GLDF | Revue : Points de Vue Initiatiques | 2T/1976 |
Propos sur la Saint JeanDans nos anciens
Rituels, on demandait au visiteur qui se présentait à la porte d'un Temple : «
D'où venez-vous ? » — et il devait répondre : « De la Loge de Saint Jean ».
Pourquoi Loge de Saint Jean ? Que dire de Saint Jean qui n'ait déjà été dit et
redit. Essayons cependant. Saint Jean, Patron
des Francs-Maçons ? Mais d'abord quel Saint Jean ? Est-ce Saint Jean-Baptiste,
dit « le Précurseur », celui qu'on fête au Solstice d'Eté ? Saint Jean
l'Evangéliste, dit a l'Apôtre », que l'on fête au Solstice d'Hiver ? Et
pourquoi pas Saint Jean l'Aumônier, dit « L'Hospitalier », dit « Saint Jean de
Jérusalem » ? Et remontant plus
avant dans le temps, est-ce que Janus, Janus Bifrons, le Dieu Romain aux deux
visages ne peut pas les synthétiser ? Saint Jean
l'Aumônier, dit l'Hospitalier, dit Saint Jean de Jérusalem, fils du Roi de
Chypre, alla à Jérusalem prodiguer les secours aux Croisés, pélerins et
Chevaliers, et relever les Temples renversés par la Barbarie. A ce titre de
reconstructeur des Temples, il peut être considéré — et il l'a été par certains
— comme l'Ancêtre, le Patron des Francs-Maçons. Mais la Franc-Maçonnerie n'est
pas seulement bienfaisance et construction. Elle est aussi, elle est surtout,
élévation spirituelle. Alors, si Saint Jean l'Aumônier ne nous suffit pas,
voyons Saint Jean-Baptiste. Jean-Baptiste, dit
le Précurseur, celui qui est fêté au Solstice d'Eté, celui qui baptise par
l'eau, qui évoque le Bleu, couleur de nos Loges Symboliques. En hébreu, Jean se
dit « Hanan », ce qui signifie à la fois miséricorde et louange. Si l'on veut
bien considérer que la miséricorde est descendante (de Dieu vers l'Homme),
alors que la louange est ascendante (de l'Homme vers Dieu), nous pouvons
admettre que le Baptiste qui est fêté au Solstice d'Eté, alors que le soleil, à
son apogée se prépare à redescendre, symbolise la miséricorde. Les Manuscrits de
la Mer Morte nous ont appris, sans aucun doute possible, que Jean-Baptiste
appartenait à la secte des Esséniens, cette secte juive rigoriste dont l'idéal
était fait de bonté, de vertu, de justice, d'ascèse et d'humilité, — en un mot
de ferveur spirituelle. Les Esséniens
pratiquaient le baptême par l'eau, baptême non chrétien évidemment, sans
rémission des pêchés. Il impliquait une rupture avec l'existence passée et une
naissance à une existence nouvelle. C'était donc une Initiation. C'est parce qu'il
baptise par l'eau que le Baptiste est le Précurseur. Il prépare le chemin, il
est l'Annonciateur, il est la Voix ; alors que l'Evangéliste sera la Parole. Il dit : « Je
vous baptise par l'eau, mais en viendra un autre, plus puissant, qui vous
baptisera par le feu. » Notons enfin que
Saint Jean-Baptiste est représenté dans l'Eglise Saint-Jean de Latran de Rome
entouré de sept cerfs d'argent, représentant les sept dons de l'Esprit Saint
reçus avec le Baptême — et souvenons-nous que pour qu'une Loge soit « juste et
parfaite » et puisse recevoir et initier un profane, il faut au moins sept
Francs-Maçons. Ce chiffre 7, nous
le retrouvons chez Saint Jean l'Evangéliste, puisque son Apocalypse est
représentée scellée de sept sceaux. — Saint Jean
l'Evangéliste est l'Apôtre. Alors que le Baptiste était le Précurseur, lui, il est
le Témoin. Alors que le Baptiste baptisait par l'eau (bleue), lui il baptise
par le Feu (rouge). Le Feu purifie, non plus en lavant, mais en consumant les
éléments nuisibles. Souvenons-nous d'Hercule, purifié par le feu de la tunique
de Nessus, et de Saint Jean l'Evangéliste lui-même, sorti indemne de l'épreuve
de l'huile bouillante. Le Feu est l'élément capital, l'élément primordial de
toutes les Initiations. Le Baptiste, lui- même, nous l'avons vu, a dit «
Viendra un plus puissant que moi qui baptisera par le Feu. » Evangéliste, son
Evangile est l'Evangile de l'Amour et de l'Esprit. Souvenez-vous du premier
verset : « Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la
Parole était Dieu. » Et souvenons-nous aussi qu'au Rite Ecossais c'est à cette
page de l'Evangile de Saint Jean qu'est ouverte la Bible pendant les Travaux. Alors que le
Baptiste est fêté quand le soleil est à son apogée et s'apprête à redescendre,
l'Evangéliste, lui, est fêté au Solstice d'Hiver, quand le soleil est au plus
bas et s'apprête à remonter, comme la Louange de l'Homme remonte vers Dieu —
deuxième signification, nous l'avons vu, du nom « Hanan » en hébreu. La Lumière va
réapparaître à l'Initié. Symbole de cette
Lumière, Jean l'Evangéliste est
souvent représenté tenant un vase sacré —
référence au Graal — d'où sort un
serpent, symbole de la Lumière et de la Connaissance. Saint Jean
l'Hospitalier, Saint Jean l'Evangéliste, Saint Jean- Baptiste, remontons dans
le temps, voulez-vous, et nous allons rencontrer Janus, Janus, le Dieu au
double visage, le Dieu romain, des « Collegia Fabrorum », c'est-à-dire des
corporations d'artisans, ancêtres des Compagnons. Il faut souligner que c'est
en son honneur, en l'honneur de Janus, que les Romains célébraient les deux
fêtes solsticiales, d'hiver et d'été. Janus est le «
Clusius », c'est-à-dire le porteur de clefs, celui qui ouvre. Ovide dit que
personne n'entre aux Cieux si Janus ne lui ouvre la porte. N'est-ce pas là la
définition de l'Initiant ? Janus peut-il être
considéré comme l'ancêtre des deux Saint Jean ? A l'Eglise Saint-Rémy de Reims
un vitrail représente les deux Saint Jean— le Baptiste et l'Evangéliste — en
une seule figure, sorte de Saint Jean synthétisé, de Janus chrétien, et la
fusion des deux Saint Jean est soulignée par la présence au-dessus de la tête
de deux tournesols dirigés en sens opposé, vers les deux solstices. Les Maçons
opératifs représentaient les deux Saint Jean par un cercle pointé portant deux
tangentes parallèles diamétralement opposées, les points de contact des deux
tangentes avec le cercle représentant les deux solstices. Mieux encore, un
bois gravé de « l'Azoth », ouvrage de l'alchimiste Basile Valentin,
représente, aux pieds d'Atlas portant la sphère cosmique, un buste de Janus et
un jeune enfant épelant un alphabet. Le symbolisme n'est-il pas évident de
Janus devant le Cosmos, donc Initiant, et de l'Apprenti « qui ne sait qu'épeler
» ? Cette Fête de la
Saint Jean (d'Eté), ou plus précisément encore cette fête de Saint
Jean-Baptiste rassemble traditionnellement chaque année les Francs-Maçons de
Rite Ecossais. Sommes- nous réunis comme certaines confréries pieuses pour nous
délecter du passé pour mieux médire sur le présent, sommes-nous amateurs de
folklore et de retraite au flambeau ou encore de kermesse utilitaire quant à
nos relations mondaines ? Certainement pas, la vie est courte et les
constructeurs que nous voulons être, ne sauraient perdre ainsi leur temps.
Fêter la Saint Jean nous plonge certes, nous autres Francs-Maçons dans le passé
et dans la tradition mais ce afin de travailler dans le présent pour l'avenir
comme cela a toujours été notre vocation. On a beaucoup écrit
sur les origines de la fête de la Saint Jean et mon propos ici n'est pas de
faire oeuvre historique mais plutôt de voir ce que cette fête peut signifier
pour nous aujourd'hui. Dans la tradition
chrétienne Jean le Baptiste est considéré comme un envoyé de Dieu. Il vient,
dit le quatrième Evangile, « pour servir de témoin, pour rendre témoignage à la
lumière, afin que tous crussent par lui. Il n'était pas la lumière, mais il
parut pour rendre témoignage à la lumière ». Notre tradition
maçonnique ajoute des éléments intéressants quant au rôle de Jean le Baptiste.
Il me suffira de rappeler Oswald Wirth l'un de nos maîtres voyant en lui « le
précurseur immédiat de la lumière rédemptrice et du Christ scolaire. Et il est,
ajoute-t-il, l'aube intellectuelle qui, dans les esprits précède le jour de la
pleine compréhension. Apre et rude sa voix retentit à travers la stérilité du
désert, éveillant les échos endormis. Ses accents véhéments secouent les
mentalités rebelles et les préparent à saisir les vérités qui doivent être
révélées. » Ainsi cet homme que
nous fêtons aujourd'hui, cet homme qui ne prétend pas être la Lumière, mais
simplement son témoin ou encore un précurseur préparant les autres à la
recevoir, cet homme- là me semble être le type même de Franc-Maçon. Un Franc-Maçon en
effet ne prétendra jamais qu'il est la Lumière, c'est-à-dire qu'il détient la
Vérité. Notre Ordre n'est
pas une Eglise. D'ailleurs quelle Eglise aujourd'hui oserait dire qu'elle
détient la vérité et ce pleinement et totalement, comme une propriété dont elle
pourrait disposer à volonté. Les secousses qui déchirent de plus en plus les
Eglises chrétiennes ont amené celles-ci à plus de réalisme et à plus de
modestie. Et même si elles proclament (comme c'est leur droit), qu'elles
détiennent une certaine partie de la vérité, la plupart d'entre elles le font
maintenant avec humilité, conscientes qu'elles sont de la relativité des
formulations dogmatiques. Sauf pour quelques intégristes attardés, ç'en est
donc fait du triomphalisme ecclésiastique qui prétendait monopoliser la
lumière. Cette Eglise de jadis, si d'aventure elle voulait réapparaître, la
Franc-Maçonnerie la combattrait car elle déshonore ce que ses fidèles appellent
Dieu en le limitant ; elle déshonore aussi l'homme en aliénant sa liberté. La
détention absolue de la vérité est une prétention dangereuse, qu'aucune
institution ne doit avoir. La Franc-Maçonnerie écossaise ne l'a pas, pas plus
qu'elle n'est prête à accepter que d'autres revendiquent ce privilège. C'est
pour cette raison que notre Ordre ne saurait s'accommoder d'un régime
totalitaire, quelle que soit sa tendance. Il ne pourrait y avoir qu'une
entreprise de destruction de l'homme tel qu'il le conçoit ainsi qu'une
destruction des libertés essentielles sans lesquelles un homme digne de ce nom
ne peut vivre. Et l'histoire nous a appris que ces atteintes aux droits de la
personne comme aux libertés sont toujours le fait de fanatiques politiques ou
religieux se croyant seuls détenteurs de la vérité. Comme tout homme éclairé le
Franc-Maçon ne peut qu'être un témoin de certaines vérités, c'est là en
particulier un des premiers exemples fourni par la personne de Jean le
Baptiste. Il serait
intéressant de voir maintenant ce qu'était l'action de Jean le Baptiste, telle
qu'elle nous est rapportée par la tradition. Son message est
tout entier tourné vers la repentance, vers le retour sur soi-même, vers une
remise en question radicale, le tout symbolisé par la purification par l'eau,
conduisant à la rencontre de Dieu. Aussi je ne puis m'empêcher de penser au «
Connais-toi toi-même », une des plus belles maximes philosophiques éclairant
notre Ordre Maçonnique. En effet comme
l'écrit le Philosophe Léon Brunschwig (Le progrès de la Conscience). « Un fait
s'est produit au Ve siècle avant Jésus-Christ. Un appel à la conscience de soi
qui devait marquer d'une empreinte indélébile le cours de notre civilisation ».
Le précepte socratique « Connais-toi toi-même », qui, nous dit-on, figurait au
fronton du Temple de Delphes et qui fut repris par Socrate, ne saurait
seulement consister en une sorte de technique de l'introspection visant à faire
l'inventaire de nos tendances et de nos aptitudes, non plus à procéder à une
enquête dont on pourrait voir le prolongement dans ce que l'on appelle de nos
jours les sciences humaines. Le « Connais-toi toi-même » socratique est et
veut être plus que cela. Il dépasse la sphère de notre individualité et
débouche sur la personne. Il s'agit de prendre conscience de ce qu'il y a
d'essentiellement vrai dans la condition de l'homme. Il s'agit de prendre
conscience de ce qui en tout homme dépasse l'homme lui-même et lui donne un
sens et le fonde, c'est-à-dire l'Esprit lui-même. Plus que psychologique, la
signification du « Connais-toi toi-même » nous apparaît comme éthique et
métaphysique car il s'agit pour Socrate comme pour tout Franc-Maçon de
découvrir en l'homme la valeur qui le fonde. Il s'agit pour Socrate comme pour
tout Franc-Maçon de faire et de refaire sans cesse le bilan de lui-même,
c'est-à-dire de se situer par rapport à cette valeur. Et ce message de Socrate
vieux de deux mille cinq cents ans nous paraît plus que jamais actuel. L'homme
de notre temps comme l'homme de tous les temps doit de son propre effort
refaire lui-même son chemin vers la lumière que nul ne peut faire pour lui et
dont nulle technique aussi avancée soit-elle ne saurait le dispenser. Et quel est
le chrétien sincère, fréquentant nos Loges ou non, qui osera nous dire qu'un
tel principe n'est pas conforme à sa foi et n'est pas un des éléments
essentiels de ce qu'il peut appeler son examen de conscience ? Et cela est
valable pour tous les esprits religieux. Quel est l'humaniste réfléchissant
honnêtement sur la nature humaine qu'il soit maçon ou non qui oserait qualifier
d'obscurantiste une pareille démarche de l'esprit ? Qu'on parle d'une
forme de repentance devant un Dieu personnel et révélé ou encore de remise en
question de soi-même par rapport à l'ordre universel que la méditation
personnelle fait percevoir ne s'agit-il pas au fond des mêmes démarches, des
démarches de progrès que Jean dans l'Evangile appelle le témoignage rendu à la
lumière et que la Franc-Maçonnerie appelle aujourd'hui la recherche perpétuelle
de la vérité. En effet, il n'est
pas de sagesse initiatique qui ne passe par un sérieux retour sur soi-même et
une sévère remise en question de ses pensées. C'est à cela que tend avant tout
l'initiation maçonnique. L'homme qui chercherait d'abord à vouloir changer la
société avant de se changer lui-même, l'homme qui s'attaquerait à ce qu'on
appelle les structures avant de se regarder d'un œil critique, celui- là
risquerait de rester toujours dans les ténèbres et de ne jamais trouver la voix
de la lumière tracée par Jean. Car Jean dans sa
prédication sévère ne renverse pas la société de son temps ni son ordre. Dans
la Palestine occupée à l'époque par les Romains cet ordre était symbolisé par
deux éléments fondamentaux, l'armée et les publicains, collecteurs d'impôts.
Et vous imaginez aisément comment ces deux institutions pouvaient paraître
tyranniques et injustes. Aux publicains qui viennent vers lui Jean dit : «
N'exigez rien au-delà de ce qui vous a été ordonné », aux soldats qui lui
demandent ce qu'ils doivent faire Jean répond : « Ne commettez ni extorsion ni
fraude envers personne, et contentez-vous de votre solde. » Jean ne renverse
donc aucune institution établie car il sait qu'elles sont nécessaires à la vie
de ce monde ; il veut simplement d'elles qu'elles fonctionnent conformément à
la raison et à la justice. De même Socrate, évoqué tout à l'heure à propos du «
Connais-toi toi-même », sait accepter les institutions de ce monde et, alors
qu'il vient d'être condamné injustement par la cité et que ses amis le pressent
de s'enfuir, il déclare dans l'admirable Prosopopée des lois : « Si je
m'échappais, si je m'enfuyais comme un esclave puni par son maître ne crois-tu
pas que les Lois viendraient me trouver et me diraient : « En ne te soumettant
pas au décret, Socrate, sais-tu que nous les lois, tu nous détruis, et que tu
renverses la Cité qui est fondée sur les Lois ? Oublies-tu que parmi nous il en
est une qui est la première de toutes, c'est celle qui impose à tous les
citoyens d'obéir aux décrets qu'ont pris les maîtres de la cité démocratique ?
Tu diras que tu as été condamné injustement, que le décret des juges est
inique. As-tu le droit de choisir entre les lois de ton pays celles qui
paraissent te nuire ? Tu dois à ces lois la liberté de ton père et de ta mère,
ton éducation, ton instruction, mais parce qu'il en est une qui t'envoie à la
mort tu voudrais les transgresser ? Si tu faisais cela, la cité périrait. » Faudrait-il classer
Socrate dans la catégorie des résignés ou de ceux qui se veulent étrangers à la
cité ? Ce serait une grave erreur. Car il proclame en face des sophistes et des
politiques (nous dirions aujourd'hui des démagogues) qu'il est au contraire un
des rares athéniens qui s'attache au véritable art politique et qu'il est le
seul à le pratiquer aujourd'hui (Gorgias). En effet il est celui qui dans la
cité ne cherche que la vérité et qui subordonne tout à cette recherche ; il est
celui dans la cité qui ne veut parler et agir qu'en vue de la justice. Il est
le seul dans la cité qui de toute son âme s'efforce à rendre les citoyens aussi
parfaits que possibles. Rendre les citoyens, rendre les hommes aussi parfaits
que possible. Voilà pour Socrate le véritable art politique, la fin de toute
politique digne de ce nom. Et force lui est de constater que ceux qui le
condamnent ou le condamneront n'agissent pas selon les mêmes principes et les
mêmes fins. Or n'est-ce pas là le projet fondamental du Franc-Maçon écossais ? Ne
veut-il pas comme Socrate travailler au perfectionnement moral de tout homme ?
Et travailler au perfectionnement moral de tout homme n'est-ce pas travailler
au perfectionnement de la cité, nous dirions aujourd'hui de l'humanité ? Ainsi au rôle
facile de briseur d'institutions le Franc-Maçon écossais préfère celui plus
ingrat et plus difficile de vigile de l'humanité et de la société. Il se sait
pleinement participant à l'une et à l'autre. Vouloir le nier, même par les
artifices les plus subtils comme c'est la mode chez certains intellectuels
relève pour lui de l'utopie, et la Franc- Maçonnerie n'est pas synonyme
d'utopie. Aussi, acceptant
cette humanité et cette société avec ses servitudes petites et grandes, le
Franc-Maçon cherche à construire en améliorant. Que le publicain soit honnête,
que le soldat se contente de sa solde, voilà ce qu'exige Jean. Que l'homme
fasse un retour sur lui-même, qu'il agisse le plus honnêtement et le plus
raisonnablement possible là où il est, voilà ce à quoi appelle la Franc-Maçonnerie.
Certes il se peut que ces retours sur soi opérés par ceux qui voudront suivre
cette voie, aboutissent à des changements de structures. Les Francs-Maçons ont
l'esprit suffisamment ouvert pour accepter ces changements. Cependant ceux-ci
doivent être produits par des changements profonds de l'âme humaine sous peine
de n'être que de ces sinistres farces que périodiquement certains démagogues
aiment jouer à leurs semblables. Une situation
d'humble témoin devant la lumière de la Vérité, un retour sur soi-même sans
faiblesse ni complaisance, une priorité à donner à ce retour par rapport à une
quelconque rénovation des structures qui nous entourent, voilà la triple
exhortation qui ressort du témoignage de Jean, patron des Francs-Maçons
écossais. Suivre cette exhortation c'est se donner la base spirituelle
nécessaire pour pouvoir utiliser la science sans danger pour l'humanité et
jamais le Franc-Maçon ne sera à cet égard un apprenti sorcier. Ainsi vivre d'une
manière maçonnique la Saint Jean (d'été) c'est aujourd'hui savoir assimiler le
progrès pour avancer sans crainte dans la voie de la connaissance, c'est
dépasser le folklore simplet en sachant se placer en harmonie avec les grandes
lois de la nature. Comme l'a écrit notre Frère Ragon « Ce n'est pas pour
adresser des prières à Saint Jean que nous nous trouvons réunis ; nos
cérémonies ne nous prescrivent rien de semblable et l'esprit de l'ordre s'y
oppose même puisque la Maçonnerie est indépendante des religions, qu'elle est
de tous les siècles, de tous les pays, et que la vérité n'est qu'une... Non,
mes frères, l'histoire de tous les peuples apprend qu'à pareille époque,
l'univers offre chaque année, le spectacle immense d'une seule fête : que la
maçonnerie si féconde en heureuses et sublimes allégories a dû saisir celle qui
lui offrait si facilement un des plus grands phénomènes de la nature, le
triomphe complet de la lumière sur les ténèbres. » |
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