GLFM Bulletin : Bulim Misraïm 06/2011

L’Etoile Flamboyante

Lors de mon travail philosophique, je vous ai parlé de l’Amour. Ce thème, vous vous en doutez bien, m’est essentiel. Ce n’est donc pas fortuit si mon travail symbolique s’est orienté vers l’Etoile Flamboyante ...

Et pourtant, je n’imaginais pas à quel point elle en était l’expression lorsqu’elle s’est imposée à moi ... c’est-à-dire, dès que je l’ai vue ! Il m’a fallu vivre ces cinq années de compagnonnage comme autant de voyages, pour en découvrir, ou du moins, soupçonner sa profonde émanation. Je suis une grande rêveuse et les étoiles ont toujours eu une influence stimulante sur mon imagination. Certes, la poésie inspirée par l’Etoile a tout pour me séduire de manière intuitive. Que ce soit dans les paroles de la chanson de Brel, La Quête :

Rêver un impossible rêve (...)
Partir où personne ne part (...)
Tenter, sans force et sans armure
D'atteindre l'inaccessible étoile
Telle est ma quête Suivre l'étoile
Peu m'importent mes chances
Peu m'importe le temps
Ou ma désespérance
Et puis lutter toujours
Sans questions ni repos
Se damner Pour l'or d'un mot d'amour
Je ne sais si je serai ce héros
Mais mon cœur serait tranquille
Et les villes s'éclabousseraient de bleu
Parce qu'un malheureux
Brûle encore, bien qu'ayant tout brûlé
Brûle encore, même trop, même mal
Pour atteindre à s'en écarteler
Pour atteindre l'inaccessible étoile

Ou dans le conte de Saint-Exupéry qui a bercé mon enfance Le Petit Prince qui, descendu de son étoile où il prenait soin de sa rose, accompagnait un voyageur égaré, le temps de ranimer sa foi en le reconnectant au plus pur de lui-même, et stimuler ainsi sa persévérance dans la traversée ... Je me sentais brûler d’une ardeur exaltante ...

Mais c’est par le Travail que la nature même de l’Amour se révèle, éprouvé dans la chair, en résonance avec le monde. J’aime ce mot, résonance, car par son impact musical, il agit par vagues, crée des ramifications de perceptions qui stimulent l’esprit, éveillant ainsi la conscience ... Le corps, l’âme et l’esprit sont des instruments vivants, qui réagissent aux ondes qu’ils perçoivent en vibrant à l’unisson pour évoluer en harmonie avec leur environnement.

Cette félicité me stimule à la reproduire et m’incite donc au travail. C’est par lui que j’affine mes perceptions pour me rendre toujours plus limpide et souple dans mon approche du Monde afin de me laisser traverser par la Lumière et la rayonner. Je comprends de mieux en mieux que mon lyrisme naturel est un carburant fabuleux pour m’atteler à la tâche. Mais je dois être vigilante et ne pas me laisser déborder par cette exaltation, et au contraire, la canaliser en la structurant à l’aide des outils que me propose la F.M.
Je me suis incarnée à la Rose de Saron, la plus envoûtante des roses car il s’agit de la fleur d’Amour qui permet de retrouver le chemin de l’Harmonie dans le Cantique des cantiques. Mes sœurs ont dévoilé mon regard et ainsi permise de recevoir la Lumière. A l’aide du Ciseau et du Maillet, bien protégée derrière mon tablier en forme de carré long surmonté du triangle isocèle, j’ai pris conscience de la matière dont j’étais pétrie et l’ai dégrossie peu à peu. Je suis descendue au plus profond de moi-même grâce au fil à plomb. Plus je prenais conscience de ma profondeur à la lueur de la Lune, plus je me verticalisais, soutenue par mon propre corps qui incarnais des pieds à la gorge au moins la rectitude de l’équerre.

Afin de poursuivre l’œuvre commencée, on m’a présentée à la porte du Temple pour permettre d’avancer dans les voies de la Sagesse et de la Connaissance. Quelle ne fut pas ma grande joie de découvrir qu’à chacun de mes pas se révélait toujours plus ardemment la Lumière, Féconde et Immortelle, source inépuisable de Science, d’Amour et de Vertu. J’allais pouvoir passer de la Perpendiculaire au Niveau. Si au cours de mon apprentissage j’avais trois ans, pour comprendre la notion d’unité révélée, à cinq ans, je réalise que mes potentiels d’Etre Humain interagissent non seulement sur mon univers intérieur, mais également avec celui qui m’entoure. J’aime retrouver dans notre Rituel la confirmation de ce que mon intuition capte naturellement dans ma vie profane, tel que le fait que les objets les plus humbles symbolisent les réalités les plus hautes. La Lumière se matérialise sous toutes les formes.

La Règle à vingt-quatre divisions est mon premier outil de Comp.°. Quel beau cadeau musical : elle me rappelle la mesure dans mon approche, à toute heure de mon existence. Telle un métronome, elle rythme mes pas et me permet même un pas de côté avant de retrouver mon axe, esquissant une danse de la vie pour mieux en éprouver la richesse et mes limites. Elle accompagne mon cheminement au cours du Premier Voyage, assistée du Ciseau et du Maillet pour travailler sur les Cinq Sens. Cette découverte réalisée sur le plateau de l’Hosp.°., je ressens que ce voyage doit sur faire sur la route du Cœur. En connaissant ma nature profonde et mes aspérités, je développe les moyens de ne pas me mentir à moi-même et ma prise de contact avec le Monde.

Riche de ce discernement, je peux alors, armée de ma Règle et du Compas, découvrir lors du Deuxième Voyage les Ordres d’Architecture pour m’en inspirer dans la construction de mon Temple intérieur. Parce qu’ils s’appuient sur le plateau de la Très., je comprends la puissance de l’impact de ce Voyage, et les conséquences matérielles qui en découlent. Je dois incarner auprès de mes Sœurs une colonne vivante solidement appuyée sur la terre qui m’a donné naissance et m’élever vers les hauteurs pour devenir l’une des colonnes inébranlables de
notre Temple.

Au Troisième Voyage, parce que j’ai construit, je peux prendre le recul nécessaire pour mettre des mots dessus. Je suis prête à changer de plan grâce aux moyens d’expression. Je passe du faire à la transmission. Le Levier pour m’élever, toujours accompagnée de ma Règle, je découvre le cartouche des Arts Libéraux sur le plateau de la Seconde Surv. L’Art de la Parole (Trivium) et celui des Sciences (Quadrivium) s’expriment dans la Beauté et l’Harmonie car l’Amour est le véhicule de la transmission. C’est à ce moment- là que mon attention est appelée au pied de l’Orient où reposent les Globes Terrestre et Céleste qui me suggèrent qu’à présent tout l’univers est proposé à mon investigation. L’ampleur de la mission me plonge dans une inquiétude profonde ... Et me viennent les parole de Fugain : « Je n’aurai pas le temps ... » ! Mais le Rituel me rassure : Souvenez-vous toujours que l’Initié ne doit pas présumer de ses forces, et doit demeurer modeste.

Humble, je respire ma longue Robe Noire que j’aime tant, comme mon terreau où me ressourcer dès que je me perds, et c’est avec l’Équerre en main, accompagnée de ma Règle que je fais mon Quatrième Voyage. Je découvre, en appui sur le plateau de la Première Sur. le cartouche des Grands Initiés, comme pour me rappeler les règles à suivre dans la Force Morale. A l’instar de ces Hommes d’exception, je suis invitée apprendre des leçons du passé dont je tirerai la quintessence (quatre voyage pour comprendre la matière, plus un de la conscience, je réalise le cinq de l’Homme éveillé, d’où quintessence). C’est alors que s’ouvre à moi le Cinquième Voyage, les mains libres, pour passer en revue tous les Outils de la Comp.°. et comprendre dans ma chair que tout le mérite en revient au Travail. Luit devant moi, au Sud Est, tel la confirmation que tous les espoirs sont permis, l’Etoile Flamboyante. Le «Pentagramme» constituait, il y a vingt siècles, le signe de reconnaissance de la confrérie pythagoricienne, symbole d’amour et d’harmonie. Au Moyen-âge, il était un symbole des Guildes des Maçons Opératifs et aussi une figure que les Gnostiques considéraient comme magique ; ils l’appelaient : le « PANTACLE » (ou Pentacle). Au centre de l'Etoile, comme un germe, apparaît la mystérieuse lettre G.

On nous propose, entre autres comme interprétation :
- la Géométrie, trame de construction de l’Univers, du Temple et de l’Homme. Elle symbolise la connaissance de soi pour pouvoir construire son temple intérieur, à l'image de celui de Salomon,
- la Gnose, connaissance de la spiritualité qui unit l'Univers et le Vivant,
- la Gravitation, densité du Centre autour duquel tourne l'Univers... Elle symbolise l’attirance réciproque de tous les éléments de l’univers, qui assure la cohésion. Sur le plan de l’humanité, cette force est l’Amour.
- Génération : C’est le pouvoir de créer sur tous les plans : physique, intellectuel, psychique. Elle assure la Transmission telle la Chaîne d’Union, le Lac d’Amour
- Génie : C’est l’intelligence qui peut s’élever aux conceptions les plus transcendantes.

La lettre G, en grec gamma, s'écrit avec une équerre. Équerre que l'on a déjà trouvée au pied du pilier Beauté, l'harmonie des contraires, c'est- à-dire l'Amour, Équerre que l'on trouve aussi sur l'autel des serments en qualité de l'une des trois Lumières. Équerre enfin que l'on trouve également en bijou de la V.M. sur son plexus solaire pour renvoyer à l'At. les participations harmonieuses qu'elle avait reçue en vrac. En anglais, la lettre G représente God, le divin, c'est notre progression vers le Divin. Très probable que ce Germe en action soit le noyau de Lumière qui transcende l’Etoile et la rende Flamboyante...
Un jour, je vais chez mes parents avec de belles boucles d’oreille en forme d’étoiles et flamboyantes de mille feux car taillées dans du cristal de roche. Papa me regarde et me demande, mutin : « Êtes-vous Comp.°.? » Je réponds spontanément : « Mes Sœurs me reconnaissent comme telle » et réalise que la réponse n’est pas appropriée ... Pourtant, je cherche et ne trouve plus la phrase consacrée ... Le déjeuner terminé, je rentre. Sur le chemin, mon œil est attiré par un éclat dans la vitrine. Je regarde et découvre le reflet de mes boucles d’oreille ... « J’ai vu l’Etoile Flamboyante ! » J’appelle papa et le lui annonce fièrement ... mais lui précise que je ne pouvais la voir, puisque je la portais ! Il a fallu le reflet extérieur pour en prendre conscience ! Je réalise qu’au premier degré, ce sont les éléments extérieurs qui permettent de définir qui l’ont est. « Mes Sœurs me reconnaissent comme telle ».

Au Second, nous sommes partie prenante dans la découverte du monde «J’ai vu...» ...
Je sens intuitivement qu’au Troisième, « Je suis » !

Forte de mon expérience de Comp.°., je sais à présent qu’il n’est pas nécessaire, comme le suggérerait Brel, de s’écarteler pour atteindre cette Etoile, mais bien au contraire, c’est en rassemblant ce qui est épars pour trouver mon égrégore, et incarner cette Etoile, Flamboyante de sens et d’Amour.

Une Sœur de la Maçonnerie universelle
Publié dans le Bulim - Bulletin N° 29 - 30 juin 2011  -  Abonnez-vous

B029-5 L'EDIFICE  -  contact@ledifice.net \