jours plus tard. L'enseignement
doit être résolument retardataire non pas rétrograde, tout au contraire
C'est
pour marcher dans le sens direct qu'il prend du recul ; car si l'on ne
se place
pas dans le moment dépassé comment le dépasser ? Une
haute idée de l'enseignant parait une des conditions nécessaires au bon
exercice du métier Mais étroit est le fossé entre le maître et le
prophète :
celui qui se voulait libérateur devient trop souvent un tyran. Etant
au service de la société qu'elle reproduit et conserve, l'école n'est
plus au
service de l'homme même. Une civilisation qui se montre incapable
d'éduquer sa
jeunesse devient stérile. La
critique de la vie mène fatalement à une critique de l'éducation : dans
les
sociétés heureuses, l'éducation se fait pour ainsi dire toute seule,
instinctivement, les problèmes surgissent quand la jeunesse refuse de
se
laisser socialiser selon les normes traditionnelle. Et cela se produit
dans les
périodes d'évolution accélérée. L’éducation
est toujours en retard sur son temps puisqu'elle s'appuie sur
l'expérience du
passé : la culture est faite de souvenirs, de références et de
précédents. En
un temps de transformation rapide tel que le notre la divergence
s’accroît
entre la culture et la vie réelle. L'école
est ressentie comme un lieu d'exil qui sans préparer vraiment à
affronter le
réel, retarde l'expérience de la vie sérieuse et des vertus éducatives
du
travail. L'école
obligatoire, la scolarité prolongée, la course aux diplômes, autant de
faux
progrès. Dévotions rituelles où la société de consommation se rend à
elle-même
son propre culte, où elle produit, des élèves dociles prêts à obéir aux
institutions à consommer des programmes tout faits préparés par des
autorités
supposées compétentes. A
tout cela il faut substituer une véritable éducation qui prépare à la
vie dans
la vie qui donne le goût d'inventer et d'expérimenter. Il faut libérer
la
jeunesse de cette gestation scolaire qui la conforme au modèle
officiel.
L'école nuit à l'éducation parcequ' on la considéré seule capable de
s'en
charger. Beaucoup
continue à croire que l'école mérite la confiance publique alors même
qu'elle
n'est plus que la détentrice d'un monopole et que loin d'égaliser les
chances
elle en assure la répartition. La
sagesse institutionnelle nous dit que les enfants ont besoin de
l'école. Elle
nous affirme qu'ils s'y instruisent. Mais cette sagesse d'où la
tenons-nous,
sinon des écoles. L'école
par sa nature même réclame toute l'énergie et le temps dont peuvent
disposer
ses fidèles. Avec comme conséquence de faire du maître tout à la fois
un
gardien, un prédicateur, un thérapeute. Dans chacun des 3 rôles qu'il
assume,
l'enseignant fonde son autorité sur une prétention différente. En sa
qualité de
gardien de l'institution, son travail consiste, tel un maître de
cérémonie, à
guider les élèves dans le dédale d'un rituel interminable, à veiller à
l'observance des règles, à leur faire subir les différentes épreuves de
l'initiation à l'existence. En sa qualité de "censeur des mœurs", il
se substitue aux parents, à Dieu, à l’état, et se charge de
l'endoctrinement,
instruisant des bonnes et mauvaises façons de se comporter, non
seulement à l'école
mais dans la société toute entière. De
par sa 3eme fonction, celle de "thérapeute", il se croit autoriser à
examiner et connaître la vie personnelle de chacun. Et s'il n'oublie
pas qu'il
est en même temps gardien et prédicateur, il lui arrive de vouloir
imposer à
l'élève d'adopter ses propres conceptions de la vérité et de la justice. Pourquoi
celui qui apprend devrait-il se soumettre à un programme obligatoire
comment
justifier une ségrégation fondée sur la possession de certificats ou de
diplômes ? Un
véritable système éducatif n'impose rien à celui qui s'instruit, mais
lui
permet d'avoir accès à ce dont il a besoin. Les critères de réussite ou
d'échec
sont en dernière analyse des critères de conformité ou de non
conformités à ces
normes culturelles qu'il s'agit de transmettre. Pour
enseigner la vie il faut aimer la vie. Que l'éducateur aime sa vie.
Alors sera
le surhomme de demain qui maîtrisera le progrès scientifique car notre
morale
est celle du bonheur, ne l'oublions pas. Les
élèves, les enfants sont tous les hommes de demain. Le maître ou le
professeur
universel en sa pluralité détient donc tout simplement le salut du
monde . Epanouir
des consciences faire des êtres heureux et utiles tel est la vocation
de
l'enseignement ,la liberté se gagne par l'effort de lucidité qui
sublime les
courants de l'instinct. L’œuvre
de l'éducation plus que toute autre œuvre humaine doit être souple,
capable
d'évoluer. Sur
un sujet comme l'éducation nul n'est sans opinion, ni sans expérience.
Tout
propos sur l' Education oscille avec plus ou moins grande amplitude
entre le
registre du constat et celui de la prescription. Cette fonction
precriptive
explique pour une bonne part le décalage fréquent qui existe entre ce
qui se
déclare et ce qui se passent effectivement. La réalité éducative parce
qu'elle
reste en dépit de toutes les désillusions créditée d'un potentiel
humain
"miraculeux" est constamment sollicitée de justifier nos indignations
ou de consolider nos espérances. Quand
l'ambition nationale devient la réussite scolaire automatique,
qu'importe au
fond le niveau réel des élèves, les pratiques pédagogiques ou
l'efficacité des
méthodes d'enseignement L'école
est devenue un terrain statistique. Elle attend toujours qu'on refasse
un lieu
de transmission efficace de savoir. L'homme
est libre parce qu'inachevé. Une
pédagogie sans savoir c'est vide. Un
savoir sans pédagogie est un enseignement aveugle. L'éducation
contribue à apprendre à vivre en liberté et à vivre la liberté. J\M\ C\ |
7072-3 | L'EDIFICE - contact@ledifice.net | \ |