Obédience : NC | Loge : NC | Date : NC |
De l'Ombre à la Lumière Avant de recevoir la lumière et de travailler à l’ombre sur la colonne du septentrion, l’apprenti se trouve plongé dans les ténèbres que sa condition profane lui inflige : Les sens allégoriques des symboles Ombre, Lumière et de son antonyme Ténèbres ne feront pas l’objet de mes propos de ce soir. Tout au plus rappellerais-je que, en franc-maçonnerie, les Ténèbres sont assimilées symboliquement à l’Ignorance et qu’à l’inverse, la lumière évoque la connaissance; quant à l’ombre, celle-ci n’a aucune signification allégorique reconnue, si ce n’est pour évoquer l’ambiance dans laquelle se trouvent les apprentis sur la colonne du nord. Je m’intéresserai d’avantage au principe d’opposition entre ténèbres et lumière dans un premier temps, pour étudier ensuite quels sont les pré- requis maçonniques qui facilitent le passage de l’ombre à la lumière. Il y a un aspect quasi démiurgique dans l’opposition ténèbres - lumière. Le principe d’opposition binaire fondamentale est un outil qu’affectionne particulièrement la Franc-maçonnerie dans un but pédagogique. En effet, le manichéisme étant une attitude naturellement humaine, les oppositions fondamentales sont souvent sclérosantes dans la vie profane. La maçonnerie utilise celles-ci et en les rendant fécondes et nécessaires ( dixit le rituel d’initiation) pour nous orienter, soit vers le binaire de complémentarité, soit vers le ternaire. Au grade d’apprenti auquel nous travaillons ce soir je citerai parmi ces oppositions fondamentales :
Dès lors, pourquoi ne pas considérer l’ombre comme la voie médiane qui atténuerait l’opposition fondamentale entre Ténèbres et Lumière ? Ainsi , le chemin de l’ombre serait celui qui nous ferait passer des ténèbres à la lumière… Revenons quelques instants sur le rituel d’initiation que nous avons encore vécu récemment : La noirceur du cabinet de réflexion prolongée par la cécité qu’entraine le bandeau sur les yeux du profane indique que celui-ci est plongé dans les ténèbres. L’impétrant triomphe des 4 épreuves sur les 4 éléments pour aspirer en sortir ; La lumière qui lui est demandée par le premier surveillant lui est brutalement assénée. Ainsi, la première manifestation de l’Initiation accomplie est le fait qu’on retire le Bandeau obstruant la vue du profane. L’aveuglement provoqué par la brutalité de la lumière fait donc suite à la cécité entretenue par le port du bandeau … L’apprenti a reçu la lumière initiatique, mais il est incapable de décrypter les enseignements de la F\M\ qui viennent de lui être donnés ou vont incessamment lui être communiqués au cours de la cérémonie. A la faveur des yeux qui se dessillent, la lumière de l’initiation ne va pas éclairer autre chose que l’ésotérisme de la F\M\ ; non pas par exotérisme ; Au contraire ! La lumière fait prendre conscience au nouvel initié de la difficulté de pénétrer l’institution et d’en explorer les Arcanes… Ainsi l’apprenti est en droit de penser ; « je viens d’être adoubé , je suis Franc Maçon, donc fils de lumière et mes FF\ me reconnaissent comme tel… Mais je suis app, je n’ai que trois ans , je dois me taire, et je ne sais ni lire ni écrire… Et en plus on me demande de respecter le secret sur ce qui vient de m’être enseigné … mais tout ce qui vient de m’être enseigné est secret à mes yeux… ». C’est à peine initié, et autorisé à s’asseoir dans l’ombre sur la colonne du septentrion, que l’app F\M\ prends conscience du chemin qui le sépare de la lumière. Un chemin qu’il soupçonne infiniment plus important qu’il ne l’imaginait avant son initiation… Je voudrais dire ce soir à nos FF\ app que l’ombre de la colonne du nord est néanmoins le chemin le plus rapide pour tendre vers la lumière ; encore faut-il apprivoiser celle-ci afin de se repérer le plus rapidement possible sur la voie initiatique et ne pas s’y perdre ; Si, bien entendu, aucune leçon de Maçonnerie n’est à prodiguer dans le cadre de ce travail, je me permettrai de faire part des observations que j’ai faites au cours de mes 25années passées en FM. Tout au long de ce parcours, je me suis inspiré des FF\ que je pressentais comme les plus éclairés afin d’essayer, non sans difficultés d’ailleurs, de leur emboiter le pas sur la voie initiatique… La première de ces observations est l’appropriation du langage symbolique et la compréhension du Rite ; A l’instar de la lumière d’ordre qui se répand au début de la tenue afin d’éclairer nos travaux, la compréhension du rite par l’appropriation de ses symboles permet à la lumière de se répandre en l’initié, d’éclairer en lui la finalité de la F\M\ et de lui faire comprendre l’institution, le Rite pratiqué et les symboles. Cette appropriation par chacun de nous est indispensable pour assurer la sérénité de nos travaux en les préservant des écueils des travers profanes. La progressivité garantie par les Rituels d’ouverture et de fermeture des travaux en loge dégage le temple maçonnique de l’espace temporel et sociétal en le prémunissant du Forum. Le REAA entretient, par un juste équilibre, une spiritualité laïque propice à la diffusion de la lumière sur nos travaux ; Sa compréhension par chacun est donc une condition nécessaire, mais ô combien insuffisante ! En effet, cette lumière n’éclaire que les scories de notre condition profane. Cette profanité (pardon du néologisme) planerait sans cesse dans le temple si les adeptes ne cherchaient pas, par eux-mêmes, à déceler la vraie richesse qu’ils ont en eux. Le VITRIOL (Visite l’intérieur de la terre et en rectifiant tu trouveras la pierre cachée) du Cabinet de réflexion n’est pas autre chose que le « Connais toi toi-même et tu connaitras l’univers et les dieux … » Aucun Maître Maçon, aucune Institution, aucun Ouvrage ne peut révéler autre chose que ce qui repose, à moitié endormi, dans le commencement de sa propre connaissance. Alors, le Silence imposé à l’apprenti, dans l’ombre de la colonne du septentrion, va se transformer petit à petit en véritable ascèse volontaire et méditative. Le VITRIOL est l’huile de la lampe qui éclaire la voie initiatique ; une voie qui ne mène nulle part ailleurs qu’à sa propre réalisation humaine ; autrement dit, la seule voie initiatique qui vaille est sa propre voie, sa propre initiation… Prenons garde, la voie initiatique est un chemin long, tortueux et parsemé d’embuches… Il faut s’y engager avec prudence, mais détermination, car on a vite fait de s’y égarer voire de la quitter. Cela m’amène à ma deuxième observation ; elle concerne l’assiduité, le zèle et le dévouement… Nombreux sont ceux qui quittent la voie par inassiduité, entrainant ainsi leur désintérêt et leur démotivation. Les raisons de ne pas venir en loge sont bien plus nombreuses et évidentes que celles de venir y travailler. Mais la maçonnerie se pratique en groupe et le chantier d’œuvre a besoin d’ouvriers pour bâtir le temple idéal et seule la confrontation fraternelle de nos idées parvient à faire grandir celles-ci. Nous sommes dans un ordre, donc une institution de devoirs dont les droits ne confèrent rien d’autre que le droit de remplir d’autres devoirs. C’est pour cela que les FF\ les plus éclairés sont volontaires pour tout, tout en étant candidats à rien… Le Zèle et le dévouement sont les clés qui ouvrent les portes de l’élévation sur la voie initiatique. Le REAA comporte 33 degrés d’élévation et si l’apprenti est le premier d’entre eux, le grade de maître en est le troisième échelon. La règle, qui est le premier outil qui nous a été montré le soir de notre initiation, nous indique que nous appartenons à un ordre, et ses 24 graduations nous confirment que c’est 24 heures sur 24 que nous y appartenons. Rappelons-nous ce que notre rituel de fermeture profère : « que la lumière qui a éclairé nos travaux continue à briller en nous pour que nous poursuivions en dehors, l’œuvre commencée dans le temple… » Et si La tenue commence à midi pour se terminer à minuit, cela nous indique que nous devons passer la moitié de notre vie à nous perfectionner tandis que l’autre moitié doit servir à l’amélioration de l’humanité. La troisième observation que j’ai faite est que les FF\ les plus éclairés que j’ai rencontrés, agissait dans l’ombre car ils sont souvent très humbles et très aimants. Il faut se méfier des apparences, les décors les plus resplendissants de notre institution n’ont pas droit de cité ailleurs, alors que le plus modeste en apparence cache parfois un très haut niveau d’élévation. De même, le bien parler en loge n’est pas l’utilisation d’un beau phrasé, mais l’usage du langage du cœur. L’humilité est contemporaine de la lucidité car la gnose n’est pas le savoir ; au contraire ! L’art Royal ne se pratique qu’en remettant en permanence ses acquits en cause ; Le sachant est emprunt de certitudes alors que le sage est pénétré par le doute ; Ainsi, la seule conviction que j’ai acquise en maçonnerie, c’est celle qui consiste à ne pas douter du doute !... La perfection ne peut être qu’un idéal à atteindre. Symbolisée par la lumière, elle revêt le manteau de la sagesse et se pare des atours de la vérité ; Mais bien entendu, elle est inatteignable, car nous sommes imparfaits! Seul l’amour fraternel dans l’altérité permet de passer outre nos imperfections mutuelles. La fraternité est le lien indéfectible qui unit les F\M\ quelles que soient leurs différences, leur situation profane, leur culture, leur religion ou leurs opinions… L’amour fraternel permet d’entretenir à l’intérieur de soi la lumière initiatique qui, par irradiation, permet aux autres d’éclairer leur propre conscience, et de voir clair en eux même. Si la lumière d’ordre se répand de manière efficace en loge grâce aux compréhensions individuelles du rite et des symboles, l’amour et le sens de l’altérité de certains initiés répand, sur tous les FF\ de la loge, la chaude lumière de la connaissance. Celle-ci est partie intégrante de notre Egrégore et elle éclaire en permanence notre chaîne d’union, même lorsqu’ils sont passés à l’Orient Eternel. Voilà mes FF, vous aurez compris que cette planche n’est que le témoignage d’une expérience intime, mon expérience intime… A l’issue de celle-ci, je suis fermement convaincu que, malgré la stricte observance des préceptes de la Franc-maçonnerie, on ne passe pas de l’ombre à une lumière absolue, mais à un jeu d’ombre et lumière maitrisées ; Et c’est tant mieux, car je pense que l’ombre est absolument nécessaire à la mise en exergue de la lumière, qu’elle favorise le discernement et donne du relief à notre vie. Malgré ces 25 ans de parcours, je ne sais pas si je suis plus éclairé qu’auparavant. Néanmoins, la voie initiatique a émulé en moi, le sens de la clairvoyance, ce qui m’a aidé à m’acclimater et apprivoiser l’ombre qui m’entoure et qui continuera de m’entourer, en tant qu’eternel apprenti franc-maçon ; quant à la part d’ombre que j’ai en moi, elle est le reflet de mon ignorance, et je ne l’ai pas supprimé. La F M , m’a cependant appris à l’accepter et à vivre avec; l’initiation a révélé en moi une aptitude à discerner ce qui est du ressort de la conscience qui m’appartient, que je contrôle et que j’essaie d’améliorer ; de ce qui résulte de mon inconscient qui ne m’appartient pas, que je ne contrôle pas, mais que je peux borner ; En quelques mots, mon initiation m’a permis de circonscrire cette part d’ombre et d’ignorance qui est en moi, et émuler la lumière de la connaissance, dont mes FF\ les plus éclairés m’ont gratifié . Quant à savoir si je prodigue un éclairement, je ne suis pas apte à le dire… La seule chose que je sais, c’est que, comme le disait Saint EXUPERY : « On ne voit vraiment bien qu’avec le cœur car l’essentiel est invisible à nos yeux », autrement dit, mes FF, le regard que je porte sur vous avec mon cœur me permet de voir infiniment plus de choses que ce m’autorisent mes yeux … D\
L\ « Le maître qui va, parmi ses disciples, à l’ombre du temple, ne leur transmet pas sa sagesse, mais plutôt sa foi et sa tendresse. S’il est vraiment sage, il ne vous invitera pas à entrer dans le logis de sa sagesse, mais vous conduira bien plutôt jusqu’au seuil de votre propre esprit… » Khalil GIBRAN |
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