GLFM Bulletin : Bulim Misraïm 11/2009

La Symbolique Egyptienne
au travers des 4 éléments

A la gloire du GADLU, VM, mes chers F et S en vos divers degrés et grades,

je voudrais vous présenter un travail sur le thème suivant : La symbolique égyptienne au travers des 4 éléments.

Malgré le nombre important de documents mis à jour depuis plus d'un siècle et malgré l'effort accompli pour pénétrer la pensée de l'Égypte pharaonique, un mystère complet subsiste quant à la signification réelle, et au motif, de cette œuvre colossale que les Égyptiens anciens nous ont laissée, Œuvre qu’ils ont bâtie sur les berges du Nil, vert sillon tracé entre deux étendues désertiques.

L'Égypte, plus qu'ailleurs dans la monde, a modelé par ses contrastes ce peuple et leurs réflexions religieuses qui sans nul doute avaient les mêmes préoccupations spirituelles que les nôtres; ils se sont bâti un univers imaginaire reflétant leurs doutes, leurs contraintes mais aussi leurs espoirs. L’égyptien ancien était entièrement dépendant pour sa survie de la nature et des conditions géoclimatiques spécifiques à la vallée du Nil. L’impossibilité pour lui de comprendre les causes des phénomènes et des évènements naturels s’accompagne également d’une incapacité à agir sur eux. Ne pouvant comprendre ces phénomènes, il va décrire ces forces invisibles qui animent le monde sous forme d’entités divines avec lesquelles, il se doit d'entretenir un dialogue permanent car, le monde réel (celui des hommes) et le monde imaginaire (celui des dieux) lui semblaient interdépendants.

L’apparition des dieux et des divinités répond selon moi plus ou moins à une nécessité, car il est plus simple d’un point de vue ésotérique, d’interagir de manière subtile avec l’environnement en l’assimilant en une représentation capable de moduler et de canaliser nos énergies, par le biais de rituels notamment. L’existence de ces dieux correspond également à une nécessité de vénérer de façon moins abstraite les éléments de la nature à leur état brut.

Mais ce n’est pas tout. Il faut aussi que la divinité soit incluse dans l’ordre égyptien, dans un groupe social reconnu, celui des dieux.

Pour cela, il va représenter le dieu comme un être humain, l’anthropomorphiser, le faire devenir une "personne divine" et lui donner un nom qui va permettre d’entrer en contact avec lui. La représentation du dieu combine souvent un corps humain (sa personne) et une tête constituée par un animal voire par un objet, vecteur de la fonction qu’on souhaite lui voir exercer à un moment donné et dans une situation spécifique. Il ne faut pas croire qu'une représentation animale a une signification univoque. Elle recouvre souvent tout un monde de signification.

Pourtant, depuis Champollion, les hommes se sont obstinés à se servir d'une clé rationnelle pour pénétrer les secrets de l’Égypte ancienne alors qu'il faut selon moi utiliser la clé du symbole et de la symbolique pour essayer de percer ce coffre contenant la plus grande richesse de l’histoire de l’humanité et le centre le plus grandiose de la vie des Maîtres de la science créatrice.

La pensée de l'Égypte pharaonique est pétrie de symbolisme, mais sur ce terrain, nous ne pouvons avancer qu'avec précaution, et nous devons attribuer un sens symbolique à des témoignages archéologiques que si l'on y est autorisé par des textes de l'époque. Tout autre procédé risquerait de nous entraîner selon moi dans des spéculations plus ou moins hasardeuses.

Vouloir à tout prix trouver l'expression d'un symbolisme ou d'un ésotérisme moderne serait un non sens et constituerait à coup sûr, un manque de sérieux dans les travaux que nous menons. La pensée religieuse égyptienne est suffisamment riche, que nous n’avons nul besoin d'acquisitions supplémentaires; elle se suffit à elle-même. Sa magie est un régulateur d'énergies spirituelles et matérielles entre le divin et l'homme, parce qu'elle place le Sacré comme valeur première.

Pour pénétrer l’état d’esprit de cette époque ou le sens secret de cette pensée à laquelle nous croyons et qui nous réunit ici, sens qui fait le fond de la connaissance égyptienne, je pense que seule la symbolique peut nous aider à y parvenir, mais notre démarche doit également passer par une approche pluridisciplinaire, ou symbolisme, archéologie, histoire, géographie, et imagination ne feront qu’étayer mes propos. Comme toutes croyances, la pensée Égyptienne à un commencement. Chez les Égyptiens, l’histoire est avant tout mythe. Elle raconte les origines de l’humanité et la manière dont les Dieux ont bâti leur pouvoir. En décrivant la naissance aquatique du monde, ils montrent comment l’ordre se substitue au chaos.

La religion, qui occupait une place considérable dans la vie quotidienne des égyptiens anciens, reposait sur un principe de réciprocité. Pour préserver l’équilibre terrestre, les prêtres étaient contraints d’accomplir, chaque jour, une longue série de rites immuables, censés nourrir l’énergie vitale des dieux.

Le peuple lui, remettait sa destinée sous la protection d’une multitude de divinités très populaires, qu’il vénérait assidûment. Plus le culte selon eux était assidu, et plus les dieux leur accordaient leurs faveurs, maintenaient l’harmonie du monde et les préservaient de tout malheur.

Pour comprendre l’esprit de l’ancienne Égypte, il faut également tenir compte de l’environnement naturel de ses habitants, profondément attachés à leur cadre de vie très particulier et attentifs au moindre soupir de la nature dont ils ont su tirer un enseignement profond de tous les signes. Ils en étaient à la fois les complices volontaires mais également les serviteurs soumis.

Les éléments : L’eau, la terre, l’air, le feu ...
Eau, associée à l'âme,
Terre, associée au corps,
Air, associé au mental,
Feu, associé à l'esprit.

Il est difficile de parler d’eau pour les Égyptiens d’hier ou d’aujourd’hui, sans évoquer le Nil, ses deux rives, modelées par une inondation annuelle depuis des millions d’années qui côtoie deux zones désertiques à la frange souvent rocheuse terminant sa route dans un delta au déploiement épanoui comme une tête de lotus. (Symbole de la renaissance). Il semble, que dans l’antiquité, la mer méditerranée, où « fleuve-dieu » allait disparaître n’avait que peu d’intérêt pour les égyptiens, ils lui tournaient le dos, orientés vers le sud d’où provenait la miraculeuse inondation du Nil qui apportait vie et joie à ce peuple. Le fleuve Nil et surtout l’eau qui coulait dans son lit était l’unique source nourricière d’un sol sans affluent en Égypte et qui ne recevait pratiquement aucune pluie. Pour l’égyptien Ancien, il est difficile de dissocier l’eau de la terre et plus particulièrement celle du Nil «La terre noire» (Kemet), qui après les rochers et les silex qui parsèment les flancs de la montagne thébaine a permis à l’Égypte ancienne d’exister ou de subsister en fonction des apports successifs d’humus déposé par la crue annuelle à la saison «AKHET».

D’après les textes qui ont été déchiffrés par les Égyptologues, les Anciens Égyptiens concevaient le monde comme un disque entouré d’un océan (le Grand Circuit), le Noun, d’où sort le Nil, qui partage la terre en deux. Les Égyptiens appelaient ce fleuve issu de cette mer primitive : ioumâ "la mer", ou bien : ioter aa "le grand fleuve".

Au commencement donc est Noun, l’océan primordial, d’où surgit par autocréation spontanée le Soleil Atoum. Atoum-Ré, dieu créateur par excellence, qui selon la légende engendra à partir de son crachat ou de son sperme, selon les traditions, le premier couple divin : les jumeaux Shou (représentant l’air impalpable, le souffle) et Tefnout (représentant l’humidité), qui formèrent l’atmosphère lumineuse.

De leur union charnelle naîtra le second couple jumeau de l’humanité : Geb (la Terre), et Noüt (le Ciel) qui enfantèrent Osiris et Seth et leurs épouses respectives, Isis et Nephtys. Commencent alors les tribulations de cette terrible famille, qui symbolisent l’âpre lutte que se livrent les éléments primordiaux avant que le monde n’accède à la stabilité. Cependant l’ingratitude de sa descendance fait verser à Atoum-Ré des larmes amères qui, en touchant le sol, donnèrent naissance aux hommes.

Dans la mythologie Égyptienne, Geb représente le Dieu de la terre, des plantes et des minéraux et donne à la terre ses fruits et son eau, laissant à sa sœur Nout, le royaume des cieux. Il est l'un des quatre éléments qui formèrent le monde représenté sous les traits d'un homme à la peau noire ou verte, étendu sur le sol et séparé de la voûte céleste (Nout) par son père (Shou). Pour les anciens égyptiens les couleurs noire et verte étaient des couleurs très positives, car elles représentaient respectivement la terre noire fertilisée par le limon des eaux du Nil (indispensable pour assurer une bonne récolte), et le vert de la végétation, et, plus généralement, les choses vivantes.

Cependant dans l’Égypte antique, les égyptiens n’étaient pas seulement terrassés par les crues du Nil, mais également par la puissance du soleil qui pouvait selon ses humeurs provoquer différents fléaux de manière directe ou indirecte (Sécheresse, Invasion d’insectes (criquets) etc ..), les divinités solaires furent donc également l’objet d’un culte fervent.

Comme cité précédemment, après avoir pris conscience de son état dans le chaos indifférencié des origines (le Noun), le dieu démiurge Atoum a créé le monde en commençant par la lumière et la chaleur qui dans un second temps seront matérialisés par le disque solaire. Ra est ainsi inséparable d'Atoum, représentant de la dynamique du monde créé. (Atoum-re).

Shou représente le dieu de l'air qui symbolise l'air sec et la force de conservation, la lumière mais aussi le souffle de la vie et constitue l'espace entre le ciel et la terre dans lequel la vibration lumineuse se manifeste, véritable "éther" véhiculant les rayons solaires. On le représentait sous les traits d'un homme barbu se tenant debout ou à genou près de Geb et soutenant Nout les bras tendus. Parfois on le représentait avec son épouse sous la forme d'un lion ou encore sous la forme d'une colonne d'air.

Tefnout sa sœur représente l'humidité, la rosée, mais également l'orbite céleste de l'astre. Sa tête de lion fait référence à l’apparence qu’elle revêtit lorsqu’elle s’enfuit en Nubie laissant derrière elle une grande sécheresse. Véhiculant la partie dangereuse de l'astre (la chaleur) elle est associée à la puissance.

Shou et Tefnout sont inséparables entre eux et du soleil lui même que l'on représente parfois en les montrant sous forme de deux lions entre lesquels se trouve le soleil ; Les deux pylônes des temples ont semble t-il la même signification.

Les différentes phases de l'existence du soleil ont bien sur été évoquées par les égyptiens. Toute la circulation du soleil se faisant par le Nil, Ra était imaginé pour décrire son périple comme circulant dans une barque sur un Nil céleste.

Comme je l’ai précisé précédemment, Les égyptiens pensaient que la terre était plate et que le soleil disparaissant à l'horizon chaque soir, Ra changeait alors de moyen de transport et montait dans la barque de la nuit qui circulait sur le Nil souterrain. Pendant que le monde d'en haut était dans l'obscurité, le dieu parcourait les douze heures de la nuit dans le monde souterrain (la douat), faisant bénéficier ses habitants de sa lumière et de sa chaleur. Ceux ci retombaient en léthargie lorsque l'astre les quittait. Le levé du soleil au matin traduisait le triomphe des forces organisatrices sur le chaos, la victoire de la Maat. Chaque jour était donc pour les égyptiens comme une nouvelle création du monde qui n’est pas retourné au chaos des origines.

Tout le panthéon égyptien, comme ses deux principales divinités, Isis et Osiris, est relié aux éléments : l’eau, la terre, l’air et le feu. La grande magicienne Isis par exemple est née dans les marécages du delta du Nil, attirant à elle le principe humide, et s’unit à Osiris, dieu de la Végétation. Pour cette raison, elle donne son nom à l’étoile Sothis, (Sirius pour les profanes) dont l’apparition dans la voute céleste est annonciatrice de la crue du Nil. Osiris lui, confère à l’eau du Nil sa force fécondante (mélange d’eau et de terre, le limon), qui meurt lors de l’inondation pour renaître au printemps, après un séjour sous terre, comme le grain semé.

J’ai choisi dans cette évocation mythologique de ne présenter que les principales divinités aquatiques, terrestre et solaire, directement liées à l’eau du Nil et à ses terres arables qui selon ma perception devaient représenter les divinités les plus intimement liées au quotidien des anciens Égyptiens, car elles leur apportaient, nourriture, richesse, sérénité et purification. C’est pour cela qu’un culte extrême leur était sans cesse rendu dans les temps anciens conforté par un texte prélevé sur les pyramides d'Égypte, ou on peut lire: «La voici l'eau de vie qui se trouve dans le ciel; la voici, l'eau de vie qui est dans la terre. Le ciel flamboie pour toi, la terre frémit pour toi lorsque naît le dieu. Les deux collines se fendent, le dieu se manifeste, le dieu se répand dans son corps».

Le dieu qui naît, évoqué dans ces lignes, c'est l'eau surgissant de la source du Nil pour se répandre et apporter la vie et la richesse. Obsession raisonnable dans la culture de l'Égypte ancienne, le Nil, aussi rassurant qu'inquiétant, a conduit naturellement à sa sacralisation et fut divinisé par les Égyptiens sous le nom d'Hâpy qui incarnait les crues bénéfiques, sa puissance et le dynamisme de ses eaux sans lesquels l’Égypte Pharaonique n’aurait été qu’une vaste étendue désertique. Au contraire du rite de Misraïm qui place « la terre » au début de notre rite initiatique, je pense que le premier élément est «L’eau», pays natal de la vie, dont elle devient l'aliment premier parce qu'elle est l'élément premier, de plus sa symbolique sera reprise et partagée de façon universelle par toutes les religions.

Au regard de ce que je viens de vous lire, nous pouvons en conclure que les différents éléments ne forment qu’un, Indissociables les uns des autres, et forment un cycle. Mais tout cycle universel n'est un circuit entier que par affrontement de deux moitiés adverses ; et celles-ci, dressant leurs forces opposées, provoquent la fusion d'où naîtra l'Unité.

J’ai dit.

Saison Égyptienne : Chemou du 16 mars au 13 juillet - Akhet du 19 juillet au 15 novembre - Peret du 16 Novembre au 15 mars

Un F de la RL Meter M°31 à l'O de Paris

Publié dans le Bulim - Bulletin N° 12 - 30 Novembre 2009  -  Abonnez-vous

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