GLMFMM Bulletin : Khalam 10/2010

…Que venu en épervier, je sorte en phénix

T\R\M\, et vous tous mes SS\ et FF\ VV\ MM\ en vos grades et qualités. Le travail que je vous présente en ce 30e jour du 11e mois de l'an­née de Vraie Lumière 3301 a pour thème une invocation du futur M\ lors de sa Cérémonie d'Exaltation : “É venu en éper­vier, je sorte en Phénix.”

Nous avons là une phrase typique de notre Rituel au R\A\P\M\M\ Un oiseau du règne animal symbolisant un état d'avant, mais déjà évolué, et un animal mythique symboli­sant l'état d'après. Mais avant quoi et après quoi ? Pour ma part, je dirai que l'axe Janussien est le relèvement par la Griffe du M\ du nouvel être par l'un de ses pères.

Je débuterai ce travail par une présentation de la symbo­lique classique de ces deux enti­tés et commencerai par l'épervier (qui est quasi identique à celle du faucon, plus familière à nos usages égyptiens).

Moins noble que le faucon, l'épervier est, dans notre lan­gage, un symbole d'usure, de rapacité. Oiseau chasseur et agressif, il désigne aussi fré­quemment la fonction mascu­line et le pénis. En Égypte, l'épervier était l'oiseau d'Horus, donc emblème solaire. Il repré­sentait tous les pouvoirs du soleil. Faisant pleinement partie de la faune terrestre, ce rapace en symbolise la partie hillyque de l'être, faite de chair et d'os, aux instincts aussi acérés que ses serres, avec cependant en lui toutes les qualités lui per­mettant de se comparer à un Dieu. C'est son aspect dual en toute sa splendeur.

Seuls les nobles pouvaient disposer de cet animal et sa domestication était connue sous le terme de fauconnerie. Ce­pendant, par l'épervier, nous ne sommes plus des animaux ram­pant, nous sommes des éper­viers, volant plus proche du soleil que jamais et ne pouvant s'en approcher d'avantage. Être soi, sans l'espace, être soi, hors du temps. Voilà la délivrance des deux premiers degrés d'App\ et de Comp\ nous préparant à la Maîtrise.

Ainsi devrait se comprendre la métamorphose en oiseau, dont le vol abolit l'espace où l'homme étouffe. Et d'après le texte de Sarcophages :

Je suis un Faucon séjournant Dans la splendeur de la Lumière ... et je rajouterai : sans en être la Lumière...

Le Phénix, quant à lui, est un animal mythique, d'origine éthio­pienne, d'une splendeur sans égale, doué d'une extraordinaire longévité, qui a le pouvoir, quand il le désire, de se consumer et de re-naître de ses propres cen­dres.

Le Phénix est, dans l'Égypte ancienne, le symbole des révo­lutions solaires. Il est également appelé par les Égyptiens Bennou, qui était associé au cycle quoti­dien du soleil et au cycle annuel des crues du Nil : d'où son rap­port avec la régénération et la vie. Cet oiseau magnifique se levait aux aurores avec les eaux du Nil, comme le soleil ; la lé­gende le fit se consumer et s'éteindre comme le soleil dans les ténèbres de la nuit, puis re­naître de ses cendres.

Le Phénix évoque le Feu, principe à la fois créateur et destructeur dont le monde tient son origine et auquel il devra sa fin. Il est également un symbole de résurrection, qui attend le défunt après la pesée des âmes. S'il a sacrifié aux Rites et effectué sa confession négative qui aura été jugée véridique et sin­cère, le défunt devient lui-même Phénix.

Nous pouvons aussi intégrer dans cette approche les 4 let­tres suivantes “I.N.R.I” qui sont dévoilées lors de la Cérémonie de passage au grade de Comp\ qui signifient : Igne Na­tura Renovatur Integra. Cette phrase peut être traduite par: “La Nature est intégralement renou­ velée par le Feu”, et cela nous prépare à la suite de notre par­cours maçonnique, c'est-à-dire à la Maîtrise :
... venu en épervier, je sorte en Phénix...

Voilà pour les définitions aux accents égyptiens que nous pouvons tous et toutes trouver si nous nous en donnons la peine. Cependant, il ne faut pas confondre dans nos recherches la vision égyptienne et ésoté­rique avec la vision chrétienne du Phénix.

Pour le dogme apostolique romain, le Phénix se consume sur le bûcher tous les 500 ans. Cela ressemblerait à une obliga­tion afin de purifier de quel­conques péchés établis par des hommes faibles de leur humanité.

Pour l'égyptien et le gnos­tique, le Phénix se consume lors­qu'il le désire, quand il sent le moment venu. Il se prépare un nid, puis se transforme en être de feu et de lumière afin d'éclai­rer le monde des hommes. Et ainsi, comme le dit Hermès, notre M\ :
C'est de la Lumière et de la vie qu'est né l'Homme.

N'est-ce pas un peu le rôle du maçon que d'essayer d'éclai­rer l'humanité après s'être par­fait et avoir intégré les petits et grands Mystères. On raconte que dans la cité d'Héliopolis, lieu où apparut Rê, une pierre taillée en pyramidion, appelée Be­nou, représente le premier lever de Soleil évoquant la Lumière qui éclairera les hommes tout au long de leur existence.

Nous n'avons donc pas de péchés à racheter, aucun salut à retrouver, car nous sommes d'essence divine. Nous n'avons aucun Dieu à accueillir parmi nous sous la forme archétypale d'un être anthropomorphe. Notre spécificité au R\A\P\M\M\ est d'aller à la rencontre du Divin en s'élevant, et non pas l'accueillir ici-bas.

Au risque de choquer certains, aucun V\M\ ne nous donne la Lumière, car elle est déjà en nous, il ne fait qu'alimenter cette braise symbolique, et cela est déjà énorme, car il pourrait étein­dre ce feu au lieu de le nourrir. Rappelons-nous de cette phrase de notre Rituel lors de la confes­sion négative :
La flamme de l'intelligence, jamais je ne l'ai soufflée .

Tout est dans la mesure. Nous devons simplement faire nôtre les trois vertus du M\, à savoir : la Foi, l'Espérance et la Charité, qui peuvent éventuellement se résumer par un don de soi, tout comme le Phénix se consumant.
... venu en épervier, je sorte en Phénix...

Naître en épervier et mourir en Phénix, puis renaître, mais cette fois-ci en Phénix. Recevoir cette énergie et la rendre à l'Uni­vers. Le vivant participe en détenant sa part de la forme cosmique ; et le mort communie en retournant à l'océan où tour­billonne l'énergie.

Si l'homme veut connaître déjà en cette vie la force univer­selle et cosmique, et ce de manière directe, il devra s'ini­tier, c'est-à-dire recevoir le tré­sor d'expérience des écoles de mystères. Car on n'est pas ini­tié, on s'initie soi-même. C'est le désir dont je vous entretenais plus haut. Tout comme il est indi­qué dans un chapitre des Textes des Pyramides :

O Soleil !
Lorsque tu t'élèveras,
semblable à la montagne
Et lorsque tu brillas,
tout pareil au Phénix

Pour étayer l'évolution de l'épervier “dual” au Phénix “Un” cosmique, je prendrai deux exemples purement maçon­nique et de teneur symbolique.

Je me baserai sur le bestiaire maçonnique qui se compose du Coq, qui est le symbole de l'Éveil et est lié à l'App\, de l'épervier, symbole de quête des cimes, mais encore terriblement “ma­tière” qui est, lui, lié au Comp\, et enfin du Phénix qui a atteint l'Unité quand il s'enflamme à sa convenance par le don de soi.

Le second exemple se trouve sur nos Naos : l'enlacement de deux des trois joyaux de la Loge, à savoir le compas et l'équerre. Lorsque nous travaillons au grade d'App\, l'équerre se trouve au-dessus. L'équerre avec ses ailes fixes sur le compas, ressemble au Coq qui ne peut voler. Puis, lorsque nous travail­lons en Chambre de Comp\, le compas aux ailes mobiles enlace l'équerre aux ailes fixes, nous sommes dans la dualité de l'éper­vier, l'Esprit et la matière sont égaux. Et enfin, lorsque nous tra­vaillons en Chambre du Milieu, le compas aux ailes libres est au-dessus de l'équerre pour arri­ver à la symbolique du Phénix lié au M\ pur et ne faisant qu'Un avec l'Univers.

Pour continuer mon travail, je désirerai vous citer intégralement le chapitre 83 du Livre pour la sortie au jour des Anciens Égyp­tiens s'intitulant :

Formule pour prendre l'aspect d'un Phénix :
Je me suis envolé comme un Dieu primordial, je suis venu à l'existence comme Khepri, j'ai poussé comme une plante, je me suis caparaçonnée comme une tortue. Je suis le fruit de chaque Dieu Je suis la septième des sept uréus (sept : chiffre du M\) qui se trouvent à l'Occident, l'Horus qui se rend lumineux lui- même, ce Dieu qui a jugé contre Seth, le Thot qui fut entre eux dans ce jugement du Chef de Létopolis (cité dont le dieu est Horus) avec les Âmes d'Helio­polis, l'eau qui fut entre eux. Je suis venu en ce jour, étant apparu dans la procession des dieux. Je suis Chonsou (Dieu lunaire signifiant le Voyageur), celui qui s'oppose aux seigneurs.” Qui­conque étant pur et connaît cette formule, peut sortir au jour après sa mort et prendre les aspects que son cœur peut désirer pren­dre ; c'est parmi les suivants d'Ounnefer (autre nom d'Osiris), qu'il peut se repaître des nourri­tures d'Osiris, avoir l'offrande funéraire, voir le disque solaire, être prospère sur terre auprès de Rê, et justifié auprès d'Osiris, et aucun mal n'a pouvoir sur lui. Cela a été véritablement effi­cace des millions de fois.

J'ai tenu à vous le lire dans son intégralité pour faire un lieu plusieurs fois millénaires entre le Phénix et le Cérémonie d'Exal­tation à la Maîtrise, dont je suis de plus en plus certain que nous devrions la nommer INITIATION.

Certes, pour la plupart des Francs-Maçons, l'initiation se déroule lors de la Cérémonie de passage d'état de profane à l'état d'App\ Nous, nous dénom­mons cette cérémonie : RÉ­CEPTION. La vraie initiation, celle de la re-naissance après le tré-pas, est lorsque la S\ ou le F\ devient M\, avec toute la symbolique que je ne vous ferai pas l'affront d'énumérer devant vous ce soir.
... venu en épervier, je sorte en Phénix...

J'ai dit,

Le 15 mars 2010
Paul Guglielmi, Maître,
Respectable Loge l'Étoile d’Égypte, Orient de Marseille

Publié dans le Khalam - Bulletin N° 32 - Octobre 2010

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