La Dame de
Chartres
Selon la Kabbale, au commencement, YHVH créa
le Père et la Mère, unis par l’Amour.
YHVH est ainsi appelé car il n’est pas possible de
lui donner un nom. Il est celui qui préexiste à
tout. Celui qui fût, qui est et qui sera.
Le Père était la
Lumière Active, le Jour, le principe Mâle.
C’est le Dieu des Hommes. Dieu le Père, celui qui
décidera de la Création et la
déléguera justement à la
Mère.
La Mère était la
Lumière Passive, la Nuit, le principe Femelle.
C’est la Matrice Universelle, celle qui a reçu du
Père, le pouvoir de démiurge de créer,
de maintenir et de régenter les 2 mondes du bas.
C’est la Shékinah, l’Elohim de la
Genèse, le Démiurge, la Shakti, la
Mère Universelle, la Vierge Noire, Marie, Notre-Dame.
Elle est l’autre partie d’un Tout, la
moitié qui reste apparemment seule pour assurer la
maternité.
C’est la Veuve qui attend de ses enfants qu’ils
assument leur partie de la Création.
Quelle que soit la Tradition, la Mère est
toujours là !
Toujours selon la Kabbale, nous avons Abel et
Caïn.
Caïn, principe mâle, agriculteur
sédentaire qui envie ceux qui passent et voient
d’autres horizons, les pasteurs.
Justement, Abel, le principe féminin, est pasteur et pour
faire vivre son troupeau, il doit bien utiliser les terres des
sédentaires et entrer en intrus chez les autres.
Le drame universel est planté.
Comme YHVH préfère le sacrifice de
Abel, Caïn faute de pouvoir se venger sur Dieu, le fait sur
Abel.
D’autres se vengeront plus tard sur les Hébreux,
ou sur le Maître, ou sur Christ,...sur l’autre.
Celui qui est différent, cet autre, cet
intrus, cet Abel au principe féminin, c’est la
femme dans une société d’hommes, et si
l’on n'y prend pas garde, il est facile dans une
société primaire de devenir misogyne.
Dans les sociétés
d’hommes évolués, ou voués
à l’évolution, l’homme a
compris que la Force du monde de l’Action était
rejetée par la Beauté.
Le besoin s’est fait ressentir de connaître
l’autre soi-même, la femme, sous un autre
plan que celui purement matériel.
Aux cultes matériels, de la Terre féconde, de la
Matrice Universelle, c’est alors ajouter une dimension
spirituelle pour quelques hommes et dans la recherche qui
s’en est suivie, la réalité a
donné place à un idéal.
Je pense que c’est à ce moment de la
pensée humaine, que la Dame de Chartres est née.
L’homme venait de comprendre que c’était
une voie pour rejoindre l’UN, la Sagesse, le Père
et la Mère, unis dans l’Amour.
Les Traditions secondaires racontent chacune
à leur façon des histoires qui sont faites pour
donner à réfléchir, au sens propre du
terme.
Celle d’Adam et Eve, qui nous est familière, est
un exemple parfait.
Adam ne se pose pas de questions, tout comme
l’UN, YHVH, il est détenteur du Verbe, de la
Parole et donc, comme YHVH, il crée, dans ce Paradis, hors
du temps Profane. En fait, il suit le chemin tracé,
entièrement extérieur et parfaitement
sclérosant.
Eve propose à Adam de croquer la pomme.
Adam à partir de la, est viré du
Paradis, perd son pouvoir de créer et devra subir les
épreuves du temps.
Intéressant pour quelqu’un qui
analyse. C’est en fait grâce à Eve, que
l’homme va se poser des questions et progresser par
lui-même.
En un mot: Il participera et aidera à la création
du monde suite à l’impulsion d’Eve.
A partir de la, il cherchera à retrouver ses
pouvoirs, sa Parole Perdue, à retourner à cette
époque dorée, au Temps perdu, à la
source originelle, au Paradis perdu.
Et tout ça grâce à qui ?
Est-ce bien Eve la seule inspiratrice ? Ou pour parler moderne, qui est
derrière ce coup là ?
Toujours est-il que dans notre Tradition, la place de la
Dame c’est peu à peu imposée.
Au travers des siècles et depuis la plus
haute antiquité, il y a eu des tentatives dans cette
direction.
Le combat chevaleresque devient un combat spirituel où le
jeu d’échec remplace l’affrontement
guerrier. Jeu où le Roi et la Dame sont toujours
protégés par les Chevaliers.
L’enjeu n’est plus la possession, la domination de
l’autre, mais le mariage divin, le
désintéressement total.
L’homme découvre que la femme
idéale, la Dame, reflète à
l’extérieur, sa grande Beauté
intérieure et est le reflet sur terre du Divin.
Le Chevalier aime la Dame, donc Dieu le Père.
En retour Dieu aime le Chevalier et la Dame.
Pour parler de cet Amour avec un grand
« A », rappelons-nous
de la Béatrice de Dante, cette Dame initiatrice, inspiration
qui le mène au plus profond de lui-même.
C’est la Beauté apparente qui le conduit
à la Sagesse intérieure.
Elle lui apprend l’Amor, l’A Mor qui supprime la
Mort.
Elle lui apprend donc l’immortalité.
C’est l’Amour Courtois, le Fin Amor, qui permet de
séparer le subtil de l’épais.
En rejetant la convoitise que peut être la femme,
l’homme éloigne le désir charnel,
matériel et reste pur. Il transcende son désir et
transforme la Force brutale en Force vivifiante.
Celui qui arrive à cela, à unir la Force et la
Beauté, est béni de la Sagesse.
Il a trouvé sa Voie Intérieure, la Voie Royale,
la Voie du Milieu où tout est Paix. Le Centre de la Roue
dans d’autres Traditions, le Centre du Monde.
Le Chevalier est alors Roi, Roi de la Reine, la Dame.
Il devra alors protéger la Veuve et l’Orphelin.
Dans notre Tradition, la Dame Vierge donne sa Vie
à celui qui donnera à son tour sa Vie pour les
Hommes. Le Chevalier d’entre les Chevaliers sera alors
représenté comme une Rose au centre de la Croix,
lui qui vient de Celle que Bernard appelait Rosa-Mystica.
Cette Notre-Dame, cette Marie-Stella, le Chevalier lui
doit l’Amour, l’Ardent Désir (De
desirerium, nostalgie de l’Etoile).
Cette Etoile Flamboyante guidera notre héros dans un long
voyage initiatique, sa quête au terme de laquelle, il
épousera, il rejoindra, il se fondera dans sa
source. Il se réunifiera à celle qui,
telle Isis, est comme lui, le fruit de la volonté de
création de la Déité, la
Mère, Sœur et Epouse à la fois, mais
Dame avant tout.
Perpétuelle Union des complémentaires, de
l’Actif et du Passif, du moi mortel et du Soi
immortel.
Pour nous, Franc-Maçons, la Dame est la Reine
qui accompagne celui qui est dans le siège du Roi Salomon.
C’est la Sagesse, la médiatrice entre le Ciel et
la Terre.
Elle est aux côtés du V\ M\, (cet autre
médiateur à l’Orient, dans le
siège périlleux, but de tous les Chevaliers en
quête).
Comme dans la Tradition Celtique, la Reine détient la
souveraineté, le Roi ne faisant que d’appliquer
sur le terrain ses indications spirituelles.
C’est elle qui le guide sur la Voie Royale, Voie du Milieu
entre le Noir et le Blanc.
C’est lui qui reflète la
Lumière de Gloire, cette Shékinah qu’il
reçoit d’elle.
A Fulbert de Chartres, nous avons la chance de vivre
sous l’aile protectrice de Notre-Dame.
Il nous appartient de faire en sorte de nous transformer
progressivement, de nous transcender.
Il nous faut nous sacrifier, au sens de « sacrum
facere », « acte
sacré »,
à Dieu, Grand Architecte de l’Univers et
à la Dame qui le symbolise, sous les actions de la Sagesse,
de la Force et de la Beauté.
Alors, devenus soldats de Dieu, nous pourrons partir à
l’aventure, c’est à dire à ce
qui doit arriver, unis à la Dame, époux de la
Reine devenue Déesse ou Fée, telle Morgane ou
Viviane, hors du temps Profane et sur l’échelle
qui permet le passage d’un monde à
l’autre.
J’ai dit V\ M\
G\ B\
|