Moabon
"La
parole sacrée, est celle que je vous ai donnée
à l'oreille en vous relevant;
on la donne en recevant et donnant l'accolade
en trois temps,
une syllabe à chaque temps:
elle
signifie, la chair quitte, les os."
Régulateur
du Maçon. Heredon VL 5802
« Moabon »
est bien connu des Maîtres
Maçons du Rite Ecossais Ancien et Accepté. Ce mot
peut avoir plusieurs
significations et l'une de celles qui lui sont attribuées
est « le fils du
Père ». Il n’est pas question
d’en faire le tour ici, mais de souligner un
petit élément qui peut être
intéressant au chercheur qui étudie les Ecritures.
On sait que Moabon est donné en substitution du Mot perdu et
que les instants
durant lesquels il est prononcé sont
particulièrement importants dans la
cérémonie
dans la mesure où il est admis que sa
prononciation est liée et
conditionne la relévation.
Dans la Légende d’Hiram,
on sait que celui ci vient de
la tribu des Nephtalis, forgerons Moabites et qu’il est fils
d’une Veuve.
Voyons et décortiquons ces quelques informations et surtout,
replaçons en
quelques éléments dans le contexte
vétéro-testamentaire dont on connaît
l’importance dans nos rituels.
Ab ( Aleph –
Beth ) signifie « Père »
dans le sens de qui détient la source
patrimoniale. C’est ce même mot qui devient
« Abi » pour désigner 'Hiram. Moab est
une forme prolongée de Abi par
l’adjonction du préfixe « M’
» qui ajoute une conception qui signifie « issu
du propre Père de sa Mère ».
De fait, cela se rapporte bien à l’acte qui
est à l’origine de cette naissance ; le rapport
incestueux des filles de Loth
d’où est né Moab. Il est bon, aussi, de
noter que Loth, qui a fuit Sodome avant
sa destruction est « exilé » dans une
grotte et qu’il disparaît après
l’acte
incestueux. On ne parle plus de lui après Gen. 19. Ce qui
laisse à penser qu’il
aurait terminé sa vie dans cette grotte, oublié
de tous et oublié de Dieu. Le
texte biblique laisse entendre qu’il aurait
terminé ses jours dans l’abandon,
la fuite de Sodome n’aurait pas été
salvatrice, son conflit avec Dieu s’est
aggravé. La punition de l’Eternel n’est
pas la Mort mais l’ignorance, l’abandon
de l’âme. Cette ignorance de l'Eternel a un objet
précis, la continuité de
l'Histoire. Loth ne sert plus les desseins de l'Eternel, ce sera sa
descendance
qui portera le message divin malgré lui. Contrairement
à son épouse, Loth n’est
pas torturé par son passé au point de
s’en sentir prisonnier, il ne s’est pas
retourné pour faire face à une
destinée écrite, comme s’il subissait,
pour sa
part, une plus grande culpabilité muée en
individualisme. Il sera contraint
d'assumer l'avenir. Sa mort, son abandon fait des enfants de ses filles
des
enfants sans Père, des fils de veuves en quelque sorte. La
punition est
d’ailleurs ambiguë car elle s’adresse
à Moab, le fils de l’aînée
qui devient le
« fils de sa Mère issu du Père
», c’est à dire l’enfant de
l’inceste. Alors que
l’autre fils Ben Ammi, « Le fils de Mon Peuple
», père des Ammonites ne sera
pas désigné de la même
manière infamante, comme si l’acte
d’inceste n’était
condamnable que pour la fille aînée, comme si
l’on considérait que le fait
d’avoir imité sa sœur
dédouanait la plus jeune fille de la faute. C'est
sur cette faute que s'appuie l'interdit formel pour les enfants
d'Israël
d'épouser des Moabites en expiation de l'époque
durant laquelle ils habitèrent
dans la vallée des Acacias et adoptèrent le culte
de Baal-Peor ainsi que les
pratiques impures auxquelles ils se livrèrent avec les
filles du pays ( Nb 25 ;
1-3 ). Sur la colère de l'Eternel et ses
conséquences, l’Ecriture semble
quelque peu ambigüe. Il semble bien que nous soyons en
présence d’au moins deux
éléments qui permettent de penser à
une certaine mansuétude de l’Eternel dans
la mesure où, contrairement aux Interdits
formulés, Ruth, Moabite, offre, de
par son mariage avec Boaz, un élément de la
lignée de David, donc, de Jésus.
Et, second élément, celui de la tribu des
Nephtalis, forgerons Moabites d’où
est issu ‘Hiram « Abi
». La colère et
l’abandon sont donc
deux éléments de cette histoire, comme la
vengeance sera l’un des éléments de
l’histoire mythique des hauts grades…
Le pays de Moab est donc, pour la Genèse, d’une
part, un pays né de l’inceste,
mais aussi, par extension, celui où les femmes mauvaises
dominent. Il y a ici
un lien avec un autre symbole maçonnique très
fort : l’Acacia. En effet,
l'Ecriture s’attarde sur les débauches du peuple
d'Israël au pays de Moab, dans
la vallée de Cithim qui est le nom de l’Acacia. On
notera au passage que ce mot, Cithim
et d’orthographe hébraïque identique
à Shittim, qui signifie aussi acacia. La
mutation capitulaire de « SH » à
« CE » n’est pas anodine
puisqu’elle est
identique à celle de Schibboleth.
D’autre part, Shittim est un
pluriel, celui de « shithah » qui veut dire
approximativement « le feu du
savoir caché ». relever ‘Hiram par les
cinq point de la Maîtrise aurait donc
pour signification « le feu marche avec moi ».
Mais, là n’est pas la question.
Si les descendants d’Hiram Abi viennent de la
vallée du Shithim, alors, il est
naturel que cet arbre soit celui qui ait fourni la branche
posée sur sa tombe,
et il n’est pas surprenant que celui qui est né
à Moab soit aussi celui qui
bâtit le Temple de l’Eternel pour les
mêmes raisons que l’Eternel exige que le
bois d’acacia qui servit à bâtir les
hôtels du Veau d’Or dans le Sinaï et ceux
de Baal des filles de Moab.
« Moabon » est, de ce fait, lié
à l’Acacia par
l’étymologie du nom et indiquerait,
au moment où il est prononcé dans le rituel,
c’est à dire à la relévation
d’Hiram, une forte dominante de l'ambivalence propre aux
conflits entre les
forces contraires dont l'énergie est souvent mise
à l'épreuve. Les forces
contraires sont généralement vouées
à la perte à l’exception des instants
où
elles sont imbriquées dans les desseins de
l’Eternel. Ici, il est bien évident
que symboliquement, Moab est protégé par sa
condamnation et que cette
protection a pour objet de le contraindre à offrir sa
lignée au rédempteur.
Tout autant que l'acacia lui-même protège la Loi,
conservée dans l'arche, la
Loi qui est la source du Message. L'acacia comme Moabon est donc, en
quelque
sorte, l’image du libre choix et de la connaissance, du
libre-arbitre de
l'homme, le « connais-toi toi-même »
qu'il y a lieu de protéger.
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