REAA |
LOGE: NC |
09/2022 |
La
Quête du Graal Le
patrimoine de l'humanité comprend non seulement des
réalisations architecturales du passé,
mais aussi toutes les œuvres de l'esprit. Elles témoignent de toutes
les
grandes étapes de l'aventure humaine depuis l'aube des temps jusqu'à
nos jours
où actualisées elles nourrissent toujours notre imaginaire et inspirent
notre
quotidien. Aussi pour illustrer ce propos j'ai opté de vous parler de
la quête
du Graal. Ce
thème se présente comme une quête spirituelle, elle
s'est particulièrement propagée en occident à partir de la légende du
roi
Arthur. Les romans successifs sur la
quête vont de 1066 à 1220, c'est à dire de la conquête normande jusqu'à
la 5ème
croisade(1217-1221) et c'est Geoffroy de Monmouth qui à partir de son
roman, «
l'histoire britannicus » va importer sur le continent la matière dont
vont
s'inspirer les œuvres successives de Wace,
Chrétien de Troyes et Robert de Boron. Puis c'est Thomas
Malory qui
parachèvera le cycle du Graal en 1485 en lui donnant sa forme
définitive dite
cistercienne (humilité et dévotion fondateurs Clairvaux et Citeaux). Chaque
auteur va s' emparer de ce thème et en dérouler
les aventures selon leurs commanditaires, leurs sources à la fois
légendaires
et historiques mais aussi les messages
qu'il souhaite distiller dans une époque en pleine mutation. Par
ex. les
Plantagenets, qui régnaient sur la Bretagne (l'Angleterre actuelle)
dans la
seconde moitié du 12ème siècle, voulurent s'appuyer sur la légende
Arthurienne
pour se doter d'un passé héroïque afin de contrebalancer celle des
Carolingiens
dont la figure de Charlemagne fut longtemps l'archétype du monarque
universel. Le
nom d'Arthur, qui serait un chef militaire situé au
5ème ou 6ème siècle, est une contraction de la langue celtique arth et
uur
signifiant ours et homme, Pour les Celtes ce nom est sacré car il
symbolise le
cycle des temps et le retour du héros qui vient chasser les
envahisseurs. (Ici,
nous pouvons voir un rappel de l'occupation de la Palestine par les
romains et
le retour du messie). Ce
roi, héritier des Scots sera donc, dans la légende
qui nous intéresse, celui qui va inciter les chevaliers à partir en
quête d'un
idéal, idéal symbolisé par le Graal, afin de réactiver les lois et les
valeurs
qui relient les hommes aux lois cosmiques (lois naturelles d'harmonie
et
d'équilibre, mais également d'action/réaction). La
légende d'Arthur, propagée par les conteurs
troubadours, reprend en fait l'idée d'un Graal qui pour les Bardes
celtes avait
la forme d'un bouclier ou d'un chaudron, bien connu des adeptes
d'Astérix, ou
encore d'un plat, d'une corne d'abondance chez les indo-européens et
bien
d'autres supports encore, ce que en fait un symbole universel. Dans
le langage ésotérique propre à la tradition du
Graal, le calice et la vigne renvoient à l'idée de service, alors que
le sang
et le vin correspondent à celle d'accomplissement. La quête spirituelle
du
Graal désigne par conséquent le désir de se réaliser en se mettant au
service
d'autrui. Et
ce n'est pas par hasard si depuis le moyen âge, la
devise des princes de Galles est : Ich dien (je sers) formule inspirée
du code
du Graal.( devise en allemand car la maison royale anglaise d'origine
allemande
s'appelait maison de Hanovre-Saxe-Cobourg-Gotha jusqu'en 1917 où elle
pris le
nom de Windsor en raison de la guerre avec l'Allemagne ). Devise
adoptée par le
prince noir fils de Edouard III. Cette
quête spirituelle et intemporelle va donc
propagée à travers l'occident à partir de la légende d'Arthur et c'est
Chrétien
de Troyes, dans les « aventures de Perceval » qui invente le terme de
Graal et
lui donne la forme d'une coupe. Cette
forme de coupe nous renvoie à une première
tentative de christianisation car il évoque le sang royal que Marie
Madeleine
porte en son sein, dans le calice de son corps. Cette interprétation
(la forme
d'un V) provoquera l'ire de l'église pour qui ce vase sacré, assimilé
au
chaudron magique celtique, ne peut contenir le sang du Christ et encore
moins
Marie Madeleine être porteuse de sa descendance. Elle deviendra
cependant
l'inspiratrice de la « Dame » des troubadours et Robert de Boron un
siècle
après Chrétien de Troyes considérera, ce réceptacle comme étant bien
celui dans
lequel Joseph d'Arimathie a recueilli le sang du Christ. Ce
lien, entre le Graal et le Sangréal ou Sang royal,
sera d'ailleurs rétabli par les
chevaliers alliés à l'ordre européen du royaume de Sion (dont le Prince
Michael
d'Albany, héritier des Stuarts est le continuateur contemporain)
chevaliers qui
se référaient au sang royal de David, c'est à dire à la lignée du
Christ. Raison
pour laquelle le lion (de Juda) remplacera l'ours sur l'écu royal des
Steward,
rois d'Ecosse. (rappelons que les Stuarts, terme francisé des Stewarts
favoriseront l'essor de la FM vers 1640), La
légende va donc trouver sa source à partir du
moment où Joseph d'Arimathie (frère cadet de Jésus), accompagné de ses
adeptes
et de Justus ou Josephe le fils cadet de Marie Madeleine (alors âgé de
15 ans),
a débarqué en Grande Bretagne à Glastonbury en l'an 49. Il y fit souche
évangélisa la région et créa la maison de Camulod, future maison
princière du
pays de Galles dont est issu Arthur. Apparaît
également, dans cette version, la lance du
soldat romain Longinus avec laquelle celui-ci a percé le flanc du
Christ. C'est
au cours de ce voyage que Bron (lignée des
Scots), son gendre, va faire une pêche miraculeuse, fonder la lignée
des rois
pêcheurs et devenir le gardien du Graal. Plus tard un descendant de ce
riche
roi pécheur blessé par la lance mystérieuse (celle qui accompagne le
Graal)
verra son royaume dépérir et il ne survivra que grâce à la consommation
régulière d'une hostie provenant du ciboire, rappel du chaudron magique
des
celtes et de son breuvage qui rend immortel (mais aussi de la situation
désastreuse
en Orient). L'apparition
des légendes arthuriennes qui donnera un
nouvel essor à la littérature européenne coïncide avec deux phénomènes : – l'émergence
au 12ème siècle d'un certain raffinement des mœurs, qui va permettre
aux femmes
de prendre une place plus grande dans la société. Et
ainsi les chevaliers partiront, soit à la quête
d'un Graal mystérieux, magique soit pour d'autres, à la quête d'un
autre Graal,
celui de la femme idéale à laquelle les pensées et les actes les plus
purs
seront dédiés. C'est la naissance de la période romantique dite de «
l'amour
courtois ». – L'autre
phénomène coïncide avec la naissance de l'ordre du Temple et la période
des
croisades. Ces Templiers, moines soldats vont associer guerre et
spiritualité,
ce qui va donner une orientation nouvelle à la guerre, du moins au
début, dans
la protection des pèlerins et la délivrance de Jérusalem. L'idée,
ou l'intention de rechercher le Graal sera en
fait de canaliser la violence du guerrier pour la transformer en quête
spirituelle,
voir mystique, donc de civiliser le comportement des chevaliers qui à
l'époque
restaient principalement des barbares. Évoquer
la chevalerie d'Arthur revient également à
laïciser la quête spirituelle, au sens propre, c'est à dire de la
libérer de
l'emprise des moines et des religieux qui en avaient jusque là
l'exclusivité.
La quête de vérité devient personnelle et la méthode proposée ne sera
donc en
rien dogmatique. C'est pour cela que l'idée de la quête du Graal reste
étonnamment moderne à condition évidemment d'admettre qu'il s'agit de
symboles
recouvrant des idées universelles. En
termes modernes nous pourrions dire qu'il va s'agir
pour l'homme ou la femme plongé dans les remous d'une société en
perpétuel
mouvement de garder un lien avec des réalités morales et spirituelles
plus
élevées ; d'où l'idée qui émergera par la suite et prendra valeur de
référence,
l'idée d'une lutte à mener contre soi-même. Mais cela suppose
évidemment une
vigilance constante (le symbole du coq) vigilance nécessaire à
l'émergence de
cette lumière, objet de la quête, qui au-delà des exigences d'une
société
matérialiste donnera un sens à nos
pensées et nos actes. Et
si l'on retrouve ici l'éternel combat du bien
contre le mal, de la lumière sur les ténèbres, il s'agit bien de
développer des
vertus à partir d'expérimentations virtuelles ou réelles. C'est
d'ailleurs la
voie initiatique que propose le REAA tout au long de ses 33 degrés. (en
particulier du Sublime chevalier élu au chevalier Kadosch, ). Mais
revenons à Chrétien de Troyes qui, à la demande
de Marie de Champagne fille d'Aliénor d'Aquitaine et petite fille du
troubadour
Guillaume IX comte de Poitiers, va tout d'abord développer l'histoire
de
Lancelot le chevalier blanc, le préféré du roi Arthur, mais dont
l'amour pour la
reine Guenièvre, épouse d'Arthur le condamnera à l'errance, le privant
ainsi du
Graal qui lui semblait pourtant destiné. Certains
historiens prétendent d'ailleurs que les
tribulations d'Aliénor (dont le mariage avec Louis VII fut annulé pour
se
remarier au roi Henri II Plantagenet) auraient nourrit ce thème. Puis
poursuivant l'aventure, c'est à la demande de Philippe d'Alsace Comte
de
Flandres, qu'il développera l'histoire de Perceval (bien connu des fans
du
feuilleton Camelot). Ici
glissons pour mémoire le parallèle avec Parsifal,
le héros allemand, alter ego de Perceval, quête reprise et écrite au
13ème
siècle par Wolfram von Eschenbach et merveilleusement illustrée par
l'opéra de
Wagner. Chrétien
de Troyes va, dans ce récit, nous entraîner à
la lisière d'un univers féerique, quasi mythique, avec l'apparition du
mage
Merlin, qui baptisé échappa au diable et reçu du Seigneur le pouvoir de
connaître l'avenir. Un jour sortant de sa tanière il sauve la vie
d'Uther
Pendragon, roi de Camelot qui, par reconnaissance, lui confia
l'éducation de
son fils, le futur roi Arthur. Il lui demandera également de fabriquer
la
fameuse table ronde, table autour de laquelle ne pourront s'asseoir que
les
Chevaliers les plus méritants. (aujourd'hui visible in Castle hall à
Winchester). Entre
temps Merlin tombé sous le charme de la fée
Viviane, fut ensorcelé et enfermé dans une tombe. Ce manque de
vigilance, qui
nous renvoie au cabinet de réflexion, va
marquer le passage d'une époque à une autre :
du Celtisme au Christianisme. Après
l'épisode de l'épée Excalibur (qui devint le
symbole de l'esprit dominant la matière), épisode qui va désigner et
sacraliser
le futur roi, c'est lors d'une réunion d'Arthur et ses chevaliers
autour de
cette table qu'apparut furtivement le
Graal. La
beauté et la richesse qu'il contenait (nourriture
d'inspiration spirituelle) fut telle que Gauvain, neveu d'Arthur, et
les
chevaliers présents prirent l'engagement de partir à sa recherche et de
ne
revenir qu'une fois l'avoir retrouvé. L'aventure
va alors se dérouler sur le mode de
l'errance ; le chevalier « choisi » est suivi dans ses voyages et ses
combats
sur des sentiers semés d'embûches et de rencontres ambiguës. Ainsi
Perceval,
tout au long de son parcours, va rencontrer un Sage, sa tante, la sœur
du roi
Pécheur, rencontres destinées à le faire évoluer mais que nenni des
conseils,
trop sur de lui, de sa force, il ne saura se remettre en cause et
reconnaître
ses faiblesses. Ayant cédé à la tentation et oubliant l'objet de sa
quête il ne
saisira pas non plus l'opportunité qui lui est donné de soigner le roi
pêcheur
en son château gardien du Graal. La
leçon est claire, les émotions et le profit
immédiat dominent l'esprit et la transcendance ne peut s'opérer. Il ne
peut
aller au-delà de ce qu'il est en mesure de voir. Il deviendra alors le
compagnon de celui qu'il reconnaîtra comme meilleur chevalier que lui,
et c'est
ici qu'apparaît un nouvel héros :
Galaad. Ce
nouveau personnage est le fils de Lancelot et
d'Elaine de Corbénic, fille du roi pêcheur et de ce fait héritier de la
lignée
de David. Sa destinée est donc toute tracée. Le plus jeune, le plus pur
et le
plus valeureux des chevaliers d'Arthur va, après maints combats,
retrouver
l'épée que le roi Salomon avait laissé à la dérive afin qu'elle
parvienne à
celui qui en fera le meilleur usage. Remake d' Excalibur. Notons
ici l'intention de renouer avec un lien
vertueux rompu par Arthur, afin de reprendre une quête entachée par les
rapports incestueux de celui-ci avec sa demi-sœur Morgane. D'ailleurs,
le fils
illégitime né de cette union, Mordred prendra plus tard la tête des
opposants à
Arthur qui trouvera la mort à la bataille de Camlann
mettant ainsi un terme à cette partie de la
légende. Donc
Perceval vaincu par Galaad reprend la quête avec
lui, accompagné de Bohort les ayant rejoints. Retourné au château du
roi Pécheur,
Galaad le guéri de sa langueur et redonne vie à son royaume. Acteur et
témoin
de ce mystère, il va être investit, par un vieux sage, d'une mission
supérieure
et rejoindre la cité sainte de Sarras près de Jérusalem (l'actuelle
Gaza). Pour
faire court, Galaad après avoir remplacé le roi
Sarrasin et accomplit divers bienfaits au profit de la population vit
apparaître le Graal (l'Evèque Josephe, fils de Marie Madeleine) et le
secret de
la vie éternelle. Terrassé par cette vision il mourut sur place et le
Graal
disparut à jamais. Il
semble ici que Galaad, après avoir remis ses
compagnons sur la voie, doit s'écarter pour qu'ils s'accomplissent par
eux-mêmes, et ce n'est pas sans rappeler le message de Jean le Baptiste
« il
faut qu'il croisse et que je diminue » Jean 3,30 En
fait Perceval va se retirer en ermite dans le
désert afin de méditer sur ses erreurs et découvrir d'où il vient, de
quelle
lignée il est issu et retrouver le sens de sa mission, Bohort va
reprendre le
chemin du royaume d'Arthur où il contera ses aventures pour que chacun tente d'en comprendre le sens et
en tire son profit. Quant à Gauvain, neveu et héritier présumé d'Arthur
et
incitateur de la Quête, dont l'intention était de ramener le Graal pour
que ses
bienfaits profite à tous, il n'en perçu que les aspects matériels et
non le
sens spirituel, et il ne pu aboutir. Le
Graal, réceptacle d'une énergie divine ne peut donc
s'ouvrir qu'aux esprits les plus purs, à ceux dont les pratiques sont
dénués
d'intérêt personnel. Or en ces temps troublés par les guerres entre
familles
royales occidentales voulant étendre leurs territoires et leur pouvoir
et les
détournements commis par les croisés en quête également de richesses
(pillage
de Babylone lors de la 4ème croisade), cette littérature va tenter de
contre
balancer les écarts d'une période particulièrement agitée, en
instaurant une
forme de code moral, ou d'honneur qui
permettra à cette chevalerie de conserver ses privilèges jusqu'à la
révolution. Pour
tenter une conclusion, l'idée véhiculée par ce
thème pourrait être que le ferment d'une
société ne peut tenir que si l'essentiel de ses membres se mette au
service de
la dite société, donc du projet qui les rassemble, car c'est en se
mettant à
son service que le chevalier pourra tirer profit des leçons tirées des
expériences qu'il va traverser, donc
travailler à l'élévation de sa propre conscience, (ce que Jung appelle
la
conscientisation). L'autre
notion suggérée, est que toute société ne peut
échapper au principe d'entropie qui régit la nature et est donc vouée
tôt ou
tard à la décadence, à sa disparition, à son remplacement. L'histoire
de
l'humanité est parsemée de ces cycles successifs, mais
ils représentent toutefois le cadre temporel
sans cesse renouvelé pour que ses membres les plus clairvoyants
deviennent les
passeurs de traditions dont les valeurs sont par essence
intemporelles. Le
mythe unifie là où l'idéologie sépare. Cela
explique sa pérennité dans la tradition chevaleresque, et se retrouve
logiquement dans la Tradition Ecossaise où la démarche analogique nous
conduit
à l'identifier à la quête de la parole perdue. Le Graal est sorti du
temps
profane, du temps historique et s'est sacralisé dans le rituel. La
légende d'Arthur traverse les siècles, pour nourrir
des ordres initiatiques, mais parfois
aussi sous une forme ludique, comme le sacré Graal des « Monti python
», le
feuilleton télé et aujourd'hui le film à l'affiche « Camelot ». J'ai
dit, |
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