GLFM Bulletin : Bulim Misraïm 02/2009

Jésus l'Egyptien

Comment comprendre certains aspects de la vie de Jésus sans remettre en question, après Moïse, l’appartenance de Jésus à la nation juive. Notons tout de suite que celle-ci n'a jamais été un dogme dès le concile de Nicée (en 325 de notre ère)? Il est vrai qu'aujourd'hui certains s'autorisent à considérer Jésus comme catholique. Et notre vérité se confond souvent avec ce que nous apprenons avec le lait de l'enfance. C'est pourquoi ceci appelle un certain développement. Dans cette planche, je m'appuierai pour le résumer sur le travail d'un savant copte : le Docteur Sarwat Anis Al-Assiouty, auteur de “Jésus le non-juif” (paru en 1987 chez Letouzay & Ané, Paris).

Introduction

Les chrétiens connaissent l'histoire de la sainte famille fuyant le despotisme d'Hérode pour se réfugier en Égypte. De même après la mise au tombeau, Pierre trouvera au sépulcre vide des bandelettes (Luc 24:12 TOB), ce qui est d'un usage égyptien mais non juif. Mais reprenons plutôt l'histoire de Jésus sans a priori. Les généalogies lui donnent pour ancêtre David ? Mais ceci est réfuté par Jésus lui-même selon l'évangile de Matthieu (22:42). Il contredit les pharisiens qui pensent que le Christ est fils de David, grâce à une parole de David lui-même qui dit “Le Seigneur a dit à mon Seigneur :“Assieds-toi à ma droite...”...”Si David l'appelle Seigneur, comment est-il son fils ? Nul ne put lui répondre. Donc pour Jésus, le Christ n'est pas descendant de David. Les deux généalogies, différentes, ont été ajoutées aux Évangiles pour convaincre les juifs récalcitrants que Jésus de la maison David est le Messie attendu. Les chrétiens d'Égypte, à Alexandrie ont toujours rejeté catégoriquement toute judaïsation du christianisme, tout comme l'ont fait Marcion et Tatien. Ajoutons encore que David, descendant de Ruth, est Moabite, donc non -juif, du sud de la Jordanie; le nom de sa mère n'a pas été transmis. Les sadducéens, les chauvinistes, ont refusé à la maison de David l'accès à la judéité. On objectera que Jésus né en Palestine ne pouvait être que juif. Écoutons Strabon, géographe grec contemporain à Jésus : “A partir de Jérusalem, presque tout le reste du pays est fractionné entre tribus mélangées d'Égyptiens, d'Arabes et de phéniciens. tel est effectivement l'aspect du pays dans la Galilée, dans les cantons de Jéricho et de Philadelphie et dans le canton de Samarie.” Précisons que la Palestine, comme son nom l'indique n'est pas une nation juive. Au VI° siècle, les babyloniens déportent la population juive (2 Rois XXV:11), ceci représentait 4600 personnes selon Jérémie (LII:30), le reste s'étant enfui en Égypte (2 Rois XXV :26). En 538, Cyrus, roi de Perse permit aux juifs de retourner en Israël, mais la majorité refusa, bien installée dans la Diaspora. Esdras les dénombre 42360 au retour (II:64); ce qui semble disproportionné au nombre de départ. Mais avant ou après l'exil, les juifs sont peu nombreux et se situent dans un amalgame de nations non juives, gouvernées par un monarque non juif, comme Hérode le grand au temps de Jésus. Si l'on en croit le codex Sinaïticus, Jérusalem était cosmopolite (cf Actes II:5, II:9-11), le Codex vaticanus qui lui est postérieur transforme le terme “il y avait demeurant à Jérusalem des hommes dévots de toutes les nations” par “les juifs qui résidaient à Jérusalem étaient des hommes venus de toutes les nations”. Concluons par le fait que la Judée dépendait du royaume lagide, donc de la dernière dynastie égyptienne. La religion égyptienne, l'osirisme furent les bases du développement de la tradition chrétienne, comme l'ont reconnu Clément d'Alexandrie et Justin le Martyr. Le Dieu de Jésus n'était pas le dieu d'un seul peuple élu parmi des peuples déchus, mais le dieu universel de la pensée égyptienne. Précisons encore que le monothéisme n'est pas une création de Moïse puisqu'il apparaît bien avant Akhenaton dans le culte à Amon- Râ (Un hymne qui lui est dédié déclare : Tu es UN, SEULEMENT UN).

Vie de Jésus

Qu'en est-il du nom juif de Jésus: Yehoshû'a (=Yahvé sauve). La dernière lettre Aïn n'est mentionnée par aucune des sources araméennes, hébraïques ou arabes, ni même dans la transcription grecque. Irénée de Lyon, au II° siècle (contre les Hérésies II:24,2) interprète les trois lettres du nom de Jésus, I­Sh-W, comme “Seigneur du Ciel et de la Terre”. Or ces trois lettres existent dans les inscriptions anciennes nabatéennes et latines et correspondent à un nom égyptien Aïn (=i), S (Sh) et Ou en hébreu (comme Esaü) ou A en arabe (soit Isâ), Isha en égyptien. Ceci nous ramène selon le texte des Pyramides (III° millénaire avant notre ère) au cri D'Osiris en détresse : Isha-wi qui bravant les forces du mal, avertit le monde et se sacrifie pour sauver l'homme. Alors Nout, le Ciel vient à son secours, Osiris ressuscite d'entre les morts puis est couronné de gloire. Isha-wi signifie l'Annonciateur, c'est un attribut millénaire d'Osiris. La mère de Jésus porte un nom égyptien, même les savants catholiques le concèdent, ce nom est attesté dès le XXI° siècle avant J.C. dans la littérature du Moyen-Empire signifie l'aimée, la chérie, comme Maria - Amon fille de Thoutmès III. Maria ne se retrouve dans aucun des prénoms de femmes juives si ce n'est la sœur de Moïse l'égyptien. Ainsi quand Maria sentit le danger de rester en Palestine, elle se réfugia chez les siens. La conception divine de Marie est similaire à la conception d'Aménophis III ou d'Hatchepsout. Le 2° chapitre de Matthieu (II: 15 = Osée XI: 1) rappelle la prophétie “d'Égypte, j'ai appelé mon fils”. Poursuivons, la circoncision est une coutume égyptienne attestée depuis le III° millénaire avant notre ère, bien avant Abraham. La discussion de Jésus âgé de 12 ans avec les docteurs de la Loi dans le Temple reproduit un conte égyptien populaire au 1° siècle où Satme un fils de Ramsès II, appelé Si-Osiris, plongea dans l'étonnement les scribes de Double maison de Vie du temple de Ptah, et à l'âge de 12 ans avait surpassé scribes et savants dans la lecture des livres sacrés. A propos du baptême conféré par Jean Baptiste, l'évangile des Hébreux met dans la bouche de Jésus les paroles suivantes : “Quel péché ai-je commis pour aller me faire baptiser par lui (Jean Baptiste) ? De même Marcion refusera d'intégrer dans son évangile l'épisode de ce baptême, considéré comme une addition judaïsante. Durant les cinq premiers siècles, et l'art paléochrétien en témoigne, la croyance dominante en Orient comme en Europe était que Jésus fut baptisé enfant. Le baptême en Égypte existait dès le 2° millénaire avant notre ère. Il était couramment pratiqué à la période gréco-romaine dans le culte d'Isis. Jésus s'exprimait en araméen, non pas dans l'hébreu académique et aristocratique. Sa dernière parole est en araméen invoque El-i, mon Dieu, mais aussi bien en hébreu qu'en araméen ou en phénicien. L'évangile de Pierre, trouvé en Haute Égypte, nomme Jésus Seigneur (et non pas avec le terme judéo­messianique Christ) ; les derniers mots qui lui sont attribués sont en égyptien : “Mon ka, mon ka, tu m'as délaissé”, en grec dynamis, force. Dans la théologie égyptienne, c'est Atoum qui est le ka de tous les dieux dès le 3° millénaire avant notre ère, puis c'est le monothéisme d'Isis, précurseur du christianisme, qui prendra la relève. Et les femmes présentes commémorèrent la mort d'Osiris à la manière égyptienne en pleurant et en se frappant la poitrine.

L'histoire romaine en Palestine est jalonnée de révolutionnaires égyptiens, et tout harangueur de foule était un égyptien. Paul l'expérimentera une génération plus tard à Jérusalem, après qu'il soit revenu à l'observance de la Loi juive. Il fut quand même contesté par les juifs d'Asie, et dut se réfugier à la forteresse Antonia (Actes XXI). Le tribun de la cohorte romaine prend pour un égyptien (XXI:38). De même Jésus vivait en Égypte dès l'enfance (selon de nombreux apocryphes), il étudia la médecine et y reçut sa formation avant que d'y être salarié (selon Origène citant Celse, le talmud de Babylone...). Une fois arrivé en Palestine, il y rencontre un contexte cosmopolite intégrant des populations égyptiennes. Il était sans doute vêtu d'un pagne comme un prêtre égyptien, le visage rasé travaillant pour vivre comme tout prêtre égyptien. Sa longue tunique est un himation grec qui apparaîtra plus tardivement dans l'art chrétien. Il pratique les procédés de la médecine égyptienne, les exorcismes. Son emblème n'est pas la croix, mais l'animal sacré d'Osiris, le poisson. En annexe des temples égyptiens, la Maison de Vie, Per- Ankh était une maison d'études, ancêtre des universités, et il existait aussi des installations pour recevoir des malades. Où Jésus a-t-il étudié ? Était-ce en haute Égypte, haut lieu de résistance contre l'occupation gréco-romaine, au Muséion d'Alexandrie, dans le temple d'Abydos, encore actif, ou même celui d'Héliopolis ? Celui-ci fut visité par Strabon (-58 à + 21-25 de notre ère) à la suite de Platon et d'Eudoxus. L'ancienne ville d'Héliopolis fut identifiée par Champollion comme l'actuelle Aïn Shams, adjacente à Matariyèh, où se trouve raconte-t-on l'arbre qui abrita Marie exténuée et l'enfant Jésus. La représentation de Jésus en pagne ou en tunique courte, imberbe va évoluer dès l'officialisation de l'Église au IV° siècle, et le canon intégrera nombre d'additions judéo- chrétiennes. Jésus, barbu, portera une longue tunique.

Jésus se revendique comme médecin (“Médecin, guéris-toi toi-même” Luc IV:23) mais surtout comme prophète (Matt XIII:57, XXIII:37, Marc VI:4, Luc IV:24 et XIII:33, Thomas XXXI:2), ce qui en Égypte correspond aux prêtres lecteurs, prêtres supérieurs capables de guérir les malades et d'opérer des prodiges. La fonction de prophète a disparu (l'esprit de la prophétie s'est éteint avec Malachie (Lamentations II:9).

Jésus donnera aux disciples le pouvoir de marcher sur les serpents et les scorpions, et sur toute la puissance de l'ennemi, ce qui constitue la véritable médecine égyptienne. La fièvre est considérée comme un démon que l'on menace pour mettre en fuite (Le papyrus de Leiden de la période ramesside précise la formule : “Va-t-en, sors des membres d'un tel”, ou encore “va-t-en, retire toi d'ici, sors !”). On pratique aussi l'imposition des mains (Texte des sarcophages datant de 2000 ans av. J.C. : “Hathor impose ses mains sur moi”) comme Jésus le faisait (Luc XIII:11-13). L'exorcisme d'un démon peut aussi nécessiter le dialogue, voire des pourparlers. Le même papyrus de Leiden relate le transfert d'une troupe de démons d'un malade vers un troupeau d'ânes sauvages. Ceux-ci furent ensuite exécutés afin que leur sang coule à terre et soit foulé aux pieds. Ceci se retrouve dans les évangiles (Marc V:1-13, Matt VIII:28-32, Luc VIII:26- 33) où Jésus transfère une légion de démons dans un troupeau de porcs, qui périssent dans un gouffre.

Le culte d'Isis

Le christianisme s'est développé en premier lieu chez les Nations, comme secte isiaque et non pas chez les juifs en tant que secte juive.

La mère et l'enfant Marie / Jésus reprennent le thème Isis / Horus. Baptême, trinité, incarnation, rédemption, résurrection sont autant de thèmes inconnus du judaïsme. Le dieu mis à mort est un blasphème pour les juifs, mais c'est l'essence même de l'osirisme. Dans l'au-delà : résurrection des morts, jugement dernier, paradis et enfer étaient apparus plus de 2000 ans auparavant pendant que les juifs débattaient de la résurrection et que les sadducéens qui détenaient le pouvoir officiel au sein du peuple juif niaient l'immortalité de l'âme, et donc les récompenses ou les châtiments dans l'au-delà.

C'est à la suite de la terrible oppression des envahisseurs assyriens en 671 avant JC., repoussée en 651 par Psammétique 1° que les égyptiens vont propager le culte humaniste et universaliste d'Isis (celui de la trinité égyptienne Osiris-Isis-Horus) en Égypte comme à l'étranger pour promouvoir la paix et la fraternité dans le monde. Les conquêtes perses, macédoniennes et romaines ne feront que répandre l'injustice, l'appauvrissement et le culte d'Isis apportera aux populations opprimées un baume à leurs souffrances. Isis deviendra déesse de la Justice, la Mâat millénaire qui ramènera la justice, l'égalité entre tous les hommes. Son culte se répandra dans l'Europe, de l'Angleterre jusqu'en Inde et en Chine (des monnaies en témoignent). Si les romains dominèrent par la force brutale, l'Égypte conquit le monde romain par sa religion humaniste. Nous sommes habitués à croire que la Palestine n'est peuplée que de juifs gravitant autour d'un sanctuaire unique, le temple de Jérusalem. Mais l'empire romain s'étendait sur une grande diversité d'habitants, les populations égyptiennes, arabes, syro­phéniciennes et des îlots grecs et juifs pratiquaient différents cultes avec un grand nombre de temples et de lieux saints dans toutes les grandes villes. Des fouilles ont permis d'en retrouver des traces. L'historien juif Flavius Josèphe témoigne que plusieurs religions se pratiquaient. 

Le Temple de Césarée était à la gloire de l'empereur, arborant une statue aussi grande que celle de Zeus à Olympie. D'autres étaient établis à Sébasté (Samarie), aux sources du Jourdain, ou dans le royaume d'Hérode. Le culte de la trinité égyptienne possède des sanctuaires dans les grandes villes à Sébasté ou à Jérusalem, ou dans les contrées où Jésus exerce son activité, en Palestine, en Syrie, en Phénicie. César lui-même s'adapte, il fait embellir le temple de Philæ et s'y fait représenter en posture de prière devant Isis et Horus, ou Osiris et Isis. Hérode est arabe, selon Flavius Josèphe (père iduméen, mère arabe), et le temple de Jérusalem sert plusieurs cultes, le culte cananéen d'El le Très haut, le culte romain de César et le culte juif de Yahvé. Sous la domination grecque, un culte sera rendu à Zeus sous la forme du Baal Shanem cananéen. Des prières sont récitées à l'intention des rois perses. Le temple est construit avec des fonds avancés par le roi de perse pour créer un lieu de culte commun à toutes les nations. Les sadducéens et les pharisiens exhortèrent les révoltés de l'an 66 à ne pas cesser les sacrifices pour les empereurs (Guerre des juifs II:17, 2). Le culte isiaque a son propre clergé, ramification du clergé égyptien. Flavius Josèphe rapporte qu'un prophète égyptien était en activité sous Néron. Les mœurs des prêtres isiaques sont si pures que Tertullien les propose comme modèle à bien des chrétiens. Les prêtres égyptiens répandaient le culte d'Isis en identifiant celle- ci à la divinité locale, puis enseignaient graduellement leurs principes humanistes et universalistes, remède aux maux de l'empire romain. Apulée dans les Métamorphoses fait dire à Isis que “le monde entier me vénère sous des formes nombreuses...” En Samarie, à Césarée furent découvertes des traces du culte de Sérapis et d'Isis la bonne. Le culte de la trinité égyptienne s'implante dès le XI° siècle av. J.C. alors que la Palestine était égyptienne avant de devenir assyrienne. Une plaque d'ivoire trouvée sur un fauteuil de dignitaire, dans les ruines du palais des anciens rois d'Israël à Samarie, représente Horus offrant Maât à la Divinité Suprême. Une autre plaque sur un trône représente l'enfant dieu Horus assis sur un lotus, couronné d'uraei et armé du flagellum. Ce culte persiste jusqu'au III° siècle avant J.C. Une statue d'Isis du II ou III° siècle fut trouvée à Samarie la représente porteuse de la torche du monde souterrain car elle a les clés de l'enfer et de l'autre main les épis de blé car elle est la déesse des semailles et des agriculteurs.

En l'an 18 Hérode Antipas crée Tibériade sur les ruines de Sepphoris en Galilée, composée de nonjuifs (les juifs la jugent impure et prohibent son accès). Elle comportait pourtant une synagogue, au sens de lieu de réunion, une ample construction pouvant contenir une grande assemblée. Les menorot (pluriel de menorah) qui la décorent sont d'origine syrienne. Le terme est arabe dérivé de nûr, lumière ou nâr, feu pour désigner un chandelier. Ce chandelier existait en Syrie au XIX° siècle avant notre ère, deux siècles avant Abraham, six siècles avant Moïse, Mille ans avant Salomon. C'est durant l'exil à Babylone que les juifs intégreront la menorah dans le code sacerdotal. Un zodiaque y est dessiné avec des formes animales et les 4 saisons représentées par des femmes. Hélios au centre rappelle qu'Osiris ressuscité rejoint le Dieu Atoum Rê, un croissant le côtoie, figurant Isis. Les dalles reproduisent un nœud en motif décoratif, tel le nœud égyptien d'Isis, symbole d'immortalité. C'est à Tibériade que Jésus commence son activité. Or les temples égyptiens intégraient toujours une maison de vie et des installations pour recevoir les malades. Les grands centres de pèlerinages coptes ont gardé cette tradition. Une formule grecque de guérison attestée à Épidaure est "devenir sain", celle-ci se retrouve 4 fois dans le seul évangile de Jean pour parler uniquement de Bethesda. Le complexe était vaste, et permettait les cultes. Des trouvailles archéologiques ne laissent aucun doute. Un fragment de stèle comportant un serpent et des épis de blé, deux bateaux de pierre ornés d'un motif étoilé et de poissons; à la main gauche de déesse, une lampe en or en forme de barque. Nous ne sommes pas de toute évidence dans un lieu de culte juif. Or un prophète juif ne serait jamais entré dans un tel sanctuaire, de surcroît le jour du sabbat (Jn V:5-9).

L'Égypte a connu vers 2200 ans av. J.C. une révolution qui mit fin au régime féodal de l'Ancien Empire. Dans le texte des Sarcophages, 2000 ans avant notre ère, le défunt n'est admis au ciel que s'il déclare avoir partagé ses biens sur terre. Cette idée de partage a traversé les siècles, jetant les bases des communautés. Elles apparurent au Nouvel Empire chez les artisans de Deir eI Medineh au temps d'Aménophis I°. Puis ce furent des associations religieuses attestées sous le règne d'Amasis (57O-526av.J.C.), elles furent des fraternités (SNT, sounet) qui prirent la dénomination arabe de confréries, et qui désignent aujourd'hui encore chez les Coptes les associations religieuses. Les prêtres égyptiens dans les Maisons de vie prenaient leur repas en commun et possédaient leurs biens en commun. Strabon en témoigne pour le Museon, Maison de Vie à Alexandrie. Il est possible que ce mode de fonctionnement ait inspiré Platon pour sa République, puisqu' il vécut 13 ans à Héliopolis / On. L'historien grec Philostrate atteste que Platon a beaucoup emprunté aux prêtres de l'Égypte. Ceci nous ramène six siècles avant que I'on ne parle des Esséniens, des Thérapeutes ou des Qumrâniens et des futures communautés monastiques. Jésus a étudié la médecine égyptienne dans les Maisons de Vie. (C'est pourquoi il créera ces sortes de communautés partout où il a exercé son ministère. Les adeptes d'lssâ s'appelèrent les Issiyîn, en grec essenoi. Jésus a-t-il été un disciple des esséniens ou bien les esséniens sont-ils disciples de Jésus ? Toujours est-il que le christianisme s'est enraciné rapidement en Égypte et profondément. L'école théologique d'Alexandrie, la Didaskalion, fondée par saint Marc, a formé certains des plus grands théologiens (comme Origène) dans un esprit œcuménique, plus philosophique que rhétorique. Le monachisme y a éclos et a sous-tendu le développement du christianisme. L'iconographie chrétienne représente Marie dans un manteau bleu ciel parsemé d'étoiles, comme un reflet de Nout, la divine voûte céleste, la reine des cieux. L'âne qui servit de monture à Jésus dans la fuite en Égypte mais aussi pour son entrée à Jérusalem évoque la 9° heure du Livre des Morts (ou de la sortie au jour), dans la traversée des enfers où Iai, Dieu égyptien à tête d'âne, qui            symbolise l'activité
intellectuelle, doit mourir. Chevaucher l'âne indique la suprématie de l'esprit sur la chair, sur le corps. C'est à la 9éme heure que Jésus poussera son cri d'agonie.

Sur le message de Jésus

La parabole du grain de blé nous rappelle la légende d'Osiris. Osiris était symbolisé par le blé (ou l'orge). On le foulait aux pieds et on enfouissait les grains. Osiris reposait alors dans l'obscurité (les enfers) et alors pouvaient germer de nouvelles pousses (la résurrection). Quand les égyptiens de l'antiquité avaient fini de labourer leurs champs, ils faisaient une grande fête et invoquaient la Lune pour sa faculté de génération. Ensuite ils ensemençaient le champ en pleurant Osiris dont ils venaient de mettre en terre les parcelles. Pouvons nous trouver un lien entre la Cène et l'Eucharistie avec la tradition égyptienne ? (C'est encore le Texte des Pyramides qui sera sollicité : “Les forces d' Ounas sont derrière lui... qui vit de l'être de chaque dieu, qui mange leurs entrailles... C'est Unas qui se nourrit des dieux, Unas mange leur magie, avale leurs esprits... car il a avalé la connaissance de chaque dieu”. L' idée poursuivie étant d' acquérir des valeurs spirituelles par une communion ou une union physique. La communion chrétienne reprend cette opération mais en substituant la foi à la magie des anciens égyptiens. Ceci éclaire certains passages de Jean (VI:48-58) : “Celui qui mange ma chair et boit mon sang à la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour”. Jésus accorde beaucoup d'importance au cœur : “Heureux les cœurs purs”, “c'est du cœur que viennent les mauvaises pensées” etc... Et pour l'égyptien, le cœur est le lieu privilégié de son corps par lequel passe l'inspiration divine. Le cœur d'un homme est “son dieu lui même”. Et l'homme, selon qu'il avait ou non le cœur ouvert, pouvait ou non entrer en communication avec le Divin et lui obéir. D'ailleurs c'est le cœur uniquement qui répond au jugement de la Psychostasie. Le rôle du fils dans la mythologie égyptienne est celui de médiateur entre son Père et les hommes. Il a reçu de son Père tout jugement sur les hommes et personne ne peut voir le Père s'il n'est pas introduit par le fils. Ainsi parle Horus, fils d'Isis: “Je suis venu à toi, ô Beauté suprême, et je t'amène ce défunt, son cœur est vrai, il est sorti victorieux de la balance, et il n'a péché contre aucun dieu”. Citons Jean (V:22-23) :“Le Père aussi ne juge personne; mais il a remis au Fils le jugement tout entier, afin que tous honorent le Fils, comme ils honorent le Père”.

Conclusion

“D'Égypte j' ai appelé mon fils” annonçait Osée (XI:1) et repris par Matthieu (II:15) après avoir relaté la “fuite” en Égypte. Ce récit reprend une trame commune à Abraham, à Joseph, à Moïse, comme un périple initiatique, un véritable retour à la terre promise. Isaïe annonce la proclamation de l'Éternel : “Béni soit mon peuple d'Égypte”(Is XIX:25). Cette planche avait pour but de vous montrer que la religion chrétienne a su s'implanter facilement chez ceux qui avaient le credo osirien. Une rupture brutale ne fut pas nécessaire envers leurs concepts traditionnels puisqu' il n'existait pas de contradiction, et la religion chrétienne n'a pas dû paraître étrangère aux yeux des égyptiens. Jésus amène simplement un nouveau développement à la religion multimillénaire. Quant à savoir si Jésus était ou non un vrai Fils d' Israël, la question vous est posée. Elle devient aujourd'hui relative quand l'état des recherches historiques replace en Égypte l'origine du peuple hébreu, et que les recherches génétiques sur certains pharaons semblent indiquer de curieuses proximités entre les deux peuples. Quoiqu'il en soit, le Divin n'a jamais rien perdu de son unité.

F\ Den Bo - R\L\ Héliopolis à l'O\ Foix

Bibliographie
Jésus, le nonjuif /Sarwat Al-Assiouty. Letouzay & Ané. Paris 1987
Le Monde Inconnu, N° l52, 153, 154, 156, 157-158 (dès Octobre 93)
Le monde copte (N°9 fin 1980, N° 19 Juillet 91) (N° 29-31 Déc. 2000
Publié dans le Bulim - Bulletin N° 5 - 28 Février 2009  -  Abonnez-vous

B005-E L'EDIFICE  -  contact@ledifice.net \