GLMFMM Bulletin : Khalam 03/2000

En quoi le Franc-Maçon du Rite
 Ancien et Primitif de Memphis‑Misraïm
est-il concerné par le du 2éme millénaire ?

Nul n'ayant la science infuse, l'auteur de ces lignes y voit l'opportunité d'ébaucher une tentative de bilan spirituel des activités du Franc-Maçon au sein d'une Obédience mixte dont il partage la fougue de la jeunesse. A cet âge, tout est possible, le pire comme le meilleur. Disons qu'il nous reste le meilleur !

Aujourd'hui, nous sentons une force, un élan intérieur, la joie de construire... et d'y croire. Dans ces conditions, le meilleur n'est pas impossible : c'est simplement à nous de le réaliser.

Bilan frondeur de la Franc-Maçonnerie

Cette idée qui nous est venue des anglais au début du XVlllè siècle, a pris aujourd'hui une dimension mondiale qui renforce ses enjeux. On peut voir dans la F\M\ différentes motivations :
- une tentative réelle d'éveil des consciences, selon les arcanes de la Tradition, toutes Obédiences confondues, au sein de Loges qui enseignent et défendent les valeurs éternelles du symbolisme, de la culture, de l'honneur, de la fraternité...

Mais nous trouvons aussi dans sa globalité :

- des clubs de libres penseurs plus ou moins anticléricaux;
- des cercles d'affairistes;
- des antichambres du "Pouvoir";
- ou plus souvent, des groupes d'honnêtes gens moralisateurs que personne n'écoute, à commencer par leurs congénères, dans l'indifférence d'une Société en dérive;
- ou bien une activité compensatrice pour les rêveurs en mal d'identité, les utopistes malheureux et les âmes seules en quête de reconnaissance... .Que reste-t-il de tout ce verbiage, de toute cette agitation bien pensante, sûre d'elle-même, perdue dans son vertige oratoire ?

Que le silence est beau parfois quand on y songe ! Avais-je remarqué la pureté du regard de mon chien qui me dit " je t'aime", sans décors ni pendeloques, et qui n'attend de moi qu'une caresse distraite en retour à la vie qu'il m'a donnée sans que je m'en aperçoive ? Que restera- t-il de nous quand le vent du destin aura balayé notre fausse importance et même notre civilisation factice dans un vent de feuilles mortes, de débris de plastique et de poussière, et que la puissance de la voûte étoilée régnera à nouveau sur la terre des hommes ?.

Je me doute que celui qui le saurait ne pourrait le dire car on le tuerait, "ce perturbateur" qui, chose impardonnable, risquerait d'avoir raison !.

Considérations impertinentes sur notre époque

L'an 2000 n'est pas l'an 2000, car la datation de l'an 1 chrétien fut l'œuvre du moine scythe Denis le Petit qui s'est fondé sur l'Évangile de Matthieu et a estimé la naissance du Christ au 25 Décembre 753 après la fondation de Rome. Il s'est trompé de 4 ans ( ce qui nous fixerait à 2004 actuellement ).

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Pour compenser les erreurs du calendrier Julien établi en 46 av. J.C par Jules César, on choisit le calendrier Grégorien et l'on décida que le lendemain du 4 Octobre 1582 serait le 15 Octobre pour maintenir les saisons aux mêmes dates qu'en 325 ( Concile de Nicée ). Et l'an 2000 ne veut rien dire pour les musulmans, les bouddhistes, et les adeptes de toutes les religions non chrétiennes. Il n'y a que nous, et les athées occidentaux qui tombent dans l'ornière pour n'y avoir point pensé !. Par contre, o coïncidence, c'est une Ere nouvelle qui commence avec un décalage de datation d'effet secondaire en plus ou en moins, avec ses promesses, ses mensonges, et l'offre d'un pas supplémentaire sur le sentier de l'initiation de l'Humanité. Mais comme notre Société occidentale n'a pas su profiter de l'Ere des Poissons, faisant un demi-tour en arrière sur le plan de la connaissance jusqu'au XVIIIè siècle, nous avons la charge de monter deux marches d'un coup. Un des aspects de la mission christique et de ses disciples était d'offrir généreusement aux foules des enseignements ésotériques réservés aux adeptes du Temple éternel en fonction des limites de tout un chacun. Cette élévation globale devait soutenir la révolution technique prévue pour notre époque, à condition que nous ayons atteint la maturité nécessaire à la gestion de notre planète. De toute évidence, nous en sommes loin. Cette dimension mondiale de l'homme du Verseau qui se tourne vers l'espace et risque un jour de se voir remis en cause jusque dans les fondements de ses convictions profondes, est une aventure oubliée depuis des millénaires, donc nouvelle, et l'offre d'un pas supplémentaire sur l'échelle de Jacob.

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Mais il lui faudra résoudre rapidement les jeux antinomiques de cette mondialisation :
- l'essor des communications, du partage des idées, face à l'exploitation systématique de l'homme par l'homme dans le mirage du profit;
-la prise de conscience écologique, de la fragilité de la Nature, notre Mère dont nous administrons le Royaume;
- la révolution informatique qui pourrait très facilement être utilisée à des fins totalitaires;
- l'augmentation de la population mondiale qui peut poser un problème de survie et donc générer des conflits;
- la fragilité de l'artifice technologique qui gère tout: de la chimie, à la physique, l'agriculture, les transports, le tertiaire, la vie domestique;
- les fluctuations de populations de plus en plus nombreuses, rejetées par le système, ou profitant sans vergogne d'un assistanat forcément tâtonnant... facteur déstabilisant et explosif;
- les nouveaux barbares urbains qui feront renaître les délices de l'insécurité moyenâgeuse;
- l'affolement spirituel de populations stressées qui se jetteront dans les aléas de sectes éphémères qui penseront pour elles dans une précaire sécurité inhibitrice... . Nous pourrions continuer ainsi pour aboutir à une constatation globale: les temps qui viennent risquent d'être dangereux et chaotiques. Il ne s'agit ni d'alarmisme millénariste, ni d'hypocrisie devant des faits parfaitement visibles.

L'esprit maçonnique

Quel est l'avenir de la Franc-Maçonnerie dans tout cela ? Il faut avoir l'esprit en paix pour se réunir en Loge et réfléchir à loisir sur les vertus du symbole dans un formalisme circonscrit.

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Il n'y a point de critique dans cette constatation. Elle pose un problème simple: la Franc Maçonnerie d'aujourd'hui est- elle adaptée à l'univers de demain dont les prémisses s'étalent déjà sous nos yeux, ou bien sent-elle la poussière ? Pour y répondre, revenons à ses buts originels :

- La Maçonnerie est peut être en premier le respect de l'homme par lui-même. Sa devise: " liberté, égalité, fraternité " en est la juste expression, comme le principe des "droits de l'homme".

- Tout le monde sait que la liberté de chacun s'arrête où commence celle des autres. Elle commence par celle de la pensée qui a rejeté le joug religieux du XVIIIème siècle. Mais pour qu'il y ait liberté réelle de pensée, il faut pouvoir comparer; donc savoir. Toutes les dictatures ont fait la guerre à la culture. Et nous assistons à un déclin de cette dernière autour de nous.

- Comme par le passé, cette cassure risque de hiérarchiser des classes sociales qui paralyseront l'éveil global et l'harmonie recherchée. L'égalité maçonnique est avant tout une égalité de droits et de possibilités sociales. En faire un résultat imposé est contraire aux lois de la Nature. Les hommes ne sont pas égaux, ni dans leur tête, ni dans leur cœur, ni dans leur courage, ni dans leurs idéaux, sans parler de l'inné. Le nivellement par la moyenne est contraire à l'éveil des vertus maçonniques. Ce qui manque peut être le plus à notre époque, c'est d'avoir un idéal de dépassement de soi, pour soi, et pour les autres, avec une inversion progressive de ces deux motivations en fonction du degré de spiritualité. Tentée souvent de brader ses grades, sous le prétexte de ne juger personne, la F\ M\  se suiciderait. Que peut valoir pour l'individu ce qui a été offert sans mérite, sans effort ?. Si le niveau spirituel est déjà là, c'est bien; sinon, la prudence comme la tempérance demandent d'attendre... Et cette réalité est obligatoirement le fruit d'un chemin ésotérique vécu. C'est ouvrir sinon la porte au vent de l'orgueil, puis au formalisme abscons et l'obscurantisme... le contraire de l'esprit maçonnique. Rappelons que les Anciens égyptiens ne jugeaient personne: ils mettaient leurs candidats dans des situations qui révélaient leur nature profonde dans des épreuves initiatiques sévères.

- La Fraternité existe dans les actes, et non dans les mots. Combien de Maçons ont oublié leurs serments, ayant laissé au niveau du cinéma ce qu'ils avaient vécu en Loge? Mais, quelque part, on peut les excuser. La morale ne s'impose pas, même avec des serments. Elle est la manifestation naturelle d'un éveil intérieur qui induit un sens des responsabilités. Un homme est juste dans la conjugaison des deux colonnes : la miséricorde et la force. Pour cela, il faut qu'il les maîtrise.

- L'idéal maçonnique fut en général un désir libertaire et moralisateur, dont les vertus ont eu des résultats indéniables; mais ces bonnes intentions furent souvent récupérées par des enjeux politiques qui les ont détournées de leur but réel. La Sagesse est au-dessus. Dès que l'intérêt d'un individu ou d'un clan se glisse dans une décision, peu d'hommes et de femmes sont capables de prendre le recul du Maître.

Le destin maçonnique

Le changement des mentalités implique un bilan de soi, pour la personne comme pour les Ordres initiatiques. On peut constater l'éclosion de deux tendances contradictoires, mais liées :

- la chute des qualités morales de beaucoup de nos contemporains occidentaux, au sein d'une augmentation de l'insécurité de nos personnes, de nos emplois, de la famille qui explose.

- l'apparition à contrario pour d'autres, d'une prise de conscience d'un niveau plus élevé des lois de la Nature sur tous les plans, et d'une soif de connaissance réelle qui amorce l'Ere nouvelle. On risque donc d'assister à une séparation des extrêmes, plus marquée, mais également génératrice de courants spirituels de haute volée. C'est aussi dans cette atmosphère contrastée que le milieu de l'Ere des Poissons appelé pour cette raison, le Moyen Age, a vu l'éclosion des mouvement templiers, ou cathares, comme d'un désir de retour au sources de certains moines catholiques pour l'Occident, dans une quête d'Esprit que l'on appelait alors l'Église du Paraclet. Ces groupes visionnaires, très modernes, préfiguraient les mouvements du XXIème siècle, mais dans un cadre aujourd'hui dépassé.

Il y a donc, en ce tournant de l'Ere nouvelle, que nous avons la chance ou plutôt la responsabilité de vivre, un choix que nos maîtres passés, sur leurs bûchers, on prédit, et pour lequel ils sont morts afin de constituer le germe astral de cette renaissance. Il m'apparaît, pour nous, Francs Maçons, donc Maçons libres, qui avons eu l'intelligence de comprendre l'importance de la conjugaison des complémentaires, hommes et femmes, que la situation est extrêmement simple :

- ou notre mouvement sera le reflet bien pensant de la Société avec des effets très limités;

- ou nous prendrons sur nos épaules la charge que l'on nous offre et qui risque de faire reculer plus d'un: vivre une aventure spirituelle. Marconis de Nègre,

comme l'indiquait notre T\ C\ Sœur Crl\ Frs\ dans notre dernier numéro de " khalam ", mettait l'accent sur notre triple filiation d'inspiration égyptienne, de l'Ordre du Temple et des Chevaliers de la Rose+Croix d'Orient. C'est tout un programme! En sommes-nous capables ?. Notre époque ne se contente plus de croyances  dogmatiques. Elle veut remonter aux sources. Elle veut toucher, elle veut savoir, pour se faire une opinion et répondre à ses aspirations. Ce n'est plus le temps des formules ronflantes et réconfortantes. Elle veut atteindre l'essentiel car elle en a besoin. Les enjeux sont là. Beaucoup ont masqué leur ignorance dans un attachement affiché à la forme. C'est normal quand on ne connaît pas le fond. Bien des formes ont mal vieilli en Maçonnerie! Nous avons besoin de l'Esprit, et de vivre dedans... pas avec, dedans. Ceux qui auront la témérité de s'attacher à cette quête seront les promoteurs de l'avenir maçonnique. Le passé sonne juste quand il donne un enseignement. Le reste est de la nostalgie respectable, certes, mais ne participe pas au mouvement    du monde.

Nul ne fera revivre les templiers; nul ne sera à nouveau cathare! Mais leur attitude intérieure, leur réponse humaine, leur aventure initiatique, sont elles, éternelles. Tous ces Ordres possédaient de grands savants qui avaient su trouver le chemin difficile du cœur et du dépassement de soi. Le sentier initiatique est différent de l'idée que s'en fait l'Apprenti. Il est beaucoup plus dur, et infiniment plus beau. Il existe des horizons qui bouleversent l'âme. Il existe des élans que nulle médiocrité ne peut retenir. Il existe une joie que rien ne peut contenir. Il existe des infinis qui sont faits pour être vécus, et que seul le silence peut exprimer. Notre monde à venir a besoin d'initiés, comme tous les mondes, et toutes les époques. La seule différence, est qu'aujourd'hui, nous pouvons participer ou refuser de participer à un élan dont l'Humanité a terriblement besoin. L'enjeu est cette fois-ci, mondial, et peut impliquer de nombreux siècles à venir.

En conclusion, plusieurs formes de Maçonnerie véritable sont complémentaires :
- l'humanisme
- la philosophie
- l'ésotérisme.

Je me permettrai alors de faire un voeu, devant cette porte, la porte d'un nouveau Temple à bâtir: OSONS. Voyons loin dans l'Avenir, et que le Grand Architecte nous vienne en aide.

J'ai dit, mes Très chères Sœurs, mes Très cher Frères, dans le partage de l'Amour et du Courage, sur le chemin du juste Milieu.

Frère J\  M\ 

Publié dans le Khalam - Bulletin N° 2 - Mars 2000

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