Obédience : NC | Loge : NC | 23/10/2000 |
Les Cagots et l'exclusion Une des premières préoccupations
du monde contemporain est le combat contre l’exclusion,
liée au racisme ou à des maladies terrifiantes.
Le Sud-ouest médiéval a
possédé aussi ses exclus et ses marginaux, les
cagots, très vite assimilés aux
lépreux. Pendant des siècles, un peuple mystérieux – les Cagots – a été persécuté, rejeté par la société. Le Sud-ouest, qui a accueilli fraternellement les juifs et les Sarrasins, a traité les Cagots comme un peuple maudit, les considérant avec haine, crainte, dégoût et mépris. En aucun cas, les Cagots ne devaient se mêler au reste de la population et l’horreur était telle que même à l’église où on tolérait leur présence, une entrée spéciale – porte basse- à gauche leur était réservée, de même qu’un bénitier, afin que personne ne touche l’eau dans laquelle ils avaient trempé leurs doigts. Bien sûr il leur était interdit de baiser la croix et le prêtre leur tendait l’hostie au bout d’un bâton. Bien que très pauvres, il leur était interdit de marcher nus pieds, pour ne pas souiller le sol, de même d’aller à la fontaine pour boire, au lavoir ou d’entrer dans un moulin. Toutes les professions touchant à l’alimentation leur étaient interdites – agriculture et élevage compris. Seuls étaient autorisés les métiers de la construction – maçons, charpentiers- où on appréciait leur savoir faire et leurs techniques innées. La forge était très surveillée – outillage professionnel – par peur qu’ils se fabriquent des armes. Même morts, ils faisaient l’objet d’une ségrégation : ne pouvant reposer en terre bénie, on les enterrait dans les fossés, ou au bord de la mer. Ils devaient parler à distance, ou couvrir leur bouche pour ne pas contaminer par des projections de salive. S’ils passaient outre ces interdits, on leur coupait les oreilles. A la deuxième récidive, on leur perçait le pied gauche avec un fer rouge (ils boitaient presque tous), à la troisième, ils y laissaient la vie. Non seulement les Cagots étaient isolés, rejetés, mais afin de mieux « protéger » les populations, on les obligeait à porter un signe distinctif : une patte d’oie en drap rouge, cousue sur l’épaule gauche. Hitler n’a rien inventé… Droits civiques réduits : dans un procès, à la place d’un seul homme, 7 cagots étaient nécessaires pour que leurs dires soient pris en considération. En revanche, l’Eglise les protégeait dans l’exercice de certains métiers réservés : maçons, charpentiers, menuisiers, scieurs de long, fileurs de chanvre, tisserands…les considérant comme de bons chrétiens assidus, en ces temps où le paganisme sévissait encore dans les campagnes… On trouve des Cagots dans toute la Grande Aquitaine, Béarn, Roussillon, Guyenne, Poitou, Maine, Berry, Bretagne, sous des noms différents : Colliberts dans les marais, Gezitains, Gahets, Caffets, Caqueux, Cacous, Cagouilles, Cagots, Capots, Agots, Chretians, Crestians, Crétins, Crestias, Oiseliers, Charpentiers…leurs noms sont plus ou moins associés à la lèpre, le mal, la fourberie, l’hypocrisie. Cette lèpre dont ils portèrent en plus le nom sous l’appellation ladres – considérée comme punition divine – atteignait même leurs enfants donc mal héréditaire. On n’analysait pas la contamination par cohabitation obligatoire. Qui étaient ces gens ? Pourquoi
ont-ils ainsi focalisé, la haine de leurs contemporains
pendant 1500 ans, en fait jusqu’à la fin du
siècle dernier, malgré le décret de
Louis XIV et les bouleversements de la Révolution. Pour essayer de comprendre le drame que ces populations
ont vécu, il y a deux sources
d’information : Sans vouloir faire un cours d’histoire,
arrêtons-nous sur un certain nombre d’informations
capitales : - 260. Plotin dans les Ennéades, explore ses théories néoplatoniciennes fondées sur le spiritualisme, et une morale de l’austérité. - 274. L’Empereur Aurélien décrète le soleil, dieu unique, sous une multiplicité de noms divins. Les Chrétiens refusent d’assimiler le christ au soleil, mais le font quand même naître le jour du solstice d’hiver et célèbrent aussi celui d’été en y associant les deux Saint-Jean, tradition que nous avons reprise. - 325. L’évêque Arius
avait répandu la doctrine que seul le Père
était Dieu éternel, le fils
était simplement (refus de l’hypostase du Christ)
une créature de Dieu, la
première et la plus excellente, après la
genèse. - Parmi les grandes vagues d’invasion, ou
d’immigration, qui déferlèrent sur
l’Empire, les Goths (signifiant sages ou vaillants)
installés entre le Dniepr et le Danube, ont
été convertis à l’Arianisme
par un évêque –mi goth- mi romain
– du nom d’Ulphila. Les Goths de nature
très religieux s’enthousiasment pour cette
nouvelle religion et en font leur religion d’état.
Dès lors ils prennent part aux querelles religieuses,
déniant même la qualité de
Chrétiens aux Catholiques, qu’ils traitaient
d’hérétiques ! ! un
comble…à tel point que l’Arianisme fut
appelé la « Secte des Goths ».
Témoignent encore de leur dévotion, les
églises qu’ils construisirent en peu de temps en
Espagne et en Italie. - 378. Les Goths infligent une grave défaite
à l’armée romaine, à
Andrinople. Conséquences : Partage de
l’Empire romain : - Les Ostrogoths s’installent dans le nord de l’Italie. Les Wisigoths s’installent dans le sud de la France, et en 410, sous la conduite d’Alaric I, ils s’emparent de Rome et la saccagent. - 413. Saint Augustin rédige « La Cité de Dieu », où il réagit à la prise de Rome, opposant la Cité de Dieu, et le bonheur céleste, à la cité et au bonheur terrestre. - 420. Mort de Saint Jérôme, la Vulgate (traduction en latin de la Bible). - 429. Les Vandales traversent l’Europe et l’Espagne, s’établissent en A.F.N., Carthage devient leur capitale. - 451. Aetius, général romain, aidé par les Wisigoths commandés par Théodoric, bat des hordes de Huns (Attila), aux Champs Catalauniques (Champagne), ceux-ci sont définitivement refoulés. - 481. Clovis devient le roi des Francs - Tribus
germaniques du nord de l’Europe orientale,
installées au nord de la France, Belgique, Hollande. - 496. Baptême solennel de Clovis qui apparaît maintenant, « fier Sicambre, baisse humblement la tête, brûle ce que tu as adoré et adore ce que tu as brûlé », comme le défenseur de l’orthodoxie romaine contre l’Arianisme. Le Catholicisme, pour se développer doit détruire idéologiquement et physiquement l’Arianisme, incarné par les Wisigoths. Son bras armé est maintenant Clovis et ses Francs. Ainsi, Clovis bat Syagrius, dernier roi gallo-romain, installé entre la Somme et le Loire. Celui-ci se réfugie auprès d’Alaric II. Clovis essaie de conquérir le royaume Wisigoth. Il est battu à Saintes, mais réussit à s’emparer de Bordeaux, une des capitales d’Alaric II avec Toulouse. - 502. Rencontre de Clovis et d’Alaric II sur une île de la Loire. (Je te tiens.. tu me tiens par la barbichette…). Syagrius est livré à Clovis. Paix provisoire. - 506. A l’initiative d’Alaric II, publication du « Bréviaire d’Alaric ». Compilation abrégée du droit romain, à l’usage de ses sujets : l’Aquitaine et les pays wisigoths sont administrés juridiquement. - 507. Bataille de Vouillé, à côté de Poitiers, victoire de Clovis sur Alaric II qui est tué. Annexion de l’Aquitaine. Les chefs et cadres wisigoths vont progressivement se replier vers l’Espagne. Ce repli va s’étaler sur 100 ans. Mais les Wisigoths n’étaient pas seulement une armée, ils constituaient une véritable nation avec ses lois, son code civil, ses familles enfants, vieillards et ses classes sociales. - 542. Expédition de Childebert I (fils de Clovis) contre les Wisigoths d’Espagne, dont Tolède devient la capitale en 554 et leur pays Spania. L’Aquitaine, le sud
particulièrement se vide progressivement des Wisigoths, au
bout de 100 ans de conflits, de haine, de massacres, de vengeances. Cet
exode douloureux, les Pyrénées étaient
une barrière difficile, ne fut organisé que pour
ce qui restait de l’armée et des classes sociales
supérieures, les autres restèrent sur place,
abandonnés, démoralisés. Parmi les événements actuels, le
drame israëlo-palestinien est là pour nous le
rappeler. Dans la malédiction qui les frappe
s’entremêlent l’histoire et les
légendes : Les cagoteries, aux abord des villages se
transformèrent vite en ladreries, voire en maladreries,
(crestian - pluriel cresties) crestianies et léproseries
devinrent synonymes, (dans les Pyrénées, les
léproseries portaient les noms de :
« Espiteau dou crestias »). Une autre légende biblique (livre des Rois)
est relative à la guérison de Naâman -
roi lépreux et chef des Araméens – par
Elisée - mais son serviteur, Gehazi, se fit payer, donc
détourna le prix de la guérison. Le
prophète en eut connaissance et maudit
Gehazi : « La
lèpre de Naâman s’attachera à
toi et à ta postérité, pour
toujours » et Gehazi « s’éloigna
de lui, blanc de lèpre comme la neige ».Ainsi
les Cagots, surnommés Gézitains, seraient les
lointains descendants de Gehazi. Mais pourquoi associer les Cagots
à la patte d’oie, les obliger à porter
ce signe de malédiction ? Revenons à Salomon, il fut lui-même
associé à la patte d’oie puisque la
reine de Saba, Bilkis, ou Maleka pour les Arabes, à qui il
donna un fils, originaire de la lignée des Rois des rois
éthiopiens. Bilkis donc, avait un pied palmé.
D’autres Goths, installés en Bourgogne, les
Burgondes, ont maintenu la légende sous le nom de la reine
Pédauque. Dont les Hospices de Beaune ont gardé
le vin bien précieusement dans leurs caves… b. La légende de Sainte Néomaye,
Néomoye ou Eneomoye (dans le nom on retrouve
l’oye), ou Enimie, ou Noémie… Dans la chapelle templière de Saint Guillaume, à côté de Saint-Varent, on a découvert, fait classer et restaurer, des fresques du XIVème siècle relatant en quatre tableaux (tels une bande dessinée), la légende de Sainte Néomaye. Dans le dernier tableau, le vilain seigneur demande à genoux, pardon à Saint Hilaire, évêque de Poitiers, qui passait par là… c. La légende compagnonnique. Pour en revenir aux traditions, j’ai vu les
compagnons tailleurs de pierres de
« Soporen », restaurant les
monuments historiques, creuser systématiquement sur les
faces latérales des pierres taillées,
destinées à la façade d’un
édifice, un sillon en forme de patte d’oie.
« C’est pour
que le liant tienne mieux » disaient-ils.
Mais pourquoi toujours ce même dessin. Que les charpentiers
utilisent toujours pour marquer les assemblages ? ? Cette chanson confirme la tradition de l’origine orientale des Cagots. Elle les lie aussi à la construction du Temple, et les fait chasser par Salomon, comme l’ont été les assassins d’Hiram. Le texte dit encore : Il y a ainsi une conjonction d’éléments reliant intimement les Cagots, la lèpre, la mort, le langage caché des constructeurs, une origine orientale. Ces éléments étant entretenus par l’Eglise omniprésente. 385. Un évêque Arien Priscilien d’Avila répand une rébellion à la hiérarchie romaine, dans une doctrine mêlant Gnose, Kabbale et Occultisme. Il est condamné : ce sera le premier dignitaire de l’Eglise décapité pour hérésie, par les siens. En 850, Théodomir, un autre
évêque Arien aurait placé le corps de
Priscilien dans ce qui deviendra le tombeau de Saint-Jacques de
Compostelle. L’origine des Cagots est bien la
conséquence, en Aquitaine, de la querelle religieuse entre
catholiques et Wisigoths Ariens et du déroulement de ces
événements dans l’ex - Empire Romain. Cagots, Canis-Goths, Chiens de Goths :
après avoir été
persécuteurs et relayés par, les
lépreux, ils ont subi l’exclusion, la haine, dans
leur chair, leur tête, pendant quatorze siècles. Vénérable Maître, j’ai dit. A\ F\ Bibliographie : |
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