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Méditation
Constant CHEVILLON La somme des intérêts particuliers ne constitue par l'intérêt général, elle n'est qu'un amalgame anarchique des égoïsmes individuels. L'intérêt général est la synthèse des aspirations universelles et de leurs moyens de réalisation. Cette synthèse fait abstraction des tendances secondaires et dirige les hommes vers une triple fin essentielle: sur le plan matériel, possession d'un minimum de bien-être; sur le plan intellectuel, connaissance d'une vérité générale englobant l'ensemble des réalités; sur le plan spirituel, conquête de la Suprême Béatitude. Elle ne peut s'épanouir qu'au sein d'une liberté respectueuse du droit d'autrui, d'une égalité harmonisée par les valeurs personnelles, d'une fraternité basée sur un amour de réciprocité. Les démocraties primitives se sont élevées jusqu'à ces concepts et ont contribué à créer des peuples forts et unis. Lorsque l'intérêt général s'est obnubilé, elles ont glissé à l'oligarchie et celle-ci, pour se maintenir, a versé dans la démagogie. La démagogie dresse les intérêts d'un clan, parti ou classe, contre l'intérêt des autres citoyens; c'est la division prélude de la guerre civile, la prostitution de l'autorité devant des appétits mercenaires. Politique à courte vue, comme le matérialisme, dont elle s'inspire, elle ravit aux uns ce qu'elle donne aux autres, moyennant une commission usuraire. Aujourd'hui, les individus s'isolent en se croyant groupés et solidaires. Ils ont rétréci l'idéal humain au plan physique sur lequel l'égoïsme est roi. Aussi, les démocraties nouvelles fondées sur le suffrage majoritaire, confondant l'intérêt du plus grand nombre relatif avec l'intérêt général, au lieu de créer la paix dans la sérénité, engendrent, trop souvent, des ferments de haine, des contestations et luttes intestines sur lesquels se greffent les guerres internationales et les conflits de race. L'intérêt
général, au contraire, ne
favorise ni individus ni tribus, ni nations, il les utilise comme un
moyen
d'ascèse. Car, frères par l'origine, les hommes
le sont aussi par leur fin. Or,
cette fin, située en dehors et au-dessus des individus et
des collectivités,
conditionne le pèlerinage humain. Elle doit jouer le
rôle d'un pôle attractif
et lier les énergies particulières dont les
dissonances obligatoires se
confondront dans la totale harmonie. C'est pourquoi il y a une morale
impérative et une religion universelle qui sont la
véritable «Respublica», la
chose publique, celle de tous et de chacun. |
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