GLDF Revue : Points de Vue Initiatiques 1T/1972

Ce qu’est la Franc-Maçonnerie
L'Homme, devant l'Univers, s'interroge...

De nombreux historiens affirment que la Franc-Maçonnerie a été créée le 24 juin 1717, ce qui est à la fois inexact et vrai.

Cela est vrai si l'on établit par là qu'à cette date précise quatre Loges, pour la première fois, s'assemblèrent et que la forme et les règlements qu'elles se donnèrent à cette occasion s'étendirent ensuite sur le monde entier.

Mais cela est inexact à coup sûr si cette précision laisse sup­poser que la Franc-Maçonnerie n'existait pas en France auparavant.

La date du 24 juin 1717 n'est donc pas celle d'une création essentielle, elle est celle d'un aménagement fédératif.

La Franc-Maçonnerie a une histoire d'une plus considérable durée et ce vieux passé maçonnique a, de tous temps, passionné les érudits. Comme il soulève bien des problèmes, il a permis l'éclo­sion de nombreuses hypothèses.

Pour bien comprendre l'action soit d'un individu, soit d'une ins­titution cohérente, il semble nécessaire de se pencher d'abord sur les éléments nutritifs de l'espace et du temps qui les ont constitués et animés le plus directement.

Cette méthode paraît être la seule qui conduise à la découverte, dans les œuvres individuelles ou collectives, de la marque puissante des contingences historiques, sans pour autant qu'elle amène à minimiser le rôle du libre arbitre de ceux des hommes qui travaillent à engranger en eux les expériences pour mieux pouvoir s'accomplir en vertus.

Cette méthode, au surplus, illumine plus que toute autre, par- delà les lieux et les âges, les croyances et les doctrines, les races et les climats, l'unité, la continuité du principe constructif de la vie universelle, et donc les thèmes d'une pensée spécifiquement humaine.

En effet, plus l'on progresse dans la connaissance du passé, plus l'on découvre les points d'insertion d'où les nouvelles doctri­nes, parussent-elles typiquement originales ou révolutionnaires, découlent tout bonnement de certaines qui les ont précédées.

Si donc, pour reprendre une expression fameuse de Renan, il y a des « miracles » en histoire, entendons qu'elle comporte des moments surprenants qui forcent l'admiration et non pas des com­mencements absolus, phénomènes irrationnels et sans cause per­ceptible.

De commencement absolu, il n'y en eut qu'un, mais avant l'His­toire et ce n'est pas ici notre propos.

Penchons-nous seulement sur l'homme, ce complexe d'âme sensitive et de matière périssable, cherchant douloureusement son équilibre entre la pulsation de ses désirs et les commandements ordonnés de l'esprit, non pas sur l'individu contingent, mais sur l'être humain, en général, tel qu'il nous apparaît, orienté, depuis l'aube des temps, sur la route royale de la connaissance, cher­chant à s'alléger de tout ce qui arrête son élan vers le concept de l'Universel.

Pour qui veut observer, en effet, ce qui domine la diversité des civilisations, c'est cette identité foncière dans l'essence et le fonc­tionnement de l'esprit, cette inextinguible soif de comprendre que porte en lui l'humain, « ce sel de la Terre ».

Mais il y a plus, l'homme n'est pas seulement un animal pen­sant, il est aussi social et, par-là encore, vise à l'universel :

Il n'a cessé, depuis les temps les plus reculés, de parcourir les distances les plus difficilement imaginables, en quête d'échanges spirituels ou matériels, de clients ou de disciples, de confrontations et de discussions. Un brassage continu a ainsi répandu dans les métropoles du monde antique les caractères particuliers dont cha­cune d'elles portait le fruit.

Que pourrions-nous donc trouver de surprenant dans la consta­tation de la continuité, à travers les pays et les siècles, des thèmes de pensée spécifiques à l'homme, méditatif et propagandiste à la fois ?

LE NOMBRE
EN TANT QUE PRINCIPE DE L'ENTENDEMENT
ROLE DE PYTHAGORE

Sur ce terrain mouvementé de l'Histoire, voulez-vous que nous allions reconnaître quelques jalons propres à faire décou­vrir la voie de la tradition maçonnique ?

C'est en Egypte que nous irons d'abord.

Les traductions de hiéroglyphes qui remontent jusqu'à la qua­trième dynastie nous donnent l'assurance que les prêtres de ce pays invoquaient un Dieu unique, sans aucun caractère mythologi­que et anthropomorphique, principe de toute morale et de tout bien, ordonnateur de toute chose. L'une d'elles le décrit en ces termes, remarquables à plusieurs titres :

« Il est celui qui n'a pas de nom, l'Eternel ;

Celui qui est caché et dont on ne connaît pas la forme, trop mystérieux pour que sa gloire puisse être révélée, trop grand pour être scruté, trop puissant pour être connu ; celui qui s'est produit lui-même, qui leva la tête hors du chaos et qui a créé avec ce qui est sorti de sa bouche. »

Si les papyrus révèlent ceci, mieux encore s'exprimaient certai­nement les traditions orales, plus librement transmises de maîtres à disciples dans un culte secret.

Or, disaient ces maîtres, c'est de cette notion d'unité absolue, c'est-à-dire de l'Univers qui contient tout, que découle la notion du nombre, et donc celle de toutes les sciences. En effet, chaque aspect particulier et analytique de l'Univers n'est qu'une division de ce dernier, et par conséquent un nombre.

De même, les phénomènes naturels sont tous soumis à des lois, lesquelles se ramènent à des coefficients, c'est-à-dire à des nombres.

Dès lors, le nombre est à la racine de l'Univers manifesté.

Ces propositions, de tonalité si moderne, vous les trouverez cependant dans les antiques livres sacrés de l'Inde et de la Chine, d'Egypte et de Chaldée, dépositaires des plus anciens enseigne­ments de l'esprit et pour l'usage secret de ceux qui y avaient accès

Pythagore

Tel est l'essentiel de ce que Pythagore ramena d'Orient en Hel­lade, avec la foi en l'immortalité de l'âme, la valeur magique du Verbe, de la forme, du signe, du symbole, du rite, du rythme, de la sensation, la foi aussi en l'utilité des régimes théocratiques, « aussi éloignés du gouvernement d'un seul que de celui de la foule aveugle

Chacun sait que ce qu'enseignait cet incomparable génie, plus de cinq siècles avant notre ère, requérait des années d'études pour ses adeptes.A

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Publié dans le PVI N° 5 - 1éme trimestre 1972  -  Abonnez-vous : PVI c’est 8 numéros sur 2 ans

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