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Les croyances, les faits et la réalité 1. Les croyances L’interprétation généralement donnée des vestiges de la préhistoire, telles que les vénus callipyges, les peintures rupestres et autres traces de l’homme, permet de penser que les croyances ont toujours accompagné les sociétés humaines. Les plus anciennes seraient liées à la survie de l’espèce en visant à améliorer la chasse ou la reproduction. Après s’être cantonnées au maintien du bon fonctionnement de la société qui les pratiquait, les plus récentes semblent se rapprocher davantage de la satisfaction des besoins de l’individu et notamment le rassurer sur son existence et ce qui l’entoure. L’individu emmagasine tout au long de son existence une quantité fabuleuse de croyances, qu’il transforme souvent en certitudes et parfois même en vérités ! Ces croyances l’aident à affronter les dangers liés à l’inconnu et à l’imprévisible. Elles le soutiennent face à l’irruption de l’irrationnel et, surtout, lui assurent, tant qu’il les garde, une assise pour gérer le présent tout en lui donnant le sentiment d’une cohérence dans la conduite de sa vie. 1.1. Des différents types de croyances Il est assez généralement distingué trois types de croyances : - les
croyances réalistes (jugements de réalité que nous examinerons plus
loin parmi les faits), 1.1.1. Les croyances prescriptives. Les croyances prescriptives concernent le domaine des valeurs éthiques et politiques ; elles définissent les règles de l'action bonne et/ou juste. Une prescription est, soit égoïste, soit altruiste, soit les deux ; « Il faut se battre
pour réussir et l'emporter sur l'adversaire ! » est un
impératif égocentrique ; Les valeurs apparaissent vite contradictoires : la liberté et l’égalité ne font pas nécessairement bon ménage; ainsi que le bonheur personnel avec la justice, et la liberté avec la sécurité, etc. Les croyances, et les convictions prescriptives sont largement arbitraires et dépendent des choix culturels et individuels, ainsi que du jeu des désirs : on ne désire pas une chose parce qu'elle est bonne, mais on la juge bonne parce qu'on la désire. Or une société a besoin de valeurs communes pour constituer le lien social et réguler les aspirations contradictoires, d'où la tentation de fonder les croyances prescriptives sur des croyances réalistes apparentes ou révélées ou, sur le plan philosophique, de présenter les impératifs éthiques comme des vérités rationnelles et nécessaires auxquelles il faudrait se soumettre librement (La liberté comme obéissance à la Raison). 1.1.2. Les croyances mixtes. Trois types de croyances mixtes doivent être distinguées : • les jugements de valeur portant
sur des choses, actions ou personnes concrètes réelles ou possibles; 1.1.2.1. Les jugements de valeur. Les jugements de valeur « appliquent »
des croyances prescriptives à des réalités réelles ou possibles ; Il y a dans ce jugement au moins trois affirmations de natures différentes : - l'une qui impute l'acte concerné
à la personne, Ainsi ce mélange de croyances et/ou de savoirs est subordonné à une croyance prescriptive dont le choix peut toujours apparaître arbitraire et faire l’objet de contestations. La pratique du jugement de valeur consiste souvent à nier cet arbitraire en spéculant sur l'opinion majoritaire, que la loi est évidemment légitime ; une loi peut, pourtant, être considérée par certains comme criminelle, comme on le voit à propos de la « libéralisation de l'avortement », l'opinion, majoritaire, est et reste contestable. Les jugements de valeur se fondent sur les règles admises par les croyances prescriptives pour les justifier a posteriori. Mais cette confusion est à son comble lorsque nous avons affaire à des croyances religieuses. 1.1.2.2. Les croyances religieuses. Les croyances religieuses prétendent, sans preuves rationnelles, voire même, à l'encontre de la raison (à l’exemple des révélations mystiques), affirmer la valeur réelle des valeurs éthiques, au nom de l'existence, de la puissance et la bonté, réelles et indiscutables (parce que sacrées) du divin. La religion apparaît bien comme un ensemble de croyances prescriptives qui, parce qu'elles sont présentées comme réellement fondées dans la réalité absolue de Dieu, interdisent toute possibilité de pensée critique à leur égard. Elle sert à confondre le bien et le vrai; et encore, pas n'importe quelle vérité : mais celle qui, par définition, ne se discute pas ! C'est pourquoi la philosophie, au nom de la raison, a tenté de se substituer à la religion pour « démontrer » l'universalité indiscutable des croyances prescriptives, ou, tout au moins, de certaines d'entre elles. 1.1.2.3. Les croyances philosophiques. La philosophie n'est ni une science expérimentale, ni une science formelle ; elle ne peut donc prétendre produire un savoir positif ou purement logique : elle relève donc bien, dans ses présupposés comme dans ses objets ; de la croyance. Elle se distingue toutefois des autres formes de la croyance par sa démarche : elle se veut critique et rationnelle, et, à ce titre, prétend définir les fondements rationnels et les conditions authentiques de possibilité du Vrai, du Bien, voire du Beau. Philosopher ce n'est rien d'autre que se mettre à la recherche d'un sens rationnel universellement compréhensible de la vie et des conditions du Bien-Vivre. Mais parce que ces croyances rationnelles, ne peuvent échapper, dans leur objet même, à la subjectivité, les philosophies sont nécessairement plurielles. Or, beaucoup, sinon la plupart, des philosophies particulières, se réclame de l’idée de vérité unique, voire absolue ; elles prétendent, chacune, définir le vrai sens de la vie, le vrai bien, la vérité vraie etc. Elles se veulent des croyances réalistes et pas seulement prescriptives. Elles tentent pour cela d’assimiler toutes les valeurs, à la valeur de Vérité. Les distinctions entre elles, fondées rationnellement et universellement, ne seraient que l’expression plurielle, d’une même croyance fondamentale : la croyance dans la Raison en tant que Vérité auto-fondatrice d’elle-même. Ce substitut philosophique au divin conduit les philosophes à construire des propositions éthiques, politiques et esthétiques qui prétendent trouver leur fondement : - soit dans
l’Être rationnel, tel qu’il est vraiment : le cosmos, les lois de la
nature en général et/ou de la nature humaine en particulier, Dans les deux cas, la philosophie tente de soustraire l’éthique à l’arbitraire du désir et de la subjectivité en proposant, - soit une
conception du bonheur sans désirs sensibles et égocentriques, 1.2. Petit inventaire des croyances courantes 1.2.1. Les croyances liées à la religion Différentes positions cohabitent au sujet de la religion. Pour rappel : •
L’animisme, où tous les objets et phénomènes ont une âme. La hiérarchie des croyances religieuses varie avec les sociétés - Il existe
une forme de dieu pour 57% des Français. Mais ce pourcentage est de 81%
au Canada et même de 86% aux USA. À titre d’exemple : sous nos latitudes, la religion catholique reste, pour l’instant, la mieux assise. Il faut reconnaître qu’elle s’est installée depuis 2.000 ans et qu’elle a eu le temps de structurer sa mythologie et particulièrement de phagocyter toutes celles préexistantes. Il peut en effet apparaître surprenant à un esprit critique que toute sa justification soit basée sur des textes dont le plus ancien aurait été écrit un siècle et demi après sa création. C’est d’autant plus surprenant que les auteurs contemporains de ses débuts, n’en font nulle part mention. L’époque a pourtant été prolifique. Fait aussi surprenant, la plupart des récits de référence, se retrouvent textuellement dans les Manuscrites de la Mer Morte » pourtant antérieurs de trois siècles aux faits qu’ils sont censés rapporter. Mais, il serait dommage de limiter les croyances, aux seules religions. 1.2.2. Croyances dans le surnaturel et le paranormal Force est de constater que la croyance dans les phénomènes paranormaux est encore largement répandue comme en témoigne une série d’enquêtes menées depuis une vingtaine d’années par la SOFRES et dont le dernier sondage réalisé (en 2000) confirme tous ceux qui ont précédé. Ainsi sur 100 personnes : - 63 croient aux sourciers et
autres radiesthésistes Passons sur le détail incluant la numérologie, la cartomancie, les marabouts et les prédictions de tous genres. Nombre de nos contemporains ne doutent pas que la puissance de notre cerveau reste encore inexploitée et espèrent que l’homme saura y trouver un jour sa vraie puissance. Le niveau d’instruction ne semble pas prémunir l’individu vis-à-vis de ces croyances. 1.2.3. Tradition : les croyances culturelles Parmi les
traditions, il existe un « fond » culturel
indéniable 1.2.4. Croyances modernes Toutes les époques ont su créer et entretenir leurs certitudes spécifiques. La nôtre n’y échappe pas et la presse locale, voire à scandale sait s’en faire l’écho. Ainsi : - Les
rumeurs : la bête du Gévaudan a été supplantée par les réseaux de
traite des blanches à partir des cabines d’essayage
orléanaises et autres faits divers du même acabit. La forme la plus efficace est actuellement supportée par l’Internet sous la forme de fausses informations (en anglais : hoax (ou canular]). Que ce soient les faux virus, les appels aux dons ou à la solidarité, les mises en garde, les chaînes d’amitié, les pyramides magiques et autres formes les plus variées. Chacun apprend progressivement à ne plus crier au loup au fur et à mesure qu’il voit repasser ces messages qui se répètent depuis des années. L’informatique, en général, semble répondre au besoin d’imaginaire de quantité d’individus par le nombre et la qualité des programmes de jeux vidéo et de simulations, qui intègrent la réalité virtuelle, et par la qualité apportée à la conception des jeux de rôles. 2. Les faits : La religion de la Science À la question : « À qui faites-vous le plus confiance pour résoudre les problèmes de l’humanité ? », 38% des personnes interrogées répondent : les scientifiques, qui arrivent ainsi en première position, bien devant les politiques et les personnalités religieuses. C’est ici qu’apparaissent les croyances dites réalistes. 2.1. Les faits scientifiques Les croyances réalistes prétendent rendre compte des faits, de leur déroulement, soit en les décrivant, soit en les expliquant. Ces faits relèvent de l'expérience réelle ou possible; ils peuvent être passés, actuels ou futurs, voire imaginés; mais il convient alors de le préciser, en montrant qu'ils sont au moins logiquement possibles. La valeur de référence des croyances réalistes est la vérité ou la vraisemblance. Dans les deux cas, la concordance réelle ou possible, entre la pensée et les faits, est exigée. 2.1.1. Les observations directes Les simples descriptions ne font que rapporter les faits particuliers dans leur contexte spatio-temporel. L'expérience sensible ou scientifique réelle ou possible est nécessairement invoquée, sinon explicitement évoquée. Cette description renvoie toujours à un certain point de vue qui peut être discuté ou critiqué selon un autre point de vue; c'est dire qu'il n'y a pas de description "neutre": chacune se réfère à des critères de choix qui, eux-mêmes, font intervenir, consciemment ou non, des hypothèses interprétatives, ne serait-ce que pour distinguer ce qui est significatif et important dans les faits ou ce qui est secondaire, et qui peut être négligé. 2.1.2. Les faits scientifiquement reproductibles Les explications tentent de relier les faits selon des lois générales de cause à effet, plus ou moins logiquement construites. Cette explication autorise la prévision, plus ou moins probable, selon le principe du déterminisme qui affirme la reproductibilité de l'enchaînement des faits dans des conditions semblables. C'est ce principe qui permet de soumettre la théorie à l'épreuve de l'expérience renouvelable. Ainsi, description et explication ne peuvent pas, en pratique, être totalement indépendantes ; les deux démarches sont indispensables et leur confrontation incessante permet seule de répondre au besoin de prévoir l'avenir qu'exige la réussite de nos actions. La vérité est une nécessité technique : de la qualité de nos théories prévisionnelles dépend la réussite ou l'échec, et dans de nombreux cas, la vie ou la mort, la santé ou la maladie, le plaisir ou la douleur. 2.1.3. Les constatations statistiques S’il n’est pas évident de démontrer que « quelque chose » n’existe pas, il est envisageable de montrer que la possibilité de cette existence est réduite, sinon quasi nulle. Le moindre mathématicien pourra vous démontrer que la possibilité d’avoir les six bons numéros au loto, sont d’une chance sur 17 millions. Que ce n’est pas vraiment la chance qui entre en jeu, mais le hasard. Et, si vous avez, certes, une possibilité, même infime, de gagner, vous serez surtout perdant de 30% de vos jeux, puisque c’est le prélèvement effectué à la source par l’État. C’est ce type de méthode qui est mis en place dans les protocoles statistiques pour évaluer le degré de probabilité d’une théorie. - De tels
protocoles on montré que les placebos avaient autant d’effet que
l’homéopathie. Les observations doivent être objectives et reconnues par la communauté scientifique. Mais de larges zones d'ombre demeurent. Notamment dans les domaines peu accessibles à la réflexion scientifique parfaitement objective, là où des valeurs et des interprétations culturelles interviennent. 2.2. Les pseudo-sciences et l’image de la science C’est dans cette zone d’incertitude que s’engouffrent les tenants des théories plus ou moins farfelues auxquelles ils tentent de donner un brillant scientifique. La coupure entre les croyances scientifiques et les autres types de croyances est peut-être moins nette qu’on ne le croit : il n’est pas plus facile d’expliquer pourquoi Descartes croyait que « la nature a horreurdu vide » que d’expliquer les croyances magiques. Certains évoquent « l’existence de forcespsychologiques ou culturelles, qui feraient que, dans telle culture, dans tel groupe ou tel ensembled’individus, l’esprit humain obéissant à des règles d’inférence particulières, fonctionnerait dans descadres mentaux invalides ». Ce n’est pas toujours délibéré. Ainsi, pour 33% des jeunes de 15 à 25 ans, l’astrologie est une science, arrivant ainsi en 12e position, juste derrière la psychologie ou la sociologie, mais devant la géographie, l’écologie ou encore la linguistique. Mais c’est aussi souvent délibérément que toutes les méthodes d’amalgame, de pseudo justification et de théorisations fumeuses, sont exploitées et usées jusqu’à la corde. Pour ne citer que les plus actuelles : - Les
tenants de l’homéopathie, continuent d’en affirmer la réalité, voire
même la supériorité. Toutes ces pratiques se basent sur deux éléments complémentaires qui sont : -
L’impossibilité de démontrer qu’une croyance n’existe pas Un certain nombre de contre arguments à la raison scientifique sont alors avancés : - les
découvertes seraient des oeuvres individuelles, de génies méconnus,
voire maudits. - " on
nous cache des choses ", les scientifiques ne nous disent
pas tout (le grand complot, encore un, de la science dite
officielle). Il en résulte que : - Nombreux
sont ceux qui continuent à croire à l’influence des phases lunaires sur
le comportement humain. Force est de constater que, même ceux qui placent la science au premier rang de leurs croyances, n’hésitent pas à les remettre en cause, pour pouvoir concilier leurs envies et la réalité. C’est sur ce besoin que se fondent les pseudo sciences. 3. La réalité (Croyance, raison et déraison) La validité des croyances est très variable. Tout dépend de la source d'une croyance et des méthodes utilisées pour la vérifier. Aucune croyance n'est absolument certaine, car toutes dépendent de notre contexte culturel, des informations dont nous disposons. Il y a six siècles, il était raisonnable de penser que la Terre était plate, et il était admis par la plupart des gens que la sorcellerie permet d'envoûter nos ennemis ! Nous ne pouvons pas être certains que parmi nos croyances actuelles, certaines ne sembleront pas aussi absurdes aux siècles futurs. Certaines autorités sont valables, d'autres sont douteuses. Enfin, si les méthodes scientifiques sont généralement les plus fiables, elles ne sont pas infaillibles et ne répondent pas à toutes les questions. 3.1. Les abus des dogmes scientifiques Même certaines des théories d’Albert Einstein, qui avaient pourtant été jugées définitives, ont été battues en brèche par les faits et par l’évolution du champ des connaissances scientifiques. Dans son désir de trouver des explications universelles à partir de son domaine, le chercheur a tendance à s’enfermer dans sa tour d’ivoire. C’est pourquoi les plus récentes avancées sont plutôt l’oeuvre d’équipes pluridisciplinaires. 3.2. Les erreurs des protocoles La base sacrée de démonstration que sont les « protocoles scientifiques » a parfois été entachée par des prévisions qui ont orienté la structure même du protocole et ont forcé les résultats vers le but recherché. Sans remettre en question la méthode générale, si ce type d’erreur a été rapidement détectée, il a été aussi souvent récupéré par les tenants d’une théorie non reconnue. On a même pu voir, il y a quelques temps, un article sur la mémoire de l’eau pour tenter de justifier l’efficacité de certaines dilutions homéopathiques. 3.3. L’interprétation des faits À l’autre bout du protocole, il a pu apparaître, selon un processus équivalent des interprétations erronées de résultats d’expériences. Mais, la plupart du temps, ces abus ne franchissent pas le niveau de la publication et des contre expériences qui en découlent. Excepté, le plus souvent, quand ces publications se font dans des médias qui n’ont pas grand-chose à voir avec le monde scientifique et qui, la plupart du temps, servent d’abord une idéologie politique, économique ou religieuse (Suaire de Turin par exemple) 4. Le besoin de croire Les êtres
humains ont un grand besoin de croire. Nous voulons croire que le monde
est tel que nous l’imaginons. Nous voulons croire que tel Dieu
a créé le monde de telle manière, et qu'il nous réserve
tel sort : nous voulons avoir une explication transcendante.
Nous voulons croire que notre vie aura un sens si nous
agissons de telle ou telle manière : nous voulons un code moral. Dans
tous les secteurs de notre vie, nous cherchons un ordre, une
explication cohérente, des lignes directrices. Certains cherchent plus
ou moins par eux-mêmes, d'autres se fient à un prêtre ou à la
télévision! Mais tous cherchent ou prétendent savoir. Même les
athées et les sceptiques croient en quelque chose. Ainsi, on ne peut
pas diviser le monde en croyants et en incroyants, à moins de
nous référer à un dogme. Dans le monde, il n'y a que des plus
ou moins croyants ! Certains croient en des choses, les autres
en des choses différentes. 4.1. L'inventaire critique des croyances Beaucoup de nos croyances n'ont jamais été examinées avec soin. Pourtant, les croyances jouent un rôle fondamental dans nos vies, aussi bien au plan psychique qu'au plan pratique. Chacun devrait prendre soin de réviser périodiquement ses croyances, celles qui sont explicites, mais aussi celles qui sont implicites. Certaines croyances sont en effet injustes (les croyances racistes), dangereuses (le fanatisme), nocives (les délires religieux) ou procurent un faux sentiment de confiance (la foi aveugle dans la science et la technologie, par exemple). Bref, l'esprit critique doit demeurer en éveil. Mais à l'inverse, un esprit critique exacerbé mène au scepticisme absolu, qui est aussi une forme de dogmatisme. 4.2. Et la Maçonnerie dans tout ça ? Au milieu de cette foison de croyances, nous, Francs-Maçons, sommes, bien sûr, à l’abri de tels excès. Après tout, nous sommes fiers, à défaut de ne pas tous être « athées », d’au moins, ne pas être assez « stupides » pour se raconter des histoires. Pourtant, si l’on consulte la littérature la plus courante, celle qui est accessible à toutes et à tous dans les librairies de grande diffusion, nombreuses sont les références qui fleurent bon avec les exemples données précédemment. Parmi les plus courantes nous trouvons la tentative fréquente de vouloir rattacher directement la maçonnerie spéculative, à la tradition compagnonnique qui est alors nommée, dans ce but, la maçonnerie opérative. Nous faisons alors référence, comme les Compagnons, au temple de Salomon et à ses avatars. Comme précédemment pour la religion catholique, certains sont tentés, à leur tour de récupérer des croyances plus anciennes pour arriver à un syncrétisme pseudo-philosophique qui assurerait davantage de crédibilité à l’ensemble. Mais, certains souhaitent aussi ratisser plus noble. Il est donc fait référence dans certaines pratiques à la chevalerie (adoubement de l’Apprenti), voire des templiers et de leur traditions plus ou moins mythiques (GLTSO, OITAR, OISOT). Et, pourquoi pas, réaliser un superbe amalgame de l’ensemble, comme il est pratiqué par les Rose-Croix. Mais cela manque aussi d’ambition et d’ancienneté. L’égyptologie vient au secours des tenants des différentes versions du rite de Memphis-Misraïm, qui ont ainsi pu se concilier les grâces d’Isis et Osiris et trouver en Aménotep la vraie origine du temple. Zoroastre n’est pas non plus écarté. Certains peuvent aussi considérer, qu’il ne sert à rien de faire simple, quand on peut faire compliqué. Il est alors fait référence à la Kabbale, l’herméneutique, la chrysopée et aux séphirotes. Éleusis peut parfois être invoquée. Et, pourquoi pas introduire aussi des valeurs romantiques comme celles invoquées par l’illuminisme (et son chantre Gérard de Nerval). On peut aussi vouloir se donner un cachet pseudo-scientifique. On voit ici et là invoquer les notions zodiacales si chères aux tenants de l’astrologie. Même notre loge n’y échappe pas. Je ne suis pas le seul à être gêné par la présence du symbole qui se trouve, devant vous, à l’avant du plateau du Vénérable. En insistant un peu, on en arrive à l’ésotérisme si cher à certaines loges de la région. Nous flirtons avec l’alchimie, évoquée par le Vitriol. La magie et l’occultisme suivent de près, et les tarots et leurs valeurs symboliques apparaissent régulièrement dans les planches, ici ou là. De telles pratiques peuvent s’avérer être aussi une réponse à notre propre justification. Les Maçons aiment bien faire référence à leurs prédécesseurs les plus illustres et apprécient ainsi de pouvoir légitimer leur propre appartenance à la Maçonnerie. Cela regonfle parfois le moral lorsque l’on peut se dire que si les Champollion, Desmoulins, Eiffel, Gambetta, Joffre, Lavoisier, Montesquieu, Mozart et autres Voltaire ont appartenu à la maison, c’est que cela ne doit pas être nul. Parmi les notions les moins anciennes, certains prônent ces temps-ci le mystère des « grands initiés ». Après tout, tant qu’on y est pourquoi ne pas aller chercher des justifications dans chacun des grands courants de pensée. Confucius, Pythagore, Jésus-Christ, Socrate, Moïse et Bouddha, ça flatte davantage l’ego que Francis Blanche, Pierre Dac, Oliver Hardy ou Achille Zavatta. Au milieu de tout ce fatras apparent, chacun doit bien arriver à récupérer des pièces pour conforter ses propres certitudes. Nous ne sommes pas gênés par cette cohabitation de références et nous arrivons même à nous en accommoder, n’hésitant pas à recevoir et visiter les autres Loges, Obédiences et rites. Pourtant, toutes ces approches ne sont que des moyens, et, comme le rappelle Luc de Falco, nous devons garder à l’esprit qu’« Il faut suivre ceux qui cherchent la lumière et fuir ceux qui l'ont trouvée. » Je terminerai en invitant chacun d’entre nous, à plus de tolérance envers les idées qui ne sont pas les nôtres, même si nous devons rester vigilants vis-à-vis de ceux qui essaient de les imposer. Il y aura peut-être un chantier à mettre en route, pour paraphraser une question proposée récemment par notre Loge : « Doit-on hiérarchiser les croyances ? » Jean Bertola - Le sceptique (Georges Brassens) Imitant
Courteline, un sceptique notoire, J’ai dit VM\ |
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