L’Esotérisme
Chrétien
Ce titre propose deux termes que nous devrons, en
préalable à tout développement,
expliciter : ésotérisme et
chrétien.
Ainsi nous nous proposerons d’essayer de répondre
aux questions suivantes :
Qu’est-ce que
l’ésotérisme ?
Qu’est ce que le Christianisme ? (recherche de
traces d’ésotérisme dans son histoire,
ses dogmes et ses sacrements)
Y a-t-il un ésotérisme
chrétien ?
Si oui, en quoi consiste-t-il et concerne t-il les Maçons
d’aujourd’hui ?
Si non, quel pourrait être
l’ésotérisme de la tradition
occidentale ?
Enfin nous nous livrerons à une brève conclusion
recentrant notre propos dans le cadre de l’unité
transcendantale des traditions.
Nous poserons pourtant, en préalable, deux limites
à ce travail. La première concerne le champ
d’investigation ; nous nous contenterons
d’observer la tradition occidentale, l’Eglise
d’orient offrant une réalité sans doute
différente. La seconde concerne nos connaissances ;
il serait très présomptueux d’affirmer
tout savoir d’une chose dont l’essence est
d’être, si non cachée, au moins
discrète.
I de
l’ésotérisme
Il importe, dans un premier temps, de
déterminer l’ancienneté du terme afin
de savoir s’il désigne un concept traditionnel
René Guénon nous indique qu’il fut
utilisé par certaines écoles philosophiques de la
Grèce antique. Le mot est en effet grec. Mais, en
réalité, le terme
d’ésotérisme est totalement absent de
la littérature grecque sous sa forme substantive. On ne peut
donc légitimement fonder le concept
d’ésotérisme, et le promouvoir au rang
de catégorie majeur des doctrines religieuses, sur la haute
antiquité hellène.
En réalité, le terme
substantivé et donc le concept sont modernes. Ils semblent
être, en partie, une création
génonienne. Le mot apparaît réellement
en 1828 sous la plume de l’historien Jacques Matter et
c’est le socialiste Pierre Leroux qui en assure la diffusion
en 1840 dans son ouvrage « de
l’Humanité », pour
qualifier la doctrine pythagoricienne. Il existe une
corrélation évidente entre le milieu
où s’élabore le concept
d’ésotérisme, comme
catégorie générale de la
pensée religieuse, et la notion qu’il
désigne. Ce milieu semble bien être celui du
romantisme socialisant qui inspirera la révolution de
1848 : selon Jean Borella, il s’agit « d’une
nébuleuse idéologique où se conjuguent
la religion de l’humanité et le culte de la
démocratie, de confuses spéculations sur la
Trinité, la Femme, le progrès industriel et
social. Ajoutez à cela un goût pour les
sociétés secrètes et l’on
aura une idée assez précise de cette mythologie,
plus ou moins saint simonienne qui excite l’imagination de
Michelet, Georges Sand, Alexandre Dumas, Victor Hugo ou de
l’Abbé Constant (Eliphas Levi) ».
René Guénon donnera une consistance à
cette notion d’ésotérisme qui,
grâce à lui, accèdera au statut de
catégorie universelle de la pensée religieuse.
Dès lors, sa présence, ou son
absence, dans une religion déterminée en
définira le caractère complet ou incomplet. Il
est bien évident qu’en raison même de sa
nature cachée, seuls quelques « grands
initiés » sont en mesure de constater,
dans telle ou telle tradition, les signes de cette présence
de l’ésotérisme ! Il faut en
effet, pour cela, la possession de quelque vertu innée que,
nous semble-t-il, beaucoup croient avoir.
De plus, nous noterons que l’emploi d’un concept
abstrait, pour désigner ce qui faisait
précédemment l’objet d’une
pratique qualifiée
d’ésotérique dénote une
perte de connaissance. Il n’est point besoin, lorsque chacun
sait, pour soi même, ce qui est beau, de se poser la question
de savoir ce qu’est la « beauté
en soi » lorsque, effectivement, le
ressenti, l’émotion devant la beauté
s’estompe, il devient important de fixer sa
mémoire dans des normes et un concept
général de beauté.
Pourtant, sous peine de clore ici notre discours, il
nous faudra bien redéfinir ce terme et ce concept tellement
usités qu’ils servent aujourd’hui
d’indicatif dans les rayons des librairies où se
trouvent, joyeusement mélangés, des ouvrages
autrefois étiquetés sous les rubriques magie,
occultisme, alchimie, astrologie ou symbolique religieuse. Le souffle
léger du mercantilisme « new age »
syncrétise toutes les dénominations au
même titre que les doctrines traditionnelles.
Pour ce faire, nous abandonnerons le substantif pour nous attacher
à l’étude du qualificatif. En effet, si
le substantif « ésotérisme »
n’apparaît que récemment dans la
littérature, il n’en va pas de même pour
l’adjectif « ésotérikos »,
qui lui est employé dans les milieux
aristotéliciens du 1er siècle.
L’étymologie nous permettra d’en
comprendre le sens, et sur cette base d’élaborer
un concept mieux adapté à la
problématique qui nous intéresse ici, parce que
plus restreint et plus exact.
Esotérikos se décompose en trois
éléments : ésô,
ter, et ikos. Esô est une préposition ou un
adverbe qui signifie « au dedans »,
« à
l’intérieur » avec,
à l’origine, une idée de mouvement. Ter
se rapporte à teros, suffixe qui marque le comparatif.
Enfin, la terminaison ikos indique l’adjectif avec une
indication de spécificité. Il signifie donc
« ce qui a la qualité
d’être plus spécifiquement à
l’intérieur ».
Trois idées sont à
retenir : une première
d’intériorité, une deuxième
de déplacement et surtout une idée de
comparaison, de relativité. Une chose ne peut être
ésotérique, c’est à dire
plus intérieur que relativement à une autre qui
se trouvera, de ce fait, plus à
l’extérieur.
Pour l’homme qui se trouve dans l’existence,
c’est à dire, étymologiquement, dans ce
qui se tient à l’extérieur, le divin,
le sacré, dont nous sommes orphelins, est en effet plus
intérieur, plus au-dedans. C’est
d’ailleurs ce qui ressort de la parole de
Jésus : « le royaume
est au dedans (entos) de vous » (1) (Luc
17 : 21).
Outre cette intériorisation, la notion
d’ésotérisme que je vous propose
implique un nécessaire dépassement des apparences
extérieures.
Nous considèrerons donc
l’ésotérisme comme un mode
herméneutique (2) du message
révélé, un mode de lecture et de
compréhension plus intérieure. Nous admettrons,
de plus, que si la métaphysique représente le
degré ultime de l’herméneutique
spéculative, il existe encore un degré bien
supérieur dépassant toute spéculation.
Or, si nous entendons par ésotérisme, des niveaux
de compréhension, de lecture, différents, plus
intérieurs de l’Ecriture, si nous en
inférons que ces degrés
d’herméneutique sont
réservés à des « initiés »,
il faudra alors se souvenir que chaque baptisé est
initié. Il n’y a donc pas d’enseignement
secret dans le Christianisme.
A titre d’exemple, nous citerons l’Evangile selon
Saint Jean, qualifié
d’ésotérique. Souvenons-nous simplement
que son auteur reçoit son enseignement la tête
contre la poitrine du Maître lors de la Cène,
attentif aux battements de son cœur. Ceci est une parabole,
comprenne qui peut…
II du Christianisme
Pourtant, il fut un temps où
l’initiation chrétienne était
organisée d’une façon assez semblable
à celle en vigueur dans diverses
sociétés initiatiques. De plus, les
vérités révélées
sont nommées des « mystères ».
Ce mot avait, chez les Grecs, le sens de vérité
cachée, voire de vérité
incompréhensible.
Il est évident que la Nouvelle Alliance présente
les stigmates d’un véritable
ésotérisme. Mais c’est un
ésotérisme essentiel en ce sens qu’il
découle naturellement des enseignements du Christ. Nous
l’avons vu, le Maître met l’accent sur
l’intériorisation du vécu de foi et sur
la relation personnelle, cœur à cœur,
avec le Père. Il insiste sur le dépassement des
formes extérieures et de la Loi. De plus, certains de ses
enseignements sont donnés en secret, et
l’obligation de l’arcane pèse sur les
disciples. (Mat. 17 : 9 : « Comme
ils descendaient de la montagne, Jésus leur donna cet ordre
: « Ne parlez à
personne de cette vision, avant que le Fils de l'homme ne ressuscite
d'entre les morts. »)
Il semble également, qu’une
certaine parenté entre l’aspect sacramentel du
Christianisme et les mystères païens puisse laisser
supposer une filiation. Celse, philosophe anti-chrétien du
2ème siècle, écrit dans son
« discours de
Vérité »,
qu’« il n’y
à rien de nouveau dans le Christianisme ; sa
doctrine morale serait du Platon mal compris, d’autres
enseignements viennent des Mystères de Mithra, des mythes
égyptiens de Typhon, d’Isis et
d’Osiris ».
Le plus troublant est, sans conteste, que nombre de liturgies semblent
présenter des équivalences avec le bain de
régénération spirituel
qu’est le rite baptismal. Elles comportent une lustration par
l’eau ou d’autres éléments
qui symbolisent une mort suivi d’une renaissance.
Jean Borella cite, à propos des
mystères isiaques, un texte à la
première personne, récit d’une
initiation ; il s’agit d’Apulée
dans les Métamorphoses (dit aussi
« l’Ane
d’or », texte du 2ème
siècle). Cet écrivain néoplatonicien
nous dit : « L’initiation
doit être reçue comme
l’équivalent d’une mort volontaire et
d’un salut gratuitement accordé… »
il poursuit ; « j’ai
approché la frontière de la mort, j’ai
mis le pied sur le seuil de Perséphone, j’ai
voyagé à travers tous les
éléments et je suis revenu, j’ai vu le
soleil à minuit étincelant d’une
lumière blanche. »
A la fin du 4ème siècle, Faustus, un
manichéen attaque sur le même thème les
chrétiens en leur disant : « Vous
avez converti les sacrifices des païens en agapes, leurs
idoles en martyres à qui vous offrez les mêmes
hommages ; vous célébrez les
mêmes fêtes que les gentils, comme les calendes et
les solstices ».
Ce n’est certes pas entièrement faux, il est
certain que la nouvelle religion s’enracine dans un terreau
culturel et cultuel qui la colore et l’alimente
d’une certaine façon. Il est d’ailleurs
de nombreux exemples récents de l’inculturation de
la religion catholique. Néanmoins, nous sommes là
dans la forme, dans l’apparence extérieure.
S’il est présent, nous l’avons vu plus
haut, l’ésotérisme n’est pas
à ce niveau. Nous ne pouvons constater ici que
l’unité des traditions qui expriment
symboliquement les mêmes choses.
L’ésotérisme,
s’il est présent, doit affleurer dans les
enseignements. Afin d’effectuer cette
vérification, je vous invite à examiner
d’un peu plus près l’œuvre de
deux des pères de l’Eglise ;
Clément et Origène. Ils ont en commun
d’être d’Alexandrie, ville
d’Egypte qui, par son caractère à la
fois grecque et cosmopolite, semble rassembler, dans les premiers
siècles de notre ère et les derniers de la
précédente, toutes les gnoses du monde de
l’époque. Il était indispensable, pour
un hellène qui avait la prétention
d’être un initié, d’avoir fait
son pèlerinage à ces sources de la connaissance.
Philon lui-même y témoigne de la
présence des traditions ésotériques
juives, égyptiennes, grecques et bien d’autres
encore. Enfin, et ceci trouvera toute son importance
ultérieurement, c’est tout près de
là que naîtra le monachisme chrétien.
Chez Clément, en effet, on peut trouver une
référence constante à une gnose qui,
selon Bossuet lui-même, ne s’identifie pas
entièrement à la formulation doctrinale de
l’Eglise, puisqu’elle en constitue une
interprétation théologique et
spirituelle ; un niveau plus intérieur de lecture.
Mais pour Clément, le gnostique (le connaissant)
n’est pas tant un privilégié ayant
reçu un enseignement secret, que celui qui est
doué d’une compréhension vraiment
spirituelle. C’est à dire celui que ses
capacités intellectuelles ne conduiront pas à
mépriser la pratique des vertus et à
s’affranchir des dogmes ecclésiastiques. Il
observe ces « âmes gnostiques »
et y voit des âmes de contemplation (théoria),
puis des âmes qui obéissent aux
préceptes, enfin des âmes capables
d’instruire les hommes de bien. (VII Stromates). Notons bien
que Clément assimile contemplation et gnose (la
connaissance).
L’œuvre de Clément
d’Alexandrie nous apprend encore une chose importante,
à nous qui vivons dans un monde démocratique,
dont l’idéologie égalitaire dominante
nous conduit à penser que tout le monde a droit à
tout. Elle nous enseigne que la Vérité est
infiniment sainte et que nous devons travailler dur pour nous rendre
digne de l’entendre. La Vérité est
précieuse, elle est sans prix, la brader et la vulgariser
c’est la profaner et la prostituer. C’est aussi
créer, à son endroit une indifférence.
Combien de chrétiens sont encore, aujourd’hui,
conscients d’entendre la Vérité
révélée par Dieu, dans leurs
églises lors de la liturgie de la Parole ?
Origène est le successeur de
Clément à l’école
catéchétique d’Alexandrie. Il semble
distinguer deux sortes de Chrétiens ; les simples
fidèles, conduits par la foi, et les
« disciples » ou
« parfaits » qui eux, ont acquis
la gnose. Ce terme, dans le vocabulaire origénien,
désigne surtout une connaissance surnaturelle. Selon lui,
à l’intérieur de la
communauté, passe une ligne séparant les
initiés des non initiés qui ne
reçoivent pas la totalité des enseignements. Mais
pour Origène, comme pour les autres auteurs
chrétiens de cette époque, tous les
baptisés sont des initiés. Il est même
un des premiers à nommer le baptême une
« télété »,
une initiation. Simplement, Origène distingue, en
matière d’exégèse, trois
étapes ou trois degrés dans le
dévoilement des réalités
divines : deux degrés
d’ésotérisme et un
dévoilement total dans la connaissance parfaite de la
béatitude. Cette pensée sera reprise par Ambroise
et structurera en profondeur toute la pensée
médiévale.
Notons cependant que les catéchumènes,
à cette époque, n’étaient
pas admis à l’intégralité du
service divin. A la fin de l’office des lectures on fermait
les portes de l’église et l’Eucharistie
se déroulait « à
couvert ».
III de
l’ésotérisme chrétien
Donc il existe bien un ésotérisme
chrétien, mais il est conforme aux enseignements du christ,
à la transmission apostolique et à la tradition
ecclésiale.
Jésus a certes enseigné en secret, mais il
annonce aussi que « rien de
caché qui ne devienne manifeste, ni rien de secret qui ne
doive être connu et venir se manifester. »
(Luc 8 : 17). La vocation propre au Christianisme
est, incontestablement, de communiquer au plus grand nombre la vertu
intériorisante de la grâce christique.
Mais cette herméneutique plus intérieure, plus
profonde, que nous avons suivie à travers le
début de l’histoire de l’Eglise,
où la retrouve-t-on ensuite ?
Comme nous le laissions entendre précédemment,
c’est en Egypte que nous allons reprendre sa trace avec la
naissance du monachisme (3) et les pères du
désert.
Les premiers moines, (monos : un) ne furent
sans doute pas chrétiens. On peut voir chez les
thérapeutes, les esséniens ou dans les groupes de
prophètes les ancêtres de ces hommes
n’ayant d’autre raison de vivre que de
réaliser en eux, l’unicité de
l’Etre.
Les premières communautés chrétiennes
d’ermites et d’anachorètes vont fleurir
(si l’on peut dire) dans le désert de
Scété ou de la Thébaïde (de
Thèbes, la ville) dès le début du
3ème siècle.
Mais c’est Saint Antoine qui est
considéré comme le père des moines. De
fait, il paraît bien être
l’archétype de ces hommes vivant la
radicalité de la quête.
La première des choses que nous pourrons remarquer
c’est qu’ils commencent leur vie
ascétique par un enfermement plus ou moins long dans un
tombeau. Plus ou moins long car certains y passent plusieurs
années…(le tombeau étant
déjà occupé par un locataire normal
pour ce genre d’endroit ; c’est
à dire n’attendant plus grand chose de la vie).
Nous retrouverons ce rite chez bien d’autres
ésotéristes, particulièrement dans le
sûfisme comme en témoigne Ibn Arabi.
Mais cette initiation n’est qu’un indice formel
d’ésotérisme, il nous faudra chercher,
dans les quelques écrits qui nous sont parvenus, la trace
d’un enseignement plus intérieur. (Notons en
passant que la grande majorité de ces hommes ne savaient ni
lire ni écrire).
Les quelques « paroles »
qui nous sont parvenues, témoignent en
réalité plus de l’ascèse que
de l’enseignement Néanmoins, on distingue
clairement le but de cette vie : devenir un avec
l’Unique. Le moyen proposé :
« l’apathéia »,
c’est à dire le silence des passions,
l’outil privilégié des philosophes
grecs que l’on retrouvera chez les stoïciens
notamment, qui, eux aussi, recherchent ce point, ce centre
« où tout ensemble ne fait
qu’un. » (Psaume 122 :
2)
Nous pourrons aisément discerner ce fil conducteur, cette
spiritualité, dans tout le moyen age. Notons
l’étrange parenté entre les
« apophtègmes » de ces
pères du désert et les
« Koans » des moines
Zen : même finalité, même
pédagogie.
Nous nous transporterons maintenant, à la fin
du 7ème siècle en Europe. Après
l’effondrement de l’Empire Romain et le passage des
hordes barbares, il ne reste plus guère de trace de ce
qu’il est convenu d’appeler une civilisation. Seuls
ont échappé à cette
débâcle les monastères
situés en Irlande et en Ecosse.
Ce sont ces moines, dit de saint Colomban (4), qui vont reconstruire
l’Europe. Ils connaissent bien le grec et
possèdent une immense culture. Il semble bien
qu’ils furent christianisés bien avant la Gaule
continentale, grâce au commerce entre la Phénicie
et l’Irlande existant avant l’ère
chrétienne. De plus, il y avait dans les collèges
druidiques une forme de vie communautaire. Tous ces
éléments feront de l’île
verte un formidable laboratoire où la nature mystique du
peuple celte vivifiée par les apports
néoplatoniciens et la théologie apophatique, (5)
donneront une forme particulière à cette
spiritualité monacale.
Dans cette lignée émergeront, à la
suite de Jean Dun Scot et de Scot Erigène, qui, comme leurs
noms l’indiquent, étaient irlandais, de valeureux
successeurs parmi les moines bénédictins et
cisterciens. Un des plus célèbres
d’entre eux, Saint Bernard, fut le promoteur, le «
parrain » de l’Ordre du Temple. Ce sont
également ces moines qui encourageront et structureront le
compagnonnage.
En marge des querelles dogmatiques entre les écoles
théologiques, au 12ème siècle, cette
spiritualité sera nommée
« mystique
spéculative ».
Viendront ensuite, dans d’autres ordres
religieux, le célèbre Maître Eckhart,
Jean Tauler, et quelques uns encore, dont les ouvrages et les
thèses, sensiblement en marge du dogme officiel, seront
persécutés, tel le réformateur de
l’ordre des Carmes, Saint Jean de la Croix (6).
En dehors de l’Eglise, il y eut également des
laïcs qui témoignèrent de cette veine
spirituelle. Ils se regroupèrent souvent en
confréries ou des organisations structurées sur
ce modèle. Nous ne citerons pour mémoire que les
Fidèles d’amour, les troubadours et certains
ordres chevaleresques. Pour certains, tel Agélus
Silésius, il est bien difficile de dire s’ils
furent solitaires ou émergence représentative
d’une organisation. (La Rose Croix en l’occurrence).
Tous ces hommes ont en commun les points
suivants :
Une ascèse visant à réduire
l’ego afin de laisser la place pour que le Tout Autre se
fasse présent : « Ce n'est
plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi »
disait Saint Paul. (Gal 2 : 20)
Une conscience vivante, «
expérimentielle » de
l’Unicité de l’Etre. (Saint
François dialoguant avec les animaux et les
éléments)
Un dépassement des formes et des concepts relatifs
à Dieu, issue de la théologie apophatique (qui
trouvera son point culminant dans un ouvrage anonyme du
14ème siècle : « Le
nuage d’inconnaissance ».)
Ce survol, un peu bref, de l’histoire religieuse
mériterait bien des développements propres
à nuancer ce portrait par trop grossier. Il nous faudrait le
temps de revenir sur chaque époque, étudier dans
le détail chaque auteur cité et
d’autres encore.
IV de l’implication des
maçons d’aujourd’hui dans cet
ésotérisme
Il est fort tentant, pour beaucoup de nos
frères, de penser que
l’ésotérisme chrétien
aujourd’hui est la Maçonnerie. Hélas,
cette affirmation ne tient pas un seul instant devant les faits.
Pour confirmer cette allégation, nous dirons,
premièrement que, selon René Guénon il
ne peut y avoir d’ésotérisme sans
exotérisme. Nous savons certes bien que les
« Old Charges »,
documents fondateurs de la Maçonnerie
spéculative, nous font obligation de pratiquer une religion.
Mais cette religion n’est pas et ne sera jamais, une partie
plus extérieure de la Maçonnerie et cette
dernière ne représente en aucun cas une
herméneutique plus intérieure du Christianisme.
De plus, la maçonnerie ne propose pas, en
elle-même, une lecture différente de la seule
révélation Chrétienne, mais de toutes
les Traditions. Il ne faut pas confondre un langage et une culture
apparemment judéo-chrétiens dus en partie au fait
que la Maçonnerie vit dans ce substrat, et la filiation
apostolique qui seule authentifie la Tradition chrétienne.
Le problème est un peu différent en ce qui
concerne le R.E.R, en tant que Régime.
Mais n’oublions pas que l’initiation chevaleresque
existe dans nombre de Traditions antérieures au
Christianisme, de même que les initiations de
métiers. Elles prennent seulement la couleur culturelle du
lieu et du moment, mais elles ont leur source dans une tripartition
sociale pré chrétienne (cf
l’œuvre de René Guénon).
Mais, en réalité, le principal obstacle
à la désignation
d’ésotérisme, concernant la
Maçonnerie, tient au fait qu’elle est
essentiellement spéculative. Or
l’ésotérisme nous semble
éminemment opératif. Il découle
naturellement d’une ascèse totale impliquant
corps, âme et esprit. La prière continuelle, la
lecture amoureuse des textes sacrés et la grâce
sanctifiante du Tout Autre en sont les trois colonnes.
L’ésotérisme est, avant tout, une
expérience intérieure, le basculement dans une
autre dimension réellement vécue dans le corps et
la psyché. Du quel basculement résultera une
gnose, une connaissance opérante de l’ordre
métaphysique.
De plus, il serait intéressant de se poser
sincèrement la question de savoir si la pratique
maçonnique est de nature à effacer
l’ego, condition sine qua non d’une
réelle opérativité initiatique.
Même si nos rites initiatiques nous font vivre physiquement
certains des mystères métaphysiques
proposés par le dogme de l’Eglise, notre
parenté se situe ailleurs, dans l’unité
transcendantale de la recherche de l’Unique et pour autant
que cette quête existe chez le Maçon. (Mais que
viendrions nous chercher en loge dans le cas inverse ? Des
grades ? Des tabliers ?)
Bref, nous dirons en termes symboliques, que
l’initiation chrétienne se passe du triptyque
Sagesse, Force et beauté ;« Car
la sagesse de ce monde est folie aux yeux de Dieu »
(1 cor 3,19) ; « car ce qui est
folie de Dieu est plus sage que les hommes, et ce qui est faiblesse de
Dieu est plus fort que les hommes. »
(1Cor 1 : 25) Et encore ailleurs, il est dit de
Jésus, au Calvaire, qu’il « n’avait
plus apparence humaine ».
C’est, en effet, par la tendre faiblesse d’un
enfant que Dieu se révèle aux hommes, par la
folie d’un amour qui donne sa vie, et la mort ignominieuse du
calvaire qu’Il montre le chemin de la
réintégration. L’initiation
chrétienne suppose que l’on puisse dire sans
aucune retenue : « que Ta
volonté soit faite ». A ce
titre la devise Templière est exemplaire : « non
nobis Domine non nobis sed nomini tuo da gloriam »
(psaume 115 : 1)
V de la tradition occidentale
Si donc la Maçonnerie fait aujourd'hui partie
intégrante de la tradition initiatique occidentale, c'est un
phénomène récent et elle reste
exogène, dans ce qui constitue son essence, à la
tradition chrétienne. Or, ce qui fait l'épine
dorsale de la tradition occidentale, c'est le Christianisme de l'Eglise
Romaine. Même si an fil des siècles il a su
intégrer d'autres traditions et se vivifier de ces apports,
même si de récents
événements ont pu nous laisser penser qu'il avait
vendu son, âme au cours d’un concile
destiné à le rendre plus moderne, plus
présentable, plus vendable, le Christianisme se porte bien
et témoigne même d'un renouveau
intéressant. Les ordres monastiques enregistrent de
nouvelles vocations et de nouveaux monastères, de nouveaux
ordres se créent qui recherchent le souffle des
premières communautés. Si nous postulons que
l'ésotérisme chrétien perdure, il nous
faudra en chercher ici les traces.
Pour ce qui concerne notre époque, nous avons
un instrument de mesure assez fiable : la production
littéraire. Les ouvrages témoignant de cette
veine sont assez nombreux depuis la fin de la dernière
guerre.
Quelques-uns uns sont directement écrits par des hommes
d'Eglise, tel celui de l'Abbé Boon : « Au
cœur de l'écriture ». Plus
intéressante est la contribution du Frère Elie,
moine cistercien, aux Etudes Traditionnelles et la parution de deux de
ses livres « Doctrine de la non-dualité
et Christianisme » en 1982 et « Théologica
sine métaphisica, nihile » en octobre
1991, le jour même de sa mort. Quelques
théologiens officiels du dogme sont également
à inclure dans cette veine, tel Urs Von Balthazar. Son livre
« le cœur du monde
» offre un parallèle surprenant avec « Le
Roi du monde » de René
Guénon. La beauté de cet ouvrage
débouche sur des enseignements d'une richesse et d'une
profondeur étonantes.
Mais, le fait marquant de ces dernières décennies
est la parution d'œuvres produites par des laïcs.
Nous ne pouvons pas ignorer l'œuvre immense de Marie
Madeleine Davy, celle de Jean Borella.
Au-delà de ces émergences
scripturaires, sur un plan organisationnel, il semble bien que
l'ésotérisme chrétien reprenne force
et vigueur. La lectio divina est toujours enseignée comme
doctrine majeure chez les moines de Saint Bernard, l'oraison
silencieuse de plus en plus pratiquée par les jeunes
fidèles, les cours d'exégèse et
d'herméneutique intéressent de plus en plus de
monde. Il semble bien que l’Eglise sorte enfin de
l'ornière des doctrines sociales pour se revivifier an
souffle de l'Esprit.
Mais, me direz-vous, s’agit-il encore
d'ésotérisme ? La nature même de cette
doctrine ésotérique, n'est elle pas
d'être, pour le moins, discrète ?
VI à la recherche de
l’ésotérisme perdu
Nous ne le pensons pas car si le dépassement
proposé par l'ésotérisme
était parfaitement accompli et
réalisé, il n'y aurait plus lieu de parler
d'ésotérisme. En effet,
l'ésotérisme est, par nature, relatif et offre
une vision duelle de la Réalité. Or, la
connaissance est unitive et, du point de vue de l'Absolu, cessent
toutes les différences. Plus d'intérieur ni
d'extérieur, plus d'apparent ni de caché.
De fait, il apparaît que les structures tenantes d'un pur
ésotérisme chrétien soient en voie de
disparition. C'est le cas, entre autres de l'« Estoile
Internelle » ou du « Paraclet
» dont le dernier représentant connu
vient de mourir.
Mais il est très difficile d'avoir une idée
exacte de cette réalité, car, les structures
initiatiques traditionnelles n'ont jamais eu besoin de tenir
à jour des rôles et des matricules N'encaissant
pas de cotisation, elles n'ont pas de comptabilité, et,
n'ayant nulle utilité d'un statut légal, elles
n'ont pas pignon sur rue. Seule y prévaut la discipline de
l'Arcane.
L'unique chose dont nous pouvons être sur est qu'il existe
encore deux ordres chevaleresques directement souchés sur
Rome.
Autre événement surprenant, la
parution d'un ouvrage original. Il s'agit d’un petit livre
anonyme datant vraisemblablement de la fin du
15ème siècle, proche de ce que l'on peut savoir
de l'Estoile Internelle, dont Charbonneau Lassay fut sans doute un des
derniers membres avant sa dislocation. Ce livre témoigne
d’une connaissance native de l'hermétisme
chrétien et trouve sa place dans la lignée des
tenants du Saint Graal. Son titre est : « Sept
Instructions aux Frères en saint Jean ».
Il semble bien que nous assistions là à un
phénomène que René Guénon a
fort bien décrit: une société
initiatique très discrète, voir
secrète, apparaît durant quelques instants, telle
la lumière verte du soleil à son couchant, et
disparaît après avoir laissé des signes
suffisants de son message, de façon à ce que
d'autres puissent prendre le relais en temps utile. C'est ainsi que la
Tradition parvient à se faufiler an milieu de tout un monde
chaotique en attendant l'avènement d'un nouvel ordre...
VII conclusion provisoire, ou
préalable au débat
Ce qui tend à
confirmer notre propos, concernant la
spécificité de l'ésotérisme
chrétien, dans cet ouvrage se trouve dès la page
de garde :
« A nos Frères
en Saint Jean,
Au nom du
Père, du Fils et de l'Esprit, pour la seule gloire de l'Un
qui est Tout,
afin qu’Il nous accorde Sa joie ! Et par l'intercession de la
Bienheureuse Marie, Mère de Dieu ! Amen.
Il n'est rien ici qui soit
compréhensible par ceux qui n'ont pas
éveillé leur cœur. C'est pourquoi, bien
qu'il s'agisse de choses saintes, nous ne craignons pas de les livrer
en ces pages, ne risquant pas de jeter les perles aux pourceaux et
sachant qu'il n'est rien de voilé qui, pour ceux qui ont
des oreilles pour entendre,
ne doive être dévoilé. Ainsi se
transmet certaine signification depuis l'aube de la
Révélation, pour que
quelques-uns en fassent usage comme il convient.
Par la Grâce de
Jésus-Christ.
Notre Seigneur.
Amen. »
Nous pouvons y voir les paroles même du
Maître que nous citions plus haut reprises ici ; Rien
de caché... Que celui qui a des oreilles entende...
Mais surtout ceci : « l'Un qui est Tout. »
C'est sur cette donnée, principalement, que concordent tous
les ésotérismes du monde, toutes les traditions.
Ainsi Le plus grand des Maîtres sûfi, Ibn Arabi et
Maître Eckhart ont pu dire ensemble :« Je
suis l’œil par lequel Dieu se regarde
être ».
Mais, en régime chrétien cela commence par la
conscience d'une chose qu’Angelus Silésius nous
décrit dans un de ses
diptyques : « Christ serait-il né mille
fois à Bethlehem, c'est en vain pour
toi s'il n’est pas né dans ton cœur ».
Ailleurs on pourra lire, sous cette même plume :
« Je ne sais qui je suis, je ne suis
qui je sais
une chose et non une chose, un point nul et un cercle...»
« Trouver ma fin ultime et mon
commencement,
C'est me fonder en Dieu et fonder Dieu en moi,
Devenir ce qu'Il est : être un
éclat dans l'éclat,
Une parole en la Parole, un Dieu en Dieu ».
Voici, en quelques lignes, résumée
toute la doctrine de l'ésotérisme
chrétien. Sans doute me direz vous que c’est bien
peu de choses pour un si grand mystère ?
Mais songez un seul instant qu’une personne insuffisamment
préparée reçoivent ces paroles sur un
simple plan intellectuel, qu’elle en déduise,
à juste titre que le bien et le mal sont des notions
relatives… En effet ces antagonismes n’ont plus
lieu d’être si c’est Dieu qui agit en moi
et moi en lui. Or l’Eglise a rempli une grande mission
civilisatrice pour laquelle ces idées auraient pu
être dangereuses.
Cette doctrine de l’Unicité de l’Etre se
retrouvent dans toutes les traditions, avec pour corollaire, la
même discrétion obligée et des rites
initiatiques ; ainsi se réalise la parole de
Jésus : « Que tous
soient un » (sans distinction de couleur).
Bibliographie
Jean Borella : «
Esotérisme guénonien et mystère
chrétien »ed Delphica L'age d'homme
Lausanne 1997
« La Bible de Jérusalem »:
ed Desclée de Brouwer Paris.1975 (et CD rom)
Dom Lucien Regnault : «L’Evangile
vécu au désert »,
Fayard Paris 1990.
René Génon « aperçus
sur l’initiation » Editions
traditionnelles Paris 1992
René Génon «Initiation
et réalisation spirituelle »Editions
traditionnelles
Paris 1983
Jean-Pierre Laurant : «L'ésotérisme
chrétien en France au
19ème siècle » ed. L'age
d'homme Paris 1992.
« Le nuage
d'inconnaissance »
: traduction d'Armel
Guerne Ed le seuil, coll. Points Sagesse, Paris 1972.
Ph. De Lignerolles et J.P. Meynard « Histoire de la
spiritualité chrétienne »
Les éditions de l’atelier. Paris 1996
Marie Maglione : « Les
plus belles prières du monde »
De Vecchi poche Paris 1974
Eckhart : « Traités
et sermons » trad de A. de
Libéra GF-Flamarion Paris 1993
Angelus Silésius :
« l’errant
chérubinique » trad de R.
Munier Arfuyen Paris 1993
Un moine d’Occident :« Doctrine
de la non-dualité et christianisme »
Devy livres Paris 1982
Histoire de la Philosophie : Encyclopédie de la
Pléiade NRF Paris 1969
Abbé Boon :« Au
cœur de l’écriture »
ed Dervy Livres Paris 1987
Hans Urs von Balthasar :« Le
cœur du monde » trad de R.
Givord, ed. Desclée De Brouwer.Bruges 1953 (une
réédition a été faite
très récemment)
Eduard Lohse : « Le
Milieu du nouveau testament » trad. A.
Liefooghe, ed CERF Paris 1973
Notes :
1 Entos :
Le sens de la parole souvent traduite par « au milieu de
vous » emporte plus une notion
d’intériorité il serait plus juste de
traduire par « au centre », «
au-dedans » de vous.
2 herméneutique :
science qui a pour objet l’interprétation des
textes philosophiques ou sacrés. Interprétation
des phénomènes du discours en tant que signes.
Notre travail, en loge pourrait être
considéré comme une herméneutique du
symbole.
3 monachisme :
Il importe de distinguer les moines, les religieux et les
ermites :
Les ordres monastiques (moines) se distinguent par la clôture
totale ; ce sont les Bénédictins et les
Cisterciens. Ils vivent dans des abbayes.
Les religieux vivent dans des couvents et ont des règles de
vie communautaires, mais ils exercent à
l’extérieur des apostolats, voire des professions.
Ce sont les Dominicains, les Franciscains, les Carmes.
Les ermites vivent en solitude complète, ce sont les
Chartreux et les Camaldules.
Ces distinctions souffrent moult exceptions et aménagements.
4 Saint
Colomban : ce passage de
l’Histoire de notre civilisation mérite bien un
travail à lui tout seul. Nous vous le proposons
dès aujourd’hui. Il pourrait éclairer
une face obscure de notre ascendance maçonnique.
5 Théologie
apophatique ou négative est une
théologie s’attachant à
décrire Dieu, non pas parce que l’on croit
qu’Il est, mais au contraire par ce dont on est sûr
qu’il n’est pas. Ceci conduit à
définir le divin comme tout autre.
On trouvera des exemples de cette
« doctrine » notamment chez
Grégoire de Naziance dont la prière suivantes
résume très bien la théologie
apophatique :
O Toi l’au-delà de tout,
Comment t’appeler d’un autre nom ?
Quelle hymne peut te chanter ?
Aucun mot ne t’exprime.
Quel esprit te saisir ?
Nulle intelligence ne te conçoit.
Seul Tu es ineffable ;
Tout ce qui se dit est sorti de Toi
Seul tu es inconnaissable ;
Tout ce qui se pense est sorti de Toi
Tous les êtres te prient, ceux qui parlent comme ceux qui
sont muets
Tous les êtres te rendent hommage, ceux qui pensent comme
ceux qui ne pensent pas.
L’universel désir, le gémissement de
tous aspirent vers Toi
Tout ce qui existe Te prie ;
Vers Toi tout être qui sait lire ton univers fait monter un
hymne de silence
Tout ce qui demeure, demeure en Toi seul
Le Mouvement de l’univers défile en Toi.
De tous les êtres Tu es la fin.
Tu es unique
Tu es chacun et Tu n’es aucun
Tu n’es pas un être seul, Tu n’es pas la
somme des êtres
Comment t’appellerais-je, ô le seul
innommé ?
Quel esprit pourra pénétrer les nuées
qui voilent le ciel même ?
O
Toi l’au-delà de tout, comment t’appeler
d’un autre nom ?
6 Sain Jean
de la Croix et l’ordre des Carmes
pourraient fournir également matière à
un travail exemplaire de ce que nous exposons ici.
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