Obédience : NC Bulletin de SUB ROSA : Une Parole Circule 10/2009


L'Ego du Maçon,
une entrave à l'idéal maçonnique ?

Les membres, participants et visiteurs de la Loge de SUB ROSA ont admis d'emblée que cette question n'était pas simplement une manière de régler des comptes avec un petit nombre de Frères ou de Sœurs qui «oublient de laisser leurs métaux à la porte du Temple». Ils sont persuadés que les affec­tions telles que la cordonnite ou l'hypersen­sibilité aux titres ronflants ne sont que de rares maladies de jeunesse; ces manifesta­tions-là ne sont que des soins palliatifs à un ego mal construit, le plus souvent des compensations à toutes sortes de vexations accumulées au cours d'une vie profane.

Comme le disait la psychologue cana­dienne Michelle Larivey: « L'estime de soi est le résultat d'une auto-évaluation. Il s'agit d'un baromètre évaluant dans quelle mesure on vit en concordance avec ses valeurs. Elle se manifeste par la fierté que nous avons d'être nous-mêmes, et repose sur l'évalua­tion continue de nos actions... Celui qui s'estime a tendance à mettre en marche ses aspirations et à se développer .»

Les diverses méthodes de travail prati­quées dans la Loge SUB ROSA, à savoir que chaque Frère apporte sa contribution par un travail individuel à une recherche collective, amendée par des débats et constituant finale­ment une publication anonyme, ne pourrait- elle pas être une façon de restreindre l'égo­tisme et l'égoïsme de chacun d'entre eux ? Le groupe étant toujours meilleur que le meilleur du groupe, cela ne permettrait-il pas de magnifier l'apport de chacun ? Le travail commun les englobe tous et leur permet de s'élever ensemble. Le temps de la Tenue correspond à la mise en oeuvre d'une parti­tion symphonique interprétée par tous les musiciens, chacun à sa place, chacun à son rôle, vers ce seul objectif de sublimer l'instant fugace où tout est juste et parfait.

L'idéal, qu'il soit maçonnique ou recher­ché par d'autres voies, est indéfini. Il est le but vers lequel l'homme s'efforce de diriger ses pas. En effet, un idéal est « ce que l'on se représente comme type parfait ou modèle absolu », selon le dictionnaire Robert; il en découle une notion de quête de perfection. Une voie initiatique authentique se reconnaît aux épreuves et aux obstacles dont elle est pavée. Si l'ego peut être une entrave, il peut être aussi une chance, un moteur, puisque c'est dans cette nécessi­té de le maîtriser que la démar­che initiatique prend son sens.

On dit une fois à Socrate que « quelqu'un ne s'était aucune­ment amendé en son voyag e». Celui-ci répondit « Je crois bien, il s'était emporté avec soi ».

Effectuer le voyage initia­tique en «s'emportant avec soi» est inutile. L'ego qui fige l'esprit s'installe dans l'homme qui désire évacuer la contradiction et veut une «cohérence» ici et maintenant. Evacuer, c'est fuir, c'est déraper dans la facilité.

C'est laisser le sens s'échouer dans la signi­fication. Il faut pour avancer dans le voyage veiller à entretenir la porosité des limites, permettre les brassages, les échanges, l'écou­te, les passages, se débarrasser de son ego pour retrouver l'homme enfoui. C'est main­tenir le «possible», c'est à dire s'attendre sans cesse à être déconcerté, bousculé, éton­né par les expériences insoupçonnées qui nous attendent sur le chemin. Comme le dit Marcel Proust, « le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nou­veaux yeux ».

Ce qui se ferme meurt spirituel­lement.

L'initiation confère à la mort cette fonc­tion de préparation à la renaissance sur le plan spirituel. La sagesse nous enseigne que le mal vient de l'attachement à ce qui fut et qui nous empêche donc de voir ce qui est. L'attachement, conscient ou inconscient, à ce que nous avons été, à ce que nous avons aimé ou craint, nous impose à chaque seconde l'étouffoir du passé et nous interdit de vivre  «le vierge, le vivace et le bel aujourd'hui » si chers à Mallarmé. Faisons mourir ce mort et nous serons vivants.

Renoncer à une illusion est un acte hautement positif, une libération, et non une mutilation. En définitive, le mensonge du moi est de se donner pour un être, alors qu'il n'est qu'un avoir.

Les textes hindous suggèrent au «moi» de se dissoudre dans la vacuité du «Soi». La perte d'individualité, comme stade ultime de la sagesse ou de la connaissance, nous infor­me au moins sur un point: la nécessité d'une identité solidement forgée auparavant.

Le chemin de la libération commence par la méditation sur les outils de chaque degré et par les recherches riches d'enseigne­ment qui illuminent nos voyages. Une voie qui n'impose aucun dogme, mais qui prépare chacun à accomplir sa propre quête, telle est notre compréhension de ce que devrait être la voie spirituelle maçonnique. Nous l'appelle­rons « notre philosophie maçonnique ».

« C'est de moi autant que de lui, si lui et moi pensons de même » disait Michel de Montaigne en parlant de son ami La Boétie.

Il faut donc que brûle en nous ce que nous voulons allumer chez les autres :
    Que doit-il brûler en nous ?
    Que voulons-nous allumer ?
     Ce que nous voulons allumer chez les autres brûle-t-il en nous ?

SUB ROSA a dit.

Publié dans le Bulletin de SUB ROSA : Une Parole Circule - Bulletin N° 1Octobre 2009  -  Abonnez-vous

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