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Giordano Bruno, ou les conséquences de l'intolérance

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Qui était Giordano Bruno ?

Bruno nait en 1548 à Nola, petit bourg proche de Naples, qui relève de la souveraineté espagnole. Son nom de baptême est Filippo. Sa famille se trouve d'origine modeste (son père « homme d'armes »).

Il est scolarisé dans une école proche du lieu où vit sa famille. Il aura alors une instruction, imprégnée d'humanisme, d'auteurs classiques, d'étude de la langue et de la grammaire latine. Plus tard, il rejoindra l'université de Naples où il découvrira la mnémotechnique, l'art de la mémoire, qui constituera l'une de ses disciplines d'excellence. Il suivra aussi des cours qui le conduiront au sein de débats philosophiques entre platoniciens et aristotéliciens. Sa culture, alors essentiellement humaniste, va s'enrichir d'un apport théologique déterminant.

En effet, en 1565, il entre dans un prestigieux couvent dominicain. Il y rencontrera Giordano Crispo, maître en métaphysique auquel il rendra hommage en adoptant son prénom. Il sera alors un dominicain modèle, vivant selon la devise « verba et exempla » qui veut dire « par le verbe et par l'exemple ». Il sera ordonné prêtre en 1573.

Giordano Bruno sera lecteur en théologie et poursuivra sa carrière de dominicain, au cours de laquelle, il soutiendra une thèse sur la pensée de Thomas d'Aquin et de Pierre Lombard. Toutefois, Bruno dissimule en fait, une rébellion contre le carcan théologique. Au fil des années, il aura su se forger une culture éclectique et peu orthodoxe, sans cesse alimentée par un appétit vorace de lectures et des capacités exceptionnelles de mémorisation.

Il est particulièrement adepte des œuvres d'Érasme, humaniste catholique qui use d'une certaine liberté par rapport aux autorités ecclésiastiques. Il a le goût de l'hermétisme et de la magie. Il aura une passion grandissante pour la cosmologie, détachée de l'approche théologique.

Au fil du temps, les heurts avec les autorités religieuses deviennent de plus en plus durs et les accusations de lecture de livres interdits augmentent.

Il renie : le concept de la vierge Marie, le concept de la Trinité, dogme qu'il repousse.

En 1576, il est contraint d'abandonner le froc dominicain et fuit. Une instruction est ouverte à son encontre afin de le déclarer hérétique.

De 1576 à 1578, il aura l'occasion de fréquenter plusieurs villes et régions dont celles de Gène, Savone, Turin, Venise etc. Il y abritera ses doutes et ses recherches.  Épuisé par sa condition, il s'exilera dans le Comté de Savoie. Tout d'abord, à Chambéry, puis à Genève qui est alors calviniste. Son intégration dans la communauté évangélique ne durera qu'un temps. Un différend avec un de ses membres lui vaudra arrestation et excommunication.

Il deviendra ensuite, protégé par Henri III, l'un des philosophes attitrés de la cour. Il tiendra une chaire de lecteur extraordinaire et provisionné au collège des lecteurs royaux, qui deviendra le Collège de France. En 1583, Bruno se rendra en Angleterre où il aura un accueil hostile. Il essuiera nombre de critiques.

Il apparaît comme un philosophe théologien et scientifique, novateur et impertinent. Dans ses ouvrages, il expose sa vision cosmographique audacieuse révolutionnaire. Il y soutient les thèses coperniciennes du monde, et va encore plus loin en imaginant un univers peuplé d'une infinité de mondes.

« Nous affirmons qu'il existe une infinité de terre, une infinité de soleil et un éther infini ».

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En 1585, il retourne à Paris mais les positions religieuses se durcissent. Henri III ne peut plus se permettre de défendre un révolutionnaire du savoir. Il devra s'exiler en Allemagne ou plusieurs universités l'accueillent. Le voilà au sein de la communauté luthérienne. Mais encore son particularisme va lui faire connaître l'excommunication de l'église luthérienne.

Qu’elle va être sa vie de 1592 à 1600 ? : « Le procès ».

A l’issue de cette dernière expulsion, Bruno accepte une invitation à Venise qui lui sera fatale. Il sera dénoncé à l’inquisition vénitienne, arrêté puis jeté en prison.

Débutera alors un procès qui durera huit longues années.

L'acte d'accusation connaîtra plusieurs chefs : ses positions théologiques hérétiques, sa pensée antidogmatique, le rejet de la transmutation que le Concile de Trente vient de confirmer, le rejet de la Trinité, sa négation de la virginité de Marie.

Ses activités, sa pratique de l'art divinatoire, sa croyance en la métempsychose, ainsi que sa vision cosmologique lui seront également reprochés.

Le Vatican parviendra à le faire extrader. Ainsi, Bruno se retrouvera dans les redoutables geôles vaticanes. Sous la torture et les tourments, il lui arrivera de concéder un geste de rétractation mais il se reprendra toujours :

« Je ne recule point devant le trépas et mon cœur ne se soumettra à nul mortel ».

Le 20 janvier 1600, Clément VIII ordonne au tribunal de l'inquisition de prononcer son jugement. Ce dernier le déclarera hérétique.

A la lecture de sa condamnation au bûcher, Bruno commente :

« Vous éprouvez sans doute plus de craintes à rendre cette sentence que moi à la recevoir ».

Le 17 février 1600, il est mis nu, la langue coupée, il sera supplicié sur le bûcher. Mais au fait, quelle est sa doctrine ?

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La preuve donnée par Giordano Bruno sur la relativité du mouvement est célèbre. Bruno affirme le mouvement de la terre. Par ses recherches, Bruno ouvre la voie aux travaux de Galilée.

« Toutes choses qui se trouvent sur la terre se meuvent avec la terre. La pierre jetée du haut du mât reviendra en bas, de quelque façon que le navire se meuve ». (Le banquet des cendres. Giordano Bruno) Ainsi Giordano Bruno adhère à la cosmologie de Copernic, à l'héliocentrisme : double mouvement des planètes sur elles-mêmes et autour du Soleil, au centre. Bruno ira encore plus loin. Il veut renoncer à l'idée de centre « il n'y a aucun astre milieu de l'univers, parce que celui-ci s'étend également dans toutes ses directions ». Chaque étoile est un soleil semblable au nôtre. Autour de chacune d'elles tournent d'autres planètes, visibles ou invisibles à nos yeux mais qui existent.

Le monde est infini, sans clôture !

Bruno abolit la sphère des étoiles fixes, puisque dans toutes les directions à l'infini, le vide immense est parsemé d'étoiles. Pour la première fois dans l'histoire de la pensée humaine, le ciel acquiert une profondeur. Plus exactement, c'est la notion même de ciel qui disparaît pour laisser la place à celle d'espace homogène, c'est-à-dire, identique à lui-même dans toutes les directions.

Bruno est le premier à postuler contre la doctrine de l'église de l'époque et à affirmer la pluralité des mondes habités dans son ouvrage « de l'infinito universo et mondi », qui veut dire « l’infini, l’univers et les mondes ». Il postule que les étoiles sont des soleils plus petits car éloignés et que ceux-ci peuvent abriter d'autres créatures à l'image de Dieu…

Giordano Bruno est le champion de l'idée d'infini : il pense que tout est vivant.

L'œuvre de Bruno est d'une rare complexité. Elle embrasse des domaines très variés, extraordinairement pionnier en astronomie, en physique ou en philosophie. Bruno s'intéresse également à l'astrologie, à l'occulte ainsi qu'à la magie à laquelle il a consacré un ouvrage. Sa vie foisonne de combats et de péripéties.

En Bruno, on admire le visionnaire, relevant ses théories sur l’univers et l’infini. On admire en lui l'encyclopédiste comme un progressiste face aux despotes.

On dira de lui qu'il est un précurseur du matérialisme.

Il sera considéré comme un panthéiste et un libre penseur.

Plus tard, la réaction positiviste à l'italienne contre l'église et la monarchie l'identifiera à un Franc-maçon. En 1889, les Francs-maçons italiens érigeront une statue de Giordano Bruno, sur la Place de Campo di Fiori (là-même où il fut exécuté), le regard sombre en direction de la Coupole, tenant entre ses mains un livre, symbole de savoir et de sagesse.

Œuvre du sculpteur ETTORE FERRARI, qui fut V\ M\ De la Loge « Rienzi » de Rome et devint Grand Maître du Grand Orient d’Italie en 1904. Une Loge créée en 1985 porte d’ailleurs le nom de Giordano Bruno.

Giordano Bruno ou les conséquences de l’intolérance ?

En effet, Bruno n'a pas combattu l'église, mais par ses recherches, il a mis à mal le dogme et les croyances de l'église. La peur de voir s'effondrer 1500 ans d'efforts pour occulter ce que nous appelons aujourd'hui, l'évolutionnisme et en particulier, le fait que l'Homme et la terre ne sont pas le centre du monde, a conduit le religieux au crime, à l'intolérance. Cette intolérance qui s’est traduite pour Bruno par l’exigence d’avoir de gré ou de force les mêmes idées que les autres, ce qu’il a réfuté, combattant son droit de libre pensée. Comme l’écrit l’Historien Luigi Firpo « Bruno reste le défenseur du droit de l’Homme de croire à ce qu’il pense, et non d’être obligé à penser par force ce à quoi d’autres voudraient qu’il croie ».

La vie de Bruno est donc exemplaire à plus d'un titre : libre penseur brûlé pour ses écrits, ses paroles ainsi que ses différences. Il aurait été un humaniste précurseur. Sa pensée trouve dans les derniers travaux des astrophysiciens, de remarquables résonnances. Sa philosophie visionnaire apparaît comme un miroir qui focalise les grandes lignes de l'histoire, tout en se projetant dans l'avenir. Sa pensée cosmique à anticiper la compréhension que l'homme moderne a du monde et de lui-même.

Au-delà de notre époque, il pourrait même être le précurseur d'une spiritualité novatrice. Bruno, martyr de la libre pensée, précurseur des temps modernes ?

« Giordano Bruno Campo di Fiori »

Bruno n’était-il pas, ce que nous appelons un « Maçon sans tablier » ?

Au nom de quelle justice peut-on aliéner une vie qui trouble ?

C’est ainsi que la Franc Maçonnerie moderne, bien que ses membres n’en soient pas toujours conscients, est aussi l’héritière de la pensée de Bruno et de sa vision du monde, car, mes F\, nous avons chacun « notre différence, notre libre pensée ». Elles ne doivent pas déranger, mais enrichir l’autre…

J’ai dit !

R\ L\

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