Obédience : NC | Loge : NC | 18/10/2014 |
Franc-maçon et catholique Ce n’est pas un sujet symbolique ni rituelique mais plutôt historique et de société et cela touche à la religion, sujet qu’il n’est pas conseillé, en général, d’aborder en Loge. Je vous demande donc votre indulgence, sachant que je ne cherche à convaincre personne sur une croyance, mais à vous parler d’une problématique que de nombreux maçons ont, y compris dans notre Loge. D’ailleurs, je m’inspirerai de la planche du F\ F\ P\ sur les bulles papales. Il s’agit de la double appartenance Franc- maçon et catholique. Pour ne pas être abstrait, il me parait indispensable de vous parler de mon cas personnel qui doit être celui de plusieurs milliers de catholiques en France, mais que l’énorme majorité d’entre eux n’ose pas évoquer par peur des conséquences. 1 mon histoire : Je suis né dans une famille chrétienne non pratiquante mais mes parents ont insisté, sans difficulté de ma part, à ce que je parcoure le cursus du bon catholique à savoir baptême, confirmation et communion. Sur cette lancée et au début de ma carrière professionnelle, je me suis engagé dans l’animation des messes, l’aumônerie et avec ma femme dans la préparation au mariage. Après avoir perdu longtemps la pratique, à ma retraite, nous sommes arrivés en Bretagne et, après un moment, j’ai repris cette pratique religieuse et me suis réengagé dans l’équipe d’animation paroissiale locale. J’ai donc été dans l’équipe plus de 5 ans en donnant de temps en temps la communion et en remplaçant même une fois le prêtre lors d’une Assemblés Dominicale en l’Absence de Prêtre (soit une messe sans Prêtre). Il me manquait un groupe de réflexion sur la vie en général et je ne l’ai pas trouvé dans les différents mouvements d’Eglise que j’ai examiné (cadres chrétiens par exemple) et je n’ai pas changé de point de vue depuis. C’est alors, il y a 6 ans, que je fus invité par mon voisin à déjeuner. Celui-ci me proposa d’entrer en Franc-maçonnerie pour réfléchir sur moi-même et sur les autres. J’avais un préjugé négatif de ce groupement, comme la plupart des profanes surement, mais, venant de mon voisin, qui me semblait charmant, j’ai décidé de tenter l’aventure. En effet, cela correspondait à ce que je cherchais ; à savoir une réflexion sur des valeurs complémentaires à la religion ; et je me suis engagé, d’autant plus que c’était à la Grande Loge Nationale Française qui impose la croyance en Dieu, à ma grande surprise à l’époque. Je ne suis pas resté longtemps dans cette obédience car, à l’époque, les dirigeants ne pensaient qu’à recruter des Frères pour augmenter les effectifs aux dépends d’un travail en profondeur. C’est ainsi qu’à chaque tenue en 6 mois il y avait une initiation, donc pas le temps de travailler. J’ai fait part de ma déception à mon parrain qui m’a orienté vers un ami commun, Michel, dont je n’avais jamais relevé son appartenance à la F\ M\. Celui-ci était d’une obédience voisine « La Grande Loge de France » qui n’impose pas la croyance en Dieu mais en Le Grand Architecte de l’Univers dont chacun peut se faire une image et qui, pour moi, représente tout simplement Dieu. Là, j’y ai trouvé le travail sur soi-même que je cherchais et la fraternité des autres pour que nous nous aidions réciproquement à progresser. Depuis cette date, je travaille avec acharnement à m’améliorer et ma femme m’a dit avoir observé une forte évolution dans mon comportement envers les autres. Parallèlement à cette démarche, j’ai continué plusieurs années à animer les messes car je ne pensais pas offenser le Seigneur puisque mon entrée en F\ M\ ne m’avait pas fait renier mes convictions, et ce malgré la menace d’excommunication. Cependant, je n’ai jamais réussi à en parler aux membres de l’équipe car aucun cadre ne s’y prêtait. La seule discussion que j’ai pu avoir a été avec le prêtre de la paroisse au moment où il s’en allait et celui-ci m’a réservé un excellent accueil car il ne connaissait pas et n’avait pas de préjugé ; lui ; mais malheureusement contact inutile vu son départ. J’ai quitté l’équipe il y a un an environ, sans aucun rapport avec ce qui précède, tout simplement parce que le nouveau curé a décidé de supprimer des messes dans ma paroisse et a refusé les ADAP dans la lignée de son Evêque, demis depuis. Celui-ci n’a même pas cherché à me repêcher. Depuis que je suis rentré en maçonnerie, je n’ai donc eu de cesse de chercher à vérifier la compatibilité avec ma croyance religieuse. J’ai donc eu l’occasion de lire une vingtaine de livres et autant d’articles sur ce sujet (la bibliographie est disponible sur demande, comme ma planche). J’ai eu la chance récemment de m’abonner à la revue « lettre aux catholiques amis des F\ M\ » de Paul PISTRE, que j’admire et dont je parlerai plus bas et, par l’intermédiaire de l’ancien aumônier du Secours Catholique d’adhérer à L’association CREDI (Cultures et Religions En Dialogue) qui milite pour le dialogue inter courants de pensée. Je vais donc résumer ici historiquement et les positions des deux côtés en m’inspirant beaucoup d’une planche de Fabrice, puis les tentatives de dialogue avant de conclure. 2 l’histoire des relations Eglise- F\ M\ : De la part des Papes, cela a commencé dés 1189 : le concile de Rouen (puis celui d’Avignon en 1326) va interdire les confréries de Maçons, soupçonnées d’être déjà trop proches du Judaïsme, trop secrètes et trop adeptes du serment. En 1738 : La première Bulle Papale de Clément XII excommunie les Frères M\ pour plusieurs motifs dont la plus originale : « et pour des raisons de nous seuls connues ». Et pourtant la M\ de l'époque était en grande majorité composée de bons et fervents Catholiques. Exemple : l’Heureuse Rencontre (loge GLDF de Brest) fêtait la Saint Jean Baptiste chez les Carmes ou à L’église Saint Louis par une messe aux frais de l’atelier. - 1751 : Benoît XIV va,
dans sa bulle « Providas »,
condamner mais cette bulle ne sera pas enregistrée par le
Parlement Français, et sera donc de peu d'effet sur notre
territoire. Le F\ M\ serait aussi l'ennemi du peuple qui se voit « dépouillé des consolations qu'il eût pu trouver avec tant de facilité et d’abondance dans les croyances et les pratiques de la Religion Chrétienne ». - 1917 : Le droit Canon 2335 pose :
La sanction : l’excommunication. - 1955 : Pour
l’anecdote, un Frère prêtre de la loge
l’union de Laval été
béatifié par PIE XII en 1955. Il s'agit de
l'Abbé Jean Marie Gallot, guillotiné en 1794. - novembre 1983 : c’est
sans compter sur le Cardinal RATZINGER, futur Benoît XVI,
alors Préfet de la Congrégation pour la Doctrine
de la Foi (terme qui remplace depuis 1965 La Sainte Inquisition),
rappelle « le Jugement
porté de tous temps sur la F\ M\ qui
est inconciliable avec la doctrine Catholique ». la positions de la F\ M\ par rapport à l’église : - 1927 : Oswald WIRTH,
éminent spécialiste du symbolisme en
franc-maçonnerie de la GLDF, confirmera la
liberté absolue de penser et de croire (1), les tentatives de conciliation : - Parmi la haute
hiérarchie de L’Eglise, seul Mgr PEZERIL en 1971
puis surtout Mgr Jean Charles THOMAS se fera toujours
l’avocat du dialogue et du respect en particulier avec des F
de la GLDF et ce malgré, le Cardinal Ratzinger qui bloquera
le dossier de la cassette et imposera à Mgr Thomas la fin du
dialogue. Force est de constater qu'à ce jour, aucun
évêque de France ne se risquerait à un
dialogue. 2012 : Mathieu METAYER,
médecin et membre éminent de la GLNF, explique
que tous les chrétiens devraient être
Francs-maçons. C’est l’argumentaire le
plus engagé, mais vers la GLNF. 2012 : Jean LANCELIN, membre
de la GLNF, explique sa découverte de la
maçonnerie et son entretien avec le futur pape Jean XXIII,
Frère depuis 1935. 5) les principaux points d’achoppement vus des catholiques : 1 Les raisons politiques : 2 Des raisons Historiques : Liées à la naissance de la M\ spéculative et à ses parrains protestants, à sa volonté de dépasser les guerres de Religion qui ruinent les sociétés, les hommes et toutes les tentatives d'évolution de la civilisation, ce qui était contraire à ce que L’Eglise voulait faire. 3 Le Secret M\ La question n'est pas ici de savoir quel est le sacré Secret Véritable du M\, mais de se demander si un secret est compatible avec une religion révélée. Ne s'agit-il pas d'une rivalité dans le Secret par rapport au secret de la confession. Il n'y aurait point de secret envers le représentant « officiel » de Dieu sur terre, qu'il soit Pape ou Prêtre mais le M\ résiste. Comme vous le savez, la notion de secret est très ancienne pour les maçons et provient de l’époque, dite opérative, ou les F\ M\ avaient des secrets de fabrication propres à chaque corporation à protéger ; cet aspect a perdu de son sens de nos jours. Le secret maçonnique revêt deux aspects bien différents : l’esprit institutionnel qui s’applique aux rituels des différents grades et celui propre à la construction du temple intérieur de l’initié, donc incommunicable à mesure qu’il progresse dans la voie de la connaissance. Jésus a lui-même veillé à la formation secrète des trois principaux apôtres qu’il avait choisi. 4 La religion maçonnique : Pour pouvoir la critiquer plus facilement, l’Eglise s’est efforcée d’assimiler la F\ M\ à une religion. Or, tout le monde sait qu’une loge n’est pas un lieu de culte religieux mais un centre de rencontre ou chacun arrive avec sa foi personnelle ; même si des références déistes existent ; mais elles ne sont représentatives que de rituels et de symboles. Les constitutions d’Anderson précisent « Un M\ est obligé par son engagement d'obéir à la loi Morale et s'il comprend correctement l’Art, il ne sera jamais un athée stupide ni un libertin (donc qui professe une morale laïque) irréligieux » et les F\ M\ en général prêtent serment sur la bible. De plus, il est de notoriété publique que de tous temps des membres de la hiérarchie de l’église allant jusqu’au Pape jean 23, ex cardinal RONCALLI, ont été F\ M\. Le récent scandale de l’abbé VESIN, curé de Megève en est une illustration criante sachant que de plus il était au Grand Orient de France, qui est une des obédiences les plus laïcs et les plus lointaines de la religion. La hiérarchie de l’Eglise a refusé sa double appartenance. C’est encore moins une secte puisqu’elle n’a pas de gourou et qu’elle laisse le F\ M\ libre de tous ses actes et en particulier celui de la quitter. C’est un ordre initiatique universel et laïc fondé sur la fraternité. Le concept de GADLU peut convenir à toutes les religions et à toutes les philosophies, aux deux pensées M\ et Chrétienne ; il permet une totale liberté de pensée et de réflexion ! Il reste une entité métaphysique, chemin de la Connaissance. Il convient aussi bien aux Déistes qu'aux Théistes. 5 l' Œcuménisme. La M\ spéculative est née sur les ruines des guerres de religions, et les Loges étaient les seuls lieux où les Catholiques, les Protestants et même les Juifs pouvaient échanger des idées. Les Loges ont ouvert une brèche dans le système des Ghettos. La mission des F\ M\ qui est de réunir ce qui est épars trouve ici une application concrète. Et ce qui les unit est infiniment plus fort que ce qui les sépare, y compris leur fondations ; la symbolique M\ reposant sur de nombreux fondamentaux Judéo-chrétiens. L'œcuménisme prévoit un dialogue d’égal à égal or une religion révélée comme le Catholicisme, détentrice de La Vérité, ne peut que vouloir convertir ceux qui sont pour elle dans l’erreur. Si un dialogue débute, il sera forcément « pipé ». 6 Le Libre arbitre. La M\ va aggraver son cas, en proposant un cheminement initiatique, c'est à dire un voyage personnel de recherche de la Lumière, de la Vérité. Oser préférer la recherche de la Vérité à la Vérité Révélée s'apparente à une attitude hérétique pour Rome. (Hérésie = Dénier le dogme) Le Vatican fera analyser par L'Inquisition nos Constitutions et, surprise, elles ne seront pas remises en cause et donc considérées comme non hérétiques. Reste néanmoins que le Libre arbitre proposé par la M\ est incompatible avec le Dogme Catholique. Les textes fondateurs ne sont pas hérétiques, la méthode l’est. Nous sommes des « cherchant » « cherchez et vous trouverez » disait Jésus qui est, selon un de nos rituels, « un des maillons de la chaîne symbolique formée par les initiés de tous les temps ». Cette maxime est à rapprocher d'une phrase extraite d'une Bulle : « Celui qui cherche sera damné ». Force est de constater que la F\ M\ demeure incompatible avec le Catholicisme tel que le conçoit l'église romaine rétive à Vatican II ; il est vrai que pour la F\ M\ ce n'est pas l'Eglise de Pierre qui est importante, encore moins celle de Paul mais celle de Jean. 7 l’effet réseau : Parmi les tabous à démystifier, il y a celui de l’intérêt à rentrer en Franc maçonnerie. Certes la presse ne parle que soit des scandales de certaines fraternelles (groupements de F\ M\ dans des domaines particuliers tels le bâtiment,) ou des influences politiques des dirigeants des obédiences ou de la fraternelle des parlementaires. Ces actions ne concernent qu’une très petite minorité des F\ M\ et je peux vous assurer que dans les loges de base dont je fais partie, aucune compromission de ce type n’existe et nous ne faisons que travailler ensemble à l’amélioration de valeurs spirituelles et morales de la société. Cela ne veut pas dire que nous sommes meilleurs que les autres mais nous essayons de l’être. L’Eglise est d’autant plus mal placée pour critiquer la F\ M\ qu’en son sein existe l’opus Dei, qui est une certaine Franc maçonnerie vaticane. 6 Conclusion Le Catholicisme et la M\
pourraient non pas s'allier mais au moins se respecter et se
tolérer puisqu'ils poursuivent au moins au niveau des Grands
Principes, le même but : « Travailler au
Bonheur de l'Humanité ». Certes la démarche maçonnique est clairement caractérisée comme une démarche de recherche de Connaissance par opposition à une démarche de croyance ! Mais pour ma part, je suis optimiste, je me dis que « tout ce qui monte finit bien un jour ou l'autre par converger » et je milite dans ce sens grâce au CREDI et à Paul PISTRE. Surtout dans tout l’argumentaire des autorités catholiques cité plus haut je ne vois aucune incompatibilité avec ma pratique maçonnique. Vénérable Maître, j’ai dit. B\ K\ Bibliographie : 1« la
religion du Franc-maçon », Oswald
WIRTH, le symbolisme 1927 (repris dans le PVI 135 en 2005). |
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