Obédience : NC | Loge : NC | Date : NC |
La Chair Quitte les Os Maître Hiram assassiné par trois mauvais Compagnons repose entre les deux outils qui représentent la base du travail de l’architecte : le compas et l’équerre. Au dessus de sa tête repose sur le sol une branche d’acacia. Remarqué absent du chantier depuis trop longtemps, plusieurs maîtres partent à sa recherche. D’abord trois puis cinq puis sept, et à chaque recherche tous de dire « nos recherches ont été vaines ». Soudain l’un d’eux aperçoit une branche d’acacia planté de manière inhabituelle sur un monticule et le signale aux autres. Sous le tertre ils retrouveront finalement son corps meurtri et inanimé. Après que le 1er surveillant ait vainement tenté de le faire en pratiquant l’attouchement de Compagnon, c’est relevé par les Trois Lumières dirigeant la Loge à l’aide des 5 points parfaits de la maîtrise que le nouveau Maître renaîtra. Mais avant tout ceci, c’est initialement le Second Surveillant qui échouera le premier en essayant de soulever le corps inerte par l’attouchement de l’Apprenti. C’est ainsi qu’il s’exclamera en disant : « La Chair qui les Os ». La variante de cette exclamation rencontrée au sein du Rituel au 3ème degré comme « Mot Sacré » ou « parole substitué » pour se reconnaitre entre Frères Maître FM est devenu : Mahabon ou Mac Benac. En effet, il est dit que le mot de passe des Maîtres ayant été perdu après que les trois mauvais compagnons aient commis leur forfait, il fut convenu que la première parole qui serait prononcée par celui qui découvrirait le corps de l’architecte deviendrait le nouveau mot de passe afin notamment d’éterniser le souvenir de ce crime. Quand le Compagnon est en passe de devenir Maître à la veille d’une cérémonie à priori pleine de promesses car nommée « Exaltation », il peut s’attendre à ce qu’on lui communique encore un mot secret, une formule magique qui illuminerait son savoir ordinaire et transmuterait par enchantement sa place banale dans ce monde en un trône royal d’où il exercerait un réel pouvoir sur les autres ou sur lui-même, si il est assez humble pour cela. Sa vision de l’avenir pourrait se définir par l’espoir d’une compréhension miraculeuse du chaos de la vie. En remerciement à son intention de poursuivre le chemin de la sagesse, il attendrait encore qu’un esprit céleste déversât une connaissance merveilleuse en son cœur en lui remettant la clef d’une compréhension définitive. Par la « Chair quitte les os », par le mot substitué, lui aurait-on remis cette clef et ce secret tant espéré ? D’une certaine manière on peut penser que oui. Cela sera le fil conducteur, la notion sous jacente de mes propos à venir. C’est donc au cours d’une tant attendue nouvelle cérémonie, mais cette fois au 3ème degré paradoxalement nommée « exaltation », que le futur Maître sera appelé à vivre la légende d’un être exemplaire nommé Hiram. Ayant accompli les étapes formatrices du métier grâce auxquels il est supposé avoir appris à travailler, c'est-à-dire à maîtriser et agir sur la nature qui l’environne, cette légende pourra être considérée comme le fil de sa propre histoire, de notre propre histoire : On s’est taillé puis on s’est poli puis on est mort afin de revivre et enfin maintenant agir en toute responsabilité et conscience. On peut donc y voir l’accomplissement de notre chemin initiatique comme s’il y avait une fin au stade de la maîtrise. C’est à la fois vrai car nous sommes censés savoir nous servir à bon escient de la matière, contrôler la nature et les symboles. Nous sommes ainsi peut être allés jusqu’à un certain bout de La Signification ou de Notre Signification. Mais cependant à partir du mot substitué nouvellement créé par l’exclamation « La Chair quitte les os », il nous reste probablement à accomplir le chemin inverse soit remonter de la Signification jusqu’au Sens. La rupture que représente la mort notamment dans la décomposition du corps est un changement d’état, une sorte de mue alchimique débouchant sur un changement de direction. Outre la perception d’une nouvelle voie à découvrir, cette autre mort nous invite à remonter dans le temps et à réfléchir au chemin parcouru afin de comprendre intuitivement quel était le sens inné de notre démarche initiatique. Le mot magique « MAHABON » n’est pas un terme neutre en lui-même. Il est bon que le fils, l’élève ou le disciple sache qu’il émane de la putréfaction. Au final ici bas ne sommes-nous pas entrain d’agir sur le fumier du devenir, où tout se dissocie sans cesse au quotidien. Pour exemple les très vieux édifices qui restent néanmoins fondamentalement éphémères puisqu’ils s’écroulent un jour pour fournirent les matériaux à de nouvelles bâtisses, à des constructions certes vitales mais au final perpétuellement renouvelées. Qui sait, il faut peut être connaître et savoir pénétrer le secret de la mort transformatrice pour se faire une idée juste de la naissance et déroulement de la vie. En constatant l’état de putréfaction où se trouve le cadavre, les Maîtres « découvreurs » nous invite à prendre conscience que la transmutation est entrain de se faire, l’alchimie de la Terre déjà rencontrée au 1er degré au sein du Cabinet de Réflexion opère une nouvelle fois. Le résultat de cette nouvelle transmutation alchimique correspond au fait qu’il ne reste plus cette fois que des os. Mais somme toute l’essentiel est là, le processus de régénération et de renaissance se met à l’œuvre. Notre première naissance fut celle de l’homme de chair, la deuxième est celle de l’homme spirituel dans l’homme de chair. Nous sommes passés de l’Equerre au Compas. C’est une nouvelle descente au plus profond de nous même dans les ténèbres épaisses qui nous est proposée. Hiram est descendu dans le Nadir, c'est-à-dire au plus profond de son éternité. Mais à cet endroit, même s’il est au plus bas de la Voûte Céleste, le soleil y brille cependant. Sa caverne tombeau tout comme ce fut le cas pour le futur apprenti au sein du Cabinet de Réflexion correspond à son premier pas pour entrer dans son immortalité. La tombe de terre d’Hiram au sein de laquelle La Chair va quitter les Os est la matrice de notre nouvelle naissance en tant que Maître. Elle est un alambic alchimique qui nous transmute et nous élève. Elle transmute la chair en esprit et élève l’être vers cet autre chose. A cet effet, il est toujours déstabilisant pour moi de constater que se sont des outils jusqu’ici utilisés à la construction de nous-même qui ont cette fois portés des coups mortels. Ce sont ces outils si magnifiques qui ont donc séparé la chair des os. Ce sont donc ces si merveilleux outils de travail transmutateurs qui ont donc ouvert des plaies et ainsi tout désunis. Cet acte ignoble aurait-il finalement eu paradoxalement sur nous quelque vertu ? Serions-nous passé d’homme horizontal reposant dans son tombeau de terre à homme vertical se rendant vers le soleil source d’illumination, voie vers la connaissance et qui sait de la vérité. Si nous voulons vraiment connaitre la vie au delà de l’apparence, quittons la chair mortelle de la temporalité et endossons l’esprit de la lumière. Que notre chair quitte les os afin que l’ombre devienne lumière. A travers cette réflexion, je ne peux pas m’empêcher de penser aux dernières scènes d’un film réalisé par Stanley Kubrick relatant une odyssée spatiale illustrant au mieux ce que je ressens. La chair qui quitte les os évoque donc pour moi la putréfaction qui grâce à sa désintégration va devenir le fertilisant, l’accélérateur de vie nécessaire à la nouvelle existence autant matérielle que spirituelle qui s’ouvre devant nous et nous est offerte pour qui saura la prendre. Oui c’est un fait la « Chair quitte les Os », mais derrière ce malheur il y a une bonne nouvelle. Les Os en question contiennent leur moelle de vie. Cette moelle est le fluide ou le suc vital contenant l’ADN de notre Tradition et de nos transmissions passées et à venir. Même mort, notre maître Hiram sera toujours présent et agira en nous. Il est vrai que la chair a beau quitter les os, mais la sève n’est et ne sera jamais tarie. Cette exclamation, en réalité constate la séparation de la nature mortelle qu’est la chair et de la nature immortelle de l’être que sont les os. Au-delà de la transmission, l’os est donc également l’élément permanant qui contient le germe de la restauration de la vie. Cette moelle sera probablement l’énergie universelle nécessaire que nous utiliserons lors de notre quête de la parole perdue. L’initié que nous sommes doit donc se détacher une nouvelle fois de son écorce, de sa chair de terre pour revêtir sa chair solaire et cheminer vers la voie de la connaissance à la rencontre du GADLU. C’est en fait la trajectoire d’un FM comparable à un escalier à vis avec plusieurs paliers au bout de trois, cinq et sept marches et plus dit-on. Son élévation lente lui permettra de contempler plusieurs fois de suite le même paysage avec un point de vue plus haut et une plus large vision de son univers. Le fait de mourir et renaître par cette métamorphose un peu morbide nous donne un avantage énorme pour l’avenir si nous savons nous en servir. Cet avantage correspond au fait d’avoir en nous le souvenir du monde précédent et de savoir utiliser notre expérience à bon escient dans le nouveau. La chair et les os appartiennent à l’ancien monde et l’engrais produit par leur décomposition nous permettra de fertiliser à bon escient le nouveau. Autre réflexion sur « La chair quitte les os » qui m’interpelle encore. Sommes nous en face uniquement d’un cri d’horreur ? Ne serait-ce pas également ou paradoxalement à l’inverse un cri de joie ? Une exclamation nous invitant à nous réjouir car notre Maître Hiram est né une nouvelle fois. De la même manière que peuvent nous l’enseigner la passion du Christ ou le mythe d’Osiris, même si « la chair quitte les os » et que « tout se désunit », réjouissons-nous car notre Maître a atteint une nouvelle dimension qui lui permettra de réunir ce qui est épars et a été perdu. A-t-il finalement eu cette chance, est-il arrivé au bout du chemin initiatique de la connaissance et de la vérité, lui est-il permis dorénavant de contempler les réalités supérieures tout en restant à travers nous dans le monde pour y communiquer la lumière. Au final, la vision positive distinguée au-delà de la perte de notre chair quittant nos os ne doit elle pas nous permettre d’envisager la mort, notre mort sans angoisse. Mais avant que ce jour arrive, quoiqu’il nous soit proposer lors de notre passage à l’Orient Eternel, le Rituel du REAA nous invite à laisser notre chair à quitter nos os afin de prendre en compte la chance qui nous est donner qu’un sens profond de l’existence éclaire ce qui, auparavant, nous semblait absurde et sans raison. Tel que Goethe l’a écris : meurs et deviens…. Alors ainsi soit-il, pour la Gloire du GADLU, que ma chair quitte mes os… J’ai dit. D\ |
7384-2 | L'EDIFICE - contact@ledifice.net | \ |