GODF Site : http://www.troispoints.info/ 28/03/2008


Vengeance et justice

Du Crayon et de la plume comme outils de la pensée


Pourquoi ce poignard dans le temple ? Pourquoi ces épées dans la franc-maçonnerie ? Que viennent faire ces armes blanches dans nos confréries qui se veulent affranchies des servitudes du profane ?

Tout est symbole, dit-on. Tout n’est que symbole ? Ce symbole n’en porte pas moins sens. Si tout symbole est libre d’interprétation par chaque frère, il n’empêche que l’épée porte en elle son pouvoir, sa charge de signification que l’on ne peut nier. Poignards, épées sont des armes qui blessent et tuent et font couler le sang. Ce sont les instruments d’une violence, que celle-ci soit légitime ou criminelle : à quoi sert une épée ? à quoi sert le poignard ?

Et ces têtes coupées, fichées sur leurs piques, exposées à l’orient converti en pilori. Exemples de la vengeance accomplie : justice est faite ! Pour être crédible, la justice accomplit la vengeance ! Si elle n’épuise pas l’énergie de la vengeance, elle ouvre la porte à tous les ressentiments. Et la Justice punit. Et châtie bien : prison peut-être, exécution capitale parfois. Couper la tête du criminel, l’exposer au pilori. Justice est faite. Le sang punit le sang. Le sang couvre la dette.

Et je devrais vivre tranquille. Dormez bonnes gens. Dormez mes frères. La Justice inflexible règle les comptes et apure les dettes. Le rituel du chapitre "Je Doute" a jeté le poignard aux oubliettes. Rangé l’épée au placard. Parce que l’épée et le poignard ne sont pas des instruments de la pensée, les outils de la réflexion. Encore moins les moyens de l’Utopie.

Quelle est cette justice qui rend le sang pour le sang, l’œil pour l’œil, la dent pour la dent, au fil des ornières de l’histoire depuis des milliers d’années. Par sa violence calculée, elle justifie la violence criminelle et lui donne de la crédibilité. Pour punir le crime, la justice n’aurait pas trouvé d’autre moyen que de recourir à l’instrument du crime. Ce faisant elle le légitime aux yeux du criminel. Si le meurtrier tue, elle le justifie d’avoir semé la mort en le condamnant lui-même à mort.

La justice est-elle accomplie en exposant à l’orient les têtes coupées des trois mauvais compagnons ? La justice consiste-t-elle à éliminer par un moyen ou un autre, le coupable ? La victime s’en trouverait-elle satisfaite ? Les frères trouvent-ils la sérénité dans cette conception de ce qui est juste ?

N’y a-t-il pas lieu d’examiner cette conception ? Est-il possible de la faire évoluer ? La sanction du crime passe-t-elle nécessairement par une répression simpliste qui prend, dans ses moyens, modèle sur le crime ?

La franc-maçonnerie qui se veut force de proposition et se prétend prospective, ne pourrait-elle pas imaginer et proposer des formes plus humaines, plus matures, plus civilisées, de prise en compte du délit et du crime. Le poignard et sa symbolique sont-ils à jamais la forme du recours ? Alors même que, au profane, l’institution judiciaire s’interdit aujourd’hui l’exécution capitale et prévoit des peines de substitution pour limiter l’incarcération dans des prisons reconnues indignes de la République.

En supprimant le poignard et l’épée de son paysage symbolique, le Chapitre "Je Doute" s’est libéré du poids et des ornières d’un passé qui orientaient a priori la réflexion et l’ankylosait. Sur cette table rase, il lui reste le crayon, la plume pour tout examiner librement. Et faire des propositions pour l’avenir, dignes de cette Utopie que la franc-maçonnerie affectionne.

par Cyrille publié dans : Pour un riruel libéré communauté : Franc-maçonnerie


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