Qu’Est-Ce
que l’Illuminisme ?
"Histoire
de la
philosophie" vol II Emile Bréhier.
Quadrige/Presses
Universitaires de France.
Mais tout d'abord, quelle
définition
donner de l'illuminisme et qui soit commune au delà des
nuances de doctrine
développées par ces grands mystiques et
illuministes.
Comme son nom l'indique, celui-ci fait référence
à la lumière. De quelle
lumière s'agit-il ?
« Science de Dieu », lumière venant d'en
haut : l'étymologie nous donne la
meilleure définition de la théosophie et de
l'illuminisme. Les mystiques qui
professent ces doctrines croient posséder, par une
révélation directe, les
secrets du monde supérieur; l'« inspiration
», et, le plus souvent,
l'association secrète les caractérisent ;
« tous ces hommes, peu satisfaits des
dogmes nationaux et du culte reçu, se livrent à
des recherches plus ou moins
hardies sur le christianisme qu'ils nomment primitif ». Ainsi
les décrivait
Joseph de Maistre. Si c « Fabre d'Olivet, Dutoit, Prunelle de
Lière, affirmaient
que la théosophie commence où cesse la
philosophie rationnelle ; mais elle
finit alors où commence la théologie; elle
enveloppe les relations que l'on
prétend entretenir avec le surnaturel,
indépendamment de l'autorité ou du
contrôle de n'importe quelle Église
établie. Ainsi l'entendent les plus
réfléchis des illuminés et les plus
consciencieux de leurs historiens. Leurs
définitions reposent sur la théorie de
l'inspiration directe. Dégager, par
l'initiation, ce « moi intérieur »,
cette « étincelle divine » existant dans
la
personnalité humaine ; jouir de cette « intuition
», de cette « intelligence
profonde des choses qui repose, sur une illumination spirituelle
», de ces «
relations d'un genre exceptionnel avec les habitants du monde
invisible" »
; posséder la « vision intime du principe de la
réalité du monde », telles sont
bien les espérances des adeptes. Ils obtiendront un jour, si
le succès couronne
leurs efforts, une « communauté
immédiate avec la Divinité » ; Ils
savent
d'ailleurs que, dès auparavant, ils ne peuvent, sans
révélation, avoir d'idées
vraies de Dieu, de la nature, du ciel ni de l'enfer. »(Les
sources occultes du
romantisme, vol 1, A.Viatte, 1ere partie ; Librairie Honoré
Champion, Paris);
Le caractère fondamental de l'illuminisme est le
Théisme, la voie utilisée est
cardiaque, l'outil le divinisme, qui est la doctrine des modes de
manifestations ou signes de Dieu.
Des «Fragments inédits» de Novalis.
(Anthologie littéraire de l’occultisme
R.Kanters et R.Amadou Ed. Seeghers) se dégage un panorama
grandiose sur ce que
doit être l’illuminisme.
"Le monde est en tout cas le
résultat d’une action et d'une réaction
entre moi et la divinité. Tout ce qui
est, et tout ce qui naît, naît d'un contact
d'esprits. Nous sommes en relations
avec toutes les parties de l'univers, ainsi qu'avec l'avenir et le
passé. Il
dépend de la direction et de la durée de notre
attention que nous établissions
tel ou tel rapport prédominant, qui nous paraît
particulièrement important et
efficace. Une véritable méthode en ce qui
concerne ce procédé, ce ne serait
rien moins que la science divinatoire, si longtemps
désirée par les hommes ; et
ce pourrait être plus encore."
"L'homme agit constamment selon les lois de cette science et il est
indubitable qu'il possède la faculté de les
découvrir grâce à l'observation
géniale de lui-même ".
"Tout le visible adhère à de l'invisible, tout
l'audible à de l'inaudible,
tout le sensible à du non-sensible. Sans doute tout ce qui
peut être pensé
adhère-t-il de même à ce qui ne peut
être pensé".
"Le rapport universel, harmonique, intime, n'est pas, mais devra
être."
"Nous
sommes liés de plus près
à l'invisible qu'au visible."
"Si Dieu a pu devenir homme, il peut également devenir
pierre, plante,
élément, et peut-être existe-t-il de
cette manière une continuelle rédemption
dans la nature."
"Le divinisme est la vision de la totalité des Mondes
placée sous les
signes de Dieu. Des différences d’approches sont
nettes dans la
conceptualisation , la vision de la création de
l’Univers, de la Nature, des
Anges qui ont participé soit à son organisation
soit à sa privation de liberté
et de lumière."
Le Monde de Swedenborg n’est pas exactement le même
que celui de William Blake,
celui de Boehm pas tout a fait celui de Kunrath. Cependant
dès que l’on touche
aux modes de contact avec ces mondes par convocation, les
résultats sont là :
le Monde angélique répond à cette
Grace que l’Eternel accorde aux Elus.
Nombreux sont les témoins, qu’ils appartiennent au
swedenborgisme, au
martinézisme, ou autre école. La «
Chose » apparaît, cela est indéniable.
Elle
apparaît immédiatement à Fournier ,
souvent à St Martin, Dieu seul sait si elle
se manifeste à Jean-Baptiste Willermoz. Sans magisme, la
révélation peut être
fulgurante aussi, chez Boehm, Swedenborg, ou Blake ,enfant.
"A l'époque où nous arrivons, deux
thèmes se croisent: la vérité est
atteinte par une sorte d'intuition, de la nature du sentiment ; la
vérité doit
être proportionnée à
l'utilité de qui la reçoit. L'union de ces deux
traits donne
naissance à cet illuminisme et à cet
ésotérisme qui sont si
caractéristiques de
la fin du 18 siècle (3) ; ils tombent parfois dans le
charlatanisme des
occultistes, avec un Cagliostro; en revanche, avec un Lessing et un
Herder, ils
s'élèvent jusqu'à une conception de
l'univers qui s'émancipe de celle des
philosophes des lumières; la Schwârmerey ou
illuminisme, dont Kant se plaint si
souvent, comprend aussi bien pour lui la mystique platonicienne que les
visions
de Swedenborg. Tandis que Voltaire, après Locke, croyait
à un rapport exact et
naturel entre nos facultés et nos besoins, on voit
maintenant un contraste
entre les facultés transcendantes, qui sont le lot d'un
petit nombre d'hommes,
et la raison commune : on trace une démarcation entre
initiés et
profanes."
|