GLDF Revue : Points de Vue Initiatiques 3T/1989

Les chemins de la Fraternité

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Suite :  2éme orateur

Michel Barat

Mesdames, Messieurs la présentation des travaux de cette demi-journée, l'esprit de cette demi-journée, va vous être faite par Monsieur Paul Laget, Professeur de Sciences, Médecin, et aussi homme de Lettres, Grand Chancelier adjoint de la Grande Loge de France, c'est-à-dire l'un des res­ponsables des relations extérieures de notre Obédience.

Paul Laget

Mes Frères, Mes Soeurs, Mesdames, Messieurs,

Le Grand Maître de la Grande Loge de France vous a présenté les person­nalités qui nous ont fait le grand plaisir et le grand honneur d'honorer cette séance je ne recommencerai donc pas car certainement je le ferai beaucoup moins bien que lui. Le concept de fraternité et certes nous le savons est devenu inséparable des deux autres termes de la devise républi­caine que les célébrations multiples du bicentenaire s'efforcent de rajeunir et de dépoussiérer. Cependant une différence essentielle existe entre cette fraternité que nous célébrons aujourd'hui et les deux autres concepts. Elle ne relève en effet que de l'ordre du sentiment et ne saurait se promulguer par décret. Elle est la seule aussi qui soit issue d'une source biologique et la notion de fraternité de sang s'est imposée probablement à l'homme dès l'aube de son existence. Cependant elle a éveillé dans celui-ci bien des pul­sions et des passions contradictoires et les textes issus des vieilles civilisa­tions nous ont convaincu que les sociétés n'ont que peu à peu et bien len­tement compris que sa signification devait mûrir et s'affirmer pour lui donner un sens universel, la débarrasser de ses connotations parfois redoutables. La Grande Loge de France dans «Ses Rencontres» et par le choix des termes s'est attachée à illustrer quelque peu cette trajectoire qui a donné au terme de fraternité le sens que nous lui donnons aujourd'hui, et qui en fait l'un des plus noble des sentiments susceptibles de s'éveiller dans le coeur de l'homme.

Le Professeur François Babinet, Doyen de la Faculté de Droit et de Scien­ces Politiques de l'Université de Strasbourg, Monsieur Henri Tort Nouguès, Passé Grand Maître de la Grande Loge de France et Professeur de Philosophie vont justement vous rappeler ses cheminements de la fra­ternité qui du sombre tragique du mythe l'a progressivement détaché sous la lumière et la raison et la philosophie, tandis qu'elle se déployait et se spiritualisait, atteignant les sommets auxquels l'ont menée l'inspiration judéo-chrétienne. Nous la retrouvons enfin rajeunie, épurée, enrichie aux siècles des lumières apparaissant dans toute sa richesse et sa profondeur au grand soleil de la liberté. Elle est ainsi pour nous telle que nous la concevons aujourd'hui fille de la pensée occidentale et de ses sources judéo-chrétiennes. C'est certainement l'une des causes pour laquelle cette notion de fraternité s'est si facilement transportée aux rives du nouveau monde avec ceux qui, utopistes, proscrits, persécutés l'avaient profondé­ment au cœur et qui souhaitaient ardemment en faire une réalité vivante.

Le Grand Maître Gamiz Fernandez, Grand Maître de la Valle de Mexico, nous rappellera tout à l'heure combien cette fraternité éclairée d'une nou­velle lumière par le travail patient et serein des Loges maçonniques, for­gée au feu des passions révolutionnaires a largement inspiré et éclairci d'une lumière moins farouche les luttes pour la liberté dans ces terres alors si lointaines pour les yeux de notre vieille Europe. Et beaucoup de ceux qui sont ici savent bien qu'il ne suffit pas de disserter avec talent de concepts abstraits fussent-ils des plus riches en connotations généreuses, mais qu'il faut aussi que ces concepts passent dans les faits et qu'ils contribuent à inspirer les actions des hommes. C'est pour cela que se tour­nant pour un jour à nouveau vers notre continent dont ils sont certes les héritiers mais aussi les porteurs d'enrichissement et d'innovations les Grands Maîtres Ricardo Noriega, Grand Maître de la Grande Loge du Pérou, Alejo Neyeloff, Grand Maître de la Grande Loge d'Argentine vont nous montrer les difficultés, les obstacles de tous ordres naturels, socio-politiques, économiques auxquels ces nations se heurtent, soeurs des nôtres et qui leurs interdisent jusqu'à aujourd'hui de connaître ce déve­loppement harmonieux et cette prospérité que la maçonnerie a toujours passionnement souhaité pour tous les hommes. C'est pour cela qu'aujourd'hui même trois Grands Maîtres sud-américains présentent le plan maçonnique péruvien et argentin qui, ils l'espèrent, adouciront quel­que peu le sort de certains des plus déshérités de leurs compatriotes.

Madame le Ministre Simone Veil a bien voulu malgré toutes ses charges et ses obligations nous consacrer un peu de son temps. Quand nous sommes venus lui demander d'honorer de sa présence nos Rencontres, nous avons été accueillis avec une infinie bonne grâce ce dont je la remercierai bien vivement au nom de tous les membres de la Grande Loge de France. Nous savons son attachement aux valeurs qui fondent la grandeur et la dignité de l'homme. Nous savons combien leur foi en elles a été forgée au sein des plus grandes et des plus terribles épreuves et combien elle a toujours ins­piré et inspire toujours son action. Cette action qui s'est d'abord inscrite dans notre pays s'est ensuite élargie aux dimensions de cette Europe, que nous espérons définitivement assagie, à la suite des tempêtes qu'elle a tra­versées, et qui aborde aujourd'hui à des rivages paisibles et plus heureux. Comme nous tous ici et tout spécialement les membres de la Grande Loge de France nous savons qu'elle partage les voeux que nous formons pour une Europe plus unie et surtout plus fraternelle. Mais aussi une Europe sans exclusive qui a conscience qu'elle serait à la fois bien égoïste et bien infirme si elle ignorait voire rejetait, ces nations aux immenses espaces qui nous sont si proches par l'ombre de leurs inspirations, de leurs traditions, de leurs cultures ; nations dont les représentants ici présents sont persuadés comme tous les maçons du monde que les valeurs qu'ils défen­dent et pour lesquelles ils luttent, en particulier la Fraternité dont ils nous traceront le chemin, ne sauraient avoir la plénitude de leurs sens si elles n'atteignaient pas aux dimensions de l'universel. Je vous remercie, Mes­dames et Messieurs.

Publié dans le PVI N° 74 - 3éme trimestre 1989  -  Abonner-vous à PVI : Cliquez ici

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