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La Marche du Maître


Lorsque j’ai reçu le thème de mon travail, je me suis dit « encore un travail sur un symbole ». Quoi de plus normal, quoi de plus intéressant. Je m’apprêtais à préparer un traditionnel 3 pages A4 caractères 11 sur le modèle habituel : 1/3 de rituel, 1/3 de recherche et 1/3 de perso. Je n’étais pas au bout de mes surprises.

S’il est vrai qu’en loge, les travaux au 3 sont rares, « la Marche du Maître » allait me faire non seulement travailler à ce degré mais également me forcer à revisiter tout ce que j’ai déjà appris en F\M\.

En effet après avoir découvert grâce à vous que ce symbole est la quintessence de l’élévation au grade de Maître, je sais désormais qu’il représente également à lui seul l’ensemble du parcours maçonnique proposé au sein des loges initiatiques

Je vous propose donc de décomposer les différents temps de cette marche pour montrer en quoi elle symbolise à elle seule la cérémonie d’élévation.

Nous verrons ensuite que la marche du Maître lors de la cérémonie d’élévation peut s’apparenter également à l’ensemble des étapes du chemin maçonnique

1)      La marche du Maître, symbole parfait de l’élévation

De tous les secrets du grade, la marche est certainement celui qui symbolise le mieux et à lui seul toute la cérémonie d’élévation du Maître Maçon. Ceci est spécifique du 3ème degré et l’on ne retrouve pas cette quintessence de la marche au 1 ou au 2. Certainement parce que la Marche du Maître est irrémédiablement liée au signe du grade, à l’outil des Maîtres et à la légende d’Hiram.

A l’ordre de maître
           
Avant de réaliser véritablement la marche du Maître, le Maçon commence par exécuter les 3 pas de l’Apprenti, à l’ordre d’Apprenti, puis les 2 pas du Compagnon, à l’ordre de Compagnon.

Notons qu’au REAA, toutes les déambulations se font à l’ordre, quel que soit le degré.

La marche du Maître se fait donc à l’ordre de Maître. Avant de faire le premier pas de Maître, le Maçon quitte l’ordre de Compagnon et se met à l’ordre de Maître.
           
Si le sujet n’est pas ici de traiter de la symbolique de ce signe, on constate par contre déjà que  marche et signe sont toujours de facto indissociables.

Il est cependant intéressant de constater que lors de la cérémonie d’élévation, le futur Maître exécute sa première marche de Maître à l’ordre sur les indications de l’Expert mais sans même connaître encore le signe du grade.

Le premier pas : symbole de l’élévation

Le premier pas de la marche du Maître apparaît toujours curieux, difficile à réaliser à l’impétrant qui n’en connaît pas encore la signification. L’expert le reprend et le corrige souvent. Ce n’est que lors de l’instruction qui suit qu’il pourrait en saisir la signification. Mais nous le savons tous, l’émotion est telle lors de cette cérémonie que nul ne prête réellement à l’explication donnée par le V\M\. Et ce n’est souvent que lorsque le nouveau Maître vivra l’élévation d’un de ses frères Compagnon qu’il commencera à entrevoir le sens caché de cette curieuse gestuelle qui symbolise l’élévation spirituelle que doit accomplir le maçon. Le troisième degré est en effet une mise en garde « Si la verticalité est absente au cœur de l’homme, les ténèbres l’envahiront »

Le passage de l’horizontal à la verticale
           
Jusqu’alors les pas de la marche se faisaient en glissant les pieds sur le sol, une marche horizontale en somme. Le premier temps du premier pas de la marche du Maître consiste à lever verticalement la jambe droite. Cette élévation physique symbolise l’élévation spirituelle du Maçon, le passage du tangible aux idées, ce travail qui tend à dégager le subtil de l’épais.
           
Le passage de l’équerre au compas

Le deuxième temps du premier pas consiste à réaliser un arc de cercle vers la droite avant de reposer le pied. On ramène en suite le pied gauche, en équerre à côté du pied droit.

Comme le Compagnon fait un premier pas perpendiculaire par rapport à l’axe de la marche pour symboliser le passage du niveau à l’équerre, cet arc de cercle symbolise le changement d’outil, le passage de l’équerre au compas. Le passage de la réalisation à la conception. En effet si l’équerre et le niveau sont les outils des maçons, le compas est l’outil de l’architecte.

Notons ici que la verticalité du niveau de l’apprenti correspond à une descente et non à une élévation ; une descente au fond de soi-même pour y découvrir cette part de divinité qui nous habite tous.

Ce premier pas est donc symbole de l’élévation au sublime grade de Maître, élévation rendue possible par le passage de l’équerre au compas.

Le deuxième pas : symbole de la légende d’Hiram

Le deuxième pas consiste à fait un grand pas à gauche en croisant l’axe médian pour simuler le passage au-dessus du cercueil, puis à ramener le pied droit une nouvelle fois en équerre à côté du pied gauche.

Ce pas décrit également un arc de cercle comme le premier mais il s’agit évidemment de la reprise symbolique de la légende d’Hiram dans son ensemble, le rite le plus important sans doute de la maçonnerie,  symbolisant les  trois morts de l’architecte et de sa renaissance en un nouveau Maître, du triomphe de la vie sur la mort, ce travail de métamorphose, de Tubalcain n’est rendue possible que par l’émergence de la lumière intérieure dans le cœur du Maçon.

Cette mort est le passage obligé pour que naisse le nouveau Maître. Un proverbe espagnol dit : « celui qui ne meurt pas avant la mort, pourrira après la mort ».

La mort d’Hiram symbolise également l’avertissement fait aux maçons contre la menace qui pèse sur la Loge en cas d’insuffisance des 3 principaux officier de la Loge : Ignorance du 2ème Surveillant, Fanatisme du 1er et Ambition du V\M\. C\e mythe leur rappelle également le dessein du grade qui est d’établir à contrario la règle de la Liberté, de l’Egalité et de la Fraternité.

Le troisième pas : symbole de la reprise de la marche vers l’Orient

Toujours en décrivant un arc de cercle, le Maître se repositionne sur l’axe médian, d’abord avec le pied droit, puis en ramenant le gauche en équerre à côté du droit.

Le troisième pas symbolise le retour à l ‘axe, le retour à la vie, toujours un peu plus loin en direction de l’Orient. Néanmoins cette marche est stoppée par le Rideau noir et par la fin du signe d’ordre des Maîtres.
           
D’abord le signe pénal, qui rappelle la sanction qui frapperait le maçon parjure, ensuite le signe d’horreur qui, exécuté en même temps l’Exclamation Rituelle,  rappelle une nouvelle fois la légende d’Hiram et la découverte de son cadavre par les maîtres partis à sa recherche.

2)      La marche du Maître, synthèse du parcours maçonnique

Nous venons de voir rapidement en quoi la marche est le symbole parfait de la maîtrise. Mais cette marche va encore plus loin dans la symbolique. Elle est le reflet du parcours complet en loge symbolique, celui qui mène le profane de l’extérieur du temple jusqu’au pied du deb’hir. Refaire cette marche tout à l’heure en pénétrant dans cette loge m’a rappelé le chemin déjà parcouru et laissé entrevoir celui qui me reste à faire.

Les 3 grades repris dans la marche du maître
           
La première évidence est que la marche de maître contenant en préambule la marche des 2 grades précédents, elle symbolise au-delà du parcours du Maître, le parcours maçonnique dans son entier.

En effet, le Maître commence par se mettre entre les colonnes à l’ordre d’apprenti, les pieds en équerre. Il fait 3 pas glissés en direction à l’occident. Ces 3 pas symbolisent le niveau, outil par excellence de l’Apprenti qui travaille sur la pierre brute. Outil qui symbolise la descente verticale au fond de soi que l’Apprenti se doit de faire pour y extraire la part de divinité qui est au fond de lui.

Le Maître quitte ensuite l’ordre d’apprenti pour se mettre à l’ordre de Compagnon. Il fait un pas vers la gauche, pas toujours glissé à ras le sol. Le deuxième pas le ramène vers l’axe en direction de l’occident. Cette marche réalisée à 90 degrés par rapport aux 3 pas de l’Apprentis, symbolise cette fois-ci l’équerre, outil du Compagnon qui travaille sur la pierre cubique. Equerre symbole de rectitude sans laquelle, il n’est rien.

Le Maître quitte alors l’ordre du compagnon pour effectuer la marche du Maître telle que nous l’avons détaillée précédemment symbolisant l’élévation nécessaire rendue possible uniquement  par la mort symbolique du Compagnon. L’outil de ce maître sera désormais le compas, complétant ainsi la boîte à outils du Maçon-Architecte.

L’allusion au parcours maçonnique est dès lors évidente, chaque grade n’étant que la suite logique et nécessaire du grade précédent, la suite de l’histoire en quelle que sorte, laissant évidemment présager que celle-ci ne se termine pas avec le grade de Maître.

De l’Occident à l’Orient :
           
L’ensemble de la marche s’effectue de l’Occident vers l’Orient, elle commence entre les colonnes pour terminer devant le rideau séparant  le Deb’hir de l’E’hal.

Ce lent parcours magnifique qui symbolise les différents lieux de travail du maçon ne se termine évidemment pas au pied des marches de l’Orient. La Chambre du milieu n’est pas une fin en soi.

L’élévation vers le Deb’hir, le saint des saints est maintenant le nouveau devoir du maître maçon qui doit poursuivre son chemin toujours un peu plus vers l’Orient afin de répandre partout la lumière
               
Dernier point : la parole perdue et retrouvée
           
Nous savons qu’un des thèmes récurrents de la Maçonnerie spéculative est celui de la parole perdue. Evidemment elle apparaît de façon formelle lors de la cérémonie d’élévation. Mais la marche du Maître ne nous rappelle t-elle pas que la parole perdue et retrouvée est présente tout au long du parcours maçonnique.

A\S\M\D\. Telle est l’exclamation rituelle que le Maître prononce après le dernier pas de sa marche en même temps que le signe d’horreur.

Je ne développerai pas ici en détails cette exclamation qui ramène, elle aussi, à la légende d’Hiram. Je me contenterai de vous proposer l’hypothèse que cette  exclamation est aussi dans le parcours maçonnique le symbole de la parole retrouvée.

En effet, à l’opposé des marches silencieuses de l’Apprenti et du Compagnon que l’on peut assimiler à des Maçons ayant perdu la parole, la marche du Maître se termine par une exclamation, une parole criée et donc soudainement retrouvée.

Conclusion :

J’ai essayé de vous apporter ma vision de la Marche du Maître. J’aurai pu développer longuement chaque point tant ce symbole est riche et interdépendant de tous les autres, tant ce rituel du 3ème degré du REAA est d’une exceptionnelle densité. Je tenais à remercier mon Frère Frédéric de m’avoir permis de réaliser ce travail.

J’aimerai maintenant terminer momentanément par une question et une proposition de réponse.

Pourquoi la marche du Maître comprend-elle 3 pas et non pas 2 ? En effet, l’Apprenti fait en tout 3 pas et il a 3 ans, le Compagnon en fait 5 et il a 5 ans. Mais le Maître fait 8 pas… pourquoi ? On sait l’importance de 3, 5 et 7 entre autres dimensions en pieds du tombeau d’Hiram ou le nombre de marches de l’escalier qui mène à la chambre du milieu ; que vient faire ce chiffre 8 ?

Quand on sait à quel point le moindre détail du rituel est riche de sens et de symbole, on ne peut penser qu’il s’agit d’une erreur ou d’une simple nécessité logistique  pour permettre au maçon élevé de passer au-dessus du cercueil.

Je soumets à votre sagacité, votre connaissance et votre sagesse, le début de réponse suivant : le maître n’a pas 7 ans, il a 7 ans et plus, pour bien marquer que le chemin ne s’arrête pas, que la connaissance doit s’accroître indéfiniment. Alors 8 pas, 9 pas….c’est toujours 7 pas et plus.

V\M\ J’ai dit

F
\ K\

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