Obédience : NC Loge : NC Date : NC


L’Equerre



De tous les symboles maçonniques, l’Equerre est certainement un des plus connus et des plus visibles et il me serait permis de penser qu’elle est aussi, un des plus étudiés.
Je m’y consacre aujourd’hui, sans peur de la redondance compte tenu de l’importance et de la portée du symbole.
L’Equerre, à l’instar d’autres outils, constitue un instrument indispensable à la construction de toutes les merveilles du monde, allant des pyramides égyptiennes, aux temples grecs, en passant par les cathédrales du Moyen-Âge et les palais de la Renaissance.
La franc-maçonnerie spéculative adopta le symbole de l’équerre dès 1725 mais en lui soupçonne une existence maçonnique beaucoup plus ancienne.

En 1830 en effet, fut trouvé en Irlande une équerre en cuivre datant de 1517 et qui portait sur
ses deux faces l’inscription suivante : « je m’efforcerai de vivre avec amour et sollicitude sur le niveau au moyen de l’équerre ».
L’équerre est aussi présent sur des monuments Chaldéens (4500 avant J-C), dans les plus anciens livres sacrés de la Chine, sur les portes des temples en Inde centrale, ou encore à Dendérah en Egypte, dans le temple d'Osiris où l'équerre et le fil à plomb sont intimement liés à Osiris.
Dans un document ancien retrouvé dans les archives de la respectable loge Ecossaise Dumfries de Kilwining, N° 153, on trouve, dans l’instruction donnée aux apprentis, cette question : « Qu’est-ce que la franc-maçonnerie ? ». La réponse rituelle est révélatrice: « C’est une oeuvre d’équerre. » y lit-on.

L’équerre a effectivement réussit une transition parfaite entre sa fonction d’outil indispensable
en Maçonnerie opérative et un symbole pertinent au coeur de la Franc-maçonnerie spéculative.
Son rôle est central : outil de rectitude par excellence, l’équerre regroupe à elle toute seule l’horizontalité du niveau et la verticalité du fil à plomb réunissant ainsi les attributs des deux surveillants en loge.

Indissociable du compas dans la représentation de la Franc-maçonnerie, ils forment avec le
volume de la loi, les trois grandes lumières d’une loge.
Outil dont l’unique fonction se destine à la certification d’un angle droit, l’équerre est cependant un symbole aux multiples expressions :
De part son origine étymologique même, l’équerre, qui se disait « norma » en latin classique, donna les mots français norme et normal, qui sous entendent la conformité nécessaire à des règles établies.
L’équerre en effet ne trace rien comme elle ne crée rien d’elle-même mais accompagne l’utilisateur et guide ses mains dans un cadre d’exercice bien défini.
On dit alors que l’équerre ne s’utilise que par rapport à un plan.

On tire également son appellation du bas latin exquadrare qui signifie équarrir, rendre carré.

Et c’est par allégorie à ce carré que l’équerre est admise comme le symbole de l’équilibre, de la justice et du travail sur la matière, y compris sur l’homme, comme pierre brute.
L’équerre est alors justice et droiture.
D’ailleurs, ne dit-on pas d’un homme intègre et droit qu’il est « carré » ? Comprendre par là qu’il applique et qu’il respecte les règles.

Si le Vénérable porte en bijou l’équerre suspendue à son sautoir, c’est bien parce que son rôle
premier est sensé créer des parfaits maçons. Il dirige les travaux par l’équerre parce que son devoir est de rendre la loge en conformité avec les règles, qu’elles s’agissent des règles internes à la loge ou à l’obédience, voire jusqu’en dehors du temple, dans lequel cas, il s’agirait plus de la loi morale.
L’équerre est en effet le symbole du devoir et de la loi morale.

Pour se mettre en équilibre, les maçons opératifs marchaient en équerre sur les travers des
échafaudages. Lorsqu’on loge, nous nous mettons en ordre, la main en équerre placée sur la gorge, c’est pour nous rappeler à la prudence et à la pondération afin que nos propos soient équilibrés et précis. C’est aussi cela le message de l’équerre : elle impose la maîtrise et la rigueur.
Mais le sens de l’équerre peut se lire dans la forme géométrique qu’elle dessine :
En formant l’angle droit à 90°, l’équerre détermine la jonction de la verticale et de l’horizontale. La verticale étant la trajectoire de tout corps soumis à l’attraction terrestre (selon le petit Larousse, l’attraction se définit comme ce qui attire, ce qui séduit) – c’est la jonction entre ce verticale - et l’horizontale, c'est-à-dire le plan parallèle à l’horizon, orthogonal à la perpendiculaire et qui sert de plan de référence. C’est le point de rencontre
entre l’envie et la norme.
L’équerre décrit dans ce cas, la conscience et la raison.

L’équerre est ce qui réconcilie au mieux l’homme et ses mondes : visibles et invisibles,
matières et esprits, concret et conceptuel, propre et figuré.
Elle est plus qu’un outil puisqu’elle contribue à l’oeuvre de création à laquelle participe l’homme en prolongeant la volonté et l’imagination de ce dernier vers une réalisation concrète.
Le manuscrit Graham signale à cet effet que « La science de Dieu est résumé dans l’équerre et que l’Equerre est bien plus qu’un outil puisqu’elle prolonge la Règle pour relier le haut et le bas afin que ne se sépare le Ciel et la terre »
Et la réponse de la loge écossaise m’apparaît alors plus claire : « La Franc maçonnerie est une oeuvre d’équerre. » Elle donne forme et concoure à la beauté des choses dont elle s’assure l’équilibre. C’est un outil de transformation avec lequel il est possible de faire d’une oeuvre,
un vrai chef d’oeuvre.

Au vu de tout cela, à quoi servirait l’équerre aux francs-maçons que nous sommes et dans
notre monde d’aujourd’hui ?
Voici une tentative de réponse : Si tant est que notre idéal demeure encore la perfection, nous sommes tenus en loge comme en dehors, d’agir dans l’esprit de l’équerre :

En s’imposant plus d’équité et de raison, en respectant les règles et les lois, dans leur
esprit comme dans leur expression, nous ferons de nos travaux un réel outil de perfectionnement et de nous même, une vraie lumière qui rayonnera jusqu’à l’extérieur du temple.
Peut-être, cela apporterait-il plus de discipline dans les casernes ? Plus de justice dans les tribunaux et moins de monde dans les prisons ? Peut-être cela rendrait-il notre société meilleure ?

Les voies de l’équerre sont étroites et parsemées d’embûches mais elles restent pénétrables, à
fortiori par ceux qui n’aspirent pas au repos !

Vénérable Maître, J’ai dit.

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